@ Daniel BESSON
Ce que vous écrivez sur l’appât du gain est juste, bien-sûr. Mais ce n’est pas le sujet, car vous avez commencez par une affirmation "l’extraterritorialité n’existe pas". Ben si, l’extraterritorialité existe de facto. Et les Etats-Unis veulent imposer leurs lois partout et pour tous. Le problème ne se résume pas à l’appât du gain, le problème est politique : de quel droit des lois US s’imposeraient-elles à l’extérieur de leurs frontières ? Aucun, a priori. Et la passivité des dirigeants occidentaux devant une telle dérive mériterait une étude à elle toute seule car il s’agit en réalité d’une ingérence directe. Une entreprise française qui exerce une activité légale sur le sol français peut se voir infliger une "amende" par les Etats-Unis ! Le terme même d’"amende" est une arnaque (et pourtant largement employé par des journalistes ignorants).
Pour illustrer mon propos : imaginez recevoir un beau jour chez vous une "amende" exorbitante pour des activités autorisées en France mais interdites aux Etats-Unis. Vous penseriez sûrement quel culot ! et votre première réaction serait de la jeter à la poubelle. Mais vous lisez les petits caractères en bas de la page qui précisent que si vous ne payez pas, un membre de votre famille résident aux Etats-Unis devra payer à votre place (et beaucoup plus, pour faire bonne mesure). Alors vous "négociez" en acceptant de payer une "amende"... Il s’agit là d’une violation pure et dure de l’idée même de droit. Vous pourriez vous amuser en tentant de renverser la donne. Par exemple, porter une arme en France sous prétexte que le port d’une telle arme est autorisé... aux Etats-Unis (eh oui, quitte à "extraterritorialiser" les lois, autant le faire dans les deux sens, non ?).
Ou imaginons le contraire : la France infligerait une amende à une entreprise US, basée aux US, pour des activités exercées aux US. On imagine assez facilement la réaction du gouvernement US...
Dans le cas de loi Helms-Burton mentionné dans mon commentaire précédent, il y a même quelque chose de plus : la rétroactivité. En effet, la loi "punit" des actions commises à une époque où elles étaient autorisées... C’est, je crois, du jamais vu. Sinon aux Etats-Unis. Certains pays ont réagi. Le Canada, par exemple, "interdit l’application de loi Helms-Burton" sur son territoire... (Assez cocasse de constater qu’un pays doit voter une loi pour interdire l’application sur son territoire d’une loi votée dans un pays tiers.) L’UE a aussi vaguement réagi en 1996 par une directive qui va dans le même sens mais qui, contrairement à d’autres directives, est tombée dans l’oubli.