(La proposition d’une bourse iranienne du pétrole, par Krassimir Petrov. )
[Jacques Chirac refuse de se plier à l’impérialisme US.
(...) interpréter ce discours comme celui d’un Président français affaibli tant au plan intérieur qu’au niveau européen par les élections allemandes et la présence désormais d’une chancelière atlantiste, plus proche désormais de Tony Blair sur la question de la vassalisation acceptée de l’Europe serait une erreur.]
22 janvier 2006
La position de Jacques Chirac sur la force de frappe nucléaire de son discours de Brest [1]
s’analyse à un double niveau,
1) l’affirmation du droit de l’impérialisme à agir comme bon lui semble, en violation des règles qu’il prétend imposer aux autres.
2) un impérialisme qui refuse le leadership des Etats-Unis et prétend agir pour son propre compte, la France revendique son rôle de puissance nucléaire pour devenir le leader de l’Europe.
1) La position de l’Iran :
Cette position d’un pays sous la menace d’une intervention , y compris nucléaire de la part des Etats-Unis décrit bien la stratégie impérialiste, et voit surtout dans les propos du chef de l’Etat français une affirmation du "droit impérialiste", donc une mise en cause de la légalité internationale, une affirmation du droit du plus fort sans ,aucune des hypocrites raisons habituelles invoquées par Bush et ses alliés. Il est certes question des "menaces", mais surtout des "intérêts".
Le porte-parole du ministère iranien des Affaires étrangères Hamid Reza Asefi a estimé que la mise en garde lancée jeudi par le chef d’Etat français reflétait les intentions réelles des puissances nucléaires, selon l’agence officielle IRNA.
Le président français a dévoilé "les intentions secrètes des puissances nucléaires en utilisant ce levier (armes nucléaires) pour déterminer les jeux politiques", a déclaré M. Asefi, cité par IRNA.
Pour le porte-parole, la fin de la pauvreté dans le monde et l’arrêt des discriminations dans les relations internationales représenteraient un meilleur moyen d’anéantir le terrorisme.
"Chirac ferait mieux de presser les dirigeants occidentaux " afin qu’ils avancent sur la voie consistant à s’attaquer "aux racines de la discrimination, de la pauvreté et de l’injustice dans diverses parties du monde", a souligné M. Asefi au sujet de la menace nucléaire.
De son côté, la télévision publique iranienne a déclaré samedi que Jacques Chirac avait "négligé les règlements internationaux" concernant le désarmement nucléaire.
Les "(menaces de Chirac) montrent que les appels lancés par des puissances nucléaires pour le désarmement ne sont rien de plus qu’une affirmation et que les traités internationaux sont utilisés comme un instrument pour exercer des pressions sur d’autres pays", a-t-elle ajouté.
S’adressant jeudi aux agresseurs potentiels -jamais cités- de la France, Jacques Chirac a voulu ne "pas laisser planer le doute sur notre volonté et notre capacité à mettre en oeuvre nos armes nucléaires" en cas de menace contre nos "intérêts vitaux".
Ainsi, la France est "en mesure d’infliger des dommages de toute nature à une puissance majeure qui voudrait s’en prendre à des intérêts que nous jugerions vitaux", a-t-il dit lors d’une visite à l’Ile-Longue, près de Brest (Finistère). Et pour la première fois, le président français a mis en garde "les dirigeants d’Etats qui auraient recours à des moyens terroristes".
En effet, le discours de Jacques Chirac ne s’embarrasse pas de "sécuritaire" à l’usage du peuple français, on peut même estimer qu’un tel discours prend le risque de transformer le territoire français en terrain d’exercice des "terroristes fanatiques" ou d’Al-Quaïda [2].
"La dissuasion nucléaire (...) dit Jacques Chirac n’est pas destinée à dissuader des terroristes fanatiques", appartenant à des organisations comme Al-Qaïda par exemple. Mais "les dirigeants d’Etats qui auraient recours à des moyens terroristes contre nous" et "ceux qui envisageraient d’utiliser (...) des armes de destruction massive, doivent comprendre qu’ils s’exposeraient à une réponse ferme et adaptée de notre part".
Donc l’Iran voit bien dans la menace du Président Chirac, une manière de dévoiler les intentions et les hypocrisies des Etats Occidentaux, qui font fi en ce qui les concerne des règlements internationaux qu’ils prétendent imposer aux autres, y compris quand ils tentent de développer une énergie nucléaire pacifique pour leur propre compte.
2) Jacques Chirac refuse de se plier à l’impérialisme US :
Mais interpréter ce discours comme celui d’un Président français affaibli tant au plan intérieur qu’au niveau européen par les élections allemandes et la présence désormais d’une chancelière atlantiste, plus proche désormais de Tony Blair sur la question de la vassalisation acceptée de l’Europe serait une erreur. [3] C’est même le contraire, notons que si on peut toujours considérer que ce discours s’explique par des jeux internes avec Sarkozy, le point d’appui réel est au niveau international, en Europe, mais au-delà puisqu’il passe désormais aux yeux du monde pour le défenseur de l’altermondialisme, voir un écologiste. Sans parler de la Chine ou de la Russie, eux-mêmes à la recherche d’une stratégie alternative et au monde arabe. Ce discours n’est pas une offre de service à Bush, mais au contraire l’affirmation qu’il y a en Europe, un impérialisme concurrent capable d’agir de la même manière que les Etats-Unis mais qui, désire rester maître chez lui.
Mieux il constate le déclin des Etats-Unis, leur incapacité à jouer le rôle auquel ils prétendent, donc il dit nous ne sommes plus au temps de l’Union soviétique, nous pouvons agir pour notre propre compte. Nous estimerons nos intérêts et les menaces au niveau européen, et la France possède les moyens nucléaires de son ambition.
Il dit :
"En 1995, la France avait émis l’idée ambitieuse d’une dissuasion concertée afin d’initier une réflexion européenne sur le sujet. Ma conviction demeure que nous devrons, le moment venu, nous poser la question d’une défense commune qui tiendrait compte des forces de dissuasion existantes, dans la perspective d’une Europe forte, responsable de sa sécurité."
De nombreuses réactions se sont fait jour comme celles de Guido Westerwelle (dirigeant du parti de droite FDP) qui a appellé Chirac a plus de retenue dans ses décalarations, ou bien le député CDU Eckart von Klaeden qui a indiqué que les mots de Chirac étaient particulièrement " malheureux ". Ce sont là les plus proches alliés militaro-economiques de la France. Mais on pourrait citer toute une série de réactions , provenant d’abord des rangs des droites diverses ou des gauches de droite en Europe.
Ce discours se heurte donc effectivement à la droite européenne et aux atlantistes de gauche, puisque Jacques Chirac en fait leur explique que désormais, les USA sont en difficulté dans le monde et qu’ils n’ont plus à protéger l’Europe, singulièrement l’Allemagne de la puissance soviétique, les Européens peuvent agir pour leur propre compte et rester maître chez eux. Dans un tel contexte c’est un défi aux Etats-Unis et au contraire l’affirmation du refus de les suivre. Les Européens doivent agir pour leur propre compte.
La vraie question que pose ce discours est celle du réalisme d’une telle vision de l’Europe telle qu’elle est, dominée de fait au niveau économique par son choix néo-libéral, elle l’est totalement au niveau politique et les récentes élections n’ont fait qu’accentuer la tendance à l’acceptation de la vassalisation. [4] De surcroît cette Europe n’est pas celle des peuples qui au contraire repoussent cette construction européenne qui se traduit par une dégradation de leur condition d’existence autant que par la perte de leur pouvoir d’intervention sur les choix politiques et économiques. Le Non à la Constitution des Français a traduit cette réalité. Comme d’ailleurs l’impossibilité grandissante de s’entendre sur une politique commune qui dépasserait le simple niveau de la mise en oeuvre de dispositions néo-libérales contre les dits peuples.
Jacques Chirac n’a plus beaucoup d’alliés même si Berlusconi par exemple est tenté par cette stratégie impérialiste mais indépendante (retrait des troupes d’Irak, gendarmerie européenne stationnée en Italie). Sur le strict plan de la défense européenne, on peut noter que même Zapatero semble préférer son propre potentiel industriel intégré aux Etats-Unis plus qu’à l’Europe. Il ne reste comme atour maître au président français que premièrement sa force de frappe et l’appui que pourraient lui apporter d’autres puissances nucléaires comme la Chine, la Russie voir l’Inde...
Il risque de ce fait d’y avoir des réactions inattendues de la Chine, de la Russie et même de l’Amérique latine. Pour les peuples d’Amérique latine, et singulièrement ceux qui tentent à la fois de se protéger de leur puissant voisin, mais également de trouver les moyens d’une stratégie originale d’un développement autocentré dont les ressources seraient réservées à résoudre les problèmes dramatiques de leurs populations, la question est posée : faut-il dénoncer comme le fait l’Iran qui est en première ligne, la stratégie des puissances impérialistes ou jouer sur les contradictions interimperialistes, les concurrences féroces entre ces puissances ? Pour ce que nous en voyons aujourd’hui, y compris dans les positions du nouveau président de la Bolivie Evo Morales, il faut apprendre à danser non plus seulement avec le loup étasunien, mais avec le reste de la meute. [5]
En ce qui concerne le peuple français, sans négliger ce niveau international et le danger que fait courrir à toute la planète, êtres humains et environnement l’impérialisme US sénile et meurtrier, en lutte contre son propre déclin et dont la dangerosité est extrême, il doit bien mesurer qu’il ne peut dans le même temps cautionner pour l’Europe, ni pour son propre pays, le moindre mal que serait la montée d’un impérialisme local dont la violence s’exerce sur lui. Et l’effort d’armement qui est exigé de lui, par exemple, aux dépends de ses services publics, de son emploi, de sa vie, comme un modèle basé sur la guerre généralisée, la violation de toute légalité, l’exercice de la loi du plus fort, l’exaspération des concurrences. Et le meilleur service que puisse rendre à la planète, le peuple nord-américain, comme d’ailleurs les peuples occidentaux seraient de la débarrasser de leurs dirigeants prédateurs.
Toute la question est là et dans l’immédiat il est peu de dire que nous sommes loin d’être avancés sur le chemin de la construction d’une alternative comme d’autres peuples. Il n’existe actuellement aucune force politique à gauche comme à droite capable de dégager cet objectif, elle reste à construire.
Danielle Bleitrach
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Du peuple déicide, du Protocole des Sages de Sion au montage du journal Libération, par Danielle Bleitrach.