RSS SyndicationTwitterFacebook
Rechercher

Gaza- chroniques d’un désastre de la raison

Dimanche 5 Novembre sur un plateau de télévision, le général Michel Yakovlev déclare que ce que fait Israël à Gaza est "un désastre moral". C'est un général quatre étoiles, atlantiste, qui a participé pratiquement à toutes les interventions de l'OTAN, Irak, Yougoslavie etc...., Il sait donc , de quoi il parle. Ses propos sont d'autant plus remarquables qu'il révèle, en même temps, qu'il est sioniste à la stupéfaction générale.

Sa déclaration sème l’émoi sur les chaines françaises au moment où elles sont pleinement engagées dans le soutien ou la justification des bombardements de Gaza. Il dit que c’est un massacre que rien ne justifie, même pas l’efficacité et qu’il ira inévitablement à l’échec. Mais si on considère ce qui est dit à ce propos sur les médias, il aurait dû aussi parler de désastre intellectuel, d’un désastre de la raison.

Qu’on en juge. Voici quelques propos qu’on pouvait noter sur une chaine de télévision française (LCI) au fil des jours de ce conflit. Ils sont stupéfiants !
5 novembre .19h- Cohn Bendit, “ leader du mouvement étudiant de mai 1968 ”, et aujourd’hui figure en vue du système médiatico-politique français. Sur les bombardements de Gaza, il pose la question "comment faire autrement". On pourrait lui dire "Tout simplement faire la paix, négocier évidemment". Il n’y songe même pas. "Il faut liquider Hamas", répète-t-il "autrement ça va recommencer". "Dites- moi s’il y a une autre solution" s’exclame-t-il. C’est le même langage depuis 75 ans. C’est ce qu’ils disaient de l’OLP. D’abord liquider toute force palestinienne résolue, la paix, mais la paix israélienne avec des partenaires soumis. En fait ils ne voient pas d’autre solution que de massacrer les Palestiniens. Ce même jour, cinq bombes d’une tonne ont été larguées sur un quartier. Le cratère est énorme, volcanique. L’argument d’Israël est qu’ils visaient un (UN vous avez bien lu) responsable de Hamas Ils appellent cela des "dégâts collatéraux". Monstrueux. Des dégâts collatéraux qui deviennent la règle, l’essentiel, cela s’appelle un massacre. Et cela veut donc dire que la cible, la vraie, c’est le peuple de Gaza. Pour qu’il meure ou pour qu’il parte ? Il suffit de voir les bombardements de Gaza, pour comprendre comment s’est faite la Nakba, l’exode des palestiniens en 1948 et de nombreuses autres fois après.

"Une différence de nature"

5 novembre 21h30- Raphael Enthoven, philosophe très parisien. Toujours le même argument "Israël n’a pas d’autre option que de bombarder Gaza, bien sûr que je suis contre les bombardements, mais est-il possible de faire autrement ? ” A-t-on vu un philosophe aussi guerrier ? Il reprend lui aussi, comme s’ils avaient tous un guide de conversation, l’argument que "Hamas est une organisation terroriste et qu’elle prend en otage le peuple palestinien". Ce ne sont donc pas les bombes israéliennes qui tuent les palestiniens, c’est Hamas. Ce n’est pas Israël qui a fait de Gaza une prison à ciel ouvert depuis 20 ans, c’est Hamas. Déni total et inversion du réel. Et là, la meilleure, lui le philosophe, supposé rationnel, dit :"on ne peut comparer des terroristes qui tuent des juifs au hasard d’une rue d’Israël avec des victimes collatérales d’une opération militaire comme cela se fait à Gaza". Ah, bon, les bombes ( et les balles désormais aux portes des hôpitaux) ne tuent pas les Palestiniens au "hasard d’une rue" ? Aura-t-il plus tard honte d’un tel argument ?

Et il précise que "s’il arrive (" s’il arrive", dit-il, c’est donc qu’il n’y en a pas encore, NDLR) qu’Israël commette des crimes de guerre, ils seront à coup sûr, certainement, documentés par la seule démocratie de la région, c’est-à-dire Israël". Circulez, il n’y a rien à voir ! Ils sont devenus fous ! Le déni est total. Un monde virtuel, idéologique, est substitué au monde réel. Les sophismes en deviennent comiques. Il nous explique ensuite que "toutes les différences sont donc entre les victimes et les gens qui tuent". Il consent à ce qu’il y ait "des problèmes en Israël ( le gouvernement Netanyahou, les colons) mais, précise-t-il, " la différence est incommensurable, entre ce qui se passe en Israël et les comportements de Hamas". C’est un "différence de nature". Retenez bien cette expression, elle sera reprise souvent.

6 Novembre 19h. Pascal Bruckner, philosophe, romancier, membre du jury du prix Goncourt. il est très proche d’un intellectuel français juif connu, un autre philosophe, Alain Finkielkrault, qui avait développé la thèse que dans le conflit israélo-palestinien, "c’était la dictature des victimes", c’est-à-dire celle des Palestiniens. Dans la même veine idéologique, Pascal Bruckner nous apprend que "Hamas se sert de sa population pour protéger ses militants, ses armes, tandis qu’Israël se sert des armes pour protéger sa population", (et massacrer la population des autres, pourrait-on ajouter). Et il dit, lui aussi, comme s’ils s’étaient tous donner le mot, " je ne vois pas comment Tsahal peut s’arrêter aujourd’hui", puis poursuit : c’est une guerre sale comme toutes les guerres. La stratégie de Hamas est intelligente , il joue sur la pitié et nous, comme nous sommes citoyens de pays démocratiques nous sommes plus touchés à la vue des enfants". Il faut que chacun, chaque homme sensé s’arrête un instant pour méditer ces paroles stupéfiantes, horribles. Les autres n’ont donc pas d’enfants, n’ont pas de peine pour les enfants ? Voilà, dans sa nudité, l’idéologie des intellectuels qui supportent les massacres d’Israël. Une pensée raciste assumée comme on ne l’a jamais vue avant ce conflit. On est ici devant un chef d’œuvre de la pensée sioniste.

Israël, "une armée humanitaire"

8 Novembre Anne Sinclair, journaliste vedette dans le passé, connue pour avoir dirigé la célèbre émission des années 90, "Sept sur sept". Le discours est pratiquement le même que les précédents. Elle, qui avait refusé naguère d’inviter le parti du " Front national" à sa fameuse émission, justifie aujourd’hui, comme la plupart des autres "supporters d’Israël" la présence de celui-ci à la manifestation contre l’antisémitisme. Elle se veut pleine d’humour - : "En amour, il y a des preuves d’amour"’ et précisément maintenant le rassemblement national adore les juifs", et soudain sérieuse : "ils y ont mis du temps, mais ils y sont arrivés et tout le monde devrait pouvoir manifester contre l’antisémitisme. A la question "s’il n’y pas deux poids deux mesures", elle répond que "la guerre ( celle faite par Israël) c’est la guerre, et que ce n’est pas exactement la même chose qu’un massacre tel que celui commis par Hamas". Il faut donc comprendre que les bombardements de Gaza ne sont pas, eux, un massacre. Le deux poids deux mesures dans sa pureté.

Elle trouve d’ailleurs que l’armée israélienne (Tsahal pour les intimes) est "humanitaire car elle ouvre des corridors humanitaires vers le sud "où ils sont moins bombardés" dit-elle. Le lecteur aura apprécié le "moins" C’est ce qu’elle dit mot pour mot. On se demande parfois s’ils se rendent compte de ce qu’ils disent. Pour justifier les bombardements israéliens, Mme Sinclair rappelle d’autres bombardements occidentaux effroyables, Mossoul, Dresden (ce qui est déjà un aveu), l’air de dire : "nous faisons comme vous, nous sommes des Occidentaux, ne nous donnez pas donc de leçons".

L’absurde du raisonnement continue : "Les tunnels servent à protéger Hamas et pas les habitants", argument souvent repris d’ailleurs dans l’argumentaire médiatique. Imaginez tous les habitants de Gaza, des centaines de milliers de personnes, vivant sans eau, sans nourriture, pendant des semaines, des mois peut être serrés dans des tunnels hypothétiques d’ailleurs. Désastre de la raison.

"Le danger du "relativisme"

9 novembre. Raphael Gluckman, essayiste et député socialiste européen en vue : il parle de "démanteler Hamas". Derrière un humanisme larmoyant et tout théorique sur "toutes les victimes", il précise "qu’il ne faut pas confondre l’agresseur et l’agressé". Il développe, comme beaucoup d’autres, la fameuse théorie " du danger du relativisme", celui de ne pas voir "le caractère unique des attentats du 7 Octobre", de les banaliser en leur opposant les bombardements israéliens.

9 novembre, une journaliste, Margot Haddad, parlant des victimes palestiniennes, explique que ce qui différencie un crime de guerre d’un crime contre l’humanité c’est l’intentionnalité, les terroristes, eux, avaient l’intention, ce qui n’est pas le cas des bombardements d’Israël". On est en pleine folie.
Toujours le 9 novembre, Elie Korchia, président du Consistoire central israélite de France a cette explication monstrueuse "on tue des civils pour éviter la mort de soldats israéliens", ce à quoi, un colonel français qui se trouve à côté lui fait remarquer que "normalement ce sont les soldats qui prennent des risques." Une journaliste, spécialiste de la critique de l’islamisme et notamment de l’Iran, nous révèle le 9 Novembre dans l’émission de Daniel Pujadas, que le chef de Hamas, individu "corrompu" dit-elle, s’appelle "Monsieur Maison" à Gaza car il y est promoteur immobilier. On voit derrière, en fond d’image, les immeubles en ruines. Humour noir probablement.

Ce toujours 9 novembre, Yves Threard , directeur adjoint de la direction du Figaro, dit sans sourciller : "c’est Hamas qui devrait être jugé pour crime de guerre car il a pris en otage le peuple de Gaza". Non, ne souriez pas, car il ajoute aussi : " les gens n’ont pas compris assez ce qu’était le 7 octobre, quand on voit les vidéos, que je n’ai pas vues, et cela peut se reproduire tant qu’on aura pas éradiqué le Hamas." On aura noté qu’il n’a pas vu les vidéos mais qu’il a compris, lui, ce qu’était le 7 Octobre. D’ailleurs qui a vu ces vidéos ?
17 novembre. Robert Badinter, ancien ministre de la Justice, père de la loi ayant aboli la peine de mort en France. Il semble bien avoir changé d’avis à ce sujet. Aucun mot pour condamner les bombardements. Il réserve toute son indignation à Hamas, "organisation terroriste". Il reprend le récit fantastique biblique d’une terre mythique d’Israël et de la dispersion des juifs après la conquête de la Palestine par les Romains. Lorsqu’on lui pose la question d’une éventuelle réconciliation entre Palestiniens et Israéliens après ces bombardements sanglants israéliens, il dit "qu’elle s’est bien faite entre l’Allemagne et la France". Comment peut-on comparer deux États à niveau de forces comparable avec les rapports de nature coloniale en Palestine occupée ? Misère de la raison.

L’identité juive

On l’aura peut être remarqué, beaucoup des intellectuels cités plus haut, sont des intellectuels français juifs. Dans ce désastre intellectuel, des intellectuels français juifs ont occupé les premiers rangs pour défendre les thèses de l’armée et du gouvernement israéliens et justifier, d’une manière ou d’une autre, les bombardements impitoyables sur la population palestinienne de Gaza. Pourquoi ? Pression identitaire ? L’identité serait elle aussi ravageuse qu’elle ferait perdre la raison et la rationalité. Ne songent-ils pas qu’ils portent ainsi atteinte, en profondeur, à l’image de la communauté juive dans le monde ? Comment pourront-ils alors s’opposer, dénoncer le sentiment qu’ont les gens de leur parti pris en fonction de leur identité et puis les accuser d’antisémitisme ? Israël et ce conflit semblent avoir fait lever un vent de folie dans l’intelligentsia française juive. C’est le cas aussi d’une grande partie des journalistes, des animateurs, et des invités sur les medias. On se surprend, désormais à chercher l’identité de l’intervenant, lorsqu’il a des propos particulièrement partisans et véhéments.

Cette question d’identité est certainement un des facteurs explicatifs de ce désastre de la raison chez une partie des intellectuels juifs. En fait, les apparences sont trompeuses. Des intellectuels juifs dénoncent la politique israélienne ou prennent carrément position en faveur de la Palestine. En décembre 2019, 127 intellectuels juifs écrivent aux députés français pour s’opposer au projet de loi qualifiant l’antisionisme d’antisémitisme. Des intellectuels juifs connus, comme Daniel Salvatore Schiffer, Ilan Lalevi et d’autres défendent le peuple palestinien. On ne peut donc résumer la question à une question d’identité. On peut observer aussi que la plupart des intellectuels juifs qui relaient les thèses d’Israël font partie des élites du système Le discours accusateur sur l’antisémitisme, qui instrumentalise la question d’identité et tente ainsi, en Occident notamment, de déconsidérer toute opposition à Israël, de la qualifier d’antisémite, est de plus en plus en échec. Israël et ses agissements divisent la communauté juive. Le sionisme l’avait présenté comme la solution à "la question juive", elle est aujourd’hui le problème. Au sein même de la communauté juive mondiale il y a désormais un clivage de plus en plus grand entre partisans et adversaires d’Israël. Aux États Unis mêmes, des milliers de jeunes et d’étudiants juifs manifestent leur solidarité avec le peuple palestinien ; l’opposition à la politique israélienne des dirigeants étasuniens est très forte aussi au sein du parti démocrate. Tout cela incite à l’optimisme sur les capacités d’empathie de l’humanité au-delà des visions étroites et réductrices de l’ identité.

Dans le discours intellectuel et médiatique de soutien à l’armée d’Israël et ses bombardements sur la population palestinienne, un thème va occuper une place centrale : "on ne peut mettre en parallèle les actions d’Israël et celle de Hamas". Il va permettre de développer en même temps que masquer une idéologie suprématiste et raciste monstrueuse.

"Ce n’est pas la même chose"

Einstein, qui était un juif antisioniste, a donné au monde la théorie de la relativité. Les intellectuels qui défendent et justifient l’action de l’armée israélienne vont nous donner la théorie du relativisme. Au nom de cette théorie, ils vont chaque fois dénoncer ceux qui mettent sur le même plan les actes de Hamas et ceux d’Israël, leur reprochant de minimiser "ce tournant historique, ces évènements sans précèdent que sont les évènements du 7 Octobre en Israël".
"C’est pas pareil" est le maitre mot de la propagande israélienne et des intellectuels qui la reprennent. Les interventions citées plus haut sont empreintes de cette vision terrible, de cette raison démente qui peut déboucher sur un véritable holocauste, déchainé et impitoyable, contre le peuple palestinien, encerclé, enfermé dans la prison de Gaza, qui n’a nulle part ou fuir ses bourreaux. On peut probablement s’attendre à ce que chaque action des combattants de Hamas donne lieu à des représailles israéliennes sanglantes contre les civils. Un cauchemar.

Le 8 novembre par exemple à 18h sur LCI, Isabelle Lasser, une journaliste du Figaro regarde, avec les autres présents sur le plateau, les images terribles des enfants tués à Gaza, celles d’un père qui découvre ses enfants morts, et que dit-elle : "il ne faut pas tomber dans le relativisme, ce n’est pas la même chose, les victimes ne sont pas les mêmes, celles tuées dans une opération terroriste et celles tuées par l’armée israélienne, une armée régulière, ne sont pas les mêmes, on ne peut pas les comparer, là il y a une organisation terroriste au départ". Le 7 novembre autre exemple, dans l’émission du soir de LCI , on déclare très fort que "les attaques du Hamas sont le passage vers autre chose", "le plus grand massacre de juifs depuis 1945, un évènement historique nouveau", "le franchissement d’une frontière".

Ce qu’on nous dit, en définitive, c’est que la mort d’un Israélien est différente de celle d’un Palestinien. Il s’agit d’un racisme essentialiste. N’est-ce pas le summum de la discrimination, de la violation du principe fondamental qui fonde la morale humaine, l’humanité, les religions, celui que tous les êtres sont égaux .

Aucune compassion

Il n’y a d’évidence chez eux aucune compassion pour les victimes palestiniennes. On en parle au passage, comme une sorte d’exercice obligé, sans aucune émotion.

On affirme que Hamas tire sur la population pour l’empêcher de fuir vers le Sud. Toujours le même thème, en fait, celui de barbares, celui d’une sous humanité qui ne donne pas d’importance à la vie humaine. Bizarre, les boucheries de masse ont été régulièrement le fait de l’Occident, pendant les deux Guerres mondiales, et dans les conquêtes coloniales, mais ce thème a la vie dure. De toute façon, Hamas est qualifié de toutes les horreurs : le 7 novembre encore, sur le même plateau, on dit qu’il a tué des centaines de militants de "Fatah", et certains en les jetant du haut d’immeubles.

C’est dans l’absence totale de compassion, d’empathie, qu’il faut rechercher la cause profonde de cette négation de l’humanité de l’Autre. Là est l’explication de ce désastre de la raison que nous contemplons depuis le début de cet article. "Ce sont des animaux humains" avait dit des Palestiniens le ministre de la défense israélien.

La construction de ce suprématisme raciste a commencé il y a longtemps, depuis l’occupation de la Palestine, en obligeant les Palestiniens à chercher de quoi vivre chez les israéliens. À Gaza, on poursuit le même but. On cherche à les faire mourir de faim, de soif, de peur, à en faire des "animaux humains". Une vidéo est alors montrée par l’armée israélienne. Celle-ci exulte car on y on voit des Palestiniens se disputant des vivres. Mais c’est bien la seule qui a pu être filmée. La solidarité palestinienne est totale bien qu’on les affame, bien qu’on les assoiffe. On reste admiratif et songeur devant cet héroïsme collectif, quotidien, cette fraternité, cette discipline, cette entraide des Palestiniens pourtant dans des conditions extrêmes.

Dans l’argumentaire "ce n’est pas la même chose", la guerre faite par Israël est qualifiée de "différente". Sa guerre est humanitaire car :

Il avertit juste avant de bombarder. Quelle délicatesse !
Israël dépose du carburant à la porte de l’Hôpital Shifa. Comme c’est gentil !
Israël bombarde le nord pour permettre aux habitants d’aller au Sud. Quelle prévenance !
Israël coupe l’électricité mais il illumine la ville avec de monstrueuses lucioles qui préparent les bombardements. C’est féerique !
Israël tue les habitants de Gaza mais "peut-il faire autrement ? Ils n’ont qu’à ne pas être sous les bombes puisqu’on les a avertis".

Il y a aussi la version "Soft" de ce suprématisme, la version, disons, "humaine". Comme on craint de se faire qualifier de nazis en niant l’égalité de l’identité humaine, on dira alors que ce qui diffère entre Israéliens et Palestiniens "c’est dans la façon de procéder, dans la manière de tuer", terroriste et barbare là, civilisée ici, et que "tout est là". Agoniser pendant des heures pour une petite fille sous les blocs de béton d’un immeuble détruit, c’est quoi ? Un acte civilisé ?
Dans l’argumentaire du "ce n’est pas la même chose", on en revient au fond à l’idéologie coloniale primaire. Quelle différence y a-t-il avec les catégories coloniales, la recherche des preuves anatomiques d’infériorité dans les crânes que les anthropologues coloniaux mesuraient, comme ces crânes des résistants algériens qu’on avait décapités et rangés dans des tiroirs du musée, appelé quand même de l’Homme, le musée du Trocadéro pendant la conquête de l’Algérie ?

Israël est décidément un État colonial. Il fait renaitre les pires blessures.

URL de cet article 39144
   
Eric Hazan. Changement de propriétaire. La guerre civile continue. Le Seuil, 2007
Bernard GENSANE
Très incisif et très complet livre du directeur des éditions La Fabrique (qui publie Rancière, Depardon, Benjamin etc.), ce texte n’est pas près de perdre de son actualité. Tout y est sur les conséquences extrêmement néfastes de l’élection de Sarkozy. Je me contenterai d’en citer le sombrement lucide incipit, et l’excipit qui force l’espoir. « Dimanche 6 mai 2007. Au bureau de vote, la cabine dont on tire les rideaux derrière soi pour mettre son bulletin dans l’enveloppe s’appelle un (…)
Agrandir | voir bibliographie

 

Croire que la révolution sociale soit concevable... sans explosions révolutionnaires d’une partie de la petite bourgeoisie avec tous ses préjugés, sans mouvement des masses prolétariennes et semi-prolétariennes politiquement inconscientes contre le joug seigneurial, clérical, monarchique, national, etc., c’est répudier la révolution sociale. C’est s’imaginer qu’une armée prendra position en un lieu donné et dira "Nous sommes pour le socialisme", et qu’une autre, en un autre lieu, dira "Nous sommes pour l’impérialisme", et que ce sera alors la révolution sociale !

Quiconque attend une révolution sociale “pure” ne vivra jamais assez longtemps pour la voir. Il n’est qu’un révolutionnaire en paroles qui ne comprend rien à ce qu’est une véritable révolution.

Lénine
dans "Bilan d’une discussion sur le droit des nations", 1916,
Oeuvres tome 22

© Copy Left Le Grand Soir - Diffusion autorisée et même encouragée. Merci de mentionner les sources.
L'opinion des auteurs que nous publions ne reflète pas nécessairement celle du Grand Soir

Contacts | Qui sommes-nous ? | Administrateurs : Viktor Dedaj | Maxime Vivas | Bernard Gensane
Le saviez-vous ? Le Grand Soir a vu le jour en 2002.