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Auteur : André LACROIX

L’Europe servile et débile

André LACROIX

Placé devant une carte de géographie, un enfant de cinq ans comprend que l’Europe n’est que le bout d’un immense continent. Cette réalité, bien intégrée depuis un siècle par les décideurs étasuniens, semble échapper au cerveau d’Ursula von der Leyen, de Charles Michel, de Josep Borrell et consorts.

Quand on a des responsabilités politiques, on doit faire passer le rationnel avant l’émotionnel. Le 24 février 2022, la Russie a envahi l’Ukraine. On peut penser ce qu’on veut de cette invasion, mais il s’agit d’un fait, et un fait est plus respectable qu’un lord-maire. Autre fait indiscutable : l’Europe a besoin des ressources de la Russie : non seulement du gaz naturel et du pétrole (y compris pour fabriquer des sources d’énergies propres !), mais aussi de l’uranium (pour ses centrales nucléaires), de l’aluminium (pour les voitures), du nickel (pour les voitures électriques), du palladium (pour les pots catalytiques), etc. Au lieu de prendre en considération ces réalités incontournables et de veiller à ce que le conflit ait le moins de répercussions dommageables pour leurs populations, les dirigeants européens se sont empressés de faire ce qu’il ne fallait pas faire : empiler les unes après les autres des sanctions censées affaiblir la Russie. Mais elle en a vu d’autres, la (…) Lire la suite »

Conflit ukrainien : trente ans de provocations étasuniennes

André LACROIX

En décidant d’envahir l’Ukraine, Vladimir Poutine a probablement commis une grave erreur. Son grand tort : n’avoir pas pu résister aux provocations étasuniennes.

Sans le Drang nach Osten de l’OTAN, il n’y aurait pas eu de réactivation du fantasme de Novorossiya. Tout mettre sur le compte de Vladimir Poutine, c’est un peu court. Si Gorbatchev n’avait pas été roulé dans la farine et si l’accord avait été respecté de ne pas étendre l’OTAN aux pays de l’ex-Pacte de Varsovie, il n’y aurait sans doute jamais eu d’invasion de l’Ukraine. L’OTAN a prétendu qu’ « un tel accord n’a jamais été conclu » (1) et la « grande presse » a accrédité cette thèse sous prétexte qu’il n’y aurait pas d’accord écrit. Mais, outre qu’il est indécent de considérer qu’un accord oral ne lierait pas les parties – promissio est servanda – une note des archives nationales britanniques publiée le 18/02/2022 par Der Spiegel enlève toute équivoque (2). « Il était clair depuis longtemps que l’expansion de l’OTAN conduirait à la tragédie. Nous payons maintenant le prix de l’arrogance des États-Unis », affirme Ted Gallen Carpenter, membre du think tank libertarien Cato (…) Lire la suite »
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Guénolé, Mélenchon et le Tibet : où va la gauche française ?

André LACROIX

Dans son émission quotidienne de la RTBF « Au bout du jour », le journaliste Eddy Caekelberghs a donné la parole le lundi 13 juin 2022 à Thomas Guénolé qu’il avait déjà interviewé le 23 mai à propos de son livre "Le Souverainisme" (Que sais-je ?, PUF, 2022). Cette fois, il s’agissait de Jean-Luc Mélenchon et de la France Insoumise, parti auquel Guénolé avait adhéré avant d’en être exclu à l’issue d’une procédure probablement contestable (*).

Pendant les dix premières minutes de l’entretien, Thomas Guénolé se livre à une critique sans merci des pratiques de Jean-Luc Mélenchon : le « procès stalinien » auquel il a été soumis lui fait penser au Procès de Kafka. Autre référence littéraire : 1984 d’Orwell, en ce sens que la France Insoumise se caractériserait par l’invocation de valeurs démocratiques pour masquer une dictature interne. En qualité d’ « intellectuel de gauche » comme il se définit lui-même, Guénolé se dit « absolument mortifié (...) de constater (...) que nous nous retrouvons maintenant avec une gauche française sous l’hégémonie d’un parti au fonctionnement antidémocratique. » Il parle encore d’ « apologie de la dictature » et de « Grand Bond en arrière ». Le journaliste intervient alors pour interroger Guénolé sur – je cite – « les relations que Jean-Luc Mélenchon entretient avec ce qu’il faut bien appeler un certain nombre de dictatures ou des dictateurs. On se rappelle le discours qu’il a fait à la mort (…) Lire la suite »
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Calunnia del Arte

André LACROIX

Le 8 février 2022, Arte diffusait un « documentaire » de 105 minutes intitulé "Le drame ouïghour" (1). Ce n’était pas son coup d’essai (2). À plusieurs reprises déjà, j’ai eu, avec d’autres, l’occasion de dénoncer ses partis pris antichinois (3). Tout se passe comme si, dès qu’il est question de certains sujets comme la Chine, la prestigieuse chaîne franco-allemande perdait tout sens critique. Arrêtons-nous un moment sur « le drame ouïghour » vu par Arte.

Une première démystification magistrale J’invite tout d’abord le lecteur à prendre connaissance des Quelques réflexions, par ordre d'apparition dans le « documentaire »... rédigées par le Professeur belge Emmanuel Wathelet, docteur en information et communication. C’est seulement après avoir pris connaissance de ces quatre pages contenant vingt-cinq points précis que le lecteur pourra trouver quelque intérêt à lire mes observations suivantes. Le poids des mots Comme Emmanuel Wathelet, j’ai été frappé, dès le prologue du « documentaire » (00:32) de François Reinhardt (aidé par Romain Franklin), en entendant le narrateur (Alexis Victor) parler de « hordes de touristes » chinois. Plus loin (11:40), ce dernier emploiera l’expression : « sous couvert de lutte contre le terrorisme (...) » au lieu de « pour lutter contre le terrorisme », comme si comptaient pour rien les centaines de victimes d’attentats terroristes et les milliers d’islamistes ouïghours venus grossir les rangs de (…) Lire la suite »

Ciao, Chao ! La Chine en 100 notions…

André LACROIX

Comme le remarque ironiquement le Chinois Ruolin Zheng qui a vécu une vingtaine d’années en France, les Occidentaux, dont la plupart n’ont jamais mis les pieds en Chine, s’imaginent mieux connaître la Chine que lui et les autres Chinois. Aussi me suis-je plongé résolument dans le petit livre de la Chinoise Chao Ye, intitulé sobrement "La Chine en 100 notions", éd. La Route de la Soie, septembre 2021. Chao Ye a commencé ses études de français à l’Université de Shanghai. Elle a travaillé six ans pour Air France en tant qu’interprète à bord. Ses voyages entre la Chine et la France ainsi que les rencontres et conversations qu’elle a vécues l’ont motivée à faire mieux connaître son pays auprès des lecteurs francophones. En guise de recension, je me suis permis de lui écrire cette lettre ouverte.

Chère Madame Chao Ye, C’est à dessein que vous commencez Chine en cent notions par une évocation des jardins chinois qui sont « un lieu pour méditer, pour dialoguer (...) Sur le balcon de Versailles, écrivez-vous, l’espace vert s’offre d’un seul coup d’œil tandis qu’en Chine, c’est en y pénétrant petit à petit que l’on peut découvrir le jardin, secret » (p. 9). Une autre métaphore m’est venue à l’esprit, celle d’une peinture pointilliste dont chaque touche contribue à donner de la Chine une vision globale : vous utilisez les différentes rubriques Art, Culture, Économie, Politique, Histoire comme autant de tubes de couleurs pures. Le tableau qui en résulte est étonnamment vivant : ça va de la cuisine à l’architecture, en passant par la musique, le jeu de go, la poésie, les empereurs, la démographie, le Covid, le TGV, Hong Kong, etc., etc. Ce sont cent portes d’entrée de seulement une page ou deux, idéales pour approcher la Chine réelle. Rien que la carte de la p. 4, aux couleurs (…) Lire la suite »

Le match du siècle ? Réflexions sur le livre de Kishore Mahbubani "Le jour où la Chine va gagner"

André LACROIX

S’il est une personnalité pouvant donner de la Chine une image au-dessus de la mêlée USA-RPC, c’est bien Kishore Mahbubani, un Singapourien d’origine indienne ayant vécu dix ans à New York en tant qu’ambassadeur aux Nations unies. Ce livre (1) n’est destiné à plaire ni à Xi Jinping ni à Joe Biden. C’est un constat richement documenté (avec une bibliographie de 17 pages en petits caractères), agrémenté d’anecdotes personnelles glanées au gré de rencontres avec les « grands de ce monde » de tous les continents.

Une remontrance à la Chine Le premier chapitre du livre a pour titre « La plus grave erreur stratégique de la Chine ». Selon Kishore Mahbubani, la Chine a eu le tort, après la crise financière de 2008, de s’aliéner le monde des affaires des États-Unis. Alors qu’elle était devenue la deuxième puissance économique mondiale, la Chine a continué à « se prétendre aussi vulnérable que le Tchad ou le Bangladesh et à exiger que lui soient appliquées les dispositions protectrices spéciales de l’OMC » (p. 52). Semblable attitude, ressentie comme déloyale par les États-Unis et les autres économies avancées, a terni l’image de la Chine. Comment expliquer cette « hubris qui s’est emparée de Pékin » (p. 50), cette conviction qu’elle est « un Empire du Milieu autosuffisant qui n’a pas besoin de se mêler au monde » (p. 57) ? Mahbubani pointe la faiblesse de l’interrègne de Hu Jintao (2003-2013), quand la direction du parti n’a pas été en mesure de « vérifier attentivement comment les provinces (…) Lire la suite »

« La Chine sans œillères » : recension

André LACROIX

Maxime Vivas et Jean-Pierre Page ont réussi ce tour de force de réunir dix-sept intellectuel(le)s majoritairement chinois et français, mais aussi du Luxembourg, d’Australie, du Sri-Lanka, du Canada et de Cuba, pour nous offrir, à l’occasion du centenaire du Parti communiste chinois, une vision de la Chine réelle, loin des préjugés antichinois (1) sans pour autant verser dans une admiration béate (2). Le titre est clair : "La Chine sans œillères". Le sous-titre également : "Tout ce que vous avez toujours voulu savoir…" Il suffit de lire le sommaire pour comprendre que nous sommes en présence d’une petite encyclopédie à entrées multiples.

Les articles sont de longueur variable : de 4 à 20 pages. Mais ce qui ne varie pas, c’est leur valeur et leur intérêt. La Préface sous la plume de Mobo Gao, professeur de civilisation chinoise en Australie donne le ton de l’ouvrage : ce n’est pas un panégyrique de la Chine dont à plusieurs reprises l’auteur reconnaît que tout n’y est pas parfait ; on est en droit de critiquer la Chine, à condition toutefois que l’on fasse preuve d’un minimum d’honnêteté intellectuelle et qu’on n’oublie pas la parabole de la paille et de la poutre. Il y a d’abord les sujets d’actualité assez généralement présentés en Occident comme autant d’actes d’accusation à l’encontre de la Chine. Pour parler en connaissance de cause du coronavirus, les directeurs de l’ouvrage ont eu la bonne idée de demander l’avis de Badia Benjelloun, une allergologue réputée. Elle démontre clairement que les accusations de retard à informer l’OMS, de virus échappé d’un laboratoire, voire de virus fabriqué, ne tiennent (…) Lire la suite »
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Idéologie antichinoise primaire à l’ULB : Lettre ouverte au Professeur Jacques Englebert

André LACROIX

En 2019, l’ULB (Université Libre de Bruxelles) décidait de se séparer de l’Institut Confucius pour des raisons officiellement administratives, mais en réalité idéologiques (1). En 2020, Vanessa Frangville, titulaire de la chaire d’études chinoises à l’ULB, inventait le concept de « terrorisme anecdotique » pour qualifier le terrorisme islamiste ouïghour ayant tué des centaines d’innocents et ayant fourni des milliers de combattants fanatisés à Daech (2). Début 2021, elle en remettait une couche dans un réquisitoire antichinois plutôt indigent (3). C’est au tour maintenant d’un éminent Docteur en sciences juridiques et chargé de cours à l'ULB, Jacques Englebert, de se livrer à des propos sinophobes d’un simplisme désarmant.

Un échange frustrant Réagissant à un appel de ma part à consulter, à propos des Ouïghours, d’autres sources que les affabulations d’Adrian Zenz, Mike Pompeo et consorts, Jacques Englebert m’a écrit le 14 juin : « Dès lors que le Chine est une dictature qui bafoue tous les droits fondamentaux, votre acharnement à défendre ce régime me donne la nausée. » Réponse de ma part le 21 juin : « Je ne comprends pas que vous accusiez la Chine de bafouer tous les droits fondamentaux, comme si les droits sociaux (art. 22-28 de la Déclaration universelle des Droits de l’Homme), globalement garantis en Chine, n’étaient pas des droits aussi fondamentaux que les droits individuels (art. 1-21). Il s’agit là d’une faute de logique (généralisation hâtive) qu’en tant que professeur du secondaire (aujourd’hui retraité) je n’aurais pas tolérée chez un adolescent. Elle en dit long, me semble-t-il, sur les dérives d’une certaine analyse politique universitaire, alimentant le China-bashing à la (…) Lire la suite »
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« Ouïghours, victimes et otages » … du brouillard diplomatique

André LACROIX

Dans "Le Monde diplomatique" d’avril 2021, on peut trouver un article intitulé « Ouïgours, victimes et otages » (1), signé par Martine Bulard, Rédactrice en chef. En décembre 2019, elle nous avait déjà gratifiés d’un article mi-figue mi-raisin sur le Tibet (2). La voilà qui « remet ça », cette fois à propos du Xinjiang. Rien que le titre pose question ; il y manque à tout le moins un point d’interrogation.

Les Ouïghours sont bien des otages Selon la définition du Petit Larousse, un otage est une « personne dont on s’empare et que l’on utilise comme moyen de pression contre quelqu’un pour l’amener à céder à des exigences ». Tel est effectivement le statut des Ouïghours utilisés par les États-Unis – de Blinken comme de Pompeo, plus les suivistes européens et autres – pour essayer d’enrayer la marche de la Chine qui conteste leur hégémonie. Le syllogisme états-unien est simple : Les Ouïghours habitent principalement au Xinjiang, point de départ des nouvelles routes de la soie, ferroviaires et routières. Or, les routes de la soie sont appelées à briser le containment de la Chine décidé à Washington. Donc, il importe d’entretenir au Xinjiang un abcès de fixation sur les flancs de la Chine, en espérant que ça suffira... Depuis que le Tibet est sorti des radars et que plus personne ne croit que la Chine s’y livre à un quelconque génocide des pauvres bouddhistes (3), les pauvres (…) Lire la suite »
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Jean Quatremer : un perroquet à l’aise sur Arte

André LACROIX

À la fin du « 28 minutes » du vendredi 26 mars 2020, ARTE nous a une nouvelle fois gratifiés d’un grand moment de journalisme aligné…

L’animateur, Renaud Dély, avait demandé à un des invités, Jean Quatremer, de commenter une photo représentant « une manifestation de soutien à la minorité ouïghoure persécutée en Chine, devant l’Ambassade de Chine en Indonésie ». La formulation de la question était déjà indigne d’un vrai journaliste, qui aurait dû déontologiquement parler de « minorité prétendument persécutée ». Mais le meilleur était à venir : écoutons Jean Quatremer : « Persécutée ? On devrait même parler de génocide comme le font officiellement désormais les Américains, Mike Pompeo avant lui et aujourd’hui Blinken (...) » Bel exemple de journalisme critique ! Il suffit donc à Quatremer que Pompeo et Blinken parlent de génocide pour que cette gravissime accusation soit fondée et qu’il la répète en boucle : du psittacisme tenant lieu de journalisme... Le plus amusant de l’histoire, c’est que, pour illustrer ce grand moment télévisuel, il y avait en studio le dessinateur Xavier Gorce, spécialiste des (…) Lire la suite »