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« Les Français savent que c’est la Russie soviétique qui a joué le rôle principal dans leur libération. » De Gaulle,1966.

Face à l’offensive guerrière de Trump, contre l’offensive antisociale de Macron… que faire ?

Face à l’euro Loi travail XXL imposée brutalement par ordonnances, la blietzkrieg anti sociale de Macron contre les travailleurs en France (APL, CSG, blocage des salaires des fonctionnaires et privatisations…), l’état d’urgence permanent visant le mouvement social, l’offensive impérialiste des Etats Unis avec des guerres plus ou moins ouvertes de la Syrie à la Corée et l’Ukraine en passant par le Venezuela, que faire ? … Georges Gastaud secrétaire national du PRCF a bien voulu répondre aux questions de la rédaction d’Initiative Communiste et proposer des solutions des actions concrètes afin d’agir dès maintenant

Initiative Communiste – C’est peu dire que Trump, pressé à la fois par ses difficultés intérieurs et par le complexe militaro-financier US, roule les mécaniques tous azimuts à propos de l’Ukraine et de la Russie, de la Syrie, de la Corée, du Venezuela... Comment analyser cette situation et comment y réagir ?

Georges Gastaud : Etant donné le surarmement de l’impérialisme US et son extrême agressivité, conséquence de son recul objectif sur les plans géopolitique et géoéconomique, il serait aberrant de clamer partout que « l’impérialisme est un tigre de papier », comme certains crurent pouvoir le faire jadis. Mais la faute symétrique, la surestimation de cet ennemi principal des peuples qu’est la nébuleuse euro-atlantique et « trans-pacifique » (Japon en plein réarmement, Corée du Sud...), ne serait pas moins grave. En réalité, l’impérialisme US est en difficultés :

En Corée, l’ « invincible Armada » de Trump n’impressionne pas Pyongyang, bien déterminé à ne pas finir sous les bombes US comme ont fini, après moult concessions n’ayant servi qu’à exciter les appétits impérialistes, d’autres régimes ciblés par Washington de l’Irak à la Libye. Il faut faire la lumière sur les responsabilités écrasantes de Washington dans la montée des tensions régionales et dans cet esprit j’appelle à lire le livre de Robert Charvin récemment publié chez Delga « Comment peut-on être coréen du nord ».

Avec détermination, les forces progressistes d’Amérique latine se battent contre les ingérences continues de la CIA et de ses relais oligarchiques locaux. Il faut soutenir, fût-ce de manière critique, révolutionnaire et constructive – comme le fait le PC vénézuélien – la résolution de Nicolas Maduro de ne pas laisser les oligarques pro-yanquis détruire l’héritage de Chavez et avec lui, l’ALBA, dans le but d’isoler Cuba socialiste. Pour nous cependant les choses sont claires : avec le double pouvoir qui se met en place au Venezuela, il n’y aura d’issue que dans une radicalisation du processus bolivarien dans le sens du socialisme. Contrairement à ceux qui théorisaient un « socialisme du 21ème siècle » sans révolution ni dictature du prolétariat, le Venezuela montre que, quand les choses se tendent entre le travail et le capital, il n’y a plus de milieu entre la contre-révolution fasciste et la révolution socialiste. Mais c’est évidemment au peuple et aux camarades communistes vénézuélien de tirer par eux-mêmes toutes les conclusions de la situation actuelle et le PRCF soutient sans réserve le camp populaire et la nouvelle Assemblée constituante boycottée par la réaction et soutenue par les secteurs populaires.

En Palestine une jeunesse héroïque continue de se dresser contre l’entreprise colonisatrice illégale et criminelle de Netanyahou et de ses complices, Trump et Macron en tête.

En Syrie, malgré les frappes US sur l’armée syrienne, le recul, voire la débandade des djihadistes pro-occidentaux travestis en « démocrates », est général et il faut à la fois soutenir l’unité et l’autodétermination de ce pays souverain et appuyer davantage les communistes et les progressistes syriens qui combattent l’ingérence américaine et pétro-monarchique.

Quelles que soient les critiques justifiées que les communistes russes adressent au régime de Poutine, critiques que nous soutenons au titre de l’internationalisme prolétarien, on ne peut renvoyer dos à dos le nouveau Drang nach Osten (marche vers l’Est) de l’UE/OTAN, qui masse des troupes en Pologne (en soutenant un régime clérical et maladivement anticommuniste), qui arme les pronazis de Kiev et qui ne cesse de « punir » la Russie en jouant avec le danger de guerre nucléaire mondiale que représenterait un affrontement Ouest-Est à l’initiative de Washington et de ses commis bruxellois. Nous n’oublions pas pour notre part le mot du Général De Gaulle en visite d’Etat à Moscou en 1966 : « les Français savent que c’est la Russie soviétique qui a joué le rôle principal dans leur libération » et c’est aussi un enjeu de dignité nationale pour le peuple français que de ne pas se laisser entraîner par Macron et par les autres forces euro-atlantiques qui sapent notre pays, dans un conflit irresponsable avec le grand peuple russe ami.

N’oublions pas en outre que l’impérialisme ne peut jamais totalement s’unifier et que des lignes de fracture existent entre les partisans du TAFTA, Clinton et Obama en tête (et sans doute, Macron et Merkel une fois passées les élections allemandes), et ceux du protectionnisme que défend plus ou moins Trump. Il ne faut certes pas surestimer ces fractures, car les impérialistes rivaux savent s’unir pour régler leur compte aux mouvements émancipateurs, mais il ne faut pas non plus les ignorer car elles sont un symptôme de la crise généralisée de ce système capitaliste-impérialiste qui, depuis longtemps, est historiquement « au bout du rouleau », ce qui le rend toujours plus agressif.

En résumé, il faut plus que jamais travailler à l’unité du Mouvement communiste international, au rassemblement des forces anti-impérialistes en France et dans le monde, et soutenir les forces « rouges » et progressistes de chaque pays sur la base de la solidarité de classe internationale sans perdre de vue que l’impérialisme reste l’ennemi principal, proprement exterministe, de la paix mondiale. C’est dans cet esprit que le PRCF et la F.I. lensoise ont manifesté ensemble pour la paix en juin dernier à Lens : une initiative qu’il faut tenter de généraliser sans sectarisme aucun, y compris bien entendu, s’ils le souhaitent, avec les camarades du PCF, de la CGT, etc. ET plus encore, c’est dans cet esprit que le PRCF prépare son meeting international annuel sur son stand de la Fête de l’Huma, ainsi que le grand meeting internationaliste du 4 novembre à Paris à l’occasion du 100ème anniversaire de la Révolution d’Octobre. Nous nous inspirerons à cette occasion de la pénétrante remarque de Georges Dimitrov, le dernier secrétaire en titre de l’Internationale communiste : « les contre-révolutions sont des parenthèses de l’histoire, l’avenir appartient aux révolutionnaires ».

Dans l’immédiat, notre tâche à tous est de mener la lutte contre l’idéologie de guerre qui déferle en permanence sur nos médias d’apparence sirupeusement « gnangnan ». Sur le Venezuela, la Corée, la Syrie, la Palestine, Cuba, l’Ukraine et la Russie, le DOUTE METHODIQUE cher à Descartes doit être la règle, y compris à l’endroit de médias prétendument « progressistes » comme Libé ou Télérama, qui sont en réalité le canal rose des ingérences impérialistes et de l’euro-décomposition de notre pays. Rien de tel pour combattre à la fois le vieil impérialisme beauf et néocolonial, type « Françafrique », qui poursuit ses ingérences au Mali et ailleurs, et le nouvel impérialisme bobo et pseudo-humanitaire de « Libé » et Cie, que de consulter chaque jour le site du PRCF qui fait quotidiennement un travail remarquable pour rétablir la vérité.

Je m’en voudrais de ne pas terminer par un appel à accentuer la solidarité avec les courageux communistes polonais du KPP que le pouvoir clérical persécute dans le silence complet des défenseurs bourgeois attitrés des « droits de l’homme » (façon Wall Street !). Si nous, communistes et progressistes occidentaux, continuons de sous-estimer cette question, notre tour viendra car l’UE est une machine à fasciser l’Europe sous le masque d’un pseudo- « antitotalitarisme » qui sert à la fois à criminaliser le communisme historique et à banaliser son ennemi le plus constant : l’extrême droite. Plus que jamais, c’est aussi pour défendre les libertés de tous qu’il faut, non pas « démocratiser l’UE », cette prison des peuples pilotée d’une poigne de fer par Berlin et par ses nouveaux Kollabos, mais sortir au plus tôt de ce broyeur des libertés démocratiques, de la paix Est-Ouest, des souverainetés nationales et des acquis sociaux.

I.C. : Macron dispose de l’Elysée, d’une chambre introuvable de godillots, de la complaisance évidente du Sénat (LR et PS), de l’essentiel des médias... La messe n’est-elle pas dite pour les mouvements sociaux et politiques progressistes à venir ?

Georges Gastaud : Nullement et, si je puis risquer cette formule, je dirais que Macron est un « beau gosse » aux pieds d’argile. Sa « force » même est faiblesse. En effet, c’est seulement sur la base de manips politico-électorales, par ex. du pseudo-barrage antifasciste de second tour qu’était censé représenter « En marche », sur la base d’une gonflette médiatique éhontée qui fond déjà devant les faits, d’un équilibrisme politique que résume la formule pseudo-dialectique « en même temps » (qui nie magiquement les contradictions de classes...), et surtout, sur la base d’un rapt antidémocratique terrifiant (étant donné la hauteur de l’abstention et du vote blanc, Macron représente moins de 16 % des inscrits et il détient 80% des députés, dont une majorité d’incapables !), que Macron peut – pour combien de temps ? – adopter la posture dangereuse de « Jupiter ». Mais son dévissage rapide dans les sondages est parlant. Etant donné la NATURE DE CLASSE objective de ce pouvoir, encore plus antisocial, antidémocratique et antinational que ceux de Sarkozy et de Hollande, étant donné sa totale euro-dépendance, sa vassalité sans borne à l’égard de l’oligarchie financière, ce pouvoir pourra difficilement, sauf fuite en avant périlleuse dans l’autoritarisme sans borne et dans les aventures militaires, maintenir bien longtemps le couvercle du « ni droite ni gauche » vissé sur la cocotte-minute française.

Sans parler des conflits qui s’annoncent sur la nouvelle loi travail (fin, non seulement du code du travail national, mais des conventions collectives de branche), et qui ne manqueront pas de raviver la contradiction principale dans notre pays (l’antagonisme objectif capital/travail), Macron affronte déjà la jeunesse estudiantine et lycéenne en réduisant les APL et en mettant gravement en cause le bac national en tant que premier grade universitaire donnant droit à une inscription en fac sur tout le territoire (ce bac, il faudrait lui rendre sa crédibilité, et non pas l’affadir, le brader pour mieux le priver de sens). Si les forces ouvrières, communistes et démocratiques agissent correctement, sans s’enliser dans les discussions-bidon et le pseudo- « dialogue social » que Macron et son syndicaliste de service, Berger le bien-nommé, mettent en place pour accompagner la casse sociale, il existe un large espace, à la fois syndical et politique, pour une vaste contre-offensive progressiste associant les travailleurs et la jeunesse populaire.

Pour cela il faut en particulier faire le lien entre la casse des conventions collectives (salariés du privé), celle des statuts publics et celle de l’Education (de moins en moins) « nationale » : il est clair que la segmentation de l’EN en milliers d’établissements secondaires concurrent délivrant, non plus un bac crédible sur examen anonyme national, mais des « formations diplômantes » purement locales, sur contrôle continu, pilotées par le patronat local et sur la base de « compétences rechargeables », visent tous à détruire le socle de protection sociale nationale qu’avaient constitué, à l’époque du PCF marxiste-léniniste et de la CGT de classe, le Front populaire et les ministres communistes de la Libération. Casser l’Educ nationale et ses diplômes, c’est détruire à très court terme tout l’édifice des conventions de branche nationale, des statuts de la fonction publique (mais aussi d’EDF, de la SNCF, du CNRS, etc.), bref les jeunes – futurs salariés promis à la précarité « ubérisées » -, les salariés d’active, les chômeurs et les retraités ont tout intérêt à converger dans les luttes du mois de septembre.

Encore faudra-il que les états-majors des forces syndicales et progressistes établies ne continuent pas majoritairement, comme cela s’est hélas fait durant le conflit sur la loi dite El Khomri, que les directives européennes dictant la casse du marché du travail en France et en Europe (lois Peeters en Belgique, Jobs Act en Italie...), ne soient pas systématiquement épargnées par des directions politico-syndicales trop intéressées bien souvent à ménager l’UE, la sacro-sainte « construction européenne » et leurs appendices, le Parti de la Gauche Européenne, coprésidé par Pierre Laurent, et la Confédération Européenne des Syndicats (qui a laissé tomber les travailleurs français au printemps dernier, alors que la FSM les a soutenus).

Mais ce n’est pas tout. Macron-MEDEF et son projet de faire de la France une « start up nation » et un « business-friendly country » (l’américanisation systématique de la langue répond à l’américanisation des contenus sociétaux) sont également férocement antinationaux et antirépublicains. Antirépublicains quand, pour entrer dans les clous de Maastricht, casser l’échelon communal et départemental, désosser la République une et indivisible (c’est ce que Macron appelle le « pacte girondin ») au profit des métropoles et des méga-régions à l’allemande, Macron rabote de 13 milliards les subventions d’Etat aux communes, en provoquant la grogne massive des maires, en dehors de ceux qui, comme Collomb, sont à la pointe de la métropolisation antidémocratique. Antinational quand sur tous les terrains, « saut fédéral européen », mise en place d’un « gouvernement » et d’un « budget de la zone euro », défense européenne intégrée à l’OTAN et plaçant la force nucléaire française sous le contrôle de Berlin, engouement dérisoire du gouvernement « français » lui-même pour le charabia en globish, le pouvoir pousse à son terme la logique antinationale de Mitterrand quand il disait « la France est notre patrie, l’Europe est notre avenir », ce qui signifie en réalité... que la nation appartient au passé. Cela a déjà provoqué d’intenses frictions entre Macron et l’état-major militaire qui assiste médusé à cette contradiction éclatante d’une restriction des crédits destinés à la défense nationale au moment même où Macron annonce que le budget militaire français passera à 2% du PIB pour satisfaire aux exigences (pour une fois commune !) de Trump et d’Obama (armée européenne totalement otanisée). Projet totalement antidémocratique quand le pouvoir macronien déguise en sortie de l’état d’urgence » un projet de loi inscrivant dans le droit commun les dispositifs les plus liberticides dudit état d’urgence, ce qui permettrait demain et pour toujours aux préfets de fliquer n’importe qui et d’interdire sans motif toute manif populaire !

Un vrai parti communiste, c’est-à-dire une force d’avant-garde léniniste mettant la classe ouvrière à la tête de toutes les résistances démocratiques et nationales au grand capital, ne sourirait certainement pas de ces fissions (maires, officiers généraux, défenseurs de la langue française, y compris « bourgeois ») dans le système du pouvoir. C’est seulement, disait Lénine, quand « ceux d’en haut ne peuvent plus gouverner comme avant et que ceux d’en bas refusent d’être gouvernés comme avant » que surgissent les crises révolutionnaires. Il faut donc défendre, bien entendu sur des bases progressistes, la défense nationale (dans l’esprit de L’Armée nouvelle, un livre écrit jadis dont les principes, sinon les modalités, restent pleinement valides), les communes, les départements, les libertés démocratiques, et en faire un carburant permanent pour construire le FRont Antifasciste, Patriotique, Populaire et Ecologique que défend le PRCF sur la base d’une ligne révolutionnaire visant à sortir la France, par la gauche, de l’euro, de l’UE, de l’OTAN et du capitalisme financiarisé, ce système de plus en plus pourrissant, fascisant et antinational. Aucun opportunisme à cela tant qu’on garde en tête que la classe ouvrière, cœur du monde du travail, et le monde du travail, cœur du peuple français, doivent diriger ce processus unitaire, unir les deux drapeaux historiques de notre pays (le tricolore et le rouge, qu’associèrent l’An II, le Front populaire et la Résistance communiste), qu’elle doit garder constamment le cap sur le pouvoir des travailleurs et sur la socialisation des grands moyens de production et d’échange, qu’elle doit saisir qu’à notre époque, aucune muraille de Chine ne sépare les objectifs démocratiques de restitution de la souveraineté nationale, de reconstruction de l’appareil productif, d’élargissement des libertés DEMOCRATIQUES, et la lutte pour la révolution socialiste qui peut seule à terme consolider les conquêtes du peuple français, voire son existence en tant que peuple indépendant et pacifique.

C’est pourquoi le PRCF n’a cessé de s’exprimer, au cœur de l’été, sur les « crises » qu’a déjà subies le pouvoir macronien, que ce soit avec les maires (majoritairement « bourgeois ») ou avec le haut état-major militaire. Ces crises intéressent la classe ouvrière et les vrais communistes qui sont les seuls en réalité à pouvoir leur apporter une réponse de fond avec la stratégie innovante des « quatre sorties » (de l’euro, de l’UE, de l’OTAN dans la perspective non dissimulée de rompre avec la domination capitaliste qui détruit le pays). C’est d’autant plus vrai que le PS, pardon la « nouvelle gauche », rallie à petits pas Macron, que les LR cachent sous un flot de propos « nationaux » leur allégeance congénitale à l’UE, que le PCF officiel n’en finit pas de dénigrer la Révolution d’Octobre, Lénine et sa propre dénomination, que le FN tombe le masque « eurosceptique » en renonçant peu à peu à toute annonce, fût-elle mensongère, de sortie de l’UE. Si bien que seule une sortie progressiste de l’UE atlantique, accompagnée d’une remise en cause radicale de la « dette » usurière et d’une nationalisation des secteurs-clés de l’économie, peut sauver le pays d’un délitement annoncé qui, faute d’une avant-garde léniniste reconstituée ET d’un large front progressiste, peut déboucher sur le pire, y compris sur des conflits communautarisés explosifs, manipulés et sans aucun intérêt progressiste.

I.C. : Les communistes, y compris ceux qui sont opposés à la mutation, se sont divisés à l’occasion des présidentielles. Comment les réconcilier ? Quelle méthodologie pour aller vers la reconstruction du véritable parti communiste dont le monde du travail manque cruellement pour redevenir un acteur sociopolitique majeur ?

Georges Gastaud : Le PRCF est fier de son positionnement à l’occasion de l’année électorale qui vient de s’achever. Nous avons « tenu les deux bouts de la chaîne ». D’un côté nous avons veillé à notre indépendance politique et avons privilégié la diffusion à 150 000 exemplaires, principalement aux entreprises, de notre tract-programme pour les « quatre sorties », pour les nationalisations démocratiques, la reconstruction du produire en France, la coopération internationale, tout cela dans la perspective affichée d’une sortie révolutionnaire du capitalisme. De l’autre nous avons refusé le repli et l’esprit de boutique : loin de « prendre de haut » la possibilité de constituer une force politique progressiste de masse, ce que permettait objectivement le vote Mélenchon. Si tout le monde avait compris cette double nécessité d’une intervention franchement indépendante sur un programme commun des vrais communistes ET d’un soutien critique au vote JLM, l’accès de ce dernier au second tour eût été parfaitement envisageable avec l’énorme coup que cela eût porté, non seulement à Le Pen, à Fillon et à Hamon, non seulement au pseudo-barrage antifasciste sur Macron, mais à Macron et à son programme de casse : libre à nous, mouvement ouvrier, de surveiller de près – comme il le demande qui plus est ! – un pouvoir « insoumis » qu’il ne serait pas question de laisser libre de dériver loin de son programme... Il suffit, toutes préoccupations de boutiques exclues, de penser à ce qu’eût pu être le 1er Mai 2017 avec Mélenchon au second tour pour saisir qu’une occasion d’importance a sans doute été manquée, et qu’à certaines occasions, le sectarisme et le repli pseudo-identitaire peuvent être aussi ravageurs que l’opportunisme sans frein d’un P. Laurent faisant jusqu’au bout la courte échelle à Hamon.

Encore une fois, cela ne signifiait, ne signifie ni ne signifiera jamais aucun blanc-seing à J.-L. M. : au contraire, il faudrait une force franchement communiste fortement structurée sur sa gauche, pleinement émancipée du tête-à-tête stérile avec Pierre Laurent (ou du moins relativisant très fortement cette part du combat...), pour critiquer les hésitations de la FI sur l’UE, pour mettre sans cesse la FI devant l’obligation – ô combien constructive et positive pour une FRANCHE insoumission au capital – de privilégier l’affirmation selon laquelle « l’UE, on la change ou on la quitte ». Communistes et progressistes déjà acquis à l’euro-rupture, agissons ensemble, par exemple sur la base de l’Appel du 14 juillet signé par le PRCF, le MS 21, les clubs Penser la France, par des gaullistes, par de nombreux syndicalistes, pour mettre au premier plan l’idée qu’une « France franchement insoumise » FFI ne peut émerger DANS l’UE et dans l’euro, mais contre eux. Agir ensemble sur ce terrain en interpellant à la fois la FI, les militants de base du PCF, les syndicats, la jeunesse en mouvement, etc. serait mille fois plus efficace que de déverser une bile improductive et manifestement dénuée d’impact sur la FI. Celle-ci, qui est nécessairement composite en termes de classes et d’idéologie (y coexistent plus ou moins pacifiquement des milieux petits-bourgeois et des forces plus populaires) ne peut faire le travail des communistes et des marxistes à leur place. Bref, agissons sur nos bases pour faire bouger les choses au lieu de nous cultiver une opposition stérilisante entre militants PCF et militants FI (le PRCF a d’ailleurs dépassé ce clivage dans la pratique : en fonction de la clarté des uns et des autres sur l’UE, le Pôle a localement soutenu des candidats FI ou des candidats PCF aux législatives), entre CGT et « Front social », fédérons, rassemblons, ce n’est pas contraire à l’identité communiste, c’est au contraire un moyen de la rendre attractive pour des millions de gens.

Bien entendu il faut aller plus loin que l’unité d’action communiste et nous visons clairement la tâche de reconstruction d’un vrai Parti clairement héritier du meilleur de ce que fut le grand PCF antérieur à la « mutation »-dénaturation. Il faut d’abord s’entendre sur les buts, qui dictent la méthode. Certains voudraient « rassembler » pêle-mêle tous ceux qui sont critiques, quelles que soient leurs bases, à l’égard de la direction du PCF-PGE en passant par pertes et profits le fait que certains sont franchement anti-bolchéviks, rejetant le centralisme démocratique et la « matrice léniniste » (comme si c’était de trop, et non de pas assez de léninisme qu’avaient péri les pays socialistes !), voire ne soutenant la Révolution d’Octobre que par pure opportunité, adhérant en fait sous couvert de modernité au vieux menchevisme dont le principe est le relâchement des liens organisationnels, le mépris du travail théorique, l’alignement sur les tâches purement syndicales (ce que Lénine appelait l’ « économisme »), et ne sont pas loin du « mouvementisme » que nous critiquons dans « Podemos » ou dans la FI. D’autres s’accrochent au projet de « remettre le PCF sur les rails de la lutte de classes » alors que les plus lucides des opposants internes doivent bien constater, congrès après congrès, que l’appareil du parti est de plus en plus ancré dans l’euro-dépendance et la dérive social-démocrate (voire social-libérale, quand on en est à confondre Macron et son projet libéral-fascisant avec un « barrage antifasciste », ou quand on vote Bertrand ou Estrosi au nom du « front républicain » !!!). Or on ne peut construire un parti communiste durable, échappant aux sort de Rifondazione comunista qui, en regroupant des « communistes » de tout acabit, et notamment des trotskistes non repentis, a rapidement éclaté et accru le trouble chez les communistes italiens. C’est donc le but qui doit être clarifié d’emblée et qui doit dicter le « périmètre » de la reconstruction et non le principe opportuniste « tout ce qui rentre fait ventre ». Je passe sur les tentatives d’auto-proclamation de certains groupes, qui se décrètent magiquement LE parti communiste en court-circuitant l’accord des communistes les plus engagés, de la classe ouvrière militante, du Mouvement communiste international : ces tentatives ne produisent hélas, quelle qu’en soit la sincérité, que des diversions et des divisions supplémentaires.

La première question est donc : « que serait un vrai parti communiste dans notre pays » ? Et la réponse n’est pas si difficile à trouver pour ceux qui n’ont pas encore totalement perdu, cassé ou faussé, la boussole du marxisme-léninisme et de l’histoire communiste de notre pays.

Un parti communiste est d’abord un parti de combat de la classe ouvrière et du monde du travail, travaillant à s’ancrer décisivement dans les entreprises, la jeunesse et les quartiers populaires. C’est un parti d’avant-garde qui, travaillant en permanence l’analyse marxiste du mouvement de la société, propose et ajuste sans cesse, en lien avec les luttes, un programme et une stratégie orientée vers le socialisme et le communisme. C’est un parti tourné vers les masses qui ne se contente pas de crier « socialisme, socialisme ! » en attendant le jour J, mais qui prépare les conditions de la révolution en prenant la tête des résistances populaires sur tous les terrains (social, économique, mais auss éducatif, culturel, linguistique, militaire, institutionnel et non institutionnel, etc.). Un parti qui n’oppose pas le but final – la révolution socialiste et la dictature du prolétariat au sens très ouvert et dynamique que Marx donnait à ce mot – au large Front populaire, antifasciste, patriotique et progressiste que la classe ouvrière, aidée par son parti, doit construire pour isoler le grand capital, battre décisivement la réaction et créer les conditions de l’abolition du mode de production capitaliste.

Dans les conditions présentes, cette stratégie ne peut consister ni à attendre messianiquement « la » révolution, en restant le plus isolé possible et en méprisant les tâches démocratiques, pacifiques et patriotiques immédiates, ni à éternellement s’arrimer aux restes du PS sous prétexte de barrage antifasciste (alors que ladite social-démocratie devient de plus en plus un pilier gauche de la fascisation néolibérale, qui nourrit le lepénisme). Cette stratégie révolutionnaire ET rassembleuse moderne consiste à construire, avant tout à partir des luttes, en utilisant toutes les opportunités possibles pourvu que le cap soit tenu, un large rassemblement populaire majoritaire unissant la classe ouvrière au reste des couches non-oligarchiques (non monopolistes comme on disait dans les années 70), non pas « avec » le PS (prétendu « front républicain »), ni derrière la droite (si peu) souverainiste (prétendu « front patriotique de progrès » derrière les prétendus eurosceptiques de droite ou d’extrême droite), les conditions de masse d’une sortie par la gauche de l’euro, de l’UE et de l’OTAN, ces trois piliers modernes de la domination du capital. Comme nous l’avons expliqué mille fois, ce rassemblement ne revient pas à un compromis historique ajournant le socialisme, bien au contraire. A notre époque où l’oligarchie capitaliste et ses appendices beaufs et bobos (du FN/LR au PS/EM) détruisent la nation, seule la classe ouvrière et son parti de combat renaissant peuvent conduire jusqu’au bout la contre-attaque comme le montre le fait que le nationalisme bourgeois (Dupont-Aignan, FN...), mais aussi les forces dirigées par la petite bourgeoisie et par l’aristocratie ouvrière embourgeoisée, refusent de sortir de l’UE/euro. Par conséquent la rupture avec l’UE-OTAN ne peut se séparer d’une visée socialiste et très concrètement, elle se traduirait en France par d’intenses affrontements de classes posant la question : « quelle classe doit-elle diriger le pays », sans parler des affrontements de classes qui ne manqueraient pas de nourrir l’Europe des luttes, voire un nouveau Printemps des peuples dans nombre de pays du Sud et de l’Est de l’UE.

Enfin, un vrai parti communiste ose assumer son passé, en faire la critique sur des bases marxistes et sans rien céder à l’ « antisoviétisme de confort », pour parler comme notre camarade Annie Lacroix-Riz qui combat au quotidien cet obstacle idéologique central à la renaissance communiste. On ne construit pas l’avenir en reniant son passé et son présent tels qu’ils sont, contradictions incluses, et c’est pourquoi il est vital que dès à présent les communistes français défendent bien plus fortement leurs homologues ukrainiens ou polonais persécutés, qu’ils défendent haut et fort la Révolution cubaine, qu’ils se réclament ensemble de Robespierre, de Babeuf, de la Commune et de Thorez-Duclos-Frachon (ce qui ne signifie pas perdre tout esprit critique à leur endroit ni à l’égard de quelque grand révolutionnaire passé, présent et à venir !), et qu’en même temps, comme dirait l’autre, ils réfléchissent ensemble aux FORMES inévitablement neuves que pourraient prendre en France le socialisme, le pouvoir populaire de l’avenir une fois que le peuple travailleur se serait rendu maître du pouvoir d’Etat et des secteurs-clés de l’économie.

C’est de ces contenus, acceptables pour tout vrai communiste (pour tous ceux en clair, qui ne pactisent pas peu ou prou avec le trotskisme ou avec la mutation) qu’il faut partir pour construire du solide et non pas d’une approche quantitative de type « auberge espagnole » où l’on met ensemble des gens qui se réfèrent superficiellement au mot « communiste » pour, au final, produire une version miniaturisée et rabougrie du PCF mutant.

Bien entendu, il faut aussi un solide ancrage dans le mouvement pour la renaissance du syndicalisme de classe et de masse, ce qui interdit de ménager plus que de raison les états-majors syndicaux euro-formatés qui veulent contenir les luttes dans ce qui est compatible avec les tabous de la C.E.S.

Dans les faits, la renaissance du Parti communiste s’opèrera quand, sous des formes encore quelque peu imprévisibles, les vrais communistes, membres ou pas du PCF, se regrouperont, d’abord dans l’unité d’action en continu, puis dans la même organisation SEPAREMENT des dirigeants et de l’appareil muté du PCF. Nous n’avons aucune objection notamment à ce que nos camarades oppositionnels marxistes à l’intérieur du PCF mènent encore une lutte interne lors du prochain congrès pour renverser la vapeur, croient-ils, dans ce part terriblement dégénéré (hélas, car pour ce qui est des fondateurs du PRCF, ils ont donné à ce parti le meilleur d’eux-mêmes durant des décennies). Nous pouvons même les aider dans cette offensive s’ils nous le demandent, ne serait-ce que pour faire honnêtement, expérimentalement et ENSEMBLE, le test de ce qui est encore possible de ce côté-là (bien que nous ayons nous-mêmes tout tenté dans les années 80/2000 pour rétablir la situation « de l’intérieur », et l’encéphalogramme du Parti était alors idéologiquement bien moins plat qu’aujourd’hui !). Mais ils doivent clairement, par souci d’efficacité, s’unir dans l’action aux communistes organisés à l’extérieur, dont le PRCF est un axe incontournable et hautement respectable de par son histoire, sa légitimité résistante, ses initiatives, son ancrage international, son travail syndical, sa prospection théorique inlassable. Et les pires choses, comme les meilleures ayant une fin, il serait sage de se dire que si, comme on peut le craindre, les mutants et assimilés restent aux commandes du « parti du commun » ou du PCF-PGE maintenu à l’issue d’un prochain congrès, il sera temps, comme disait Lénine, de « mettre une chemise neuve » et de construire ensemble le vrai parti communiste français sans lequel notre pays sera broyé entre fascisation, guerres impérialistes à répétition et euro-dissolution macronienne. A quoi servirait en effet de reconquérir « du dedans » et dans quinze un PCF totalement essoré et alors même qu’entretemps, le pays aurait été totalement détruit ? Ceux qui l’auraient fait seraient alors semblables à des joueurs de poker sortant tout nus d’une partie en s’exclamant joyeusement « j’ai sauvé mes as » !

En attendant, le PRCF compte sur lui-même et sur tous les communistes qui veulent agir sans retard pour les quatre sorties. A la fête de l’Huma, le 4 novembre, nous serons nombreux pour affirmer que le combat d’Octobre continue dans des formes nouvelles, qu’il faut reconstruire un grand parti communiste et que le meilleur moyen d’investir sur une force solide et claire pour avancer dans ce sens, c’est de rejoindre le PRCF et ses JRCF en plein développement.

I.C. : journée d’action CGT contre la nouvelle loi Travail, actions estivales du « Front social », manif annoncée de la France insoumise, cette multiplicité de ripostes est vécue par certains comme un facteur de division. Comment unifier les résistances ?

Georges Gastaud : ce n’est pas un secret que le PRCF a depuis longtemps, dès l’époque de la FNARC et les manifs de 2003, popularisé les slogan « tous ensemble et en même temps » ; l’idéal serait évidemment qu’il n’y eût qu’une riposte unifiée et déterminée unissant tout le monde contre ce que nous nommons les OGM² (Ordonnances Gattaz-Macron-Merkel). Mais étant donné que les luttes nationales récentes n’ont pas obtenu la victoire et que trop souvent, les directions syndicales se sont enlisées dans un dialogue social bidon, qu’elles ont soigneusement « oublié » de dénoncer l’UE derrière la loi El Khomri, qu’elle ont plus ergoté sur la grève générale que construit le rapport des forces indispensable, on peut aussi comprendre que, malgré la combativité héroïque des bases rouges CGT qui ont multiplié les blocages, d’autres mouvements plus ou moins bien orientés, des Nuits debout aux manifs insoumises en passant par le Front social, aient émergé : c’est inévitable et il faut partir de l’existant au lieu de céder à l’imprécation. Oui, il faut travailler à la convergence des luttes à partir de l’existant. C’est pourquoi au lieu de fulminer contre les manifs « insoumises », pour autant qu’elles ciblent clairement les projets Macron, de diaboliser le « front social », pour autant qu’il n’oublie pas de cibler l’Europe, ou de déconsidérer la CGT – qui reste faut-il le dire, l’outil principal du mouvement ouvrier de lutte – , le travail des vrais communistes est d’être présent partout, non pour se faire mousser, mais pour porter la stratégie des quatre sorties, rappeler aux travailleurs le contenu des circulaires européennes brisant le marché du travail et les acquis de 45, associer le drapeau rouge au drapeau tricolore, bref, créer « en bas » les conditions du Front antifasciste, populaire, patriotique et écologique qui est potentiellement majoritaire, voire très majoritaire dans notre pays (pensons au Non trahi de mai 2005). Au final, loin de désespérer, le mouvement ouvrier de lutte dispose de vrais moyens d’intervention pour peu qu’il sache montrer la même combativité à l’encontre des orientations défaitistes dans ses propres rangs que le magnifique élan qui a marqué il y a peu la lutte contre la loi Travail n°1.

Bref, les Macron passeront, plus vite encore peut-être que les météores Sarko et Hollande, mais « il y a en France un noyau révolutionnaire irréductible », comme disait Marcel Paul. Et Duclos-Thorez avaient prévenu les Kollabos de l’époque dès le 10 juillet 1941 : « jamais un grand peuple comme le nôtre ne sera un peuple d’esclaves ». Alors construisons, organisons, militons, dialoguons car, disait aussi Georges Dimitrov, « les contre-révolutions sont des parenthèses historiques, l’avenir est aux révolutionnaires ».

Comprendre cela pour orienter l’action reste la meilleure manière de commémorer de manière combative, dans la France telle qu’elle est, le 100ème anniversaire du grand Octobre rouge qui coïncidera avec le 50ème anniversaire de l’assassinat du Che (1967) et qui permettra aussi de revisiter toute l’actualité dialectique du mot d’ordre de Fidel « socialismo o muerte, patria o morir, venceremos ! ».

Georges GASTAUD

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