Son diagnostic se fonde sur des objectifs et des recettes propres à un paradigme qui ne correspond pas au modèle socio-économique que la majorité sociale y réclame dans les urnes, élection après élection, chaque fois qu’elle se rend à un rendez-vous électoral. La CEPAL fait le choix d’ignorer ce que le peuple désire chaque fois qu’elle met la main à la pâte au moment d’élaborer une publication économique ; elle préfère suivre sa ligne, usant et abusant des critères hégémoniques sans prendre en compte ni respecter ce que chaque société choisit en tant que façon de coexister économiquement.
Peu importe que la Colombie ou le Mexique aient décidé de parier sur une économie de type néolibéral à la différence du Venezuela et de la Bolivie : le jugement est toujours formulé selon la même perspective. Il s’agit d’imposer une homogénéité forcée dominante qui n’envisage pas l’hétérogénéité de différents processus. Dans cette optique, de tentative de domination/colonisation épistémologique, la CEPAL examine l’économie vénézuélienne avec un abus de copier/coller pour finir par condamner ce qu’elle voulait sûrement condamner avant de procéder au moindre calcul : “les protestations du début se poursuivent et se sont étendues à d’autres secteurs de la population”.
L’effet perroquet, si l’on peut se permettre le terme, doit être apprécié comme critère sélectif afin d’être en partie en accord avec n’importe lequel des organismes internationaux hégémoniques qui se consacrent à l’analyse de la conjoncture économique de chaque pays. Cette manie qui consiste à répéter toujours la même chose indépendamment de ce que l’on traite, est une pratique courante dans les documents de ces centres de (non) pensée qui fixent l’agenda mondial. Cette sorte d’épistémicide consiste à en finir d’un trait de plume avec n’importe quel épistème local en le remplaçant par un autre, venu et imposé de l’extérieur. Il s’agit d’utiliser toujours la même grille d’analyse, avec un excès de déjà vu, le même dogme et avec les mêmes priorités et objectifs toujours déterminés de l’extérieur sans qu’importe ce que choisit la majorité sociale. C’est ainsi que se succèdent à l’infini les études économiques destinées à examiner de nombreux pays sous une loupe qu’ils n’ont pas choisie. Dans le cas du Venezuela, c’est ce qui se passe quotidiennement.
D’autre part, si ce rapport de la CEPAL avait été écrit par n’importe quel économiste n’appartenant pas à l’establishment on l’aurait accusé (d’emblée) de manque de rigueur en matière d’économie. Pourquoi ? Parce qu’en plus de manquer d’identité épistémologique, le document présente de sérieuses erreurs dans l’analyse qu’il devrait avoir évitées. Voici ci-dessous quelques-uns des impairs (volontaires et/ou involontaires) dans la façon dont la CEPAL voit l’économie vénézuélienne.
1. Comme d’habitude : l’inflation est un sujet magique qui ne peut s’expliquer que par l’émission de monnaie. Rien n’a d’importance dans l’île de Robinson Crusoé, où il n’y a personne, ni intérêts, ni pouvoir. Tout est dû à cette question de l’augmentation des agrégats monétaires (M1 et M2). Le manque de rigueur dans ce cas est double. D’une part, il n’envisage pas la possibilité que l’inflation soit le résultat d’une bataille autour de la distribution, d’une bataille qui dépend en grande partie du contrôle du pouvoir du marché ; si c’est une seule entreprise qui a le monopole de l’importation d’un bien très demandé, et si cette population possède un haut pouvoir d’achat, alors, le prix tendra à être élevé à moins qu’il n’y ait une régulation effective soit sur les prix, soit sur la limite des bénéfices concernant celui qui finit par fixer le prix.
Ceci ne semble pas être digne d’intérêt pour la CEPAL. D’autre part, et le pire, c’est que la thèse cépalienne ne se réalise même pas selon son propre dogme : plus d’émission monétaire entraîne plus d’inflation. C’est ainsi qu’elle explique l’inflation des années 2013 et 2014 ; la CEPAL affirme qu’ “en 2013 la politique monétaire a été fortement expansive. Une augmentation moyenne interannuelle des agrégats monétaires M1 et M2 de 66% et 65% respectivement, très supérieure à l’inflation interannuelle moyenne qui a été de 40% (…) Durant les quatre premiers mois de 2014, la politique monétaire a clairement continué d’être expansive et les agrégats M1 et M2 ont présenté une augmentation interannuelle en moyenne de 76% et de 75% respectivement. L’inflation moyenne interannuelle durant cette même période a été de 59% ». A partir de cette relation, elle essaye de maintenir cette thèse infondée ; mais néanmoins, les auteurs du document n’ont pas eu envie d’aller voir tout simplement ce qui passait quelques années auparavant : dans ce même Venezuela de l’année 2005, l’augmentation monétaire interannuelle avait été supérieure à 100% et l’inflation annuelle avait été de 14,4% (voir le travail de José Gregorio Piña Torres dans El mito de la maquinita, Centro de Estudios de Economía Política, Univ. Bolivarienne du Venezuela). Voilà, la maxime orthodoxe monétariste ne se vérifie pas dans ce même Venezuela, ne serait-ce que quelques années plus tôt.
On a un autre exemple dans le document La falsabilidad del monetarismo (d’Adrian Gonzalez, Centre de recherche et de gestion de l’Economie Solidaire). Dans celui-ci, citant Zaiat, on affirme qu’en Argentine “ dans la période 2007-2013, dans un moment d’expansion et de contraction monétaire, les indices de prix se sont maintenus à des niveaux élevés stables, que ce soit au niveau de l’indicateur officiel (10%) ou des indicateurs privés (20-25%). Par conséquent, les tensions inflationnistes ont été constantes indépendamment d’une plus grande ou moindre croissance de la création monétaire (émission d’argent). En outre, on ajoute que “l’indice des prix à la consommation des Etats-Unis n’a pas dépassé 10,3% entre 2008 et 2012 alors que l’émission monétaire a été de presque 160% durant cette même période ; au Royaume-Uni il a été de 16,4% alors que son émission a été de presque 203% ; pour le Brésil, la variation des prix a été de 27,6% alors que son émission a augmenté de presque 123%. Quant à la Chine elle a connu une variation des prix de 16,6% pour une croissance de l’émission d’un peu plus de 100%, durant la même période de référence.” En définitive, dans chaque cas que propose la CEPAL pour démontrer la relation existante entre émission monétaire et inflation, nous pouvons trouver un autre contre-exemple qui prouve le contraire. Et pourquoi ça ? Parce que l’inflation va beaucoup plus loin qu’une simple relation réductrice entre deux variables nominales du fait que l’économie réelle a beaucoup à dire dans ce débat.
2. La panacée de l’accumulation de réserves. C’est une histoire de caquetage économique dominant. Premièrement, la faille consiste à considérer que ce moyen discutable est une fin en soi. Et deuxièmement, à continuer de soutenir que les réserves sont une condition obligatoire pour assurer le rythme des importations. La vielle règle dit qu’il faut toujours disposer d’un minimum de réserves équivalant à trois mois d’importation. Mais, cette prémisse ne tient pas compte du fait que de nos jours, en pleine transition géoéconomique, avec de nouvelles alliances économiques indépendantes des pays capitalistes les plus en vue, il est possible de garantir les importations de multiples façons, lesquelles ont peu à voir avec le niveau de réserves dont on dispose. Si un pays a dans son sous-sol la réserve de pétrole la plus importante du monde, celle-ci représente la véritable garantie pour disposer de mécanismes d’importation à crédit, et par anticipation, sans qu’il ne soit besoin d’avoir à présenter un niveau élevé de réserves. Il y a de nouveaux moyens de paiement en ce moment de lente désaméricanisation de l’économie mondiale où de plus en plus de pays accumulent des réserves dans des monnaies différentes du dollar.
En outre, on réalise de plus en plus de transactions commerciales sans passer par le dollar en utilisant des monnaies propres ou d’autres types d’échange (sur la base de la livraison d’une certaine quantité de pétrole ou de matières premières). Continuer d’accumuler des réserves oisivement dans le seul but de satisfaire un présupposé économiquement erroné serait une grossière sottise dans ces moments où l’on exige de plus en plus un usage productif de la devise. La CEPAL présente pour le Venezuela une situation au bord de l’abîme parce qu’il n’a pas de réserves suffisantes ; elle ignore les nouvelles dispositions pour permettre un rythme élevé d’importations en même temps qu’elle méconnaît : a) l’actuelle alliance passée avec la Chine (dont on ne dit rien dans le rapport car sans doute la Chine n’existe-t-elle pas, pas plus que l’engagement chinois à investir 20 000 millions de dollars au Venezuela), et b) que les importations du Venezuela sont de plus en plus diversifiées ( les importations depuis les Etats-Unis en dollars ne représentent qu’un peu moins de 25% du total). On parvient à la rigueur par la rigueur ; on aurait pu dire qu’il est bien vrai que les réserves ont diminué (non pas durant cette dernière année 2014, mais effectivement durant l’année 2013) et que cela peut être un motif de préoccupation, mais en précisant toujours les autres aspects qui sont nécessaires pour avoir une vision plus globale de la question des importations et des réserves.
3. Le manque de devises et le marché illégal de dollars. Voilà comment la CEPAL justifie qu’il existe au Venezuela un taux de change illégal qui est exagérément supérieur à n’importe lequel des trois indicateurs officiels. Elle n’aborde même pas la question de la spéculation pas plus qu’elle ne condamne l’illégalité de ce taux de change, mais bien au contraire, elle argumente en faveur de l’existence de celui-ci et tente de donner de la rationalité économique à une question qui relève davantage de la rationalité politique. Ainsi trouve-t-on dans ledit rapport : “la quantité de devises remises aux entreprises privées ne suffit pas à couvrir les besoins d’importations. Preuve de cela, la brèche qui existe entre les taux de change officiels et le taux de change du marché parallèle.” Or, s’il en était ainsi, comment explique-t-on que le taux de change illégal ait augmenté à une vitesse qui ne correspondait pas à la supposée baisse de remise de devises ? Selon les chiffres dont on dispose jusqu’à ce jour, il est plus que probable qu’il y ait eu moins de remise de devises dans l’année 2013 qu’en 2014, et néanmoins, le taux de change illégal durant l’année passée a été bien supérieur à celui de l’année précédente. Une autre thèse qui ne se vérifie pas : il n’y a pas de correspondance directe entre la baisse des devises remises et le taux de change illégal.
Il n’existe pas non plus de relation proportionnelle, c’est clair, le déficit de devises pour importer (si tant est qu’il existât comme l’affirment les chefs d’entreprise) n’a pas monté autant que l’a fait le taux de change illégal. Quelle que soit la façon de voir les choses, la justification du taux de change illégal selon une simple règle basée sur l’offre et la demande de devises ne tient pas. Cette question dépasse de loin ce petit jeu. Oui, il est vrai qu’il peut y avoir un pourcentage qui s’explique de cette façon. Mais, les véritables causes résident dans le réel intérêt qu’ont à déstabiliser ceux qui affichent un véritable pouvoir de marché pour un taux de change illégal en capacité d’indexer les prix. Ceci permet, d’abord, de créer du mécontentement social ; deuxièmement et fondamentalement, on remplit ainsi le véritable objectif de cette opération spéculative et illicite : se réapproprier en grande partie la rente pétrolière qui retourne au pays.
Pour le capitalisme, le débat a cessé d’être la rente pétrolière à la source, car la bataille au sein de PDVSA est perdue ; ces dernières années, le capitalisme s’arrange avec la nouvelle maison socialiste pour voir où elle peut capter le maximum de gain à partir du débat sur la destination de la rente pétrolière (aux mains du peuple vénézuélien, soit directement du fait d’un plus grand pouvoir d’achat ou indirectement via les Missions sociales). Comment faire ? En plus d’utiliser la voie du « rentisme importateur du XXIème siècle », improductif et oisif, j’achète à l’extérieur et je vends à l’intérieur sans désir de produire et en obtenant un gain facile et très élevé, accompagné d’une stratégie spéculative basée sur l’indexation des prix grâce précisément à ce marché illégal du dollar. Voilà la raison d’être de ce taux de change illégal : créer un malaise dans le peuple vénézuélien en même temps qu’on continue d’engraisser le taux de profit du capital en absorbant un fort pourcentage de la rente pétrolière à présent convertie e pouvoir d’achat pour la majorité du peuple vénézuélien.
4. L’emploi est une question dépourvue d’importance économique. Tel pourrait être le message subliminal si l’on lisait attentivement le rapport de la CEPAL. Seulement une phrase, et courte phrase, à la dernière page : “ En 2013, la moyenne du taux de chômage urbain est tombé de 0.3 point en pourcentage et a été de 7.8%. Le « taux de population active » a augmenté de 0.4 point, atteignant 64.3%. Ce petit détail pour dire que oui, c’est bien d’avoir un taux de chômage bas, mais ce n’est pas le moins du monde un sujet central en matière d’économie. Le fait d’avoir une bonne santé en matière d’emploi est sûrement un aspect insignifiant pour quelque étude économique que ce soit et qui prétendrait être rigoureuse face à l’establishment. Que l’emploi se voit affecté en période de contraction économique passe inaperçu ; tout comme passe inaperçu le fait que cette caractéristique soit une des forces du modèle économique au Venezuela. En 2014 le taux de chômage a fini par être de 5.5%, ceci étant l’un des taux le plus bas de la région. Si on le compare avec des pays qui ont des taux supérieurs à 20% (et où le chômage des jeunes est supérieur à 50%), il est très difficile d’affirmer que le Venezuela se trouve au bord du précipice. Jouir d’un modèle économique capable de garantir l’emploi est une condition qui ne doit pas être ignorée ou négligée car c’est la base sur laquelle il convient de continuer à avancer en matière de défis économiques structuraux. Le Venezuela démontre ainsi que la variable d’ajustement ne se fait pas sur le terrain de l’emploi, pas plus que sur le terrain social, comme nous le verrons dans le point suivant. L’actuelle contraction extérieure ne se traduit pas dans ce cas par une baisse interne de l’emploi ; actuellement, la détérioration de l’emploi n’est pas la solution choisie au Venezuela.
5. La pauvreté ne doit pas ignorer la dimension non monétaire. On ne peut pas toujours mesurer avec le même indicateur dans tous les cas de figures. Imaginez qu’il existe un endroit où la vie, les droits sociaux, les besoins de base ne sont pas tous commercialisés, dans ce cas, il serait incongru de continuer à mesurer la pauvreté ou non d’une personne à partir de critères relevant de la commercialisation. Ceci ne signifie pas qu’il ne soit pas important et nécessaire d’évaluer le niveau de pauvreté d’un être humain également par l’incapacité à disposer de ressources monétaires pour réaliser certains actes de consommation nécessaires. Mais, cette tâche ne doit ni réduire, ni exclure d’autres choix qui sont pertinents lorsque les modèles économiques ne commercialisent pas certains aspects qui sont indispensables lorsque l’on parle de pauvreté. En ce sens, la CEPAL, dans son Panorama Social de l’Amérique Latine affirme qu’au cours de l’année 2013, il y a eu une augmentation de la pauvreté au Venezuela, mais il s’agit d’une pauvreté mesurée exclusivement sur la base du revenu monétaire sans aucune prise en compte de toutes les prestations sociales que reçoit le peuple par le biais de « l’État intégral des Missions » et qui englobe un grand nombre de besoins de base.
En d’autres termes, il s’agit réellement d’une analyse très pauvre à l’heure d’aborder un sujet aussi sérieux et « intégral » tel que celui de la pauvreté. On laisse de côté tout besoin de base satisfait par une autre voie que monétaire ou commerciale. Par exemple, les bénéfices sociaux des missions éducatives, de santé et de logement ne sont pas pris en compte dans cette vision myope cépalienne de la pauvreté. Se targuer de rigueur aurait impliqué de continuer à évaluer la pauvreté comme la CEPAL le veut, mais au moins en précisant brièvement que son indicateur ne prend pas en compte ce qui, en revanche, l’est dans le NBI (Nécessité de Base Insatisfaite). Précisément, ce NBI continue de baisser au Venezuela même ces dernières années (l’extrême pauvreté selon NBI est passée de 9.9% en 1999 à 5.5% en 2013 ; la pauvreté selon NBI est passée de 29.3% en 1999 à 19.6% en 2013. Pourtant, la CEPAL ne dit rien de cette amélioration sociale.
En plus de cette discussion, il est un autre point qu’il convient d’éclairer : en observant le tableau de données présenté par la CEPAL, on peut facilement détecter un super-indice (sous la lettre (c) qui signale explicitement que les « chiffres de 2012 et 2013 ne sont pas strictement comparables avec ceux des années précédentes ». En définitive, c’est la CEPAL, elle-même, qui reconnaît que ces chiffres ne peuvent être comparés avec les années précédentes bien qu’elle fasse preuve de bien peu de transparence puisqu’elle n’indique pas le pourquoi de cette note en bas de page. Ce sujet a été totalement ignoré par les échos médiatiques portant sur cette analyse.
Ces cinq points ne dispensent en aucune façon les critiques bienvenues que l’on pourrait formuler à l’heure de réaliser une analyse rigoureuse de l’économie vénézuélienne. De nombreux aspects doivent être débattus comme les défis structuraux et les défis conjoncturels de l’économie du pays. En ce sens, le rapport évoque précisément du bout des lèvres, voire ne le fait même pas, des sujets qui eux sont vraiment cruciaux pour continuer à perfectionner de façon habile un modèle qui ne négocie pas les politiques sociales ni sa souveraineté, pas plus qu’il ne souhaite revenir à l’époque néolibérale. Ce rapport critique aurait pu mettre l’accent sur d’autres aspects au lieu de faire preuve de tant de dogmatisme en ignorant les vrais objectifs fixés dans le dernier Plan Economique ratifié majoritairement dans les urnes par le peuple vénézuélien.
Il existe de nombreux autres points qui, eux, présentent un intérêt pour affronter les années à venir :
1) L’urgence de la révolution productive qui permettrait d’affronter l’ « économie pétro-rentière importatrice », mais en envisageant également l’insertion vertueuse dans les nouvelles chaînes de valeur régionales et globales, et évidemment, en incorporant les nouveaux sujets économiques (communes, petites et moyennes entreprises) dans le but d’une démocratisation de l’appareil productif.
2) L’absolue nécessité d’éviter le rythme croissant des importations liées aux ressources du secteur pétrolier, rythme qui est très supérieur à celui des exportations dans le même secteur.
3) Continuer de chercher le chemin de la souveraineté fiscale basée sur la conception d’impôts plus progressifs et une capacité de recouvrement pour parvenir à se réapproprier la nouvelle rente pétrolière encore aux mains d’une minorité enrichie, ceci, dans le but de la reconditionner en la dirigeant vers la création de richesse productive interne.
4) Reformuler une politique réussie d’achats publics pour mettre ce potentiel au service d’un nouvel ordre économique qui réduise la dépendance de certains secteurs oligopolistiques.
5) Mener une politique financière qui évite un endettement privé excessif pour soutenir la consommation dans une période inflationniste en même temps qu’elle stimule l’épargne interne pour la diriger vers le secteur productif.
6) Accorder une importance primordiale à la politique de distribution et de commercialisation comme outil pour corriger les failles présentes dans les actuels mécanismes usuriers et inefficaces, mais aussi pour disposer de cette rente pétrolière qui revient au pays mais qui se perd e partie dans les différentes phases de la chaîne commerciale.
7) Mener une politique de développement des sciences et des technologies de façon à réduire la néo dépendance de la connaissance (valeur ajoutée importée) en se centrant sur ces axes stratégiques pour un nouveau développement productif au Venezuela .
8) Développer une politique effective de prix justes par le biais de l’utilisation de divers mécanismes qui puissent aller d’un programme de prix maitrisés (accords entre les parties qui fixent des prix à la baisse en contribuant à créer un nouvel imaginaire collectif populaire en la matière) jusqu’à la création d’agences publiques d’importation qui viennent modifier le pouvoir de marché importateur de certaines entreprises.
9) Revoir la politique de subventions sur les combustibles, selon des principes de justice sociale, au nom d’une réorientation productive de l’usage de chaque dollar entré.
10) Mener une nouvelle politique de (ré)investissements qui empêche « la saignée » que représentent les sorties d’argent liées aux bénéfices nets en essayant de rediriger ces fonds sur ces axes productifs stratégiques ( dans les secteurs spécifiques du développement).
Ce sont ces dix points et non les cinq précédents, qui doivent représenter une part essentielle de la nouvelle centralité pour discuter du nouvel ordre économique interne au Venezuela et pour rendre irréversible tout ce qui a été acquis durant la décennie passée en matière sociale.
Ce sont ces points et d’autres encore qui correspondent effectivement au défi de rendre réversible le métabolisme social du capital encore en vigueur dans l’organisation économique vénézuélienne. Ce fut le leitmotiv du dernier message d’Hugo Chavez dans le coup de barre et qui a trouvé continuité dans cette secousse annoncée par le président Nicolas Maduro à la recherche du nouvel ordre économique interne. Ce sont là les vrais défis et les nouvelles questions économiques que pointe la majorité sociale vénézuélienne qui ne veut pas d’autre modèle (du passé) que celui-ci même, mais toujours en constante amélioration, pour continuer à faire des bonds en avant. Cependant, la CEPAL se trompe de cible et continue à viser là où les vénézuéliens ne regardent même pas, pas plus qu’ils n’en attendent quoique ce soit.
Alfredo Serrano Mancilla
L’auteur : né en Andalousie (et de plus en plus latino-américain), Alfredo Serrano Mancilla est Docteur en Economie de l’Université Autonome de Barcelone et titulaire d’un post-Doctorat en Economie de l’Université Laval (Canada). Directeur du Centre Stratégique Latinoaméricain Géopolitique, il est également Professeur universitaire de la FLACSO (Equateur), de l’Universidad Andina et de l’UMSA (Bolivie), l’Universidad Hermosillo et l’UNAM (Mexique), l’Universidad Pablo de Olavide de Sevilla (Espagne), et de l’Université Santa Marta (Colombie).
Source.
Traduction : Sylvie Carrasco.
Collaboration : Marie-Louise Benoît