Usurpant le nom de Jean Jaurès (inspirateur entre autres de la loi laïque de 1905 qui garantit la liberté de conscience) un cercle idéologique proche de François Hollande prône des mesures restrictives de la liberté d’expression à l’encontre de tous ceux qui mettent en doute – à tort ou à raison, là n’est pas la question à ce stade de l’analyse – les « versions officielles » ou présentées comme telles de divers évènements ou phénomènes sociopolitiques (attentats de New-York, catastrophe aérienne en Ukraine, causes anthropiques du réchauffement climatique, liens entre telle loi giscardienne et l’envol de la dette française, etc.). Ainsi, les grands « défenseurs de la tolérance » qui, il y a peu, sommaient la population française, bambins de maternelle inclus, d’ « être Charlie » et de l’afficher UNANIMEMENT, appellent aujourd’hui à fliquer la Toile, l’école, les médias et les réseaux sociaux sous couvert de combattre le « négationnisme », une notion de plus en plus floue dont l’extension démesurée tend à banaliser le génocide hitlérien justement visé par la loi Gayssot... Ajoutons que ces attaques liberticides sont d’autant plus perverses qu’elles sont menées au nom du pluralisme, de la liberté d’expression, de l’ « antitotalitarisme », etc.
Le PRCF rejette le « conspirationnisme », cette méthodologie simpliste, illusoire et dangereuse qui fait le jeu de l’antimarxisme dominant en cachant le fait décisif, que « la lutte des classes est le moteur de l’histoire » (Marx). Quant complot il y a dans l’histoire – par ex. quand Göring fait incendier le Reichstag pour réprimer le PC allemand, criminaliser l’Internationale communiste et interdire toute opposition politique en Allemagne – c’est généralement comme un élément subordonné de la lutte des classes, en l’occurrence, de la lutte menée par les trusts allemands contre les militants du prolétariat. Il n’en reste pas moins que le complot n’est pas le moteur de l’histoire, dont les ressorts profonds, à notre époque plus qu’à toute autre, restent les contradictions systémiques objectives du capitalisme.
Il n’en reste pas moins que l’on doit pouvoir débattre librement sur la Toile et ailleurs, argument contre argument, et que toute tentative des gouvernements euro-atlantiques – dont le gouvernement Valls est un représentant caricatural – pour réprimer légalement telle ou telle OPINION ne peut qu’avoir des effets liberticides ravageurs... sans faire reculer d’un pouce, bien au contraire, la paranoïa dont se nourrissent les « conspis » avérés. Comme ceux-ci trouveront à coup sûr mille autres canaux détournés pour exprimer leurs fantasmes – chose que les animateurs de la pseudo-Fondation jaurésienne savent autant que nous – qui donc sera réellement visé sur la Toile, à l’école ou ailleurs ? Il est aisé de le deviner : très vite, l’argument malhonnête du négationnisme – un mot qui, répétons-le, doit être réservé aux antisémites et autres néonazis qui nient le génocide hitlérien – servira très vite à frapper les communistes fidèles à leur histoire qui refusent que l’on mette odieusement sur le même plan le Troisième Reich et l’URSS de Stalingrad, qui a joué le rôle principal dans la victoire des peuples sur Hitler : de ce côté, les choses sont déjà en marche puisque le Conseil de l’Europe a adopté le rapport Lindblad qui criminalise l’URSS et le communisme historique, qu’un commissaire européen de nationalité italienne militait encore il y a peu pour interdire l’emblème ouvrier et paysan en Europe, que nombre de P.C. sont persécutés à l’Est avec la bénédiction de l’UE, des pays baltes à l’Ukraine en passant par la Tchéquie, la Pologne, la Hongrie, etc. Notons au passage que la fausse symétrie entre les partis fascistes et les partis communistes, lesquels ont toujours été les plus intraitables ennemis des premiers, ne résiste pas à l’analyse ; à Kiev par ex., l’UE-OTAN soutient un gouvernement pronazi qui lynche les communistes et les syndicalistes, et qui encourage à nier les crimes de Bandera et des hitlériens sur le sol soviétique en les présentant comme des « libérateurs ».
Mise en route de la machine à social-fasciser :
Mais ce ne sont pas seulement les communistes qui seront ciblés une fois qu’aura été mise en marche la machine à bâillonner et à fasciser – et en l’occurrence, à social-fasciser – la Toile, l’école, les réseaux et les médias. Les syndicalistes tant soit peu combatifs auraient très vite du souci à se faire : déjà, des milieux patronaux expriment l’idée qu’accuser la classe capitaliste d’être à l’origine de la misère et du chômage de masse, cela relèverait du « racisme de classe » (sic), voire du « conspirationnisme » (car bien entendu, le grand capital mondial ne se concerte pas régulièrement à Davos et dans mille autre lieux pour mener sa guerre de classe contre le camp du travail*...). De même les citoyens « eurocritiques », qui sont devenus largement majoritaires en Europe si l’on regarde les chiffres réjouissants de l’abstention aux européennes ou les résultats des référendums portant sur la « construction » européenne, peuvent se faire du souci : le gouvernement « grec » Samaras n’a-t-il pas engagé un processus législatif visant à interdire tout parti qui appellerait à retirer la Grèce de l’UE et de l’euro ?
Ouvrir les yeux sur la fascisation
Décidément, il est temps d’ouvrir les yeux dans tout le camp progressiste sur la fascisation en cours qui ne se limite nullement à la lepénisation. Comme l’a expliqué Dimitrov au 7ème congrès de l’Internationale communiste (1935), la fascisation est le processus qui pourrit en profondeur la démocratie bourgeoise quand la classe capitaliste, confrontée à une crise durable et dénuée de remède intrasystémique, cherche par tous les moyens à refouler les résistances populaires. Non seulement les restrictions aux libertés et la mise en place d’un Etat policier auxquelles travaillent inlassablement les Valls, Cazeneuve et autres continuateurs de Sarkozy, ne permettent pas de combattre l’ultra-droite**, mais elles ouvrent un boulevard aux fascistes pour leur permettre d’abattre, le jour venu, ce qui restera alors de la démocratie bourgeoise de plus en plus étriquée, antisyndicale, xénophobe et hostile à toute véritable souveraineté populaire et nationale.
Combattre les conspirationnistes, refuser toute mesure liberticide
C’est pourquoi, tout en combattant sans compromis, sur le fond comme sur la forme, l’idéologie complotiste foncièrement idéaliste*** et antimarxiste, les militants franchement communistes refusent toute mesure liberticide des idéologues et des gouvernants euro-atlantiques, social-démocratie incluse, qui prennent prétexte de l’anticonspirationnisme pour fliquer le peuple, les intellectuels et la jeunesse... tout en donnant encore plus de grain à moudre à la paranoïa dangereuse des « conspis ».
Georges Gastaud, Antoine Manessis
*ce que reconnaissent cyniquement les capitalistes les plus cyniques : « Il y a une guerre des classes et c’est ma classe, celle des riches, qui est en train de la gagner », déclare ainsi le milliardaire américain Warren Buffett.
**Le discours grossièrement politicien du PS contre le FN est en réalité prétexte à une main tendue permanente des socialistes à l’UMP, laquelle n’en lorgne que davantage vers l’UM’ Pen.
*** philosophiquement, l’idéalisme historique est l’illusion qui consiste à croire que « les idées menant l’histoire », des cercles de penseurs bien placés dirigent consciemment l’histoire indépendamment des structures objectives de la société.