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L’autre de l’autre

Dans Meursault, contre enquête, Kamel Daoud donne corps au destin de « L’Arabe » assassiné par le héros de L’étranger. Soixante-dix ans après le faits, Haroun, le frère de la victime, construit une histoire à Moussa, mort sur une plage où le soleil cognait trop fort.

Construit en points et contre-points, en miroirs et en faux-semblants, ce roman à l’écriture parfaitement maîtrisée nous parle d’identité (s).

A propos de son livre, Daoud dit ceci : « Sans l’avoir lu, de nombreuses personnes ont pensé que c’était une attaque de L’Étranger, mais moi je n’étais pas dans cet esprit-là. Je ne suis pas un ancien moudjahid. [...] Je me suis emparé de L’Étranger parce que Camus est un homme qui interroge le monde. J’ai voulu m’inscrire dans cette continuation. [...] J’ai surtout voulu rendre un puissant hommage à La Chute, tant j’aime ce livre. »

Daoud, qui réside en Algérie, a fait l’objet d’une fatwa qui le condamne à mort parce qu’il a choisi d’écrire en français, la langue arabe étant, selon lui, « piégée par le sacré ». Le texte de la fatwa salafiste menace en ces termes : « « Il a mis le Coran en doute ainsi que l’islam sacré ; il a blessé les musulmans dans leur dignité et a fait des louanges à l’Occident et aux sionistes. Il s’est attaqué à la langue arabe [...]. Nous appelons le régime algérien à le condamner à mort publiquement, à cause de sa guerre contre Dieu, son Prophète, son livre, les musulmans et leurs pays. ».

Un extrait du roman :

Arabe, je ne me suis jamais senti arabe, tu sais. C’est comme la négritude qui n’existe que par le regard du Blanc. Dans le quartier, dans notre monde, on était musulman, on avait un prénom, un visage et des habitudes. Point. Eux étaient « les étrangers », les roumis que Dieu avait fait venir pour nous mettre à l’épreuve, mais dont les heures étaient de toute façon comptées : ils partiraient un jour ou l’autre, c’était certain. C’est pourquoi on ne leur répondait pas, on se taisait en leur présence et on attendait, adossé au mur. Ton écrivain meurtrier s’est trompé, mon frère et son compagnon n’avaient pas du tout l’intention de les tuer, lui ou son barbeau. Ils attendaient seulement. Qu’ils partent tous, lui le maquereau et les milliers d’autres. On le savait tous, et ce dès la première enfance, on n’avait même pas besoin d’en parler, on savait qu’ils finiraient par partir. Quand il nous arrivait de passer dans un quartier européen, nous nous amusions même à désigner les maisons en nous les partageant comme un butin de guerre : « Celle-là est à moi, je l’ai touchée le premier ! », lançait l’un de nous, déclenchant des cris de surenchère. A cinq ans ! déjà, tu te rends compte ? Comme si on avait eu l’intuition de ce qui se passerait à l’Indépendance, avec les armes en moins. »

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