Socrates Brasileiro

Socrates Brasileiro Sampaio de Sousa Vieira de Oliveira vient de nous quitter à l’âge de 58 ans. Socrates était un talentueux et élégant joueur de football. Il était également médecin diplômé de la prestigieuse faculté de San Paulo. Mais il était avant tout un militant. Jusqu’à sa mort, il n’a jamais renié ses convictions progressistes. Il a toujours dénoncé le « foot-business » et l’utilisation par la classe dominante de ce sport populaire pour servir ses intérêts économiques et idéologiques.

Contrairement à la plupart des footballeurs brésiliens, Socrates n’a pas courbé l’échine face à la dictature militaire (1964-1985) qui sévissait au Brésil. Bien au contraire, en utilisant son talent de grand joueur, il a fondé au sein de son équipe Corinthians de San Paolo la « Démocratie Corinthiane ». Ce système qui permettait aux joueurs de prendre totalement en charge le destin de leur club, était une expérience audacieuse comparativement à la gestion en vigueur dans tous les autres clubs du monde basée uniquement et strictement sur la réalisation du profit. C’était également une manière de dénoncer le contrôle et la mainmise de la dictature non seulement sur le football, sport populaire par excellence au Brésil, mais aussi sur tout un peuple. Ce fait unique dans l’histoire récente du football, dominée par la corruption, le dopage et les scandales en tout genre, était un acte politique courageux, d’autant plus que cette terrible dictature, soutenue par les États-Unis, ne tolérait aucune contestation aussi symbolique soit-elle.
Socrates et ses camarades transformaient les stades en lieux de contestation de la dictature. Nulle publicité idiote payée par telle ou telle marque sur leurs maillots, mais seulement des slogans politiques contre la junte militaire.
S’il est difficile de déterminer la part de cette équipe courageuse dans le renversement de la dictature, on peut néanmoins dire qu’elle y a largement contribué en utilisant la magie du football.
« Quand Lula est arrivé au pouvoir, il y a eu une liste de "ministrables’ qui a circulé, et j’étais dedans, mais j’ai pris les devants, et j’ai dit "non’. Je ne crois pas trop à la politique institutionnelle »(1) confessait Socrates. Il avait une autre conception du combat politique.

Puisse le combat de Socrates servir d’exemple aux nouvelles générations de sportifs pour débarrasser le sport non pas d’ une quelconque dictature militaire, mais d’une autre dictature beaucoup plus dangereuse, celle de l’argent.

Mohamed Belaali


(1) http://www.sofoot.com/la-mort-de-socrates-150501.html

COMMENTAIRES  

06/12/2011 00:15 par babelouest

Je ne connais rien au football, à ses stars plus orgueilleuses qu’efficaces, comme à ses vrais héros. Je découvre donc ce Monsieur, et je lui tire mon chapeau bien bas. Mais pas longtemps, car les humains se doivent d’être debout face à ceux qui veulent les courber sous le joug de l’argent et du profit.

06/12/2011 12:37 par Eric

Bonjour
Socrates faisait partie de l’équipe géniale brésilienne de Télé Santana (1982-1986) et du quatuor magique virovoltant avec Falcao, Zico et Cerezo. Rarement une équipe de football ne m’aura autant enthousiasmé. Du football samba , pétillant, étourdissant de maestria technique avec comme chez chef d’orchestre El Doctor Socrates ce joueur hors norme. peu importe que cette équipe là n’ait jamais été championne du monde, c’est elle qui reste dans mon coeur. Respect pour l’homme et pour ses engagements. Bravo l’artiste et bon vent

Eric Colonna

06/12/2011 16:18 par Bob

Bel hommage à un homme formidable !
Quant aux jeunes génération de sportifs, je ne leur fais vraiment pas confiance : elles n’ont aucun esprit critique. Leur silence et parfois leur lâcheté sont achetés à prix d’or. Leur conscience politique est tout simplement inexistante !
Les rares militants dans le domaine du sport sont vite repérés et marginalisés.

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