
Un groupe de lecteurs de l’Humanité dans un airbus 330, destination Caracas, ça papote obligatoirement politique. L’avion d’Air France est rempli de Chinois qui vont travailler à Caracas et de Vénézuéliens silencieux, retenant mal leur agressivité envers ces français sympathisants bolivariens. L’affaire prend d’ailleurs un tour de confrontation peu consensuelle.
Faut-il que la crise soit grave pour qu’aux turbulences atmosphériques s’ajoutent les turbulences idéologiques !
Arrivés à Caracas : 30°, 2 heures d’attente à la douane et un face à face peu amical avec un Monsieur uniformé, sympathique et sensible comme une porte de prison.
Nous arrivons au moment où le PSUV renouvelle les dirigeants de ses organisations de base et de ses instances, à différents niveaux. 463599 militants se sont portés candidats pour un parti de 7 millions d’adhérents.
Le processus apparaît ouvert et transparent, seul l’ultra-droitier quotidien Tal Cual parle de « bide » dans son titre à la une. Au moment où le gouvernement crée de nouvelles institutions pour combattre la corruption parmi lesquelles le « Conseil National Anticorruption ». Le souci de s’attaquer à l’un des fléaux du processus risque de se traduire par un empilement de nouvelles lourdeurs administratives si, comme l’escompte le président, il n’y a pas contrôle populaire .
Au moment où le gouvernement se bat sur le front de « l’insécurité » ressentie très négativement par la population, en restructurant les différentes polices vénézuéliennes (141 corps).
Au moment où le gouvernement vient d’augmenter, pour la troisième fois en un an, le salaire minimum de 15%. L’inflation atteint un niveau préoccupant (autour de 70%).
La crise économique n‘épargne plus le modèle vénézuélien et le gouvernement doit éviter le décrochage des couches populaires.
La plupart des vénézuéliens reconnaissent les efforts énormes et les succès de la politique bolivarienne en direction des plus pauvres, de la santé, de l’éducation. Mais de nouvelles demandes se manifestent , le gouvernement est en difficulté vis à vis des couches moyennes et des professions libérales qui s’estiment « déclassées ».
Le groupe des lecteurs de l’Humanité perçoit cette tension sourde qui se manifeste à Caracas, alimentée par la stratégie de déstabilisation de Washington. Il faut dire que la guerre économique, l’organisation des pénuries par le patronat et les grands groupes affectent la vie quotidienne.
Pour la plupart, des Vénézuéliens que nous interrogeons, une seule préoccupation : l’efficacité, la création d’une véritable économie ! Le Président Maduro s’est précisément fixé comme objectif la transformation de cet Etat en délégant un maximum de pouvoir aux « communes socialistes de base (900 actuellement).
Ce qui est accéléré, c’est cette « gauche par le bas », ces sortes d’ « autogouvernements » locaux, la multiplication des structures de pouvoir populaire .
Le gouvernement vient de créer la « banque bicentenaire du peuple et de la classe ouvrière » qui a déjà 514 agences.
Le sommeil, même à Caracas, n’est pas une vertu révolutionnaire !
Jean Ortiz