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Le NON n’ est pas un vote de gauche, c’ est un vote de classe ...

COMMENTAIRES  

07/06/2005 11:56 par imanaccident

Juste un point : s’il y a utilité à "développer l’analyse sur l’offensive que va mener la droite sur "la bataille sur l’emploi", la remise en cause du code du travail, des protections... Et à partir de là faire le lien avec le pacte de stabilité qui vient d’être reconduit, les circulaires qui continuent à se mettre en place...", n’oublions pas une chose : tenir un discours rassembleur sur les menaces précises et techniques que fait peser la droite au pouvoir et les institutions de bruxelles est qd même bien aride.

Il est à mon avis tout aussi important de parler d’espoir et d’essayer de parler de politique autrement.Si effectivement la majorité des gens qui ont voté non l’a fait sans avoir rencontré un militant, alors aller les voir pour leur servir la soupe sur tel projet de loi en corrélation avec telle directive européenne est déplacé. Il faut donc, à mon avis, aller demander à ceux qui sont hors du flux de textes et d’analyses qu’est la politique actuelle quels sont leurs espoirs personnels et quels rapports à la communauté ils ont l’impression d’avoir.

Surtout ne pas essayer de lever les damnés de la terre contre Bruxelles et Villepin avec dans la main ce qui sort de l’assemblée nationale et de la commission européenne, et essayer un peu de parler d’envie et d’espoir. C’est une marque de respect essentielle : le non est aussi un refus de ce langage, de cette politique-là . L’enjeu est maintenant de la dépasser.

08/06/2005 08:00 par paltlk

Bonjour Madame Bleitrach, chers internautes,

J’ai juste une question.
Est ce que les petites greves, et autres manifestations (lyceennes notamment), ici et là , n’ont pas favorisé la propagation des arguments du non ?

Par exemple, lors de ces rassemblements, on en parle, on en debat, parce qu’il y aurait eu, entre autres, des gens "alternativement" informés :).

Les arguments du non l’emportent.
Puis ces arguments (quelquefois, peut etre, simplement le sentiment d’avoir été convaincu par une plaidoirie) sont relayés au sein des sociétés, des familles etc..

Si ça n’explique pas tout, cela n’a t il pas contribué au verdict final ?

Merci de me donner votre avis en meme temps que vous repondez à cet article :)

08/06/2005 11:01 par Anonyme

tout à fait d’accord avec vous, les manifestations lycéennes, la répression policière a joué un rôle essentiel. On peut en tant que parent être désespéré par le désordre, le manque de travail de son bambin, mais voir la police le charger est insupportable. C’est trivial mais c’est comme ça !!! Et je crois que cela a également déclenché le vote des jeunes. Vous avez raison sur les relais sociaux, non militants directement, les familles en particulier mais aussi les collectifs de travail... le tout sur fond de conscience qu’il y avait de l’injustice, que le patron de Carrefour se remplissait les poches, tandis qu’avec l’euro les fins de mois commençaient le 15...
Les petites forces organisées, qu’il s’agisse du PCF, de la LCR ou des socialistes et des verts du NON, ont fait du bon travail. L’humanité a joué un rôle positif et il ne faut pas sousestimer ce qui a commencé à se construire, mais le fond de mon article est que premièrement leur travail a été d’autant plus efficace qu’il arrivait à traduire le rejet populaire, deuxiemement aujourd’hui il faut mesure le travail politique qui reste à faire et ne pas donner dans le triomphalisme, se croire propriétaire de votes, mais au contraire contribuer à démocratiser la vie politique française en collant au plus près des préoccupations, et en évitant de dévoyer ce NOn dans des jeux d’appareils...
Mon texte invite à une réflexion sur la démocratie à partir de la crise profonde des rituels démocratiques du politico-médiatique. Une liberté de la presse qui est devenue celle des propriétaires de presse, des annonceurs... Et qui évite soigneusement les préoccupations populaires... Un pluralisme des partis qui ne présente aucune alternative réelle. Des élections de ce fait devenues des rituels sans enjeu véritable. la destruction systématique de toute les formes collectives en particulier dans les milieux populaires. Une sociabilité spontanée s’est substituée à cette destruction, il faut avant de lui proposer orientations, analyses et surtout alliances politiques de sommet, se donner les moyens d’une véritable démocratisation (par et pour le peuple), d’une écoute, d’un dialogue...
DB

08/06/2005 10:38 par François Delpla

Bonjour !

Je ne vois pas l’intérêt de beaucoup des oppositions tranchées que vous faites : terrain français/terrain européen, mesures concrètes (non précisées d’ailleurs)/principes abstraits, militants/peuple, etc. Et la dialectique, bordel ?

En matière de mesures concrètes, je souhaiterais pour ma part que, dans le cadre du débat sur la renégociation du traité, on clarifiât la question de l’OTAN tout en exigeant de Blair et de Berlusconi l’évacuation de l’Irak (à moins que la gestion n’en soit prestement confiée à l’ONU).

Votre opinion ?

08/06/2005 13:58 par Anonyme

Bonjour,

Je n’ai pas la possibilité de répondre à tous les messages et je
souhaiterais que le débat se développe à partir des
intervenants, parce que la discussion a tout intérêt à être
collective, mais votre réponse manifeste que certains aspects de
mon texte doivent être incompréhensibles, donc je précise.

- En ce qui concerne la dialectique, je pense que nous n’en avons
pas la même définition. La grande différence entre la logique
formelle et la logique dialectique est la suivante : la logique
formelle prend un objet et tente d’en voir les aspects, elle les
additionne. La logique dialectique tente de prendre tous les
aspects de l’objet, mais elle cherche d’abord le mouvement de
l’objet, ce qui va déterminer son processus de transformation,
donc elle va essayer de mettre à jour les contradictions et
l’aspect principal qui permet d’engendrer un mouvement.

- Ceci étant posé, loin de séparer l’Europe de la France,
j’explique que le vote manifeste à partir du vécu (par exemple
l’euro et la baisse du pouvoir d’achat, la perte d’emploi, le
chômage et les délocalisations, mais aussi le caractère
irreversible des décisions, l’opacité) , il se crée une
identification entre l’Europe et la crise politico-économique,
le déficit démocratique. Donc a contrario de tous ceux qui
tentent de distinguer Europe et France et qui interprétent le
rejet comme un simple rejet de la droite, ou inventent une
Europe abstraite, idéale, le rejet est celui d’une politique et
d’une absence de démocratie, d’une possibilité pour les
individus de maîtriser leur vécu dans ce contexte
politico-médiatique.

- Mais si, comme je tente de l’analyser, la réponse patronale et
celle de la droite, est bien d’accélérer leur politique, de
détruire encore un peu plus les protections sociales, le code du
travail, d’accentuer une politique répressive qui sous couvert
de sécurité s’attaquera de plus en plus aux résistances
sociales, comme on le voit aux États-Unis avec le patriot Act,
ou avec la politique d’Aznar... Quel est le lieu de plus grande
résistance, celui localisé, au plus près des préoccupations
populaires. Et c’est seulement à partir de là que l’on pourra
aborder d’autres mécanismes similaires, l’Europe, mais aussi la
situation internationale, la paix et la guerre. Donnez moi un
levier et un point d’appui et je soulève le monde, je cherche le
point d’appui...

- Je tente également de montrer tout aussi dialectiquement que si
le camp du non tel qu’il est ne peut pas s’attribuer le vote
NON, il y a l’amorce d’une recomposition. Si je dénonce le
tromphalisme, ce n’est pas pour me plaindre de ce qui a réussi à 
surgir, il faut au contraire tabler dessus. Mais si l’on veut
aller plus loin il faut chercher le levier est le point d’appui.
Pour moi il s’agit de créer l’unité de classe entre diplômés,
non diplômés, ouvriers, employés et enseignants, cadres du
service public, etc... Sans que les uns imposent aux autres
leurs objectifs idéologiques... Mais qu’ils partent bien de ce
qu’ils doivent affronter ensemble.

-Enfin dernier point la rupture démocratique du
politco-médiatique est forte et chacun la véhicule, nul n’est à 
l’abri. Si une force politique s’approprie les votes et tente de
les négocier dans des jeux politiciens ce sera
catastrophique.Les facteurs de division l’emporteront.

-Car le fond de mon texte sur le plan théorique est que s’il y a
vote de classe, cela ne signifie pas que la classe soit
constituée en particulier sur le plan organisationnel, Bourdieu
après Marx a trés bien expliqué cette différence.`

- Mon hypothèse est d’un point de vue sociologique qu’à partir de
rejet individuel, sans que la classe soit organisée, de
multiples sociabilités ont pris le relais, famille, collectifs
de travail, les uns touchés par les informations émanant
d’associations comme ATTAC, des partis comme le PCF, la LCR, les
autres en parfaite autonomie. Et il me semble qu’il y a là un
terrain plein de promesse, encore faut-il bien le comprendre, se
donner les moyens de l’action.

- En ce qui concerne votre reflexion sur Blair et sur l’OTAN, je
vous conseille l’exercice dialectique : quel est mon objectif,
quels sont mes points d’appui, quelles sont mes zones de
faiblesse...

Danielle Bleitrach, mercredi 8 juin.

09/06/2005 18:42 par François Delpla

Bonsoir

Encore une distinction un peu raide ! Je ne vois pas ce qui vous permet de cataloguer ainsi ma manière d’aborder la dialectique par rapport à la vôtre.

Sur l’Irak, les faits se chargent de nous départager : le voyage de Straw ce jour à Bagdad à la tête d’une délégation de l’UE et en notre nom à tous montre bien comment Albion interprète le sens du "non" français : un appel d’air à boucher d’urgence. C’est, au plan européen, l’homologue de ce que la nomination de Villepin-Sarkozy ou le bétonnage du PS sont au plan français.

Cela dit, je n’affirme pas que nous pouvons obtenir tout de suite une rupture de la politique européenne avec la barbarie américaine actuelle, simplement qu’il urge que les "non" posent avec force le problème.

20/06/2005 17:01 par PB

Militant d’Attac j’ai distribué près de 3500 tracts de la main à la main en dix semaines de campagnes. Je partage l’analyse qui invite à la pondération quant aux liens de cause à effet entre vote de classe et adhésion spontanée de ladite classe à un mouvement politique. Je crois que le désarroi d’une partie significative de la population n’a pas encore trouvé son prolongement politique constructif. Probablement parce que l’offre politique n’est pas encore adaptée aux besoins de la situation.

Le jour du référendum, j’ai appris beaucoup de chose sur l’un des courrants porteurs du vote NON. Participant à un repas de famille, un de mes oncles, ex petit patron (à la retraite) d’une petite auto-école ayant salarié jusqu’à trois personnes, et dont j’ignorais s’il était plus de droite ou de gauche, a eu cette réflexion qui à mes yeux vaut bien des discours. "Je suis allé voté pour la première fois depuis plus de dix ans. C’est pas pour l’Europe. Mais y en a marre de leurs conneries. Ca ne va plus. Il est temps que cela cesse".

Le premier enseignement que j’en tire, c’est qu’à l’occasion de ce vote, mon oncle, toujours aussi désabusé par les politiques menées par les différents gouvernements, à rompu avec l’abstention. Il ne s’est pas mobilisé sur la base d’une conscience politique claire. C’est son quotidien qui l’a motivé. Mais inconsciemment il a capté l’importance de ce scrutin. En saisissant au vol de ci, de là , des fragments de campagnes, il a ressenti confusément que l’importance de l’enjeu justifiait qu’il retourne au bureau de vote.

Je pense que la vigueur des débats dans les médias a mis la puce à l’oreille de beaucoup de gens. Ils n’ont pas compris grand chose aux tenants et aux aboutissants du texte constitutionnel. Mais ils ont su à travers différents mécanismes psycho-cognitifs que le rendez-vous était de la première importance.

Le fait que les barons du système le défendent aussi âprement, appuyés par leurs homologues européens qui se sont déplacés pour joindre leur voie aux incantations favorables à la constitution, à suscité chez beaucoup de nos concitoyens un reflexe de survie politique.

Devant autant d’insistance de la part des élites européennes à nous indiquer le bon choix, alertés par le bon sens populaire, un nombre élevé de Français qui ont perdu confiance dans leurs dirigeants ont choisi la prudence en refusant de signer un chèque en blanc, bien que cernés par les promesses d’un côté et les menaces de l’autre.

Bien entendu, les analystes reclus dans la modernité d’un XXIe siècle fertile en mutations et en progrès dont ils sont les agents de propagation et les premiers bénéficiaires, ont vilipendé la peur de l’avenir et de l’étranger. Les masses ignorantes ont lamentablement torpillé la constitution commettant ainsi un crime de lèse Europe.

Un tel comportement (de la part des masses égarées) ne mérite pas l’analyse, ce serait faire trop d’honneur à la populace qui ne comprend rien ? Elle appelle derechef la réprobation et la condamnation : l’anathème qui dispense de toute autocritique. Le jugement est sans appel parce que les censeurs sont juges et partie : ils en assurent la sauvegarde et la promotion et savent mieux que d’autres en exploiter les ressources.

Conclusion : le bon sens des masses a déclenché un reflexe salutaire pour éviter (ou retarder ?) le pire. Le pire sera évité si les forces (politiques, syndicales et associatives) ayant contribué à faire pencher la balance du côté du NON savent traduire ce vote de classe. Autrement dit, à la force du rejet exprimé par la population doit correspondre une dynamique unitaire à la hauteur de l’enjeu : offrir au peuple éclaté et désemparré une perspective d’action viable pour ouvrir de nouveaux horizons dans une existence de plus en plus morne et douloureuse.

Pour cela, il faudra beaucoup d’humilité et de générosité pour :
 reléguer les ambitions personnelles au second rang et proclamer l’union sur la base d’objectifs sociaux non négociables : un revenu d’existence décent pour chacun et une activité socialement utile pour tous. La dignité des existences passe par le respect de ces deux conditions.
 se mettre à l’écoute des gens avant de leur proposer un programme. Que les gens se sentent respectés dans ce qu’ils sont.

22/07/2005 23:50 par geabel

L’antagonisme de classe est fort et pourtant aujourd’hui en France et plus généralement en Europe il n’a aucune force politique capable de l’organiser, de lui offir un perspective, fut-ce celle de simples réformes, de mesures limitées.

La seule force politique capable de l’organiser ne peut se construire que sur un modèle existant. Donc de reproduire un modèle déjà connu (et/ou reconnu).
Je pense, au contraire, que tant que cette force ne sera pas structurée et reconnue sur les modèles que nous connaissons déjà (in-dé-ter-mi-né), l’impact ou les conséquences que nous en attendons ont des chances d’aboutir.

Ce qui a créé l’unité de ce mouvement (le NON), c’est son opposition à un projet de société de l’élite dirigeante, ce n’est pas se mettre derrière une organisation quelconque.

Il me parait donc logique que pour transformer cet essai (le NON), il faut le faire autour d’un autre projet( ou Constitution) élaboré par ceux qui se sont opposés au premier projet.

Les médias ne pourront cacher éternellement son existence.

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