Mercredi 9 mai 2007.
Cette campagne dont on nous avait dit qu’elle serait celle d’Internet a contraire montré la faible audience et le faible impact de ce moyen de communication parallèle. Ce qui a triomphé c’est non seulement la télévision en tant qu’appareil idéologique du capital, la grande presse, et la rumeur... La rumeur, la bonne vieille rumeur, le grand air de la calomnie qui court du local de l’UMP et rampe jusque dans les foyers du troisième âge.
Tandis que sur Internet on répétait jusqu’à plus soif que Sarkozy était un fasciste dangereux, dans la rue on parlait d’un autre personnage, de qui ? C’était un nègre polygame ou un arabe, peu importe, mais il venait dans notre belle France pour toucher le RMI, le CMU, et pour couler notre sécurité sociale avec ses quatre épouses et ses 25 enfants. Sarkozy allait foutre dehors tous ces budgétivores... Ils ont voté massivement à cause de ce type inventé par le racisme ordinaire... Imaginez même 35% d’adhérents de la CGT ont voté pour Sarkozy, et encore la CGT est un miracle de solidarité de classe à côté de F.O, de la CFDT, de la CFTC sans parler du MEDEF, et ce sont ceux qui s’organisent, imaginez les rancoeurs, la haine du petit bourgeois isolé qui a du mal à terminer le mois et jour après jour voyait Sarkozy rouler les mécaniques et menacer les délinquants, les budgétivores, toux ces étranger venus manger notre pain.
Pendant ce temps là tout le monde dans les « appareils » de gôche était bien convaincu qu’il ne fallait surtout pas parler de la situation internationale, de la mondialisation, ils offraient un boulevard à ce type de rumeur.
Autre thème important, avez-vous écouté le discours de Clermont Ferrant prononcé par Sarkozy, là ce n’était plus de la rumeur mais du concret. Ne vous inquiétez pas je vais réhabiliter votre travail, plus de délocalisation, des salaires corrects, il vous suffira de travailler plus, de faire des heures supplémentaires jusqu’à plus soif, heures qui bien sûr ne compteront pas pour votre retraite, d’ailleurs la prendrez vous un jour ? Le fond est qu’il faut rendre la force de travail française compétitive, attrayante pour le Capital, et le jour où vous aurez appris à vivre d’un bol de riz plus besoin de délocaliser. Le tout assorti d’une crise d’indignation de bon aloi contre les patrons qui délocalisent et partent avec des primes indécentes...
Grâce à cette opération d’illusionniste, la France qui avait voté contre la Constitution européenne, manifesté contre le CPE et est traditionnellement anti-étasunienne s’est retrouvée avec la droite la plus sans complexe qui se puisse imaginer.
Car la grande réussite a l’opération qui a réussi à gommer le vote NON du 29 mai 2005, en créant des candidatures exclusivement représentative du OUI et en imposant à une France traditionnellement rebelle le représentant d’une droite la plus atlantiste, la plus néo-libérale qui se puisse imaginer. Un représentant d’une droite si peu complexée qu’à peine élu Sarkozy est allé au Fouquets avec ses amis pipole, strass et paillettes, sans parler de la cocaïne à flot, a terminé dans une boîte de nuit et a passé quelques jours dans le yacht de la treizième fortune de France à qui il ne refusera rien. Ouf nous l’avons échappé belle Johnny Halliday revient de Gstaadt, assuré que Sarko tiendrait ses promesses, alléger sa facture fiscale...
Comment en est-on arrivé là ?
D’abord si l’on veut comprendre, il faut une fois de plus éliminer les rumeurs. Ce ne sont pas les ouvriers, ni les jeunes des banlieues qui ont élu Sarkozy. Mieux encore ce qui a résisté est la France qui conserve quelque culture communiste. Certes Marie-Georges Buffet y a été balayée au premier tour, mais les bastions communistes traditionnels ont voté contre Sarkozy au deuxième tour. Cela se voit en regardant le val de Marne et la Seine saint Denis ou dans ma ville Marseille, les quartiers nord, mais également bureau de vote par bureau de vote. Le petit pavillonnaire est allé voter Sarkozy et les grandes cités contre lui.
Vous pouvez vérifier, comme je l’ai fait, la France du Non à la Constitution Européenne, celle du CPE, est bien là . Celle de la Constitution Européenne représentait un vote de classe, sur un fond pas encore tout à fait oublié de vote communiste. On pouvait partout, bureau après bureau retrouver le vote communiste d’il y a une vingtaine d’années, ce n’était même pas un vote de gauche, ni communiste, c’était un vote de classe. Il est toujours là et les cités populaires ont battu des records de vote anti-Sarkozy au deuxième tour. La France de la lutte anti-CPE est également là , ce sont les jeunes qui s’étaient inscrits en masse qui ont donné le plus fort contingent de votes à la candidate du PS au second tour.
Quand on a compris cela, on estime à sa juste valeur la manoeuvre qui est tenté par les « appareils » poltico-médiatique, et par une bonne partie du PS, accentuer la dérive vers le centre vers une union PS-Bayrou. Il s’agit d’en finir avec les forces de résistance anti-capitaliste, anti-impérialistes, anti-libérale pour diriger le vote français dans l’impasse d’un soutien à l’Europe et à sa politique, ainsi qu’à l’atlantisme. Que ce soit Sarkozy, Bayrou ou une alliance PS-Bayrou tout cela va dans le même sens, en finir avec la France qui résiste et qui lutte. Car un autre fait essentiel de cette campagne électorale française, ça a été le nombre de grèves qui se sont poursuivi durant cette campagne.
Il est clair que nous sommes partis dans une vague de droite de grande ampleur, il est clair que Sarkozy disposant d’une chambre introuvable va accélérer ses « réformes », ses cadeaux à ses amis du patronat et sa remise en cause du code du travail, mettre à mal les syndicats, en particulier la CGT. Alors ceux qui prennent la responsabilité d’affaiblir la gauche qui résiste, de tenter de détruire par exemple un peu plus le PCF et ses élus, prennent une lourde responsabilité historique, alors qu’il faut au contraire s’unir pour défendre bec et ongle, malgré les dirigeants eux-mêmes et leur incurie intellectuelle, la résistance communiste et de gauche.
Danielle Bleitrach
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– Photo : Anti CPE - 16 mars 2006 fin de la manifestation Sèvre Babylone.
Auteur : Georges
– Source : Photothèque du mouvement social
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