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Comme un lierre parasite ? Non, merci !


Illustration : détail de la fresque du muraliste italien Jorit, https://artslife.com/2020/12/10/odio-gli-indifferenti-antonio-gramsci-maestoso-a-firenze/

«  Il ne peut exister seulement des hommes, des étrangers à la cité. Celui qui vit vraiment ne peut qu’être citoyen, et prendre parti. L’indifférence c’est l’aboulie, le parasitisme, la lâcheté, ce n’est pas la vie. C’est pourquoi je hais les indifférents. »
Antonio Gramsci (1)

Le Bret
Si tu laissais un peu ton âme réfractaire
La fortune et la gloire...

Cyrano
Que me faudrait-il faire ?
Chercher un protecteur puissant, prendre un patron,
Et comme un lierre obscur qui circonvient un tronc
Et s’en fait un tuteur en lui léchant l’écorce,
Grimper par ruse au lieu de s’élever par force ?
Non, merci. Dédier, comme tous ils le font,
Des vers aux financiers ? Se changer en bouffon
Dans l’espoir vil de voir, aux lèvres d’un ministre,
Naître un sourire, enfin, qui ne soit pas sinistre ?
Non, merci. User de connivence plus que de don ?
Avoir un beau carnet d’adresses ? Un pantalon
Qui plus vite, à l’endroit des genoux, devient sale ?
Exécuter des tours de souplesse dorsale ?...
Non, merci. Se faire flagorneur des puissants,
Et, à l’opposé, contempteur des simples gens ?
Avoir toujours pour l’élite l’encensoir bien véloce,
Et pour la multitude les crocs les plus féroces ?
Non, merci. Savoir à son milliardaire complaire,
Jouer à la bayadère et la foule distraire ?
Non, merci. Zélateur du calcul égoïste,
Se faire l’apôtre de la doxa capitaliste,
Voire hussard noir du néolibéralisme,
Jusqu’à l’apothéose, jusqu’aux cataclysmes ?
Non, merci. Croire au marché pur sans entrave ?
Que jouir au détriment d’autrui n’est pas grave ?
Être pour les médias, possessions des nantis,
Un dispensateur de bonnes paroles ? Non, merci !
Travailler à se construire une jolie renommée,
Devenir ce falot influenceur primé,
Cette cheville ‘‘ouvrière’’ achetée à bon prix ?
Vendre toujours au plus offrant son bel esprit,
Jusqu’à être, par ses nombreux pairs, jalousé ?
Non, merci ! Calculer, compter, thésauriser ?
Se faire laudateur plutôt que pamphlétaire,
Pisse-copie plutôt que journaliste exemplaire ?
Confondre information et communication,
N’être plus de la propagande que le porte-coton,
De la raison du fort, du Prince de Machiavel,
Que la voix servant « l’hégémonie culturelle » ?
Non, merci ! Devenir comme une caricature,
Au service de cette nocive démocrature ?
Non, merci ! Être, pour ses principes, oublieux ?
Se faire docilement le porte-voix pointilleux
De la « révolution passive », des buts élitaires,
Tous viols de la souveraineté populaire ?
Non, merci ! Puis dauber sur la contestation,
Nonobstant les rouages de coercition,
Et la duplicité de l’État terroriste ?
Non ! Merci ! Hurler à l’envi aux complotistes ?
Être belliciste comme amoureux de sagesse,
Attendre des marchands de carnage une largesse ?
Non ! Merci ! S’épancher sur les charges sociales,
Mais passer sous silence les évasions fiscales ?
Non, merci. Non, merci ! Non ! Merci ! Mais... penser,
Être libre, avoir soif d’idéaux, rêver !
Avoir l’œil qui regarde bien, le verbe qui sied,
Mettre, quand il vous plaît, dans le plat les pieds,
Être ce franc-tireur, dans cette «  guerre de position »,
Venant troubler la digestion des ministrions,
Par la révélation des affaires, des infamies
De tous les profiteurs, exploiteurs impunis !
Pour un oui, pour un non, se battre, ne pas se taire,
Défendre sans cesse les victimes de l’arbitraire !
Agir sans le souci de gloire ni de fortune,
À tel voyage semblable à atteindre la lune !
Être comme cet esprit vif et pénétrant,
Ce cerveau qui fut enfermé dix ans durant ! (2)
N’écrire jamais rien qui de soi ne sortît,
Et modeste d’ailleurs, se dire : mon petit,
Sois satisfait des fleurs, des fruits, même des feuilles,
Si c’est dans ton jardin que, tantôt, tu les cueilles !
Puis, s’il advient d’un peu triompher du sort,
Ne pas être l’obligé d’untel et consorts,
Vis-à-vis de soi-même en garder le mérite,
Bref, dédaignant d’être le lierre parasite,
Lors même que l’on n’est pas le chêne ou le tilleul,
Ne pas monter bien haut, peut-être, mais tout seul !...
Se garder encore de toute manipulation,
Ainsi que des entreprises de diversion.
N’avoir de cesse de blâmer les compromissions,
Qui scellent, par une loi d’airain, les soumissions.
Clamer encore que vivre sans exubérance,
C’est désapprendre à s’asservir sans conscience.
Et qu’un rêve à plusieurs, c’est prémonitoire :
Une Commune utopie est ressort de l’Histoire. (3)

Le Bret
Enfin, tu conviendras qu’il est suicidaire
D’assassiner toujours la chance passagère.

Cyrano
Non... Pour le principe, et pour l’exemple aussi,
Je trouve qu’il est bon de combattre ainsi.

D’après la tirade des « Non, merci ! », acte II, scène 8 de Cyrano de Bergerac, Edmond Rostand

(1) Je hais les indifférents, Antonio Gramsci, in La cité future :
(2) Référence à Antonio Gramsci ( idem pour les concepts : «  l’hégémonie culturelle », «  la révolution passive », « la guerre de position »).
(3) Helder Camara : «  Lorsqu’on rêve tout seul, ce n’est qu’un rêve, alors que lorsqu’on rêve à plusieurs, c’est déjà une réalité. L’utopie partagée, c’est le ressort de l’Histoire. »

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« Citoyens,

Ne perdez pas de vue que les hommes qui vous serviront le mieux sont ceux que vous choisirez parmi vous, vivant votre vie, souffrant des mêmes maux. Défiez-vous autant des ambitieux que des parvenus ; les uns comme les autres ne consultent que leur propre intérêt et finissent toujours par se considérer comme indispensables. Défiez-vous également des parleurs, incapables de passer à l’action ; ils sacrifieront tout à un beau discours, à un effet oratoire ou à mot spirituel. Evitez également ceux que la fortune a trop favorisés, car trop rarement celui qui possède la fortune est disposé à regarder le travailleur comme un frère. Enfin, cherchez des hommes aux convictions sincères, des hommes du peuple, résolus, actifs, ayant un sens droit et une honnêteté reconnue. Portez vos préférences sur ceux qui ne brigueront pas vos suffrages ; le véritable mérite est modeste, et c’est aux électeurs à choisir leurs hommes, et non à ceux-ci de se présenter. Citoyens, Nous sommes convaincus que si vous tenez compte de ces observations, vous aurez enfin inauguré la véritable représentation populaire, vous aurez trouvé des mandataires qui ne se considèrent jamais comme vos maîtres.

Le Comité Central de la Garde Nationale »

Texte de l’affiche apposée avant l’élection de la Commune de Paris, 25 mars 1871.

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