La situation en Amérique latine est en train de prendre un tour
véritablement anti-impérialiste, chaque élection intervenant dans ce sous
continent montre qu’une vague de gauche portée par un puissant mouvement
populaire déferle, quelques événements récents nous permettent de mesurer
l’ampleur du phénomène. Dans un tel contexte, les révélations se
succèdent.
1)LE CONTEXTE ÉCONOMIQUE ET SOCIAL :
a) les effets de 20 ans de politiques néo-libérales :
Dans le continent sud américain, les recettes néo-libérales ont été
appliquées avec la plus extrême rigueur pendant plus de vingt ans avec un
résultat catastrophique. "Le PIB de cette zone est tombé au-dessous de sa
valeur de 97. Dans la période de 1994 à 2003, le transfert négatif des
ressources a été en Amérique latine de 29 milliards de dollars, tant à
cause du retrait des bénéfices du capital étrange, qu’à cause du service
d’une dette qui dans certains pays dépasse les 50% du PIB. De ce fait le
chômage et la misère touchent des couches de plus en plus grandes de la
population. En 2003, selon la Commission Economique pour l’Amérique latine
et les Caraïbes (CEPAL), 102 millions de personnes vivaient dans
l’indigence la plus totale, soit 20% de la population totale. Dans certains
pays comme le Honduras, près de 67% des habitants sont touchés par la
misère la plus complète. Actuellement, 54 millions des latino-américains
souffrent de malnutrition. A Haïti près de 50 % de la population endurent
des carences alimentaires. Dans un pays aussi riche que le Mexique, 34 %
des enfants âgés de moins de cinq ans sont frappés de malnutrition
chronique.
Depuis une vingtaine d’années, la plupart des gouvernements d’Amérique
latine ont accepté cette intégration au modèle étasunien. La victoire
idéologique du modèle néo-libéral a été totale, y compris dans une parti de
la gauche. Le progrès, l’espoir d’une sortie du sous développement,
l’absence, l’absence de solutions alternatives, autant que le chantages du
FMI et la déroute des partis de gauche et des syndicats imposaient
l’adoption de ces mesures. [1]
Là -dessus la crise argentine considérée comme le meilleur élève du FMI a
été un véritable électrochoc et a en quelque sorte fait la démonstration de
la nocivité des recettes néo-libérales.
Il est à noter que seulement deux pays semblaient échapper à ces résultats
catastrophiques, le Chili et Cuba, avec bien sur un modèle de
redistribution de la croissance totalement différent, ces deux pays étaient
les seuls à enregistrer (Cuba à partir de 96), une croissance positive. Le
cas de Cuba était d’autant plus exemplaire que ce pays est étranglé par un
terrible blocus, qui, entre autre l’empêche à accéder aux prêts du FMI à 2%
et est obligé à emprunter à des taux usuraires de 15% pour accéder au
marché mondial. L’exploit cubain, comme d’ailleurs sa récente
dé-dollarisation mérite un article en soi, mais nous y reviendrons.
b) la ZLEA ou la tentative des États-Unis de corseter l’Amérique latine
dans son sous-développement.
C’est dans un tel contexte que les États-Unis cherchent à mettre en place
la Zlea (Zone de libre échange des États Américains) dont seul Cuba serait
exclue. Colin Powell a défini le projet : "notre objectif est de garantir
pour les entreprises nord-américaine le contrôle d’un territoire qui
s’étend de l’Arctique à l’Antarctique et le libre accès -sans aucun
obstacle- de nos produits, services, technologie et capitaux pour tout le
continent. " Le projet constituerait un corset légal encore plus
contraignant que les diktats du FMI.
Là encore, l’analyse du système de "libre-échange" mériterait un article en
soi. Résumons là à deux faits : les USA, comme la plupart des pays
occidentaux pratiquent une politique de subvention à leurs agricultures, de
telle sorte que le maïs produit aux États-Unis ou le riz se présente sur le
marché moins cher que la production des pays sous développés et des pays
producteurs traditionnels de maïs comme le Mexique deviennent importateur [2],
pareil pour Haïti pour la production de riz et l’économie paysanne est
ruinée. On ne comprend rien au drame haïtien si l’on ne perçoit pas ce
fait. Ce qui est vrai pour le maïs et le riz l’est pour la plupart des
productions agricoles. Le deuxième fait est la dollarisation des économies,
ajoutée au service de la dette : non seulement les pays produisent pour
acheter du dollar avec lequel ils peuvent importer en particulier de
l’énergie, mais encore le font moins pour les échanges internationaux que
pour payer les intérêts de leur endettement qui parfois absorbent plus de
50% du PIB. Comme la plupart des pays du sud, l’Amérique latine est donc la
proie d’une saignée permanente. La ZLEA renforce dans de multiples domaines cette saignée... Et enlève aux gouvernements nationaux leur capacité de résistance au pillage de leurs ressources.
2) LÉVOLUTION POLITIQUE :
a) le temps du marché et de "la démocratie" étasunienne :
Le temps du consensus autour du modèle néo-libéral a été celui où les
États-Unis juraient que leur soutien à des ganaches féroces engendrées par
la lutte anti-communiste, et recrutées dans le petit personnel colonialiste
militaire indigène ou dans les hommes de main des propriétaires fonciers,
était terminé, c’était juré, c’était promis. Partout après une amnistie de
ces derniers, en Argentine, au Chili entre autres, les USA promurent un
processus électoral contrôlé de A à Z par les conditions de dépendance mais
avec toujours le danger de débordement populaire dans les urnes ou dans la
rue. Ils avaient à leur disposition de "nouvelles élites", chef
d’entreprise, intellectuels formés sur les campus nord américains,
collègues des experts du FMI, partageant leurs vues.Ce fut le temps de
la "démocratisation" avec amnistie des dictateurs. Certes les vieilles
pratiques de la CIA et des mafieux terroristes continuaient à s’exercer
contre Cuba et contre les populations indigènes des Andes ou de Colombie,
mais élections contrôlées sur la base de la dépendance économique avec la
déroute des forces de gauche et le ralliement instantané des " élus " aux
solutions néo-libérales permettaient aux ÉTATS-UNIS d’adopter un profil
vertueux. Ils s’étaient refait une virginité morale de défenseur des
libertés et des droits de l’homme. Et personne n’y regardait de trop près
sur la poursuite d’assassinats politiques et syndicaux, sur l’action
esclavagiste des propriétaires fonciers, il y avait une " presse libre "
dont les propriétaires défendaient les mêmes choix et des élections.
Certes il y avait le cas de Cuba où "la vertu" nord-américaine redevenait
terroriste et mafieuse, organisait un blocus pourtant condamné par la
quasi-unanimité des nations du monde, mais la pression économique et
idéologique, l’anticommunisme organisait un "cordon sanitaire" autour de
cette "anomalie" comme le disait Aznar. Le dirigeant espagnol franquiste
dont l’élection avait été financée par la mafia de Miami a joué un grand
rôle tant en Europe, qu’en Amérique latine où il s’est employé à rassembler
les gouvernements autour des États-Unis, à organiser la condamnation de
Cuba.
b) le développement du mouvement populaire et la montée des résistances :
Pourtant un moment écrasé le mouvement populaire se développait et les
forces de gauche transformées sous son influence commençaient leur
pression. Le phénomène altermondialiste, tout à fait différent de celui de
l’Europe, ancré en particulier dans la revendication à la justice des
couches populaires se développait. 2004 a été une année charnière.
Le sommet des Amériques convoqué par Washington le 12 janvier 2004, devait approuver la zone de libre-échange et réaffirmer l’isolement de Cuba. Lors des sommets précédents, l’autorité des États-UNis sur l’hémisphère n’était pas discutée. Mais depuis, un certain nombre de pays avaient élu de
nouveaux dirigeants. Et les États-Unis se sont heurtés à une double
résistance, d’une part celle du MERCOSUR regroupant le Brésil, l’Argentine
et l’Uruguay refusant de se dissoudre dans la ZLEA et d’autre part le
Venezuela de Chavez et les petits pays anglophones de Caraïbes regroupés au
sein d’une union.
Comble de malheurs pour les États-Unis, non seulement le coup d’État de
2002 contre le président Chavez fomenté par la CIA avec l’aide d’Aznar et
de certains pays d’Amérique latine, selon les récentes révélations de Jorge
Castaneda, l’ancien ministre des affaires étrangères du Mexique [3] a échoué
à cause de la mobilisation populaire et le loyalisme de l’armée, mais le
référendum du mois d’août 2004, suivi par les élections municipales et des
gouverneurs, ont confirmé la volonté du peuple vénézuélien de poursuivre
dans la voie "bolivarienne"anti-impérialiste.
Il est à noter que dès 2002, les États-Unis tombent le masque vertueux
démocratique ,non seulement dans un coup d’État fomenté par la CIA selon la
bonne vieille tradition, mais en multipliant les interventions terroristes
venues de la Colombie voisine et où l’on retrouve la mafia cubaine de
Miami.
Quand intervient en 2004, l’élection d’un président de gauche au panama,
l’ancienne présidente, rend un service aux USA, en graciant Posado
Carriles et ses complices. Ce dernier est un des plus grands terroristes du
continent et qui a sévi partout, à Cuba, mais aussi au Venezuela. Le
procureur vénézuélien Danilo Anderson est assassiné en novembre 2004, des
terroristes venus de Miami, ont fait sauter sa voiture. Malgré la presse
vénézuélienne majoritairement aux mains de l’opposition, et dont les
analyses sont les seules qui soient reprises en Europe et par RSF, qui
nient l’existence des terroristes de la CIA, parlent de dictature populiste
à propos de Chavez, il est difficile désormais de continuer à mentir sur ce
qui se passe au Venezuela.
Mais il reste le silence, les nouvelles tronquées. Toujours en 2004, une
vague d’élection est venue transformer la donne politique de l’Amérique
latine, il y a eu le Panama, puis le séisme uruguayen [4] et si les
États-Unis ont réussi à bloquer l’élection du Salvador en exerçant un
chantage sur le bloquage de l’argent des immigrés envoyé au familles
salvadoriennes, les élections municipales au Nicaragua ont montré une
montée de la vague sandiniste. Désormais c’est la Colombie qui menace de
passer à gauche et le Mexique. Arrêtons-nous sur ces deux pays qui pour le
moment sont les alliés sûrs des USA :
La Colombie est sans doute le pays le plus violent du continent. Les grands
propriétaires ont des hommes de main, des armées privées qui font régner la
terreur. On ne comprend rien à l’existence des FARC, si l’on ne voit pas ce
contexte d’exploitation, de terreur et de corruption. Uribe, l’actuel
président, qui s’était présenté en 2002 comme le candidat opposé à la
corruption et à la politicallerie, est le président qui a le plus été
impliqué dans la corruption et qui a le plus favorisé le clientélisme.
Comme le disent les Colombiens :"Le gouvernement et le président
représentent le fascisme colombien, la soumission à l’impérialisme
nord-américain et au Fonds monétaire international ". La candidature de
Carlos Gaviria, ex-membre de la Cour Constitutionnelle et actuellement
président du Front Social et Politique, mouvement qui regroupe des
syndicats, des mouvements et des partis politiques de gauche (comme le
Parti communiste colombien, parmi d’autres), a été considérée comme la
seule option pour battre le président Uribe. L’élection a lieu dans 20 mois
et déjà cette candidature soulève un immense espoir, on parle du Chavez
colombien.
Au Mexique, citons le journal mexicain la Jornada : "Au Mexique,
l’épuisement du modèle néolibéral, qui a détruit le tissu social, ne peut
plus être camouflé par les petites trucs du populisme ou par les promesses
d’un lendemain qui chante. Dix ans de " libre’’-commerce " avec les
Etats-Unis, gérés par le PRI puis par le PAN, ont plongé le pays dans la
misère. Dix millions de Mexicains sont partis vivre aux Etats-Unis, à la
recherche d’un minimum pour survivre. Des centaines de Mexicains ont été
assassinés en tentant de traverser la frontière vers le pays de la "
liberté ".
Cependant, le paysage politique évolue et l’espoir refait surface. Andrés Manuel López Obrador sera le candidat du PRD pour les élections présidentielles de 2006. Andrés Manuel est très populaire et sa popularité inquiète l’oligarchie et l’ambassade. D’ors et déjà , l’oeuvre de
démonisation est commencée. " Il est un ami de Fidel Castro ! " : sa
popularité croit de 5% ; " C’est un nouveau Chávez ! ", s’écrit la presse
bien-pensante et les intellectuels courtisans. Résultat : sa popularité
augmente de 10% ! Ils trouveront d’autres combines pour salir la
personnalité d’Andrés Manuel, mais rien n’indique qu’ils parviendront à lui
barrer la route de la présidence. Si les élections avaient lieu
aujourd’hui, Andrés Manuel serait président. " La Jordana le 29 novembre.
Pour que le panorama soit complet, il faudrait bien sûr d’une part
souligner les contradictions de cette évolution, la manière dont
l’Argentine, le Brésil qui à travers le Mercosur, leurs choix
internationaux, contribuent à la résistance du sous continent à
l’impérialisme, tout en cédant au plan intérieur aux diktats du FMI, ce qui
les place face à la pression de leurs peuples dans une situation difficile.
Il faudrait également analyser les pays andins, où montent les révoltes
indigènes contre le bradage des ressources du pays et la misère comme on
l’a vu avec le renversement et la fuite aux États-Unis du président
bolivien Gonzalo Sanchez de Lozado, toujours en 2004.
LE CONTEXTE INTERNATIONAL :
Dans ce soulèvement de l’Amérique latine dont le processus électoral de
victoire des gouvernements de gauche n’est que la traduction partielle, des
événements internationaux jouent également un rôle.
Il y a incontestablement l’agression nord-américaine en Irak, ce qui se
passe en Palestine. Ces faits jouent un double rôle. L’opinion publique de
l’Amérique latine s’identifie aux peuples agressés. Et de surcroît l’armée
des ÉTATS-UNIS bloquée par la résistance irakienne a du mal à intervenir
comme elle prévoyait de le faire à Cuba et au Venezuela, sans renoncer pour
autant à ses projets d’invasion.
a) Le processus bolivarien d’intégration d’un continent :
Mais d’autres événements sont intervenus parallèlement. Aznar battu en
Espagne, les États-Unis ont perdu leur homme de main le plus sûr tant en
Europe qu’en Amérique latine.
Le récent quatorzième sommet ibero-américain tenu au Costa Rica en novembre 2004, a illustré ce changement de donne. Tout avait été mis en place par les États-Unis et la presse occidentale aux ordres :
- Deux ex-présidents costaricains et trois ou quatre députés de l’Uruguay,
du Chili et de la République tchèque, plus une poignée de représentants de
la mafia de Miami et des agents de la CIA ont prétendu convertir
l’assemblée législative du Costa Rica en scène pour un show anti-cubain.
La tentative a fait long feu. Mais une puissante manifestation des
Costaricains leur a interdit cette opération médiatique anti-cubaine.
- Loin d’isoler Cuba et le Venezuela, le sommet sur proposition de Cuba a
dénoncé le terrorisme dont était victime le Venezuela, comme d’ailleurs le
blocus de Cuba. A été également dénoncée la libération par l’ex-présidente
du panama des terroristes de Miami.
- Le bilan final de cette conférence de San José est donc positif, il va
dans le sens de l’intégration du continent sud-américain.
b) l’Europe, une évolution contradictoire :
Parallèlement en Europe, les choses paraissent évoluer dans un sens
favorable. L’Espagne de Zapatero ne joue plus le même rôle que celle
d’Aznar et on assiste, semble-t-il à une évolution parallèle de la
politique française dont Cuba demeure le test avec la levée des sanctions
injustes et une aide moins affirmée aux pseudo-dissidents et vrais
mercenaires aux ordres des USA. Seule la presse française continue sa
pression et ne paraît pas avoir perçu les bougés politiques, elle demeure
dans son immense majorité en ce qui concerne l’Amérique latine, comme au
Moyen orient sur une ligne totalement atlantiste.
Dans l’évolution de certains pays européens comme la France et l’Espagne,
nul doute que le choix cubain d’en finir avec la dollarisation et de
n’utiliser les dollars comme réserves mais de procéder aux échanges avec
d’autres monnaies comme la livre canadienne, l’euro, le yen et d’autres. Ce
choix est clairement une réponse à la traque nord-américaine qui a prétendu
faire payer des amendes aux banques qui acceptaient les dollars des
Cubains, mais il constitue également un exemple périlleux pour les USA, si
d’autres pays et singulièrement les pays frères d’Amérique latine suivaient
l’exemple cubain . C’est un marché que ne peuvent pas négliger les pays
européens désireux de placer leurs productions industrielles.
Les deux piliers de la puissance nord-américaine sont ainsi contestés : sa
puissance militaire est incapable d’endiguer la résistance du peuple
irakien épuisé par des années d’embargo. La suprématie du dollar qui permet
aux USA de faire payer sa crise économique et son formidable endettement
au reste de la planète depuis l’imposition en 70 par Nixon du dollar comme
monnaie internationale, sans référence à l’or, est remise en cause par ce
choix cubain.
L’Europe est loin de présenter un front uni dans ce domaine, en particulier
depuis l’entrée des nouveaux pays de l’est. Si on peut constater un certain
"bougé" de la part de l’Espagne et de la France, la majorité des pays
européens manifestent une servilité totale à l’empire US et font tout pour
empêcher une politique autonome à l’égard des USA. Si la construction
européenne se faisait sur le modèle de la construction bolivarienne,
anti-impérialiste, sur la base de la justice sociale et de l’émancipation
des peuples qui pourrait être contre mais ce qui se réalise sous nos yeux
est tout le contraire, il s’agit d’une part de renforcer l’impérialisme
occidental sur le reste du monde et cela ne peut se faire que dans la
vassalisation, il s’agit par ailleurs d’imposer à l’intérieur des pays des
politiques néo-libérales . C’est pourquoi la bataille contre la
Constitution est aussi importante que celle que les peuples d’Amérique
latine mènent et ont mené contre la ZLEA. Et cette bataille, combinée à
d’autres luttes de salariés peut être l’amorce de recomposition politiques
et sociales importantes, il faut être très attentif à l’importance du
problème des résistances à la construction européenne, rassembler comme on
sut le faire les peuples d’Amérique latine.
c) les échanges sud-sud :
Mais il y a une deuxième idée cubaine qui est en train de se réaliser,
développer les rapports sud-sud, Cuba la met en oeuvre en échangeant non
seulement ses productions traditionnelles comme le Nickel ou le sucre et le
tabac, mais en utilisant son potentiel intellectuel pour fournir dans le
domaine biologique des produits à forte valeur ajoutée et des services
hautement qualifiés dans le domaine de la santé et de l’éducation. Les
échanges se développent avec le Venezuela mais aussi l’Argentine, le
Brésil. Sur le plan politique, Cuba se prononce pour une nouvelle
perspective pour le mouvement des non-alignés et la met en oeuvre.
C’est dans ce contexte de soulèvement d’un continent, de stratégie
"bolivarienne" d’unité de l’Amérique latine, mais aussi des "innovations
cubaines" dans la dé-dollarisation et dans les échanges sud-sud qu’il faut
apprécier l’intérêt nouveau de la Chine et du Président des non-alignés de
Malaisie pour l’Amérique latine et les liens nouveaux avec Cuba.
LE CAS CUBAIN :
Car Cuba, allié avec le Venezuela, les deux pays les plus menacés, est
plus que jamais la clé de l’Amérique latine. Il y a de ce point de vue un
véritable retournement de situation. Là encore l’agressivité
nord-américaine contre l’Irak, les menaces que l’actuelle administration
nord-américaine fait peser sur la paix mondiale, la volonté des peuples de
secouer les politiques qui les réduisent à la misère joue un rôle
essentiel. Mais Cuba et le Venezuela ont été capable de dégager une
perspective politique, l’unité anti-impérialiste d’un continent, et des
actions concrètes pour bousculer la suprématie du dollars, pour favoriser
les échanges sud-sud, une nouvelle mondialisation non capitaliste, non
impérialiste.
L’Amérique latine présente aujourd’hui une des situations les plus
intéressantes en matière de perspective politique, un véritable laboratoire
dans lequel le cas cubain présente la plus grande inventivité économique et
politique. Il faut donc dépasser le théâtre d’ombre que nous présente la
presse française aux ordres pour bien voir, comme nous l’expliquons dans
notre livre Cuba est une île" que :
- Premièrement, si les États-Unis haïssent Cuba alors que l’Union soviétique
s’est effondrée, c’est parce que Cuba demeure la clé d’un continent et on
ne comprend pas Cuba si on ne le restitue pas dans un contexte de hier et
d’aujourd’hui de ce continent "nuestra america"...
- Deuxiémement tandis que pendant 20 ans ce continent subissait les
politiques néo-libérales sans voir d’alternative, Cuba résistait et au
final avait de meilleurs résultats économiques et sociaux que le reste de
l’Amérique latine. Cuba a fait preuve d’une inventivité politique,
économique tout à fait remarquable. la montée des résistances et l’alliance
avec Chavez ont donné une force nouvelle à la stratégie anti-impérialiste
cubaine.
- Troisiémement, certes Cuba est dirigé par un parti communiste,
ce pays a adopté le socialisme et tenant les leviers industriels et
financiers du pays, il peut donc mettre en oeuvre des solutions que le capital peut rendre plus malaisées ailleurs, mais l’expérience cubaine ne se résume pas à une simple leçon de marxisme léninisme, si importante soit cette référence. Il
y a d’abord l’influence de Marti et d’un humanisme franc-maçon héritier
des lumières mais baignant dans l’imaginaire et la réalité de tout le
continent sud américain. Son refus du racisme, sa référence à l’Indien,
occupant légitime de "nuestra america", il y aussi dans le présent
l’indépendance nationale qui rapproche Cuba des "souverainistes" mais
toujours dans une dimension bolivarienne, il y a enfin les recherches
environnementales exemplaires.
Dans une Amérique latine, devenue laboratoire de l’altermondialisation, Cuba est lui-même un laboratoire. Je recommande en particulier l’analyse dans notre livre de la restructuration sucrière, le choix de l’emploi formation à l’échelle d’un pays où il tenté de faire passer la population au niveau du supérieur.
Dans un temps où nous sommes tous à la recherche d’une issue politique, ce qui se passe en Amérique latine et singulièrement à Cuba soit être connu,
discuté... Si des pays sous-développés sont capables d’ainsi "monter sur
leurs propres épaules", que pourrions-nous faire dans une pays aussi riche
que la France.
Danielle Bleitrach, 5 décembre 2004.
– Vient de publier avec Viktor Dedaj et Jean François Bonaldi "Cuba est une île", Ed. Le Temps des Cerises.
- Du même auteur :
- Quelques raisons d’ espérer.
- La situation de la Côte d’Ivoire.
- Mais qui s’ intéresse au Panama ... et pourtant ...
- Le peuple Cubain a besoin de nous.
- Les enjeux du Vénézuéla.