Si « l’axe du mal » existe [sa paternité revient à l’ancien président étasunien, George W. Bush, accusant l’Irak, l’Iran et la Corée du Nord] c’est le fait de puissances dominatrices. Elles ont besoin d’abcès de fixation ou, dit autrement, de foyers de basse et de moyenne tension, pour détourner les peuples de leurs véritables nécessités [le développement, la sécurité, le bien-être sociétal].
Pendant que des peuples s’entre-tuent, demeurant en état de sous-développement, le complexe militaro-industriel occidental tourne, lui, à plein régime. De fait, de 60% à 70% des armes détenues par les « jihadistes » proviennent des arsenaux occidentaux, étasuniens en particulier. Ainsi, l’impérialisme gagne sur tous les plans. De la sorte, tout en incitant à la guerre, l’Occident déplore, dans le même temps, les détresses humanitaires que causeraient, selon lui, non pas les guerres qu’il suscite, mais les régimes qu’il combat par jihadistes interposés. Ce qui est le cas de la Syrie qui voit son peuple quasiment chassé par des terroristes qui « font du bon boulot », dixit l’ancien responsable de la diplomatie française, Laurent Fabius, à propos de Jebhat al-Nosra (la branche syrienne d’Al Qaîda).
« L’humanitaire », voici une denrée qui se vend bien, il suffit de savoir comment l’emballer. A ce titre, les Etats-Unis forts en rhétorique quant aux atteintes au droit humain par les autres, sont ceux qui ont refusé de ratifier les protocoles d’accord à orientation humanitaire, démocratique, sécuritaire ou écologique tels que les conventions sur les droits de l’enfant, les armes à sous-munitions, la Cour pénale internationale, le protocole de Kyoto sur le changement climatique, pour ne citer que quelques-un des documents appelant à une meilleure cohabitation humaine dans le monde. C’est l’injonction du puissant : faites ce que je dis, ne faites pas ce que je fais. Ainsi, tous les malheurs du peuple syrien sont donc imputés au président Bachar al-Assad. Certes, le personnage est peu sympathique, mais ni plus ni moins que George W. Bush, ou Nicolas Sarkozy hier, Barack Obama ou François Hollande, aujourd’hui, de même que le criminel israélien, Benjamin Netanyahou. En effet, s’il y avait réellement une justice dans ce monde, la place de tous ces personnages serait sur les bancs d’accusés pour crimes contre l’humanité, crimes de guerre, voire de génocide.
Nous n’en sommes pas là. En revanche, si la situation en est là, marquée notamment par la tragédie du peuple syrien, c’est bien du fait des grandes puissances, les Etats-Unis à leur tête qui ont créé les phalanges jihadistes dans les années 1980 en Afghanistan. Al Qaîda est toujours là, renforcée par ledit « Etat islamique » qui, par un singulier retournement de la conjoncture, sert plus les intérêts étasuniens et occidentaux que ceux qu’il prétend secourir. Cela nous remet en mémoire l’éphémère apparition, au début de ce troisième millénaire, d’un mouvement jihadiste qui s’était autoproclamé « Moudjahidin sans frontières », une sorte d’ONG du crime. A bien y réfléchir, c’est exactement ce qu’est ledit « Daesh » [l’autoproclamé « Etat islamique »] une organisation dont les membres, de 80 nationalités, viennent autant des pays musulmans qu’occidentaux.
Dans la tragédie syrienne, les Etats-Unis, la France, la Grande-Bretagne, la Turquie, l’Arabie saoudite et le Qatar, ont joué uniment le rôle d’apprentis sorciers, qui n’ont même pas eu le courage politique d’assumer leur responsabilité dans la dislocation de la Syrie. Bien au contraire, ils pointent encore du doigt Damas et la Russie dont l’aviation, disent-ils, bombarde les écoles et les hôpitaux. Air connu, plus le mensonge est gros, « plus il a des chances d’être admis ». Ainsi, les méchants Russes tuent les malades et les enfants, alors que les bons Occidentaux ne font que leur devoir en frappant la Syrie. C’est le cas de Laurent Fabius qui dénonçait récemment Moscou et Téhéran, « exigeant » l’arrêt des bombardements en Syrie où, selon lui, le régime et son allié russe « mènent une offensive sanglante dans le nord ». Bien sûr, la France qui poursuit ses « frappes » en Syrie, ne cible que certains terroristes, en épargnant d’autres qui « font du bon boulot ».
Il y a deux conceptions du monde, irréconciliables, qui se heurtent de plein fouet. Ainsi, la courte parenthèse d’un monde unipolaire dominé par les Etats-Unis a-t-elle pris fin. Le retour de la Russie aux affaires, remet les choses à l’endroit et fait réapparaître la bipolarité mondiale. Ce que les Etats-Unis n’ont jamais accepté, d’où la multiplication des guerres locales et régionales, largement suscitées par Washington. Ce qui a fait dire au chef de la diplomatie russe, Sergueï Lavrov, que le monde revient à la « Guerre froide ». C’est patent, l’échec du monde unipolaire voulu par les Etats-Unis, fait revenir le monde à sa situation antérieure. Ce sont ces puissances impériales qui, pour assouvir leur hégémonie, jouent avec la sécurité du monde.
18 Fevrier 2016