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L’embarras de nos élus, désorientés, face à leurs forfaitures…

Suite aux évènements majeurs qui ébranlent le monde arabe, force est de constater la puissance de l’information alternative, autrement plus perspicace que les médias dominants et leurs marionnettes serviles sous contrôle de nos gouvernements. Et il convient de pointer combien ceux-ci ne peuvent faire autrement que de reconnaître du bout des lèvres le courage des peuples qui s’insurgent contre leurs dictateurs, quand ils fustigeaient il y a quelques semaines seulement le site Wikileaks pour ses révélations ô combien embarrassantes sur leurs pratiques, mettant à nu leur hypocrisie en ces moments où le cours de l’Histoire prend un nouveau tournant avec le risque de leur échapper.

Aujourd’hui, face aux insurrections qui se multiplient dans les pays arabes, nos chancelleries occidentales semblent perdre le Nord et sont tout bonnement dés-orientées (c’est le cas de le dire). Sans revenir sur les multiples facéties de la « sinistre » des Affaires étrangères française, les réactions de l’ensemble de nos classes politiques semblent se résumer à la même pathétique impuissance, se contentant de déclarer piteusement « n’avoir pas bien pris la mesure » de la détresse humaine sévissant dans les pays concernés. Ben, voyons ! Ainsi et malgré les centaines d’ambassades et de consulats répartis dans ces pays, mais avec surtout un personnel formaté dans le sens qui nous convient ; malgré les milliers de « think tank » - cercles de réflexion, en français - où un nombre incalculable de cerveaux viennent élaborer de nouveaux concepts sur à peu près tout et n’importe quoi ; et malgré les sommes indécentes gaspillées par ces irresponsables mondains, voilà que le seul et lamentable constat qu’il leur faille bien établir est qu’une nouvelle fois, tous autant qu’ils sont, ils n’ont rien vu venir ! A un tel stade d’incompétence, ne faudrait-il pas au minimum se demander si les budgets faramineux de tout ce beau monde sont bien utiles ? Qu’il nous soit permis d’en douter.

Mais passons pour l’instant, sur le côté strictement pécuniaire de la chose - dans ces couloirs dorés, on n’en est plus à une gabegie près - et prenons les déclarations actuelles d’une classe politique confondue, pour ce qu’elles sont :

- d’une part, passé le choc initial que cela leur a provoqué, si nous avons bien entendu nos « sinistres », il semble donc que maintenant ils auraient compris la situation catastrophique dans laquelle tente de survivre un nombre incalculable de familles de ces pays, ruinées, écrasées par les connivences qu’ils ont entretenues avec ces tyrans afin d’en soutirer le maximum de profit. Le minimum d’éthique ou à défaut la simple logique voudrait dès lors que nos gouvernements cessent aussitôt tout type de collaboration avec ces dirigeants devenus d’un coup non plus des hôtes voire des amis de vacances, mais des dictateurs infréquentables à fuir à grandes enjambées ;

- d’autre part, si nos gouvernements et leurs « experts » ont réellement pris la mesure du drame des populations de ces pays - pourtant dénoncé depuis des décennies à travers quantité de documents produits par des centaines d’ONG - faudra-t-il attendre que les unes après les autres, les rues arabes offrent le spectacle effroyable d’une jeunesse sacrifiée se faisant assassiner par ses propres dirigeants, avant que les nôtres n’aient les réponses et les réactions adéquates !? Où se terrent-ils donc nos chantres des Droits de l’Homme, nos valeureux humanistes si prompts à réagir en d’autres circonstances !?

Quand un régime n’a d’autre réponse que de tirer sur sa propre population dans l’intention avouée - « nous utiliserons jusqu’à la dernière cartouche » a annoncé l’un des fils du psychopathe de Tripoli - de la tuer et de la blesser, ne faut-il pas sur-le-champ faire entendre clairement notre voix au lieu de marmonner une énième et insipide demande de « retenue » comme vient encore de le faire Mme. H. Clinton, la moue en berne !? Combien de tués faut-il pour que nos démocraties « éclairées » montent au créneau et réagissent avec la fermeté qui convient ? Combien d’assassinats faut-il pour que nous soyons, pour ce coup-là sans retenue, aux côtés des manifestants et de la résistance pacifique comme on a pu le constater depuis des mois que grondent les contestations populaires dans ces pays ? En lieu et place d’offrir notre « savoir-faire » en matière de répression policière et de vendre nos armes de répression, quand donc des voix officielles ayant encore un minimum de conscience humaine et de sens des valeurs s’élèveront-elles pour taper sur la table et dire à ces régimes, et à nos misérables élus vassalisés : assez !

Nos autorités arrogantes et leurs « experts » auront-elles le courage de pousser leur réflexion assez loin pour comprendre que le prix que paie la rue arabe aujourd’hui est en grande partie le prix de leur duplicité avec ces régimes honnis par leurs peuples depuis des années !? Et pousseront-elles l’analyse jusqu’à réaliser que la situation est pareille dans le cas de l’occupation sanglante en Palestine : le prix payé par les Palestiniens étant celui de nos lâchetés depuis plus de 63 ans !? La réponse ne fait hélas pas de doute, et il est à craindre que nos dirigeants n’aient ni ce courage ni les compétences, d’après l’exemple récent que le nouvel ambassadeur français fraîchement nommé a laissé entrevoir lors de sa première intervention médiatique à Tunis. Ainsi de cet autre 1er « sinistre » italien Berlusconi déclarant préférer « ne rien dire sur la situation pour ne pas embarrasser son ami Kadhafi »… mais dans le même temps, mettant à disposition du despote la flotte italienne présente dans les parages, ainsi que des armes, si besoin était. Vergogna ! Trop de compromissions, d’obscurs trafics et de mensonges répétés les ont liés à ces régimes… qu’ils voient s’effondrer avec angoisse, tant leurs intérêts douteux y sont liés. Pensez donc : après le rempart de Ben Ali contre l’intégrisme qui nous menaçait, la complicité de Mubarak à l’étranglement des Palestiniens, le dément libyen nous garantissait le contrôle des flux migratoires vers nos côtes méditerranéennes… sans parler du pétrole qu’il nous livrait à gogo. En vérité, c’est toute la politique occidentale de la région qui se casse la gueule !

Alors que les décisions que nous devrions prendre sont :

- condamnation ferme et catégorique de toute violence à l’encontre des populations ;

- soutien inconditionnel à la résistance et aux opposants à de tels régimes ;

- gel instantané des biens et avoirs de tous les responsables de crimes de civils, quels qu’ils soient ;

- sanctions immédiates à l’encontre de ces régimes et de tous ceux qui les servent, là -bas comme ici ;

- mandats d’arrêt international dans le but de transférer les responsables devant un tribunal ;

- jugement des dirigeants et de leurs collaborateurs proches et lointains…

Moins que cela, procède d’une hypocrisie manifeste et n’est pas à la mesure de la situation. Et il faut en profiter pour exiger de nos gouvernements, la rupture définitive avec tous les régimes de ce type. Dialoguer, oui, dans le but d’obtenir de profonds changements ; coopérer, non, tant que ces régimes ne sont pas réellement au service de leurs populations et qu’ils utilisent une force aveugle pour les massacrer à la moindre occasion.

Il n’y a pas si longtemps, « experts » et « spécialistes » en tous genres, se bousculant dans les stations radio et sur les plateaux télé, décrétaient du haut de leur certitude - après la chute du mur de Berlin qu’aucun d’eux n’avaient vu venir - qu’avec l’effondrement de l’URSS, nous assistions à la « fin de l’Histoire »… - rien que ça ! Avec quelques années de recul, non seulement l’on a pu se rendre compte de la vanité de la déclaration, mais encore, de l’erreur absolue de tous ceux qui l’ont proférée, diffusée ou au moins adoptée comme nouvelle vérité… Tout à l’inverse, chacun peut constater que l’Histoire, loin de se terminer, se déroule sous nos yeux. Et un peu de perspicacité nous indiquerait même qu’elle pourrait bien arriver jusque sous nos fenêtres… Car l’une des leçons que nous donne le soulèvement populaire dans les pays arabes est ce rappel : que tout dirigeant censé représenter le peuple, n’est à cette place que par la seule volonté de ce dernier. A voir les sourdes manigances, les compromissions multiples et les innombrables forfaitures de nos élus avec les dictateurs dont se débarrassent les peuples arabes, ne faudrait-il pas faire un peu le ménage chez nous, et « dégager » certain(e)s de nos enfoiré(e)s !?…

Enfin, instruits comme nous et d’après leurs récentes déclarations suite à ce qu’ils voient chaque jour sous leurs yeux depuis bientôt deux mois, comment ne pas voir l’évident parallèle entre ces situations et la brutale occupation des forces israéliennes à l’encontre de la population palestinienne, depuis des décennies ? Là non plus, n’y a-t-il pas eu assez de massacres, de drames et de crimes perpétrés lâchement et avec la complicité de nos gouvernements, pour que cette situation soit pour une fois prise avec tout le sérieux nécessaire, loin des effets d’annonce qui n’aboutissent jamais !? L’autisme de nos classes politiques est-il à ce point ancré, qu’elles pensent que les choses se perpétueront de la manière actuelle en Palestine, certaines que leur allié israélien saura utiliser les méthodes abjectes dont on le sait capable pour se prémunir du tsunami qui finira par le déborder ? Dans la tectonique des plaques qui secoue la région et le chaos qui risque d’en découler, qui aura le courage et la probité pour se lever et dire à l’entité sioniste, avant l’irrémédiable : « DÉGAGE » !?

Daniel Vanhove -
Observateur civil
Auteur
22.02.11

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Daniel VANHOVE
D. Vanhove de formation en psycho-pédagogie, a été bénévole à l’ABP (Association Belgo-Palestinienne) de Bruxelles, où il a participé à la formation et à la coordination des candidats aux Missions Civiles d’Observation en Palestine. Il a encadré une soixantaine de Missions et en a accompagné huit sur le terrain, entre Novembre 2001 et Avril 2004. Auteur de plusieurs livres : co-auteur de « Retour de Palestine », 2002 – Ed. Vista ; « Si vous détruisez nos maisons, vous ne détruirez pas nos (…)
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