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La stratégie russe et le droit international

La stratégie russe et le droit international
6 Mars 2022 , Rédigé par Réveil Communiste Publié dans #GQ, #Russie, #Ukraine, #lutte contre l’impérialisme, #l’Europe impérialiste et capitaliste, #États-Unis, #Ce que dit la presse, #Mille raisons de regretter l’URSS

La Russie s’est mise dans son tort par rapport au droit international en pénétrant en Ukraine. Et ce n’est pas rien. Mais elle a le bon sens stratégique de son coté.

Une observation pour commencer : à peu près toute l’information qui provient du camp ukrainien-maidaniste est a priori suspecte. La guerre de l’information est en effet cruciale pour ce camp qui ne peut espérer sauver sa position ou atténuer sa défaite qu’avec une aide internationale massive et celle-ci ne peut pas se produire sans une énorme campagne de préparation médiatique et mise en condition de l’opinion occidentale.

La guerre engagée en Ukraine par la Russie contre le régime de Kiev issu du Maidan, sous influence néo-nazie, se donne pour but de dénazifier et de démilitariser l’Ukraine. Ce régime portait en lui les germes d’une entité terroriste comparable à Isis au Moyen Orient, et d’un État voyou nucléaire.

Mais atteindre ces buts ce n’est pas un mince affaire, L’Ukraine est un grand pays à l’échelle européenne et ce n’est pas étonnant que ça ne soit pas encore résolu en deux semaines. Surtout quand on n’a pas grand-chose à mettre à la place, en terme d’idéologie, puisqu’on renie le communisme, la seule chose qui ait fonctionné pour maintenir ensemble les peuples de l’ancien Empire russe, n’en déplaise au président russe actuel.

On peut s’interroger sur les précédents historiques, et se demander si c’est même possible de changer de régime politique durablement ainsi. Les Soviétiques ont essayé en Hongrie et en Tchécoslovaquie et n’ont pas réussi à long terme, mais cela ne prouve rien : la chute du bloc soviétique provient du sommet, non de la périphérie. Et les États-Unis l’ont fait maintes et maintes fois dans leur zone d’influence.

La Russie a déjà perdu en Occident en terme d’image, mais il faut observer que cette image à la suite de campagne constantes de diabolisation depuis une génération ne pouvait guerre empirer, et dans sa rage de surenchère impuissante l’Empire en est à boycotter Tchaïkovski et Dostoïevski.

La Russie semble avoir fait une croix là-dessus, pour gagner plus gros sur un autre terrain.

La situation ressemble à cet égard à celle de la Chine de 1989, où la répression des manifestations De Tien An Men a permis au parti communiste de conserver le pouvoir, d’étouffer dans l’œuf l’ingérence politique de l’Occident, pour finalement réussir à sortir le pays de la pauvreté au prix d’une quarantaine provisoire.

Pour la Russie aujourd’hui il s’agit d’abord de mettre fin à la persécution sanglante des Russes du Donbass, pour y rétablir le droit mais aussi pour garder la face. Continuer à la tolérer, continuer aussi à tolérer le mépris cynique des accords de Minsk par l’Ukraine et par leurs garants européens, et laisser le Donbass se faire écraser militairement comme l’Arménie avec des drones turcs aurait occasionné aussi une perte d’image, quoique d’un autre genre. On dit qu’il vaut mieux avoir l’air mauvais que faible.

Mais surtout

Une Ukraine sous le contrôle des États-Unis qui ont truffé l’administration ukrainienne de leurs agents et de leurs supplétifs banderistes constitue en soi un danger existentiel pour la Russie.

Il s’agit aussi d’une question mémorielle et donc qu’on pourrait penser secondaire, mais dans un contexte où partout ces questions acquièrent une importance croissante. Si les Russes tolèrent chez leurs voisin et cousin le plus proche la célébration officielle et la panthéonisation de chefs de bandes nazis qui ont mis en œuvre des politiques génocidaires à leur encontre – et contre les juifs – ils perdent le respect et encouragent tous les empiétements.

Il ne s’agit pas simplement de supporters de foot ou de gangs de motards. Le nazisme là bas organisé en groupes paramilitaires est une pratique réelle et non symbolique, raciste et meurtrière et sait employer le double langage à l’intention de ceux qui ne demandent qu’à se laisser tromper dans la société civile européenne.

Si un tel État, kleptocratie sous influence nazie devient membre de l’OTAN – dont la raison d’être est de combattre et de refouler la Russie – et la place, avec ses armement nucléaires tactiques, à quelques minutes de vol de Moscou, le danger cesse d’être calculable rationnellement.

Le bon sens élémentaire est du coté de la Russie quand elle décide d’y mettre un coup d’arrêt définitif.

Mais il reste que le droit international n’est pas du coté de la Russie. Le droit international qu’est ce que c’est ? En principe c’est que les conflits entre États ne doivent pas se résoudre par la force des armes, que les frontières sont intangibles et qu’il ne faut pas s’ingérer dans les affaires intérieures des autres pays. En réalité, ces principes s’appliquent à tout le monde sauf aux États-Unis, et à certains leur satellites les plus zélés.

Mais vaille que vaille les autres pays sont tenus plus ou moins de le respecter ; alors les partisans du moindre mal diront que c’est déjà ça. Surtout que ça se produit en général très loin de chez eux.

La Russie a choisi la guerre sans aller jusqu’à assumer ce terme pour mettre un coup d’arrêt aux empiétements impérialistes sur sa frontière. Il est probable que les joueurs d’échec du Kremlin ont jugé que sans cette rupture traumatique avec les règles du jeu implicites leur partie était perdue à long terme.

Alors après avoir vu dans toutes les crises de l’après guerre sans en excepter aucune les États-Unis ne tenir aucun compte du fameux droit international les dirigeants russes ont décidé d’agir de la même manière dans une question où leur intégrité nationale et leur sécurité était en jeu – ce qui n’est jamais arrivé pour les États-Unis, sauf à Cuba en 1962. En faisant cela, ils ont défié l’Empire et l’ont ébranlé jusqu’aux fondements.

Ils ont utilisé pour cela une fenêtre de tir ouverte par leur avance dans le développement des armements stratégiques, qui les sanctuarise provisoirement.

Ils sont condamnés à réussir. Ce qui signifie que si on ne veut pas que la Russie prenne le contrôle de l’Ukraine, il faudra prendre le contrôle de la Russie. Bon courage et tous aux abris.

Ce qui signifie de leur coté qu’il va leur falloir trancher dans le vif les liens multiformes qui se sont tissés entre leur oligarchie et les classes dirigeantes occidentales ; et l’hystérie en jaune bleu va les y aider.

En voulant détruire l’économie de la Russie par des sanctions démesurées on va surtout gravement affaiblir le capitalisme en Russie. Contrairement à ce qu’on fait circuler, les communistes russes soutiennent l’action de leur gouvernement et lui reprochent de ne pas l’avoir lancée bien plus tôt.

Vladimir Poutine va devoir modifier son logiciel idéologique : loin que le bolchevisme ait été le fossoyeur du monde russe, il lui a permis de durer 75 ans de plus. Et il n’est pas cohérent de faire la guerre aux néonazis actuels en se réclamant des protofascistes pogromistes des armées blanches de la guerre civile, vendus à l’étranger, qui plus est, et qui ont versé dans la collaboration à partir de 1941.

La voie de fait des Russes en Ukraine provoque un scandale total en Occident, mais rien de tel dans le reste du monde. Il voit plutôt dans cette indignation jaune bleue complétement délirante le dernier couac du suprématisme blanc.

L’Occident va maintenant mener – ou mimer – une lutte à mort contre la Russie. Il va falloir enrayer cette spirale destructrice.

En un mot comme en cent, les gens naïfs qui arborent en troupeau les couleurs jaune et bleue après avoir découvert l’existence de l’Ukraine le 24 février sont-ils conscients de participer à une escalade qui peut conduire (et avec une probabilité non négligeable) à une guerre ouverte de notre pays avec la Russie, à la guerre nucléaire ?

Empêcher cette guerre, et si elle a lieu, ne pas y participer, voilà la bonne ligne.

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