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Auteur : André LACROIX

« Quand le Tibet s’éveillera » passé au crible. Alexandre Adler : un curieux expert

André LACROIX

Le célèbre historien et journaliste, Alexandre Adler, spécialiste des relations internationales, a publié début 2020 aux éditions du Cerf son 28e livre, dont le titre rappelle évidemment "Quand la Chine s’éveillera", l’essai fameux d’Alain Peyrefitte paru il y a presque un demi-siècle. Le livre d’Adler fera-t-il date comme celui de Peyrefitte ? C’est peu probable, car, même s’il nous donne sur la question tibétaine un éclairage pour le moins original, il pèche par de nombreux défauts de forme et de fond. On pourra en trouver une critique détaillée dans : http://tibetdoc.org/index.php/religion/bouddhisme-tibetain-dans-le-monde/525-quand-le-tibet-s-eveillera-passe-au-crible-alexandre-adler-un-curieux-expert. Ci-dessous, une version raccourcie, sans aucune note de bas de page.

Un livre indigeste, bâclé et bourré d’erreurs Le livre est mal écrit. En plus de nombreuses fautes d’orthographe, le style est embrouillé : phrases kilométriques, parfois incompréhensibles. « Soyez obscur, on vous croira profond », telle semble la devise d’Alexandre Adler. Pire, l’ouvrage regorge d’affirmations contestables (j’en ai relevé six), voire d’erreurs pures et simples (j’en ai relevé huit). Ça va d’une prétendue supériorité économique et intellectuelle du vieil Empire du Japon sur la Chine (p. 10) à une imaginaire reconnaissance du Tibet par les Nations unies (p. 15) en passant par des dates complètement farfelues. Pas une seule note de bas de page et pas une seule référence bibliographique ! C’est la règle pour les romans. Mais pour un essai présenté en 4e de couverture comme « rigoureux », cela laisse rêveur. Tout se passe comme si le lecteur n’avait qu’à avaler, comme à la radio ou à la télé, des anecdotes et des déclarations assenées avec brio. Mais, n’en (…) Lire la suite »

Confucius ou dalaï-lama ? L’ULB a choisi.

André LACROIX

L’ULB (Université Libre de Bruxelles) a cessé sa collaboration avec l’Institut Confucius. Selon les autorités universitaires, « cette collaboration était considérée comme pauvre, voire handicapante. L’intérêt décroissant de professeurs pour des collaborations à travers l’Institut, le faible retour sur investissement en temps, ressources humaines et logistiques de la part de l’ULB, l’absence de transparence dans le choix des enseignants et des projets financés constituaient autant de sources d’interrogation » (1). En résumé, « Trop peu de retombées et d’activités académiques » (2). Quand on creuse un peu, on s’aperçoit que les raisons avancées pour cette rupture sont plutôt des prétextes que de véritables motifs.

L’ULB court derrière la VUB Le déclencheur de cette décision est à chercher sans doute du côté de la VUB (Vrije Universiteit Brussel), le pendant flamand de la francophone ULB. « Le 10 décembre dernier, le directeur de l’Institut Confucius de la VUB se voyait interdire de visa pour l’espace Schengen suite aux soupçons d’espionnage qui pesaient contre lui » (3). Même si « l’homme nie les faits qui lui sont reprochés » (4), l’occasion était belle pour la VUB − dans le contexte actuel schizophrénique de l’Europe partagée entre son intérêt vital de coopérer avec la vaste Chine et des sentiments antichinois mal déguisés en défense des « droits de l’homme » à la sauce atlantiste − de montrer qu’elle ne transigeait pas avec son idéal de libre examen, allergique à toute influence communiste. À une question parlementaire sur la présence d’espions chinois à Bruxelles, Koen Geens, le ministre belge de la défense avait, dans sa réponse le 4 décembre dernier, affirmé que « la Chine dispose (…) Lire la suite »
La « découverte », par un processus divinatoire, du futur dalaï-lama dans le corps d’un enfant

Le dalaï-lama plus catholique que le pape

André LACROIX

« La Chine n’a aucune légitimité à choisir le prochain Dalaï-Lama », tel est le titre d’une longue interview donnée à « La Libre Belgique » du 18 octobre 2019 (1) par Lobsang Sangay, « Premier ministre » du « gouvernement tibétain en exil ». Nous ne relèverons pas ici les accusations et autres procès d’intention, émaillant cette interview, que lui et son mentor répètent en boucle à l’encontre de la Chine. Nous ne commenterons pas non plus ses aveux assez pathétiques de la détérioration des soutiens à la « cause tibétaine », ni l’accusation de despotisme formulée par ses troupes, ni la perte du procès en diffamation intenté contre l’« Administration centrale tibétaine » par Penpa Tsering, son ancien représentant à Washington (2). Limitons-nous à la question évoquée dans le titre et aux comparaisons qu’elle inspire avec d’autres religions, notamment le catholicisme.

Ce que dit Lobsang Sangay « En 2007, le gouvernement chinois a décrété que toutes les réincarnations devaient être certifiées par le Parti communiste chinois. Vous n’êtes un lama authentique que quand le PCC vous a émis le certificat. Il a ainsi reconnu 1 300 lamas réincarnés. Récemment, en juillet, des journalistes indiens sont allés au Tibet et sont revenus avec le même gros titre : la Chine sélectionnera le prochain Dalaï-Lama et l’Inde ne doit pas interférer sous peine de conséquences. Nous avons donc adopté une résolution unanime. Premièrement, nous voulons le retour de notre maître spirituel. Deuxièmement, les leaders religieux sélectionnent leur propre réincarnation, leur propre successeur. La Chine ne peut pas interférer, il s’agit d’une question de liberté religieuse. Troisièmement, la Chine, qui a détruit nos monastères et découragé le bouddhisme ces 60 dernières années, n’a aucune légitimité ni aptitude à choisir le prochain Dalaï-Lama. » Tolérance sous contrôle (…) Lire la suite »

Bad Gones et Free Tibet

André LACROIX

Lors du match de football entre l’Olympique Lyonnais (OL) et le Football Club de Nantes du dimanche 24 septembre 2019, les Bad Gones, club de supporters de l’équipe locale, ont réalisé un « tifo » géant représentant le « drapeau tibétain ». Ils voulaient ainsi protester contre la programmation de ce match à 13 h 30, décidée par la Ligue de Football Professionnel (LFP) afin de le mettre en valeur en Chine où le championnat français est assez prisé. Comme on pouvait s’y attendre, France-Tibet s’est délecté de cet incident.

Qui sont ces Bad Gones ? « Bad Gones » est le nom d’un club de supporters de l’OL, fondé en 1987 et fort d’environ 6 000 membres, qui ces dernières années s’est illustré par des comportements détestables. Dans Le Monde du 24/09/2018, Maxime Goldbaum raconte qu’à l’occasion d’un match OL-OM (Olympique de Marseille), ces Bad Gones ont « distribué dans les tribunes un tract dépeignant la ville et les supporteurs de Marseille en des termes peu amènes, voire racistes (...) Ils y appellent notamment à se mobiliser contre la vérole sudiste (...) » Quelques jours auparavant, après la rencontre Manchester City-OL, « encore un salut nazi parmi les supporters lyonnais », pouvait-on lire en titre d’un article de Bertrand Enjalbal dans l’édition du 20/09/2018 de Rue89Lyon du 19/09/2018. Ce n’était, hélas, pas une première : « Le 15 mars 2018, continue l’article, un policier avait été violemment lynché par des hooligans lyonnais. Durant le match, l’UEFA avait par ailleurs constaté des (…) Lire la suite »

Liu Xiaobo : le scotome occidental

André LACROIX

« Liu Xiaobo, l’homme qui a défié Pékin », tel est le titre d’un reportage et d’un livre que Pierre Haski a consacrés à celui qui a reçu le Prix Nobel de la Paix en 2010 (1). Aucun téléspectateur, aucun lecteur, doué de sentiments humains, ne peut rester insensible à la destinée de Liu Xiaobo, cet intellectuel chinois que son opposition au régime a mené plusieurs fois en prison ; finalement libéré, il est mort d’un cancer en 2017. On peut aussi légitiment apprécier ses efforts pour que ne soit pas effacée de la mémoire chinoise la tragédie de Tian’anmen. On aurait aimé toutefois que le journaliste Pierre Haski mentionne à tout le moins, quitte à le contester, le point de vue du gouvernement chinois sur le célèbre dissident, devenu une icône du « monde libre ».

Un soft power encore balbutiant Certes, Pékin a manqué de subtilité médiatique en interdisant à Liu Xiaobo de recevoir son Nobel de la Paix. L’épisode de la chaise vide a eu un effet déplorable sur l’image de la République populaire de Chine. Si elle avait mieux maîtrisé l’art de la communication, elle aurait permis à Liu Xiaobo de venir à Oslo chercher son prix, tout en fournissant au monde un argumentaire mettant en cause l’impartialité du jury du Nobel, très en phase avec l’Oncle Sam, et contestant à Liu Xiaobo ses mérites de faiseur de paix. Cet argumentaire était pourtant à portée de la main, comme l’a montré le chercheur américano-canadien Barry Sautman qui, en collaboration avec l’anthropologue Yan Hairong, a écrit dans The Guardian, un article décoiffant, intitulé : « Les supporters du Nobel Liu Xiaobo savent-ils réellement ce qu’ils soutiennent ? » (2). En voici quelques extraits principaux (les intertitres sont de moi). Liu Xiaobo n’était pas un champion de la (…) Lire la suite »

Arte : d’indécrottables préjugés !

André LACROIX

Spectateur régulier de la chaîne ARTE, j’espérais beaucoup du documentaire diffusé le 27 novembre, ainsi présenté dans la presse quotidienne : « À l’occasion du 70e anniversaire de la Déclaration universelle des droits de l’homme, le réalisateur Claus Kleber, par ailleurs présentateur vedette de la ZDF, procède à un inventaire et dresse un état des lieux soulevant des questions complexes. Car si ce texte, rédigé en 1948 suite aux horreurs de la Seconde Guerre mondiale, ambitionnait de s’appliquer à tous les citoyens du monde, il reflète néanmoins une vision occidentale. Ainsi, les valeurs de la culture islamique ou encore les normes sociales asiatiques constituent aussi des clés nécessaires pour appréhender nombre de crises et conflits actuels. Comment, dès lors, concilier des conceptions des droits humains parfois très éloignées, selon les cultures, des principes que les Occidentaux souhaitaient universels ? »

Une telle annonce laissait entrevoir un documentaire passionnant. La déception a été grande chez les téléspectateurs qui ont eu le courage de regarder jusqu’au bout cette émission d’une heure et demie, brouillonne et bavarde, ne répondant que très partiellement au programme annoncé (1). Si l’on peut comprendre que, dans le contexte actuel d’islamophobie, « les valeurs de la culture islamique » aient été passées au bleu, en revanche on était en droit d’attendre une mise en perspective de la Déclaration de 1948 et notamment le rappel que ce texte fondamental ne concernait pas seulement les droits individuels (liberté d’expression, d’association, de religion), mais également les droits sociaux (nourriture, santé, éducation). Seules allusions à ces droits sociaux : un professeur de Shanghai revendiquant comme priorité l’éradication de la pauvreté et le rappel de la sortie de la misère de 600 millions de Chinois ; une infirmière kényane parcourant les villages pour inculquer les (…) Lire la suite »

André Comte-Sponville et le dalaï-lama

André LACROIX

Dans Le Soir du vendredi 4 mai 2018, paraissait une excellente interview faite par le journaliste William Bourton du philosophe André Comte-Sponville sous le titre « Il faut protéger la laïcité comme la prunelle de nos yeux » (1). Il s’agit d’un remarquable plaidoyer en faveur d’ « une civilisation commune, qui nous permette de vivre ensemble, quelle que soit la religion ou l’irréligion des uns et des autres. » On aimerait être d’accord à 100% avec les réflexions de cet intellectuel qui se définit comme « un athée non dogmatique et fidèle ». Il est toutefois un passage qui mérite une analyse critique : « Le Dalaï-lama, dit Comte-Sponville, m’importe au moins autant que le pape François – et Nelson Mandela, beaucoup plus que Donald Trump. Quel démocrate, dans nos pays, qui ne se sente plus proche d’un démocrate musulman que d’un fasciste judéo-chrétien ? (2) »

Église catholique et démocratie Ce qui pose question, ce n’est pas la référence un peu facile à Trump comme repoussoir. Ce n’est pas non plus la référence au dalaï-lama et au pape François, dont maints écrits et maintes déclarations plaideraient en faveur d’une globalisation apaisée, souhaitée par l’athée Comte-Sponville. Ce qui fait problème, c’est la comparaison convenue entre Nelson Mandela et le dalaï-lama (nous y reviendrons plus loin) ; c’est aussi et premièrement l’étonnante attribution à ces deux autorités spirituelles que sont le pape de Rome et le « pape de Dharamsala » de la qualité de « démocrate » qui semble leur être conférée par le début de la phrase suivante, même si cette dernière a trait à une nouvelle interrogation. Que l’Église catholique soit aujourd’hui perçue comme compatible avec la démocratie, c’est plutôt récent. Même si le Jésus des Évangiles apparaît comme tolérant, fraternel, et favorable à la séparation du spirituel et du temporel (3), et même si (…) Lire la suite »
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Un parlementaire européen répond à ma lettre ouverte : discussion

André LACROIX

Début mars, je lançais une lettre ouverte critiquant une pitoyable résolution votée par le Parlement européen à propos des droits de l’homme en Chine (*). Si j’excepte un bref accusé de réception critique, un seul parlementaire européen a daigné réagir de façon argumentée, ce qui a donné lieu à un échange de courriels assez intéressant. N’ayant pas obtenu de sa part la permission de publier cette correspondance in extenso, je la reproduis ci-dessous en supprimant tout ce qui permettrait de l’identifier.

Réaction du parlementaire (14 mars 2018) Cher Monsieur, Il est de votre droit de juger pitoyable une proposition visant à protéger les défenseurs des droits de l'homme. Pour ma part, je ne vais pas cesser de les défendre. Qu'ils soient en Palestine, au Tibet ou ailleurs. La Chine est effectivement un grand pays et sa population mérite le plus grand respect. (...) j'ai eu l'occasion d'y aller à plusieurs reprises (...) je ne crois pas que l'on puisse considérer que la République populaire de Chine soit une démocratie assurant la liberté d'expression et de penser. Quelle qu'en soit la couleur, les totalitarismes doivent être combattus. Je continuerai donc. Et avec fierté. Cordialement, XX Ma réponse (15 mars 2018) Cher Monsieur, Je vous remercie pour votre réponse, mais elle me laisse sur ma faim. Ma lettre ouverte portait sur des points précis et vous répondez par des généralités : d’où mon insatisfaction. Partialité Ma lettre ouverte ne niait pas que la Chine (…) Lire la suite »
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Lettre ouverte aux parlementaires européens auteurs d’une pitoyable résolution

André LACROIX

Le 18 janvier 2018, le Parlement européen adoptait une résolution "sur les cas des militants pour les droits de l’homme Wu Gan, Xie Yang, Lee Ming-che et Tashi Wangchuk,ainsi que du moine tibétain Choekyi (1)". Comme on le verra plus bas, cette résolution, comme le Gorille de Georges Brassens, "ne brille ni par le goût, ni par l'esprit".

Madame la Parlementaire européenne, Monsieur le Parlementaire européen, La résolution que vous avez cru devoir adopter le 18 janvier 2018 ne résiste pas aux critiques. * * * 1) Partialité En premier lieu, elle se caractérise par une étrange partialité, oubliant que les pires atteintes aux droits de l’homme sont dues aux guerres et à la misère. Or, précisément, pour ce qui est des guerres, la République populaire de Chine, indépendamment du conflit sino-indien, n’a mené que deux opérations militaires en dehors de son territoire (en 1949 en Corée et en 1976 au Vietnam), soit vingt fois moins que les États-Unis – qui ont semé la mort et le chaos un peu partout dans le monde. Or, précisément, pour ce qui a trait à la misère, la Chine, en moins de quarante ans, a réussi à extraire de l’extrême pauvreté plus de 600 millions de personnes – un exploit inégalé à ce jour. Au Tibet, par exemple, l’espérance de vie a doublé et le niveau de vie est en croissance constante, au plus (…) Lire la suite »
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Les frustrations de M. Lobsang Sangay

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Une fois de plus (1), et cette fois sous la plume d’Arnaud Vaulerin, Libération fait preuve de complaisance envers la pensée unique en relayant, sans le moindre esprit critique, les propos de Lobsang Sangay, le chef du « gouvernement tibétain en exil ». Son interview publiée le 26 janvier 2018 est titrée en grands caractères Tibet : « Nous avons perdu notre pays à cause d’une route ».

Une nostalgie d’Ancien Régime « Nous avons perdu notre pays » : telle était aussi la déploration des émigrés français (nobles, riches bourgeois et prélats) ayant fui la Révolution de 1789. Pour ces quelque 140 000 privilégiés de l’Ancien Régime, la France était leur chose que le petit peuple était juste bon à entretenir à leur profit. Ils étaient incapables d’imaginer que, pour les 27 autres millions d’habitants que comptait alors la France, ce « nous » des émigrés ne représentait pas grand-chose. Et pour la masse des Tibétains du Tibet, que représentent les quelque 150 ou 160 000 exilés sinon les descendants des nantis et de leurs domestiques qui ont fui leur pays à partir de 1959 ? Qui, parmi le 2,8 millions de Tibétains de la Région autonome du Tibet (RAT), oserait affirmer sans mentir : « nous avons perdu notre pays », alors que leurs conditions d’existence en amélioration constante sont sans commune mesure avec la misère qui a été le lot de leurs grands-parents ? Là (…) Lire la suite »
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