
Imaginons un instant qu’un département hexagonal, ou même la Corse, soit recouvert d’une pluie de cendres, que les écoles et les aéroports soient fermés, les avions détournés, toute la population exposée à des troubles respiratoires graves. Quelle mobilisation ce serait dans les médias ! Seulement, ce n’est pas l’hexagone qui est touché, ce n’est que la Guadeloupe. Et là , franchement, les Français s’en fichent éperdument. Sauf peut-être ceux qui avaient prévu d’y aller passer quelques jours de vacances. Non, les Guadeloupéens ne ressemblent pas assez aux Français de l’hexagone pour que les Français de l’hexagone s’émeuvent de ce qui se passe en Guadeloupe. S’il s’y produisait un tremblement de terre comparable à celui qui a frappé Haïti, on ferait peut être un effort. Mais une pluie de cendres, ce n’est rien. A Paris, on en a assez, en cet hiver glacial, de plaindre ces nègres paresseux qui bullent au soleil en profitant de l’argent que la métropole leur envoie. Demandez plutôt à Alain Finkielkraut ou à Georges Frêche qui, eux, disent franchement ce pense la France raciste. Les nègres ceci, les nègres cela. Ils ne sont jamais contents. Comme dirait un béké de la Guadeloupe, ils n’ont qu’à retourner en Afrique voir si c’est mieux. Il m’arrive de recevoir des messages de cet acabit, truffés d’insultes.
Le volcan de Montserrat s’est réveillé, projetant des poussières dangereuses à 10 000 mètres d’altitude. Ce nuage est retombé sur la Guadeloupe, empêchant les avions d’atterrir, obligeant les habitants à se terrer chez eux. Les écoles sont fermées. Les villes sont désertes. Le ciel est plombé. La préfecture précise que les poussières sont assez coupantes pour rayer les pare-brise des voitures. On peut imaginer ce que cela peut donner dans les poumons. Nulle compassion pourtant en France. La France se fout de la Guadeloupe. Les Français ont mieux à faire. Ils vont aller au cinéma ce week-end voir Gérard Depardieu choucrouté jouant le rôle d’un Alexandre Dumas incapable d’écrire une ligne. Tous les journalistes qui avaient accepté d’aller s’empiffrer aux cocktails organisés par la production ont crié au chef-d’oeuvre. Ils sont contents d’eux. Leur salaire tombera à la fin du mois.
Seul Benoît Poelvoorde, ayant pris conscience qu’il a participé à un film ignoble, annonce qu’il va arrêter le cinéma. C’est certainement excessif. Poelvoorde a du talent. Il oubliera ce navet. Nous aussi, nous tâcherons de l’oublier. Les cendres se disperseront et le soleil brillera de nouveau.
Claude Ribbe
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