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Le Monde Diplomatique (avril 2014)

Numéro très intéressant, très varié.

Quel cap pour la Tunisie, demande Serge Halimi ?
L’adoption, le 26 janvier dernier, d’une nouvelle Constitution a provoqué une détente politique en Tunisie. Les questions relatives au statut des femmes, au rôle du sacré, à la liberté de conscience étant tranchées par ce texte, les grands arbitrages économiques auraient pu dominer la vie publique. Mais, sur ces sujets-là, les principaux partis peinent à définir leur stratégie.

Puisque les révoltes arabes n’ont connu de développements heureux ni en Egypte, ni en Syrie, ni en Libye, la Tunisie est devenue dans la région le refuge de ceux qui cherchent une raison d’espérer. Aucune des aspirations sociales à l’origine du soulèvement de décembre 2010 n’y a été satisfaite. Mais, après une interminable crise politique, le pays, qui a frôlé le pire avec l’assassinat de deux dirigeants de gauche l’année dernière. vient de se doter d’une nouvelle Constitution, approuvée par deux cents députés sur deux cent seize, et d’un gouvernement d’union nationale composé de technocrates. Les tensions ont baissé d’un cran, un état de grâce s’est installé.

Comme d’autres observateurs, Olivier Zajec a relevé une certaine obsession antirusse :
Avec l’annexion de la Crimée au territoire russe, entérinée le 18 mars par M. Vladimir Poutine, et les sanctions décrétées à l’encontre du Kremlin, la crise ukrainienne a pris les dimensions d’un séisme géopolitique. Comprendre ce conflit implique d’intégrer les points de vue concurrents de tous les acteurs. Mais, dans les chancelleries occidentales, les proclamations morales supplantent souvent l’analyse.

Jean-Arnault Dérens et Laurent Geslin estiment qu’en Ukraine on passe d’une oligarchie à une autre :
Après la sécession de la Crimée, le nouveau pouvoir ukrainien doit affronter une situation économique, démographique et sociale désastreuse. Le système oligarchique construit depuis vingt ans nourrit la pauvreté, les rancœurs et les peurs. Or rien n’indique qu’il sera vraiment remis en cause.

Un très bon dossier sur la machine bruxelloise qui s’emballe :

Gilles Balbastre montre que dans le travail détaché les travailleurs sont enchaînés :
Changement de personnel : du 22 au 25 mai 2014, les Européens éliront leurs députés, un scrutin qui influera sur le choix du prochain président de la Commission. Mais l’Union abandonnera-t-elle pour autant une feuille de route politique qui, pour l’heure, se caractérise par l’organisation du dumping social ?

Frédéric Lordon demande si un peuple européen est possible :

Pour ne pas succomber tout à fait à la gageure de prétendre ajouter quoi que ce soit de pertinent à l’énormité de ce qui s’est déjà dit à propos de la nation, il est possible d’emprunter des voies plus conceptuelles, par exemple en repartant de ce ferme rappel que fait Baruch Spinoza dans le Traité théologico-politique : « La nature ne crée pas de nations. » On notera d’abord qu’on ne saurait rompre plus catégoriquement avec les conceptions essentialistes ou ethnicisantes. On y verra ensuite une nouvelle plutôt bonne : rien, en cette matière, n’est fixé pour l’éternité, car si ce n’est pas la nature mais, disons pour faire court, l’histoire qui les fait, cela signifie que, de même qu’ils se font, les peuples peuvent se défaire, et aussi se refaire. Rien n’interdit en particulier de considérer l’hypothèse de la formation d’un peuple de peuples — c’est même, comme l’a montré notamment Eric Hobsbawm. une configuration communément pratiquée par l’histoire. Donc, si évidemment elle ne va pas de soi, l’idée que se fasse un peuple européen n’a rien non plus d’essentiellement absurde.

Pierre Souchon explique comment les directives sont débattues à Bruxelles :

En théorie, une directive européenne comme celle sur le travail détaché se discute longuement au Parlement de Strasbourg. En pratique, elle se forge au cours de singuliers conciliabules...

« Ne bougez pas. Attendez-moi là. » On patiente à l’entrée de ce café bruxellois qui jouxte le Parlement européen. Une bière à la main, deux agents d’entretien de la Société nationale des chemins de fer belges semblent égarés parmi la multitude de costumes-cravates concentrés sur leurs ordinateurs portables, badge étoilé du Parlement à la boutonnière. « C’est bon. Je ne vois aucune connaissance  », se rassure notre éclaireuse, qui hésite une dernière fois, nous fait jurer sur l’honneur qu’elle restera anonyme, puis nous installe au fond de la salle, derrière un mur, avant de jeter un ultime coup d’œil inquiet à la ronde. Uniques lieux de sociabilité dans l’austère quartier européen, les établissements de la place du Luxembourg, comme celui-ci – qui propose en plat du jour des ravioles aux truffes, attirent les décideurs : « Pour un lobbyiste, c’est l’endroit où il faut être », tranche l’un d’entre eux, qui surprend notre conversation.

Frédéric Panier explique pourquoi les « Arrangements contractuels » sont l’arme fatale :
Mettre à profit la coopération économique au sein de l’Union pour accélérer la dislocation des solidarités nationales : et si le rêve bruxellois devenait réalité ?

Alors que des manifestants s’opposaient à l’accord de partenariat transatlantique négocié entre l’Union européenne et Washington. les chefs d’Etat et de gouvernement européens, réunis à Bruxelles les 19 et 20 décembre 2013, envisageaient la mise en place d’un nouvel outil : les « arrangements de nature contractuelle », signés entre la Commission et les Etats membres. Une fois mis en œuvre, ceux-ci pourraient représenter l’arme la plus puissante jamais confiée aux institutions européennes pour démanteler les Etats sociaux.

Plus atlantiste qu’Hollande, tu meurs, nous dit Anne-Cécile Robert :
En adoptant une ligne intransigeante vis-à-vis de la Syrie, de l’Iran ou de la Russie, la France achève une mue diplomatique entamée sous la présidence de François Mitterrand. Paris se met désormais au diapason d’une Union européenne qui est depuis sa création tournée vers Washington, et abandonne l’ambition d’incarner une voix originale sur la scène internationale.

Panagiotis Grigoriou propose une visite guidée de la nouvelle Athènes :
Le président de la Commission José Manuel Barroso estime que les « sacrifices » du peuple grec lui « ouvrent les portes d’un meilleur avenir ». Un avenir apparemment très lointain...

Pour Corentin Léotard, le national-conservatisme s’ancre dans la société hongroise :
Tenant tête au Fonds monétaire international et aux groupes privés étrangers, le premier ministre hongrois Viktor Orbán s’assure d’une forte popularité avant les élections du 6 avril. Ses positions nationalistes s’avèrent compatibles avec celles d’une extrême droite islamophile. Son anticonformisme économique mâtiné de conservatisme social profite largement à une nouvelle génération d’entrepreneurs proches du pouvoir.

La Hongrie où, selon Corentin Léotard, l’extrême droite n’exècre pas l’islam :
Président du Mouvement pour une meilleure Hongrie, le Jobbik, M. Gábor Vona, 35 ans, porte parfois autour du cou un keffieh palestinien – une tendance vestimentaire peu banale pour le dirigeant d’un parti classé à l’extrême droite. Ce fut le cas en novembre 2012 à Budapest, lors d’une manifestation contre une opération militaire israélienne dans la bande de Gaza. M. Vona avait alors soumis au Parlement une résolution dénonçant le « génocide de Gaza ». Le député chargé des relations internationales du parti, par ailleurs vice-président de la commission des affaires étrangères du Parlement, M. Márton Gyöngyösi, estimait que « par l’humiliation quotidienne du peuple palestinien, Israël réveille le souvenir des périodes les plus sombres de l’histoire ». Quelques jours plus tard, il exhortait le gouvernement hongrois à rompre avec l’Etat hébreu, ainsi qu’à établir une liste des députés et des membres juifs du Parlement, « qui représentent un risque pour la sécurité nationale de la Hongrie ».

Pour Jean-Pierre Séréni, en Algérie, rien ne change... sauf la société :
L’impéritie de l’Etat algérien (lire « “Tout ce qu’ils nous proposent, c’est de devenir flics !” ») suscite un mécontentement latent qui débouche parfois sur des affrontements sanglants, comme ceux survenus à Ghardaïa à la mi-mars. Dans ces conditions, la nouvelle candidature de M. Abdelaziz Bouteflika à l’élection présidentielle prévue le 17 avril a provoqué l’exaspération d’une population qui n’attend plus rien de ses dirigeants.

Alain Gresh revient sur Alain Rodinson, le monde musulman, Marx et le socialisme :
Paru en 1966, « Islam et capitalisme », du célèbre orientaliste Maxime Rodinson, auteur, entre autres, d’une biographie du prophète Mahomet (1), n’avait encore jamais été réédité (2). Cet ouvrage pose des problèmes d’une brûlante actualité : quels rapports entretiennent islam, développement économique et capitalisme dans le monde musulman ? Pourquoi ces sociétés sont-elles « en retard » ou « sous-développées » ? L’islam fait-il obstacle à l’adoption de mesures sociales, voire au socialisme ? Réfutant l’idée selon laquelle il existerait des règles propres à ces pays, radicalement distinctes de celles qui régissent l’Occident, ou selon laquelle cet « Orient compliqué » s’illuminerait grâce au déchiffrage des sourates du Coran, Rodinson préfère adopter pour son analyse les sciences sociales, et prendre comme fil rouge une pensée marxiste non dogmatique. Nous publions ici un extrait de la préface à cette nouvelle édition.

En France, les dispensaires publics sont soumis à la logique du privé (Paty Frechani-Maujore) :
Du temps, du travail collectif et des moyens : trois atouts qui faisaient la spécificité des centres de santé, créés pour offrir à tous une médecine de qualité. Peut-on les soumettre à des objectifs purement comptables sans pervertir le projet initial ? Des établissements mutualistes des Bouches-du-Rhône à ceux gérés par les villes de Saint-Denis et de Montreuil, les personnels rejettent cette idée.

Ce que corroborent Fanny Darbus et Matthieu Hély : “ Justes causes et bas salaires ” :
Gagner sa vie en servant un idéal : ce rêve conduit souvent les employés d’associations ou de mutuelles à accepter précarité et faibles rémunérations. Mais jusqu’à un certain point...

André Bellon se demande si, désormais, en France, il n’y a plus qu’une seule alternative institutionnelle : “ Bonapartisme ou Constituante ” :
C’est devenu une évidence : le fossé se creuse entre les citoyens et leurs représentants. La « crise de la démocratie » traduit un changement de modèle politique. Adopté en violation de la volonté exprimée par les électeurs le 29 mai 2005, le traité de Lisbonne a signalé la tentation autoritaire d’une partie des élites. L’élection d’une Assemblée constituante en France permettrait-elle de la juguler ?

Rodney Benson voit dans les médias américains un “ délire partisan ” :
Il y a vingt ans, un Américain qui allumait son petit écran en rentrant du travail pouvait choisir entre trois journaux télévisés quasiment identiques. Depuis, l’éventail s’est élargi. Selon qu’il opte pour la conservatrice Fox News ou pour la progressiste MSNBC, le téléspectateur sera exposé à une analyse de l’actualité radicalement différente. Avec quels effets sur la vie politique ?

Mélanie Bourdaa et Mona Chollet évoque les enjeux du sous-titrage des séries télévisée étrangères :
Orange Cinéma Séries proposera la nouvelle saison de la série événement « Game of Thrones » en France dès le 7 avril, soit vingt-quatre heures après sa diffusion américaine. Pas sûr que cela lui permette de rivaliser avec les amateurs anonymes qui, par simple passion, en offriront des versions sous-titrées en un temps record…

Alexander Main analyse au Venezuela, la tentation du coup de force :
Les Vénézuéliens avaient sans doute de bonnes raisons d’exprimer leur mécontentement face à un pouvoir qui peine à transformer les structures profondes du pays (appareil productif, fiscalité…). Mais la contestation récente a été récupérée par une frange de l’opposition qui n’a qu’un objectif : renverser le président Nicolas Maduro, pourtant élu démocratiquement.

Jacques Testart propose de repenser la procréation médicalement assistée :
Trente-six ans après la naissance du premier bébé-éprouvette — en 1978 au Royaume-Uni —, cinq millions d’enfants sont nés de fécondation in vitro (FIV), et près de 3 % des enfants des pays industrialisés sont aujourd’hui conçus ainsi. Mais la technique s’élargit sans cesse, tandis que la réglementation bioéthique s’assouplit. La médicalisation de la procréation pourrait alors emprunter de nouvelles voies, susceptibles d’« améliorer » l’être humain. Parmi les plus fantasmées : le clonage ou le géniteur universel.

Philippe Revelli décrit la révolte populaire menace le pouvoir cambodgien :
Après la violente répression de janvier dernier, les ouvriers du textile et leurs syndicats cherchent un nouveau souffle afin d’obtenir une augmentation du salaire minimum. Quant au parti de l’opposition qui hier les soutenait, il semble désormais plus préoccupé par ses tractations électorales avec le pouvoir que par les revendications sociales.

Comme par hasard, le droit anglo-saxon s’impose à la CPI, ainsi que la langue anglaise (Cyril Laucci) :
La majorité des vingt et une affaires déférées à la Cour pénale internationale (CPI) concernent des pays francophones. Pourtant, en violation du règlement intérieur de la CPI, le recours à la langue anglaise se généralise. Corrélativement, ce sont les principes du droit anglo-saxon (« common law ») qui s’imposent.

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