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Auteur : Bernard GENSANE

Richard Hoggart

Bernard GENSANE
Ce très grand universitaire britannique vient de mourir à l’âge de 96 ans. Il fonda, dans les années cinquante, les cultural studies, en compagnie de Raymond Williams et Stuart Hall. Il était né en 1918 dans un quartier ouvrier de la ville industrielle de Leeds. Un jour, par facétie, je lui posai la question suivante : — Il me semble que votre patronyme signifie quelque chose de franchement populaire. — Bien vu, Bernard, me répondit-il. Il signifie en effet « gardien de cochons ». Le peintre William Hogarth portait à l’origine le même nom que moi. ​Hoggart perdit sa mère alors qu’il n’avait que huit ans. Il fut élevé par une de ses grands-mères dans une maison minuscule. Sa tante Ethel repéra ses capacités intellectuelles et l’encouragea à tenter le lycée. Il put poursuivre ses études grâce à diverses bourses. À l’époque, un enfant sur 200 seulement en bénéficiait. En 1939, il obtient une licence en littérature anglaise à l’université de Leeds. Il fait la guerre dans (…) Lire la suite »

Un entretien avec Pierre Lemaitre

Bernard GENSANE

Pierre Lemaitre, prix Goncourt pour Au revoir là-haut, a accordé un entretien aux responsables de l’Institut d’histoire sociale du Gers et à moi-même.

Vous avez toujours rendu hommage aux écrivains qui vous ont influencé. Avez-­vous conscience de vous inscrire dans une chaîne ininterrompue de créateurs ? Construisez-­vous des fictions pour vivre, pour résister au réel ? Autrement dit, pourquoi écrivez-­vous ? Si je cite et rends hommage à certains écrivains ce n’est pas consciemment pour me situer dans une généalogie d’auteurs, c’est simplement que si quelque chose d’eux me vient lorsque je travaille (trois mots, une situation, une tonalité, etc.), il me semble normal de le dire. Je ne m’adresse pas à la postérité mais à ceux qui me lisent, ces citations sont donc également un clin d’œil que j’adresse à ceux pour qui j’écris. Ce qui répond à la seconde question : j’écris pour être lu. J’ai choisi d’être romancier, j’écris donc des romans. Je ne suis rien d’autre que ça, juste un type qui raconte des histoires. Avec Au revoir là-­haut, l’Académie Goncourt a couronné un grand roman populaire, en ce sens qu’il peut être lu avec (…) Lire la suite »

Manuel Valls : petit rappel

Bernard GENSANE
J’ai publié ce qui suit dans les colonnes du Grand Soir en avril 2010. Je ne me prononcerai pas sur la stratégie hollandaise qui consiste à promouvoir un quidam parce qu’il est populaire. D’autant que Valls est un perdant, un loser comme on dit communément. Lors des primaires socialistes, il était arrivé bon dernier. Il perd parce qu’il est opportuniste. Le politologue Philippe Marlière l’avait noté en son temps : « Manuel Valls est par atavisme un political wannabe ; celui qui se place dans la roue des puissants du moment et qui ne la lâche plus : hier Rocard, puis Jospin, ensuite Royal, brièvement Strauss-Kahn, et, tardivement, Hollande. Deuxième et Première gauche, gauche caviar, gauche New Age et gauche démocrate. Valls s’est mis au service de tout le monde, sans aucun état d’âme. Si Manuel Valls accentue toujours plus sa rhétorique droitière, c’est qu’il est persuadé qu’il s’agit d’une stratégie payante. C’est le discours que ses conseillers à Euro RSCG (l’officine des (…) Lire la suite »

Le Monde Diplomatique (avril 2014)

Bernard GENSANE

Numéro très intéressant, très varié.

Quel cap pour la Tunisie, demande Serge Halimi ? L’adoption, le 26 janvier dernier, d’une nouvelle Constitution a provoqué une détente politique en Tunisie. Les questions relatives au statut des femmes, au rôle du sacré, à la liberté de conscience étant tranchées par ce texte, les grands arbitrages économiques auraient pu dominer la vie publique. Mais, sur ces sujets-là, les principaux partis peinent à définir leur stratégie. Puisque les révoltes arabes n’ont connu de développements heureux ni en Egypte, ni en Syrie, ni en Libye, la Tunisie est devenue dans la région le refuge de ceux qui cherchent une raison d’espérer. Aucune des aspirations sociales à l’origine du soulèvement de décembre 2010 n’y a été satisfaite. Mais, après une interminable crise politique, le pays, qui a frôlé le pire avec l’assassinat de deux dirigeants de gauche l’année dernière. vient de se doter d’une nouvelle Constitution, approuvée par deux cents députés sur deux cent seize, et d’un gouvernement (…) Lire la suite »

Lettre à Fernand Darchicourt

Bernard GENSANE
Cher Monsieur Darchicourt, Je sais bien que vous êtes mort en 1968, mais en cette lugubre soirée d’élections municipales, aussi sinistre que les commentaires sans intérêt, sans souffle, sans substance du Premier ministre Ayrault, je souhaite ardemment écrire au socialiste que vous fûtes – un peu poussé par le patron Guy Mollet, certes – à l’ouvrier, à l’ancien mineur devenu maire d’Hénin-Liétard, puis député, jamais battu dans une élection. Votre femme et vous même étiez voisins de mes parents Boulevard Basly (Basly qui inspira à Zola le personnage d’Étienne Lantier). Ce boulevard, qui deviendra résidentiel, était situé dans le quartier qu’on appelait le « Vieux Hénin », célèbre pour sa fête annuelle, une fête populaire qui rassemblait les ouvriers et les petits bourgeois, ceux qui constituaient le common people cher à Orwell qu'il voyait porteur de la “ décence ” nécessaire à la démocratie et au progrès. Orwell qui, à la fin de sa vie, quand vous êtes entré en politique, (…) Lire la suite »
Claude Gauthier

Poésie et exil (24)

Bernard GENSANE

Ceci est une chanson magnifique de 1972. Elle dit l’exil intérieur, mais aussi l’ancrage dans une terre, la quête d’une identité.

Claude Gauthier est né en 1939 à Lac-Saguay, dans les Laurentides, au nord de Montréal. “ Le plus beau voyage ” est un hymne d’amour à une terre, et aussi un hymne politique. J'ai refait le plus beau voyage De mon enfance à aujourd'hui Sans un adieu, sans un bagage, Sans un regret ou nostalgie J'ai revu mes appartenances, Mes trente-trois ans et la vie Et c'est de toutes mes partances Le plus heureux flash de ma vie ! Je suis de lacs et de rivières Je suis de gibier, de poissons Je suis de roches et de poussières Je ne suis pas des grandes moissons Je suis de sucre et d'eau d'érable De Pater Noster, de Credo Je suis de dix enfants à table Je suis de janvier sous zéro Je suis d'Amérique et de France Je suis de chômage et d'exil Je suis d'octobre et d'espérance Je suis une race en péril Je suis prévu pour l'an deux mille Je suis notre libération Comme des millions de gens fragiles À des promesses d'élection Je suis l'énergie qui s'empile D'Ungava à (…) Lire la suite »
Le devoir de réparation

Les Zindigné(e)s ! - La vie est à nous n° 12

Bernard GENSANE

Les Zindigné(e)s !, c’est toujours bon. Mais cette fois-ci, c’est passionnant. Ce numéro est consacré à la dette négrière, financière et écologique et au devoir de réparation.

Fidèle à son tropisme extrême centriste de droite, Hollande est favorable à un travail de mémoire mais hostile à toutes réparations. Dans ce domaine comme ailleurs, deux poids de mesure. L’Allemagne a payé à la France et à Israël des dizaines de milliards de dollars au titre des dommages de guerre et de l’extermination tandis que les populations africaines n’ont rien reçu au titre de la traite négrière, quant elles n’ont pas dû payer – ce fut le cas de Haïti – pour acheter leur indépendance ! Pour Louis-Georges Tin, président du CRAN, « la réparation est le fondement de toute justice ; dans toute l’histoire de l’humanité, il n’y a aucune société qui ait ignoré ce principe universel. » Or les réparations votées par la France furent attribuées aux criminels : « le décret de 1848, signé par Victor Schœlcher prévoyait à la fois l’abolition de l’esclavage et des indemnités pour les colons pour les dédommager du préjudice que leur causait la fin du système esclavagiste. » Nicolas (…) Lire la suite »

Les fachos sans vergogne

Bernard GENSANE

J’ai publié récemment un article sur les lectures malsaines d’Herman Van Rompoy. Des réactions assez critiques me sont revenues du genre “ il ne faut pas tout mélanger, les hommes politiques ont le droit de lire ce qu’ils veulent, ce n’est pas parce qu’on lit un facho qu’on est soit même facho ”, etc. Je voulais montrer la porosité des idées entre l’extrême droite et la droite qui gouverne toute l’Europe, y compris par Solfériniens interposés.

Aujourd'hui, partout en Europe, sous toutes ses formes, l'extrême droite relève la tête, dicte l'ordre du jour pour la simple raison qu'elle articule un discours au degré zéro de la politique, et qu'elle n'a même plus besoin de faux nez. Comme quand elle veut s'occuper du ventre des femmes espagnoles qui découvrent, comme le chantait Jacques Brel il y a quarante ans, que “ Franco n'est pas tout à fait mort ”. Cela fait belle lurette que l'extrême droite est vigoureuse en Alsace, que le FN réalise des scores plus qu'honorables, en particulier dans les villages où l'on n'a pas vu un Arabe ou un Noir depuis 250 ans. Cet extrémisme se déchaîne désormais sur le campus de l'université de Strasbourg depuis, par exemple, que l'Action française universitaire a appelé dans un tract à “ Tuer tous les gauchismes ”. S'agite également le groupe néo-nazi Alsace nationaliste, lié aux Jeunesses nationalistes, proche de l'Œuvre française. Les Jeunesses nationalistes sont dirigées par Alexandre (…) Lire la suite »
Claude Vigée

Poésie et exil (23)

Bernard GENSANE
Claude Vigée : un poète d’une extrême finesse. Il est né Claude Strauss en 1924 en Alsace où il a connu un premier exil intérieur entre le dialecte alsacien, le français et la culture juive. Chassé par la guerre, il séjourne à Toulouse où il milite dans un mouvement de résistance juive, puis se réfugie aux États-Unis en 1943 où il devient professeur de littérature française à l’université Brandeis. Il s’installe en Israël en 1960. Il revient vivre à Paris en 2001. Pacifiste, Claude Vigée a participé à une anthologie de poèmes pacifistes dans laquelle a paru un poème sur la guerre du Liban, La voix des jeunes soldats morts. En 2008, son œuvre poétique intégrale est publiée aux éditions Galaade sous le titre Mon heure sur la terre, titre tiré de l'un de ses poèmes. Ce volume est salué par la Bourse Goncourt de la Poésie. Dormir, ne plus savoir, Contre la tentation de la mort enfantine Je me rassemble des quatre coins de la terre Pour me faire un foyer de lumière durable, (…) Lire la suite »

Les lectures malsaines d’Herman Van Rompuy

Bernard GENSANE

Au moment où l’extrême droite, les fascistes de tout poil font plus que relever la tête en Europe et dictent les ordres du jour, le fait que le président du Conseil européen, le chrétien-démocrate flamand Van Rompuy ait osé publier sur son site un poème (daté de 1909) d’un prêtre flamand nazi, antisémite, condamné à mort par contumace à la Libération, et ce dans l’indifférence totale des opinions publiques, est extrêmement préoccupant.

Un ami belge (wallon) me dit qu’il a toujours pris soin de ne pas tenter le diable du nationalisme flamand, mais que, à partir du moment où la question est posée, quand le président du Conseil européen prend comme référence un curé nazi qui a été condamné à mort par contumace en Belgique et qui n’a jamais été réhabilité, il n’est plus possible d’éluder le débat. Né en 1874, Cyriel Verschaeve devient vicaire en 1911. Durant la Première Guerre mondiale, , il est conseiller spirituel du mouvement intellectuel nationaliste flamand le Frontbeweging. Après l’Armistice, la condamnation de ce mouvement par les autorités belges convainc Verschaeve qu'il n'y a plus rien à attendre de la Belgique. Dans les années trente, il se détourne de la politique belge et de la démocratie. Il se rapproche du mouvement national-solidariste Verdinaso. Durant l’été 1940, il affiche par écrit sa sympathie pour l’Allemagne nazie. Le 6 novembre 1940, il est nommé par l'administration militaire allemande à (…) Lire la suite »
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