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Sur un assouplissement

Hier, lundi 18 novembre, le Secrétaire d’État (autrement dit le ministre des Affaires étrangères) des États-Unis a déclaré que "l’établissement de colonies de civils israéliens en Cisjordanie n’est pas en soi contraire au droit international". Autrement dit, il entérinait la colonisation rampante des Israéliens dans cette région et préparait le terrain à une éventuelle reconnaissance de l’annexion de la Cisjordanie par Israël de la part des États-Unis.

Cela constitue un changement complet de la politique étasunienne à l’égard d’Israël (mais, surtout, à l’égard des Palestiniens et du monde arabe) car, jusqu’à présent, malgré les préférences affichées du gouvernement Trump pour Israël (transfert de l’ambassade U.S. à Jérusalem, reconnaissance de l’annexion du plateau du Golan), ce gouvernement n’avait pas osé aussi cyniquement franchir le pas.

Mais ce sur quoi je veux faire porter mes remarques est le titre du Dauphiné Libéré, du Républicain lorrain et du Progrès (repris d’une même mouture ?) : "Washington assouplit sa position sur les colonies israéliennes". [J’ai graissé le verbe].

Remarque 1. Le verbe assouplir a pour synonymes adoucir, amender, apprivoiser, atténuer, corriger, délier, lénifier, polir... Or, la connotation de ces verbes suggère la douceur, l’atténuation, la suppression des raideurs, et, lorsqu’ils se rapportent aux relations humaines, l’indulgence, la compréhension, la clémence, l’empathie. D’où vient alors l’impression que quelque chose cloche dans la formulation ?

Remarque 2. Ce qui cloche, c’est que cette "souplesse" à l’égard d’Israël devient, corrélativement, une "raideur" à l’égard des Palestiniens. Elle leur signifie : "Ces territoires de Cisjordanie, dont vous revendiquez la légitime possession, nous, gouvernement des États-Unis, proclamons qu’ils ne sont pas à vous. Que vous les réclamez à tort et en violation du droit international qu’en l’occurrence nous incarnons." Ce qui implique une répression accrue par l’armée et la police israéliennes des manifestants et résistants palestiniens, mais aussi davantage d’expropriation de Palestiniens, davantage d’interdictions de construire, davantage de démolitions de maisons palestiniennes, davantage de contrôles aux check-points, etc. Et davantage de vétos étatsuniens aux Nations Unies contre les résolutions internationales condamnant Israël. Bref, davantage de dureté, davantage de raideur à l’égard des Palestiniens.

Remarque 3. L’emploi de ce verbe "assouplir" révèle, "en creux" la position à partir de laquelle se place, implicitement, le rédacteur du titre : celle du gouvernement israélien. En effet, si Washington "assouplit" sa position, c’est que cette position, jusque là, était considérée par ce rédacteur comme trop raide, trop intransigeante, trop sévère, trop intolérante à l’égard du gouvernement israélien. Ce qui est pour le moins curieux ! En effet, alors que, depuis des décennies, tous les gouvernements des États-Unis ont pour le moins été indulgents, voire laxistes, voire complices à l’égard des gouvernements israéliens, le gouvernement Trump l’a été plus que tous les autres réunis ! De quelle "souplesse" parle-t-on ?

Remarque 4. Ce n’est pas la première fois que, par les journalistes (ou par les politiciens de droite, ou par le patronat), le verbe assouplir, ou les noms ou adverbes évoquant la même réalité (souplesse, assouplissement) sont, en matière économique et sociale, utilisés à contre-emploi : "le patronat réclame un assouplissement des règles de licenciement", "le MEDEF et la CGPME plaident pour davantage de souplesse dans la détermination des horaires de travail par les chefs d’entreprise", etc. Or, chaque fois, cette souplesse, cet assouplissement, se traduisent par davantage de dureté, de contrainte, de pénibilité pour les salariés. A savoir, des horaires plus longs, des licenciements plus brutaux, des indemnisations du chômage plus mesquines, etc.

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