Je suis tout à fait d’accord, Antar.
Ne pas comprendre que les enfants doivent rester en dehors de tout cela, c’est, déjà, vouloir ignorer que les enfants ne sont pas des adultes et mépriser leurs émotions, leurs peurs et leurs humiliations.
Nier les brimades et ostracismes que subissent actuellement les musulmans et autres populations discriminées, en particulier les sans-papiers, c’est du niveau des déclarations du FN ou de Zemmour, qui disent tout haut ce que le gouvernement fait à la vue de tous et pour le grand bonheur d’une majorité.
C’est cela, c’est anodin qu’un enfant de huit ans soit emmené au commissariat devant ses camarades pour une boutade qu’il aurait lancée en classe.
Même s’il n’y avait eu qu’un seul enfant dans ce cas, c’était un de trop, si on n’est pas dans un régime totalitaire.
Les enfants ont des DROITS et un enfant de 8 ans ne doit pas être emmené dans un commissariat, s’il n’a commis aucun crime grave qui relève de la police et de la justice.
Qu’est-ce que c’est ce pays où les gens sont d’accord pour que des enfants de huit ans soient emmenés au commissariat pour avoir dit quelque chose qui ne convenait pas aux autorités ?
Mais dans quel pays totalitaire sommes-nous, désormais, où on enferme des gens – pire, des enfants, pour délit d’opinion ? Et les "bons français" acceptent ça en ridiculisant ceux qui le dénoncent ?
"Relativiser", en plus ? Il n’y a rien à relativiser ! C’est infect. POINT. Et ne pas voir ça, c’est faire partie du problème.
C’est normal, donc, aussi, que des enseignants livrent des mineurs à la police, pour des propos qui ont été décrétés non politiquement corrects par un gouvernement qui prétend défendre la liberté d’expression et par une ministre de l’éducation qui, de toute évidence, ne sait pas en quoi consiste l’éducation des enfants, et qui exige que tout le monde s’en tienne au diktat gouvernemental.
Et puis, quelle piètre image donnent à cet enfant de 8 ans ces adultes, censés être des éducateurs capables de gérer une situation aussi banale, qui n’ont d’autre réponse que de le remettre entre les mains de la police ?
D’autre part, nier sans être conscient de la possibilité d’un traumatisme, c’est ignorer tout de la fragilité des enfants et adolescents. Alors, pourquoi en parler ?
Une fragilité qui se comprend d’autant mieux quand on voit la désinvolture avec laquelle certains adultes ridiculisent une sanction humiliante et disproportionnée infligée à un jeune enfant.
Il y a près de 1 000 décès par suicide par an parmi les ados, pour 80 000 tentatives.
Tous ceux-là sont sans doute des faux traumatisés.
Et c’est dérisoire de s’inquiéter que la majorité des Français se rangent du côté des pouvoirs et ne voient pas les dérives d’une telle politique.
Mais tant que ce ne sont que des enfants musulmans, hein ! Ces gens-là ne comprennent rien à notre culture de liberté d’expression et de laïcité.
Parce que c’est de cela qu’il s’agit, encore et toujours : s’en prendre sournoisement à la population musulmane, qui ne bénéficie pas des mêmes lois que les autres français.
Aujourd’hui, plus les gouvernements virent à droite, plus les moutons bêlent avec les loups.
Et puis, c’est normal, aussi, que les mineurs isolés étrangers (MIE)soient traités comme du bétail, après tout, ils n’avaient qu’à faire comme nous : ne pas naitre dans un pays de misère et de guerre.
On s’en fiche pas mal des familles déchirées, séparées, vivant dans la peur de l’expulsion, enfermées jusqu’à 45 jours d’affilée dans des centres de détention pour être renvoyées à leur misère noire.
Rien à faire des enfants de sans-papiers qu’on arrache sans ménagement de l’école en les humiliant devant tous leurs camarades.
Rien à faire non plus que ces enfants vivent dans la peur et le secret, qu’ils soient témoins des humiliations qu’on fait subir à leurs parents, qu’ils ne puissent pas vivre leur enfance dans l’insouciance à laquelle leur âge leur donne droit, quoi qu’en disent les ignorants.
Les petits enfants juifs ont tous subi ces traumatismes-là. Et beaucoup sont morts de cette haine et de cette atmosphère de délation. Pour rappel : parmi les enfants juifs qui vivaient en Europe, seuls 10 % d’entre eux ont survécu à l’holocauste.
Pour eux aussi, on aura dit qu’ils s’en remettront, qu’il en verront d’autres.
Quelle différence entre un enfant juif obligé de se cacher et de se taire parce que, pour le seul motif qu’il était juif, sa vie était mise en danger par des salauds que leur gouvernement lui-même autorisait à le terroriser et à le dénoncer, et les traumatismes que ces enfants étrangers subissent aujourd’hui à cause d’une politique barbare et des citoyens bon teint et sûrs de leur bon droit qui la soutiennent ?
Ce que sont devenus tous ces Juifs, on le sait plus ou moins, les survivants ont raconté leur histoire et les historiens nous ont fourni la documentation nécessaire pour savoir ce qui s’était passé
Mais ce que deviennent ces familles de sans-papiers expulsées, on n’en saura rien.
C’est plus facile pour occulter, voire nier, les horreurs qu’on leur fait subir.
Selon la thèse d’ Adeline Fohn, en Sciences psychologiques, intitulée : "Traumatismes, souvenirs et après-coup : l’expérience des enfants juifs cachés en Belgique" (petit résumé) :
Le secret et la stigmatisation ont mis à mal le sentiment d’appartenance et ont favorisé le développement de sentiments tels que la culpabilité et la honte.
Les enfants juifs cachés représentent une population spécifique. N’ayant pas été reconnus comme des survivants de l’holocauste avant les années 80-90, ils ont intériorisé le silence comme stratégie de survie, ce qui leur a posé problème pour verbaliser les traumatismes multiples qu’ils ont subis à un âge très précoce sans avoir les clés pour se représenter et comprendre les événements qu’ils ont vécus.
Et, donc, outre les traumatismes, le jeune âge des enfants et le silence des adultes sont venus redoubler l’effet de non-figurabilité.
Étant donné qu’ils ont dû apprendre à se taire dès l’enfance, ils se sont construits en tant que sujet sur la base de ce silence.
Ensuite, les facteurs de non-reconnaissance sociale et de minimisation des souffrances sont particulièrement importants dans l’expérience de ces enfants.
De plus, la persécution et la peur d’être découverts ont gravement entravé leur sentiment de sécurité.
Finalement, cacher leur identité juive leur a fait subir un changement profond d’identité à un moment où ils commençaient à peine à se construire.
Il est alors difficile de sortir de l’anesthésie émotionnelle, affective et relationnelle engendrée par ces expériences douloureuses multiples.
(Voir le document en entier ici).
Donc, il est clair que ce n’est pas parce qu’un enfant ne "comprend pas" les événements qui se passent comme les comprend et les vit un adulte qu’il n’en est pas traumatisé.
Pire, le traumatisme subi par l’enfant est d’autant plus grave qu’entre son jeune âge et le silence des adultes, il lui faudra beaucoup plus longtemps pour se représenter les événements qu’il a vécus. Et, donc, prolonger indéfiniment ses souffrances et avoir bien moins de chances de les apaiser.
D’autre part, si on ne les remarque pas dans la vie, c’est probablement que les victimes de traumatismes ne se promènent pas dans la rue avec une pancarte pour signaler qu’elles sont traumatisées.
Mais il n’y a jamais de jour de fermeture au café du commerce.
Heureusement, car c’est là que les traumatisés viennent faire leur thérapie.
@Jamilla, merci pour ces exemples. Il ne peut pas y avoir eu que ces incidents dans les milliers d’école. Tout a été fait en haut lieu pour qu’il y ait des incidents, justement. Et, si peu de témoignages ont été publiés, c’est que, malgré les provocations et les injonctions gouvernementales, les choses ont été gérées (peut-être même intelligemment) à l’interne.
Personnellement, je trouve ces exemples très crédibles, et, moi, je ne connais pas qu’un seul enseignant au fin fond d’une campagne, qui servirait d’étalon pour tous les autres.
@Sheynat, je viens de voir votre commentaire. J’y adhère aussi. Marre du storytelling, comme le souligne Antar.
L’extrême-droite ne passera pas grâce à quelques fachos au crâne rasé, mais grâce à ces gens qui se prétendent de gauche qui apportent quotidiennement, seau après seau, de l’eau à leur moulin.