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Comment les cygnes noirs façonnent une planète en panique (Consortium News)

Siège de l’OPEP à Vienne. (Vincent Eisfeld, CC BY-SA 4.0, Wikimedia Commons)

La planète est-elle sous le sort d’une série de Cygnes Noirs - un effondrement de Wall Street causé par une prétendue guerre du pétrole entre la Russie et la Maison de Saoud, plus la propagation incontrôlée de Covid-19 - menant à un "pandémonium tous azimuts", comme le prétend Nomura, la holding japonaise ?

Ou, comme le suggère l’analyste allemand Peter Spengler, tout ce que "la crise évitée dans le détroit d’Ormuz n’avait pas encore provoqué, pourrait maintenant venir des "forces du marché"" ?

Commençons par ce qui s’est réellement passé après cinq heures de discussions relativement polies vendredi dernier à Vienne. Ce qui s’est transformé en un effondrement de facto de l’OPEP+ a été un véritable revirement de situation.

L’OPEP+ comprend la Russie, le Kazakhstan et l’Azerbaïdjan. Essentiellement, après des années de fixation des prix par l’OPEP - le résultat de la pression incessante des États-Unis sur l’Arabie saoudite - tout en reconstruisant patiemment ses réserves de devises étrangères, Moscou a vu la parfaite occasion de frapper, en ciblant l’industrie américaine du schiste.

Les actions de certains de ces producteurs américains ont plongé de 50 % le "lundi noir". Ils ne peuvent tout simplement pas survivre avec un baril de pétrole autour de 30 dollars - et c’est vers ça que l’on se dirige. Après tout, ces entreprises se noient sous leurs dettes.

Un baril de pétrole à 30 dollars doit être considéré comme un cadeau précieux et un ensemble de mesures de relance pour une économie mondiale en pleine tourmente - en particulier du point de vue des importateurs de pétrole et des consommateurs. C’est ce que la Russie a rendu possible.

Et la relance pourrait durer un certain temps. Le Fonds de la Richesse Nationale de la Russie a clairement indiqué qu’il disposait de réserves suffisantes (plus de 150 milliards de dollars) pour couvrir un déficit budgétaire de six à dix ans - même avec un pétrole à 25 dollars le baril. Goldman Sachs a déjà parié sur un éventuel Brent à 20 dollars le baril.

Comme le soulignent les négociants du Golfe persique, la clé de ce qui est perçu aux États-Unis comme une "guerre du pétrole" entre Moscou et Riyad réside principalement dans les produits dérivés. Essentiellement, les banques ne seront pas en mesure de payer les spéculateurs qui détiennent une assurance sur les produits dérivés contre une forte baisse du prix du pétrole. La tension supplémentaire vient de la panique des traders, avec la propagation de Covid-19 dans des pays qui ne sont visiblement pas préparés à y faire face.

Observer le jeu russe

Moscou a dû parier au préalable que les actions russes négociées à Londres - telles que Gazprom, Rosneft, Novatek et Gazprom Neft - s’effondreraient. Selon Leonid Fedun, copropriétaire de Lukoil, la Russie pourrait perdre jusqu’à 150 millions de dollars par jour à partir de maintenant. La question est de savoir pendant combien de temps cela sera acceptable.

Pourtant, dès le début, la position de Rosneft a été que pour la Russie, l’accord avec l’OPEP+ était "vide de sens" et ne faisait que "dégager la voie" pour le pétrole de schiste américain.

Le consensus parmi les géants russes de l’énergie était que la configuration actuelle du marché - une "demande négative de pétrole" massive, une offre en surplus et aucun producteur pour réablir l’équilibre - devait inévitablement faire chuter le prix du pétrole. Ils observaient, impuissants, que les États-Unis vendaient déjà du pétrole à un prix inférieur à celui de l’OPEP.

L’action de Moscou contre l’industrie américaine de Fracturation hydraulique était une vengeance contre l’administration Trump qui s’en prenait à Nord Stream 2. On paria sur une inévitable et forte dévaluation du rouble - en considérant aussi que le rouble était déjà bas de toute façon.

Pourtant, ce qui s’est passé après Vienne n’a pas grand-chose à voir avec une guerre commerciale entre la Russie et l’Arabie Saoudite. Le ministère russe de l’énergie est flegmatique : circulez, il n’y a rien à voir . Riyad, de manière significative, a émis des signes que l’accord OPEP+ pourrait être de retour dans un avenir proche. Un scénario possible est que ce genre de thérapie de choc se poursuive jusqu’en 2022, puis la Russie et l’OPEP reviendront à la table des négociations pour conclure un nouvel accord.

Il n’y a pas de chiffres définitifs, mais le marché du pétrole représente moins de 10 % du PIB de la Russie (il était de 16 % en 2012). En 2019, les exportations pétrolières de l’Iran ont chuté de 70 %, et Téhéran a quand même réussi à s’adapter. Pourtant, le pétrole représente plus de 50 % du PIB saoudien. Riyad a besoin de pétrole à pas moins de 85 dollars le baril pour payer ses factures. Le budget 2020, avec un pétrole brut à 62-63 dollars le baril, présente encore un déficit de 50 milliards de dollars.

Aramco affirme qu’à partir du 1er avril, ils offriront pas moins de 300 000 barils de pétrole par jour, soit plus que leur "capacité maximale soutenue". Ils disent qu’ils seront en mesure de produire un énorme 12,3 millions de barils par jour.

Les négociants du Golfe persique disent ouvertement que ce n’est pas viable. C’est le cas. Mais la Chambre des Saoud, en désespoir de cause, va puiser dans ses réserves stratégiques pour déverser le plus de brut possible dès que possible - et maintenir la guerre des prix à son maximum. L’ironie (huileuse) est que les principales victimes de la guerre des prix sont une industrie appartenant au protecteur américain.

L’Arabie Saoudite est dans une pagaille. Le Wall Street Journal a rapporté vendredi qu’un des frères du roi, le prince Ahmed bin Abdulaziz al Saud, et un neveu, le prince Mohammed bin Nayef, deux puissants Saoudiens, ont été arrêtés et accusés de trahison pour avoir prétendument comploté contre le roi Salman et son fils, le prince héritier Mohammed bin Salman (MbS).

Chaque grain de sable dans le désert de Nefud sait que Jared d’Arabie Kushner, le copain de whatsapp, MbS, a été le dirigeant de facto ces cinq dernières années, mais le moment de sa nouvelle purge à Riyad en dit long.

La CIA est furieuse : Nayef était et reste le principal atout de Langley. Le fait que le régime saoudien ait dénoncé les "Américains" comme partenaires d’un éventuel coup d’État contre MBS doit être interprété comme la "CIA". Ce n’est qu’une question de temps avant que l’Etat Profond américain, en conjonction avec des éléments mécontents de la Garde nationale, vienne chercher la tête de MbS - même s’il prépare une prise de pouvoir totale avant le sommet du G-20 à Riyad en novembre prochain.

La Chute du Faucon Noir ?

Que va-t-il se passer ensuite ? Au milieu d’un tsunami de scénarios, de New York à partout en Asie, la version la plus optimiste est que la Chine est sur le point de gagner la "guerre du peuple" contre Covid-19, et les derniers chiffres le confirment. Dans ce cas, la demande mondiale de pétrole pourrait augmenter d’au moins 480 000 barils par jour.

C’est beaucoup plus compliqué.

Tout indique maintenant une confluence d’un Wall Street en panique, d’une hystérie de masse de Covid-19, d’innombrables répliques du désordre commercial mondial du président Donald Trump, du cirque électoral américain et de l’instabilité politique en Europe. Ces crises imbriquées forment la tempête parfaite. Pourtant, la direction prise par le marché s’explique facilement comme étant peut-être le début de la fin de l’injection par la Fed de dizaines de milliers de milliards de dollars américains dans l’économie par le biais d’assouplissements quantitatifs depuis 2008. C’est ce qu’on appelle le bluff des banquiers centraux.

On peut affirmer que la panique financière actuelle ne se résorbera que lorsque le cygne noir ultime - Covid-19 - sera contenu. En empruntant le célèbre adage hollywoodien - "personne ne sait rien" - tous les paris sont ouverts. Au milieu d’un épais brouillard, et sans tenir compte de la quantité habituelle de désinformation, un analyste de Rabobank, entre autres, a imaginé quatre scénarios plausibles de Covid-19. Il estime maintenant que cela devient "moche" et que le quatrième scénario - "l’impensable" - n’est plus si lointain.

Cela implique une crise économique mondiale d’une ampleur, oui, impensable.

Tout dépendra dans une large mesure de la vitesse à laquelle la Chine - l’incontournable maillon indispensable de la chaîne d’approvisionnement mondiale en flux tendus - retrouvera une nouvelle normalité, compensant ainsi les interminables semaines de quarantaines en série.

Méprisée, discriminée, diabolisée 24 heures sur 24 et 7 jours sur 7 par le "leader du système", la Chine est devenue un Nietzsche à part entière - sur le point de prouver que "ce qui ne vous tue pas vous rend plus fort" lorsqu’il s’agit d’une "guerre du peuple" contre Covid-19. Sur le front américain, il y a espoir minime que le Faucon Noir - et son "Hélicoptère monétaire" (*) - s’écrase pour de bon. C’est l’ultime Cygne Noir qui aura le dernier mot.

Pepe Escobar

Traduction "croisons les doigts" par Viktor Dedaj pour le Grand Soir avec probablement toutes les fautes et coquilles habituelles

(*) L’Hélicoptère monétaire est un type de politique monétaire consistant, pour une banque centrale, à créer de la monnaie et de la distribuer directement aux citoyens, à la manière d’un dividende citoyen. L’idée est devenue célèbre grâce à l’économiste américain Milton Friedman en 1969 - Wikipédia (NdT)

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« Cuba mi amor », un roman sur le Che de Kristian Marciniak (Rebelion)
Leyde E. Rodri­guez HERNANDEZ
Publié chez Publibook, une maison d’édition française, le roman de Kristian Marciniak : « Cuba mi amor » circule dans Paris ces jours-ci. Dans un message personnel adressé au chroniqueur de ce papier, l’auteur avoue que Cuba a été le pays qui lui a apporté, de toute sa vie, le plus de bonheur, les plus grandes joies et les plus belles émotions, et entre autres l’orgueil d’avoir connu et travaillé aux côtés du Che, au Ministère de l’Industrie. Le roman « Cuba mi amor » est un livre (…)
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(...) quelqu’un a dit il y a vingt ans : "vous pouvez croire tout ce qu’on raconte sur cet homme, sauf qu’il est mort".

(...) Ce lieu sera pour toujours un témoignage de lutte, un appel à l’humanisme. Il sera aussi un hommage permanent à une génération qui voulait transformer le monde, et à l’esprit rebelle et inventif d’un artiste qui contribua à forger cette génération et en même temps en est un de ses symboles les plus authentiques.

Les années 60 étaient bien plus qu’une période dans un siècle qui touche à sa fin. Avant toute chose, elles ont été une attitude face à la vie qui a profondément influencé la culture, la société et la politique, et a qui a traversé toutes les frontières. Un élan novateur s’est levé, victorieux, pour submerger toute la décennie, mais il était né bien avant cette époque et ne s’est pas arrêté depuis. (...)

Avec une animosité obstinée, certains dénigrent encore cette époque - ceux qui savent que pour tuer l’histoire, il faut d’abord lui arracher le moment le plus lumineux et le plus prometteur. C’est ainsi que sont les choses, et c’est ainsi qu’elles ont toujours été : pour ou contre les années 60.

Ricardo Alarcon,
président de l’Assemblée Nationale de Cuba
Allocution lors de l’inauguration de la statue de John Lennon à la Havane, Décembre 2000

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