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Nouvelle victoire populaire au Vénézuéla :

Libération se verrait bien désinformer ses lecteurs à vie.

Une photo de Reuters montre un Chavez solitaire émergeant, narquois, de son château-fort. Le titre : "Chavez se verrait bien en président à vie". Les intertitres : "caudillo" et "insécurité". Les témoins parlent de "caudillisme" . La révolution bolivarienne est un "castrisme new-look" . Voilà ce que Libération offre à ses lecteurs, le 14 février 2009, en guise d’information préalable sur le nouveau scrutin que vient de remporter le peuple bolivarien avec une marge éclatante de dix pour cent, au bout de dix ans de révolution (1).

En 2006 ce journal inventait déjà de toutes pièces l’antisémitisme de Chavez au moyen d’un truquage de texte décrypté en détail par l’association Acrimed (2). Cette fois un certain Gérard Thomas met en doute la victoire populaire au référendum de ce dimanche 15 février au motif qu’une "puissante" "union bolivarienne des étudiants" aurait décidé d’appuyer le "non" de droite. Le problème pour G. Thomas c’est que nul n’a jamais vu l’organisation dont il parle. Les médias d’opposition vénézuéliens où il puise ses informations (l’opposition détient la majorité des titres de presse, web et 80 % du spectre radio et Tv) sont passé maîtres dans la manipulation mondiale et dans la récupération du label "bolivarien" pour fabriquer des clones virtuels destinés à semer la confusion parmi les électeurs. Le principal mouvement étudiant au Venezuela, le vrai, s’appelle "fédération bolivarienne des étudiants" . Née il y a six ans de l’explosion des missions éducatives et de la création de l’université bolivarienne sur l’ensemble du territoire, cette fédération représente des millions de jeunes qui ont défendu hier dans les urnes la poursuite de la démocratisation d’une université jusqu’ici réservée aux classes supérieures. Les étudiants des universités privées, minoritaires mais ultramédiatisés, n’ont cessé de manifester leur refus raciste de partager l’éducation supérieure avec quelques millions de nouveaux condisciples de milieu populaire. La victoire populaire de dimanche signe leur défaite autant que celle des grands médias.

Gérard Thomas qualifie la démocratie venezuelienne de "castrisme new look" ? Une seconde, permettez. Après dix ans de révolution le Venezuela compte une quarantaine de partis politiques, de l’extrême-droite à l’extrême-gauche. La grande majorité des medias appartient à l’opposition. L’ONG chilienne indépendante Latinobarometro (3) qui sonde tout le continent vient de classer le Venezuela avec un score de 80% sur l’échelle de la conscience démocratique en Amérique Latine. Le président Lula a souligné récemment que Hugo Chavez est sans doute le plus légitime des présidents latino-américains, vu le nombre d’élections et de référendums organisés sous sa présidence, et qu’il ne voyait que démocratie dans le référendum de dimanche puisque c’est le peuple qui tranche. Rafael Correa, depuis l’Equateur, demande qu’on cesse de donner des lecons à la démocratie vénézuélienne et les Présidents de la Bolivie et du Paraguay, Evo et Lugo ont souhaité bonne chance au Président Chavez quelques heures avant les élections. Si tous ses collègues latinoaméricains le saluent ainsi, c’est aussi parce qu’ils reconnaissent que si aujourdhui l'ìntégration latinoaméricaine avance à  grand pas avec des initiatives comme la UNASUR , lALBA ou la Banque du Sud cest en grande partie grace a la diplomatie vénézuélienne que Thomas qualifie d« erratique » sous prétexte que le Venezuela aurait rompu ses relations avec Israël par solidarité avec le peuple palestinien et entretienne de bonnes relations avec lIran comme avec tous les grand pays du Sud de la Chine au Viet Nam, de l'Afrique du Sud a la Malaisie : ce sud que des médias comme Libé se refusent de voir. Pourquoi faut-il que Libération continue à  cacher à  ses lecteurs que la possibilité de rendre reéligibles tous les élus sans limite permet simplement de multiplier l'offre démocratique des candidats ? Que cela existe déjà  dans la plupart des démocraties ? Qu'en France c'est Nicolas Sarkozy qui a fait supprimer cette possibilité de se présenter plus de deux fois à  la présidence (sans doute traumatisé par l'hypothèse d'un troisième mandat de Chirac - lequel aurait pu, peut-être, empêcher la France de retomber sous la coupe de l'OTAN). Pourquoi cacher qu'au Venezuela les observateurs internationaux ont jugé transparents, démocratiques toutes les élections, tous les référendums ( quinze en dix ans alors quentre 1959 et 1998 n`ont eu lieu que 12 elections ans ), saluant un systeme electoral des plus fiables au monde ?

Au fond ce que craint Libération c’est que la politique puisse encore passer par des projets à long terme, portés par de grands hommes d’État, comme de Gaulle a pu l’incarner à une époque. Pour Libération la démocratie consiste a renouveler rapidement les présidents comme les produits frais au marché. Quelle importance comme le soulignait encore recémment une étude de la CEPAL si la pauvreté a baissé de 20 % et que l’inégalité sociale ne cesse de se résorber, si la santé publique gratuite sauve des millions de vies, s’il y a encore tant à faire du point de vue de la majorité sociale pour sortir à jamais de la misère et construire l’égalité totale des droits ? Quelle importance si les vénézuéliens, contrairement aux francais, ont déjà conquis le droit de monter légalement des médias alternatifs de radio et télévision, d’y user d’une pleine liberté de parole, ou le droit de décider des politiques locales et de les évaluer à travers des milliers de conseils communaux ? Gérard Thomas fait dire à un "habitant de Caracas" que ce ne sont là que "promesses non tenues d’année en année".

Libération est passée de Sartre à Rothschild, sans sortir des règlements de compte des années 80, rivée au dogme selon lequel toute révolution mène au stalinisme. En fondant le journal Sartre avait prévenu : "Le droit a l’information n’est pas, comme on le croit à tort, un droit du journaliste mais le droit du peuple de savoir ce qui se passe. Le rôle du journaliste, en somme, est de permettre au peuple de discuter avec le peuple" .

Maximilien Arvelaiz et Thierry Deronne

Caracas, le 15 février 2009

Notes :

1. http://www.liberation.fr/monde/0101319404-ch-vez-se-verrait-bien-president-a-vie

2. Sur le journalisme d’imputation pratiqué par Libération contre Hugo Chavez : http://www.acrimed.org/rubrique355.html

3. Voir http://www.latinobarometro.org/

4. Tous les résultats des scrutins au Venezuela sont disponibles sur le site du conseil électoral : http://www.cne.gob.ve/

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COMMENTAIRES  

16/02/2009 22:34 par Lapige

Boaf, la désinformation a de plus en plus de mal à passer.
Y’a un article aussi sur Rue89.
Sur les deux, les réactions majoritaires des lecteurs remettent bien en place la rédaction des deux journaux.
Encore que celui de Rue89 soit nettement moins à charge, sauf le titre qui laisse penser à une dérive dictatoriale de Chavez, pour l’essentiel.
A propose de Rue89, ils ont sorti récemment un sois-disant dossier sur le 11 Septembre et le "phénomène conspirationniste", qui a été une véritable bérésina pour eux, tant les lecteurs les ont allumés grave et ont mis en lumière les amalgames, contre-vérités, omissions, mensonges et manipulations diverses et variées dont leurs articles étaient farcis.

16/02/2009 23:12 par Eric

Rue89, ils ont toujours écrit des articles à charge contre Chavez et le Vénézuela et pour cause :
Pierre Haski qui a monté Rue89 est celui qui a écrit l’article sur le présummé antisémitisme de Chavez en janvier 2006 qui n’était qu’une grossière manipulation.

17/02/2009 01:35 par Braillet Line

En croyant ce que lui dit tous les matins Alexandre Adler a la radio a propos de Chavez, la gauche finit par s’isoler des peuples en lutte et scie la branche sur laquelle elle est assise. Cette peur maladive qui regne en France depuis vingt, trente ans ! de croire qu’appuyer une revolution c’est etre un stalinien en puissance se paye cher en désespoir et en incapacité d’agir...

17/02/2009 04:19 par Chevalier Jedi

Oui, c’est vrai, le peuple Venezuelien vient de recuperer une liberte democratique, a savoir, celle de pouvoir reelire tant de fois qu’il lui plait le meme President, bien sur a condition que celui satisfasse la majorite et les expectatives du peuple.

Le pouvoir appartient au peuple !

Ceci dit Chavez est aussi un acteur fondamentale de l’avancee du Nouvel Ordre Mondial, et plus precisement de la partie gauchiste du Mondialisme. Il n’y a qu’a observer son travail pour une coalition rouge de l’Amerique du Sud en partenariat avec l’Europe et par extention avec l’UNA !

Voir ===>
http://novusordoseclorum.discutforum.com/information-et-conscientisation-f12/l-union-sud-americaineunasurfusion-en-travaux-avec-l-ue-t1300.htm

17/02/2009 09:47 par Vladimir Marciac

A ERIC qui écrit :

Pierre Haski qui a monté Rue89 est celui qui a écrit l’article sur le présummé antisémitisme de Chavez en janvier 2006

Plus exactement, c’est Jean-Hébert Armengaud qui, tronquant une causerie de Chavez en comité restreint un soir de Noël, a réussi, en commentant le moignon de phrase, à conclure dans Libé (où il continue à sévir) que Chavez est antisémite.

Pierre Haski qui était à l’époque un des dirigeants de Libération, l’a soutenu jusqu’au bout alors que les preuves de la manipulations étaient fournies, notamment par Romain Migus, journaliste français en poste à Caracas.

Haski est allé jusqu’à dire que son pote faussaire n’avait pas ajouté "un seul mot" aux propos de Chavez. Pardi, il en avait seulement enlevés !

Pis : Libération s’est emparé d’un texte de Migus paru sur le Net, l’a tronqué et l’a publié en faisant croire que c’était un "courrier des lecteurs".

Il y a quelques jours, Pierre Haski, vertueux, a publié sur son site Rue89 un article dénonçant ceux qui voient des antisémites partout. Il a oublié de rappeler le bidonnage de son pote Armengaud.

A part ça, venu venu le temps où la presse en perte de lecteurs et de crédit moral, envoie des francs-tireurs investir le Net avec des sites d’information qui bénéficient a priori de l’aura des sites alternatifs créés pour pallier leurs carences et dénoncer leur allégeance à la pensée unique.

17/02/2009 18:55 par Anna

Tout à fait d’accord avec le commentaire ci-dessus, concernant le refus de considérer le changement de Président comme Produit Frais, comme Démocratie. Chavez en 1999 était porteur d’un projet, il y a la possibilité de referendum révocatoire, mais la majorité des vénézuéliens lui ont donné crédit à chaque fois, car le projet bolivarien en valait la peine, et qu’il a porté ses fruits (même si je me doute qu’il reste beaucoup à faire).

Il n’y a qu’à regarder la soi-disant alternance en Colombie (Parti Libéral/Parti Conservateur) depuis des décennie, qui n’a jamais rien changé à la calamiteuse gestion sociale du pays, et la faiblesse des partis de gauche (quand ce n’est pas le massacre des militants de Feue-l’Union Patriotique).

La différence entre Chavez et d’autres "présidents à vie" (cf Ben Ali en Tunisie, Bouteflika en Algérie) c’est justement la valité de ce projet bolivarien et la possibilité démocratique révocatoire. Il y a d’autres pétro-états (Russie, Somalie, Monarchies du Golfe amies des USA et d’Israel, etc), mais aucun n’a mené les réformes sociales comparables à celles de Chavez. Pourtant les cancres de Libé et du Monde ne le mentionnent jamais. Je dis ça parce que beaucoup de sociologues minimisent l’impact de Chavez à cause de la "chance pétrolière", mais même s’il bénéficie effectrivement d’une manne, il ne l’utilise pas comme certains émirs.

L’idéal sera la réindustrialisation du Venezuela, et la focalisation sur l’écologie (en parlant du futur du bolivarisme), car effectivement le pétrôle est amené à disparaître. Mais Chavez a besoin de temps, et les reflux de l’opposition sont bien là .

18/02/2009 05:18 par Renèe Gougaud

Le probleme des bobos est que quand la rèvolutionn sort du caracol zapatiste pour arriver au pouvoir, elle cesse aussitot detre "in" et il faut cracher dessus pour garder la puretè du non-pouvoir. Cest lanarchisme des jeunes de classe moyenne a qui papa a payè des ètudes de sciences po. Leur ideologie, cest la non-prise du pouvoir, car mieux vaut etre pur que mettre fin structurellement a la misere. On imagine quelle comedie eut ecrit Moliere sur cette faune aux tee-shirts de Marcos et du Che - si mefiants, si critiques pour ceux qui comme Chavez plongent les mains dans le cambouis pour sortir tout un peuple de la misere. C`est evidemment moins photogenique.

18/02/2009 18:32 par Anonyme

Juste une rectif par rapport à mon message d’hier (ci-dessus) : pour les pétro-états, je voulait dire Soudan au lieu de Somalie.

Parfaitement d’accord avec Renée, la révolution socialiste gène lorsqu’elle n’est pas conduite par des libéraux-déguisés-en socialistes (cf notre pathétique PS en France) ou des sociaux-démocrates comme le sont les gouvernements européens.

Je pense à un autre cas de désinformation massive en France lorsqu’il s’agit d’Amérique latine : le retour des sandisnites au pouvoir au Nicaragua majoritairement perçu comme autoritaire et répressif, avec la même manie de copier-coller les arguments de l’opposition conservatrice.

Ils ont pas de neurones les journaleux de Libé, le Monde ou Charlie Hebdo : Si Chavez a gagné 13 consultations populaires sur 14 depuis 1999, dans des éléctions où aucune fraude n’a été décelée (au contraire de la Colombie, du Guatemala, ou du Perou), ce serait pas parce qu’il y a du bon dans le bolicvarisme ???

01/04/2009 06:24 par mimiotourdumonde

je suis passe au venez il y a quelques mois, et j’ai loge dans ne famille tres pro-chavez. le parti etait donc pris, mais ils temoignaient d’un reel changement depuis que chavez etait au pouvoir, par exemple par rapport au probleme de l’insecurite latente a carcas qui avait fortement diminue.
vous accusez ’’naivement’’ les journalistes qui n’ont que deux neurones, je cite, mais remettons les choses a leur place nous savons tous ce qu’est un bon journaliste : un manipulateur d’opignon publique paye par des monsieurs qui ont interet a faire aller l’opinon dans leur sens.
chavez, son principal defaut a ete de virer le americains d’un pays sur lequel ils avaient emprise depuis 50 ans et de commencer a mettre en place un modele democratique qui rayonne sur toute l’amerque latine, c’est le gouvernement venezuelien par exemple qui payait l’armee de Bolivie (peut etre est-ce encore le cas) au pire de la crise politique qu’evo morales a du gerer, ce qui a permis d’assurer la stabilite sociale dans le pays et d’evitr un coup d’etat appye par une armee qui aurait trouve quelque bienfaiteur au portefeuille allechant.
democratie bolivarienne, revolution bolivarienne
savez vous d’ou vient l’adjectif bolivarienne ? de simon bolivar, un des principaux leaders de l’independence latino americaine.
voila pourquoi chavez se fait pourrir dans les medias, il fait peur a notre forme de "democratie". ce qu’il met en place pourrait en inspirer d’autres, et ca c’est pas fait pour plaire a tout le monde.

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