Nous sommes au temps de la décimation de l’espèce. C’est prouvé par les rengaines de la grande presse sur la plus « terrible pandémie » supplantant le sida, je cite l’affreuse grippe AH1N1, peste néanmoins mignonne dans les faits, et qui n’ose tuer que par unités éparses le genre humain après l’avoir menacé de disparition. D’ailleurs, de nombreuses hécatombes semblent en vue dans le futur immédiat de l’humanité réduite, il faut le dire, en une sorte de collections de choses ambulantes que manipule à satiété et sciemment la faune médiatico-idéologique. Et parmi ces exterminations annoncées, surmédiatisées, celle qui hante le plus l’homme de la rue comme la plupart des enchanteurs et des chamanes mayas de la prédiction : la fatidique année 2012 !
Signe d’une société en putréfaction, l’obsession de la fin est caractéristique des systèmes qui meurent. Cette eschatologie profane qui se proclame par toutes sortes d’aberrations pseudo scientifiques ou démophobes (je cite la peur-propagande de la prétendue surpopulation du globe), n’est que le sentiment de décomposition de soi d’un mode d’être socio-économique intenable. L’eschatologie idéologique est le mode d’apprêt des peuples à toutes formes d’excès politiques par les ploutocrates maîtres de crise. La face de faucheuse de ce temps convient bien à un siècle dont la toute première année a commencé par les prétendus attentats du 11 septembre 2001. La fin dernière du monde couvre leurs insanités politiques et ouvre la veine propagandiste des prédateurs de l’économie, qui nous laissent croire aujourd’hui que le monde n’a pas d’issue au-delà d’eux. Comme les pires tyrans aigris de leur déliquescence, le monde charogneux du capitalisme sans limites, ne peut imaginer que la vie lui survive. Alors l’idéologie actuelle nous montre sa trogne de Némésis anthropophage qui, après avoir tout détruit, après s’être servi des peuples comme paillasson et comme rebut, se venge, pour ses propres crises sui-générées, de l’humanité qui ose encore exister et semble prête à la dépasser.
Thanatophilie systémique
Le système de toutes les horreurs, du colonialisme à l’esclavagisme ; des guerres d’extermination ethniques aux guerres de conquête ; de la destruction de la Terre par la surexploitation compulsive des ressources et du gaspillage meurtrier des biens communs accaparés par quelques monstres cupides autoproclamés maîtres des vies et des biens ; de la vanité arrogante des déchets du totalitarisme économique qui, stupidement, réduit l’homme à l’avoir et à la fonction économique et qui, pour se disculper de leurs propres aberrations, bricolent des métaphysiques officielles pour supputer l’homme désubstantialisé qu’ils ajustent au pécuniaire régnant, à des ontologies au rabais et à des transcendances de paille.
L’on comprend alors que lorsque l’homme rendu ombre des biens qu’il produit, au point de ne vivre que pour la production et la consommation de ces biens, se voit devant l’effondrement de l’ordre économique, sa référence, s’il ne puise en soi le fonds axiologiques et l’intériorité suffisamment humaine pour contourner la catastrophe systémique, il se prête désemparé à toutes sortes de scénarios de destruction qu’on lui propose. La vision de la destruction du monde, hormis le cadre strictement mystico-prophétique, lorsqu’elle est prêchée idéologiquement selon l’endoctrinement social, est projection de l’échec et de la déroute d’un ordre dominant. Ce n’est qu’un stratagème de la conscience systémique qui s’étant toujours identifiée à l’Être, à l’Univers et à la Ttotalité, contourne le dévoilement de son mal en le posant comme cosmique et fatal, inéluctablement au-dessus de l’homme. Mais pour croire aux allégations de destruction planétaire en vogue aujourd’hui dans les documentaires et les nouvelles, il faut avoir oublié que toutes les références du matérialisme socio-capitaliste sont des clivages d’un essentialisme imaginaire qui fonde les disparités de classe par la manipulation des consciences. Car en fait, qu’est-ce que c’est qu’appartenir à la classe dominante ?
L’histoire sociale de l’Amérique est un édifiant exemple d’inessentialité de la nature des classes sociales, la prétendue essence inégalitaire desdites classes de la société et la sorte de hiérarchisation sociale des hommes par l’appartenance à ces classes. Les moins que rien appelés colons arrivés en Amérique, de purs charognards primitifs pour la plupart, en volant la terre des indigènes, en les esclavagisant, en les faisant instruments d’exploitation des richesses du sol et du sous-sol dans un cadre de production physiocratique, en sont arrivés à un immense degré de fortune et ont créé une société où ils se sont proclamés maîtres et seigneurs, gens de bien, bourgeois et supérieurs… Cette histoire, dans sa vérité des faits et comportements sociaux, nous dit clairement que la société n’a pas de nature, et qu’elle est ce que l’idéologie la fait. Et la société actuelle du marché, n’a de nature que l’argent. La preuve, est la facilité avec laquelle quelques saletés anthropomorphes en jouant à la bourse, en délocalisant, sont devenus maîtres des vies et des biens !
Pour accéder au statut de dieu dans la belle société, il suffit d’être raquetteur de toutes sortes, banquier, financier, politicien véreux, président, ministre, belliciste faiseur de guerre pour la démocratie, économiste officiel, seigneur de « big pharma », bon manipulateur de boules de loterie et jetons de casinos, dealer de drogue avec de puissantes relations, percepteur de lourdes taxes et d’impôts, meurtrier et législateur, lobbyiste fignolant de l’association sourde avec l’État et ses dirigeants. Tout ce qui permet de faire de l’argent à satiété pour utiliser le système afin de dominer les hommes ! Un inconnu méprisé qui gagne 40 millions d’euros au loto, passe du jour au lendemain du stade de néant à celui de Monsieur Respectable à quelques pas du bourgeoisisme…
Ainsi faites, les valeurs de néant du monde où nous vivons, auront beau utiliser les chiens gueulards de la justice et du droit et les caniches suceurs de l’éthique et de la presse, la société du vide et du mensonge demeurera jusqu’à la fin ce qu’elle a toujours été : mirage où tous ont bien voulu croire, un peu comme par la complicité consensuelle qui unit le spectateur d’une fiction à son metteur en scène. Et dans l’ordre du profit sans borne qui prédomine, aujourd’hui, la fiction s’essoufflant, sa fin langoureuse, son halètement donne lieu au tumulte climatérique du danger surgissant de partout, guettant l’existence de l’homme et de la terre où savants, journalistes et populace manipulée, unis en ce choeur sinistre, pathologique qu’est l’idéologie du marché, baragouinent à grands coups de vacarmes médiatiques, en criant à la mort de tout, la fin inexorable, l’irréfragable râle ultime du monde !
CAMILLE LOTY MALEBRANCHE