Ce n’est donc pas un sous-développé du bulbe comme Aurore Bergé, Eric Brunet, ou Pierre Haski (j’en ai d’autres, mais…).
– Sur Radio Classique, il a déclaré, le 7 janvier 2019, que les policiers devaient se servir « de leurs armes, une bonne fois » contre les « salopards d’extrême gauche et d’extrême droite ou des quartiers ». Et comme il a eu peur que cela ne suffise pas, il a appuyé : « On a la quatrième armée du monde, elle est capable de mettre fin à ces saloperies. »
Sans même avoir fait une année de philo et un mois à Sciences po, chacun comprend qu’il demande que les policiers, épaulés par l’armée, tirent sur la foule des gilets jaunes. Car, il est évidemment impossible, avant de tirer, de trier entre les idées des manifestants et leur lieu de vie. Impossible de distinguer les gilets jaunes venus pour casser (une infime minorité) et ceux qui s’enragent soudain (comme le boxeur Cristophe Dettinger) au spectacle d’une violence aveugle, déclenchée délibérément par les forces du désordre.
Pour avoir manifesté les samedis à Toulouse, je puis témoigner d’une chose nouvelle et que je ne pouvais imaginer, moi qui arpente le bitume sous banderoles depuis si longtemps : il est désormais impossible d’aller manifester sans être, à un moment, obligé de courir devant les keufs et de respirer des gaz lacrymogènes.
Un excité leur balance une bouteille de bière ? Ils canardent en retour la manifestation d’une pluie de grenades. La riposte est toujours volontairement disproportionnée. Ils sont sûrs de l’impunité. Ils sont couverts et encouragés.
– « On peut cogner, chef ? ».
– « Mais bien sûr, imbécile, qu’est-ce que tu attends, un ordre écrit de Castagnette ? ».
Personne ne leur balance quoi que ce soit ? Immense frustration ! L’ordre est alors donné de scinder le cortège, de le faire s’égailler dans plusieurs rue et quartiers pour de meilleurs images de foules clairsemées. Les grenades explosent, les vauriens en civil de la BAC cognent au petit bonheur la chance, jettent à terre, ligotent dans le dos avec des Serflex, un genou sur la tête de la victime. Ils l’embarquent en la traînant comme un sac de patates, accélérant le mouvement par des coups de pieds pour lesquels ils n’auront jamais des comptes à rendre (croient-ils. Attendez, mes bonhommes…) et ils déposent plainte au commissariat pour outrage parce que l’innocent a répondu « Ta gueule ! » à « Bougnoul, crouille, Kirikou, enculé de ta vieille pute de mère, je me fais sucer par ta salope de sœur ».
Bref, la manif se disloque façon puzzle. BFMTV en filme un morceau. « Le mouvement s’essouffle », vous le saviez déjà, ou alors n’êtes pas abonnés au Monde et à Libé, vous n’avez pas la télé, ni un autoradio, ni une radio, ou vous fermez les yeux en passant devant les kiosques à journaux, ou vous ne fréquentez jamais une salle d’attente, ou vous ne parlez jamais avec vos contemporains, ou vous êtes fâchés avec votre beauf, ou vous avez enfin pu acheter la lointaine petite île perdue où la main de l’homme n’a jamais mis les pieds.
J’ai toujours dans ma poche ce petit masque blanc que distribuaient les infirmières toulousaines dans les cortèges. Et il m’a souvent servi. Et je ne pars pas en manif sans lui. C’est nouveau, ça vient de sortir. C’est une pratique labellisée « Macron 1er ».
Le président de la République, son premier ministre, le ministre de l’Intérieur, le préfet de police de Paris, la plupart de nos journaleux, Luc Ferry, haïssent et conchient le peuple de France et ils feraient embarquer Maurice Grimaux, préfet de Police de Paris en 1968 qui adjurait ses policiers d’être respectueux des lois de la République et de ne pas matraquer un manifestant à terre.
Tous ces lascars sont aussi insensibles que Marie-Antoinette, aussi inconscients que Louis XVI.
Et il y a du Adolphe Tiers en eux.
Ils ont doté d’uniformes, d’insignes et d’armes des crypto-fachos incultes et aveuglés d’une haine anti-jeunes qui leur masque les terribles analogies entre le spectacle de lycéens agenouillés, mains sur la tête, et la préparation des mises à morts de Résistants.
D’une main nonchalante, les petits marquis de la Macronie piochent, dans le saladier en cristal, des friandises achetées chez Fauchon par un domestique, de l’autre ils fouillent dans l’arsenal des lois pour trouver celle qui, en l’interprétant comme il faut, permettrait d’absoudre leurs nervis violents, leurs mercenaires assermentés et sans foi. Ils y puisent la loi qui justifierait qu’on colle au gnouf quiconque risque de nous entraîner sur les chemins où la première dame de F capricieuse dépensière de France, Brigitte Macron, casserait ses talons de 10 centimètres : ceux qui conduisent au rétablissement de l’ISF, au RIC, à l’augmentation des salaires de misère. Et la suite.
Ils portent en eux la mort par crime « légal ».
Balancez toutes les grenades que vous pouvez, même celles que les lois internationales interdisent d’utiliser, mitraillez avec vos flash balls équipés de viseurs holographiques qui permettent de ne pas rater l’œil ou la bouche, acharnez-vous en meute sur le malheureux (ne pas tenir compte du sexe, de l’âge ou de la totale innocence) qui passe à votre portée. « Ah les braves sicaires ! », s’extasie Castaner en regrettant de ne pouvoir les décorer tous de la Légion d’honneur, ce hochet galvaudé, indistinctement attribué à des citoyens méritants et à des crapules qui devraient être en prison (trois bols de fayots par jour et c’est tout. A la japonaise !).
14/18. Les malheureux poilus jaillissaient de la tranchée et les projectiles de l’ennemi en hachaient menu une partie. D’autres perdaient un membre ou un morceau du visage. Ha ! Ha ! se régalent d’avance mes détracteurs en notant avec quelle maladresse je viens de tomber dans une comparaison scandaleuse. Pourtant, aller manifester aujourd’hui, c’est risquer d’y perdre une main, un œil. « Ils vous feront cracher du sang ! » avait prédit le leader de la France Insoumise pendant la campagne des présidentielles. Qui pouvait deviner que ça serait si vrai ?
Et, croyez-en Luc Ferry, c’est loin d’être suffisant. Les poilus qui sont retournés intacts dans la tranchée avaient gagné le gros lot à la loterie de la guerre. Nos braves gilets jaunes qui ont laissé un œil, une joue, un bout des lèvres, leurs gencives, leurs dents, une main, dans une manif, ont tiré le mauvais numéro et c’est tout. La faute à « Pas de chance », ça s’appelle être au mauvais d’endroit au mauvais moment, inutile d’aller embêter Macron avec ces brouilles. Il est élu, légitime. Les urnes ont parlé (murmuré, en fait). Vous êtes démocrate, oui ou m… ?
J’ai un jeune fils qui vit bien mieux qu’un gilet jaune, mais qui ne rate pas une manif. Il a l’âge des enthousiasmes boostés à la testostérone et des indignations non tempérées. Il s’approche trop des Robocops. Je tremble pour lui. Je lui conseille (lâchement ? En toute logique ?) de laisser jaillir en premier de la tranchée ceux qui ont élu Macron et qui viennent dire qu’ils le regrettent. Tel qui a mis le feu à la maison par inconscience doit être le premier à lutter contre l’incendie et à s’exposer à une chute de brandons incandescents.
Revenons à Luc Ferry. Les crapules des journaux qui font l’opinion (c’est-à-dire les journaux des milliardaires, subventionnés et gavés de pub), les radios et télés des milliardaires (bénéficiaires du CICE et souvent non contribuables), font exactement le contraire de ce qu’ils auraient fait si Jean-Luc Mélenchon avait dit le centième du commencement du début d’amorce de ce que préconise Luc Ferry.
Et d’abord, pourquoi n’est-il pas en garde à vue, Ferry ?
Pourquoi cent policiers n’ont-ils pas perquisitionné à l’aube dans un des ses domiciles ?
Pourquoi la « classe » politique droitière (je mets « classe » entre guillemets à cause du double sens du mot qui pourrait faire croire que ces enflures sont classieuses) ne rappelle-t-elle pas que la loi républicaine interdit de tirer sur le peuple désarmé et qu’inciter à le faire est un délit (ou un crime ?).
Pourquoi n’est-il pas claironné que la loi n’autorise en aucun cas des tirs de l’armée et de la police sur des foules, au prétexte que la manifestation n’a pas été déclarée à un Préfet qui hait le peuple et lâche ses sbires équipés d’armes qui blessent, estropient et défigurent. Et tuent.
Pourquoi ne connaît-on même pas le nom du flic qui a tué, d’un tir bien ajusté, le 1er décembre 2018, une octogénaire qui fermait ses volets au 4ème étage d’un immeuble marseillais ? Il a fallu moins de 24 heures pour que tout le pays sache que Cristophe Dettinger est le boxeur (à mains nus) d’un policier harnaché et, guère plus de temps pour qu’il ne soit plus libre.
Journaliste de BFMTV (reportage imaginaire mais si ressemblant !) : « Eh bien, je me trouve au pied de l’immeuble
où vivait, eh bien, Zineb Redouane, une octogénaire qui a été frappée d’une grenade au visage alors qu’elle fermait ses volets au quatrième étage pour, eh bien, se protéger des gaz lacrymogènes. L’IGPN a été saisie pour déterminer les causes de, eh bien, cette bavure. De son côté, le procureur de la République a déclaré qu’une enquête, eh bien, était ouverte et je vous en dirai les résultats dès qu’ils seront connus, dans, eh bien, 7 ou 8 ans. »
Où est-il le tueur de la mémé ? Toujours dans les manifs, toujours armé ? Il perçoit l’augmentation de salaire offerte par les chient au froc chient-en-lit du gouvernement (oui, je m’énerve : moi, dès qu’on tue des ancêtres, je me Cristophe-Dettingerise mentalement).
Pourquoi est-il en liberté Luc Ferry ? Dans tous les cas, ses propos sont mortifères. Soit ils seront suivis d’effet et, adieu la démocratie, bonjour la guerre civile, soit ils vont faire monter chez les manifestants des velléités de ne pas se laisser tirer comme à la fête foraine, ce qui induira qu’ils s’équipent et re-bonjour la Commune de Paris (Lyon-Marseille-Toulouse-Bordeaux, Etc.) et attention, rev’là monsieur Thiers !
Luc Ferry a lancé un défi aux Français : « Venez à poil, petits lapins, nous sortons nos fusils de chasse et nos fusils de guerre ».
Macron prononce des vœux en engueulant et menaçant son peuple, Edouard Philipe annonce que les sanctions et la répression seront plus sévères, les médiacrates s’esbaudissent et applaudissent comme il convient chez les larbins, Ferry en appelle à l’armée.
Ces (comment dit-il l’agrégé, déjà ? Ah oui !) salopards annoncent des crimes et absolvent par avance les tueurs. Ils ont fait le choix de défendre jusqu’au bout leurs privilèges et les intérêts du CAC 40. A combien de millions se monte la fortune de Luc Ferry ? Ira-t-il le dire à un gilet jaune qui se les gèle sur un rond-point et qui se les gèlera en famille en rentrant chez lui ?
Ah ces salopards ( arrêtez de dire que, je suis grossier quand je parle comme un ministre sur-diplômé) hurlent à l’unisson quand un policier a été humilié sur une passerelle parisienne ou quand il s’est retourné un ongle en tabassant des gosses ou des femmes, mais ricanent en catimini devant les photos et vidéos des blessures infligées au peuple, à travers tout le pays, documents dont les médias ne veulent pas infliger le spectacle à leur public trop sensible ! Tartuffes !
Dans un article magistral paru dans le Diplo, Frédéric Lordon souligne que « ... dans le cercle des médias installés, pas un n’a encore trouvé la force d’articuler explicitement cette vérité de l’époque Macron qu’aller manifester comporte le risque d’une blessure de guerre, ou de sanctions judiciaires ahurissantes. »
« Le Capital a horreur de l’absence de profit. Quand il flaire un bénéfice raisonnable, le Capital devient hardi. A 20%, il devient enthousiaste. A 50%, il est téméraire ; à 100%, il foule aux pieds toutes les lois humaines et à 300%, il ne recule devant aucun crime » (Karl Marx).
Luc Ferry, comme toutes ces « belles gens », souffre du même complexe de supériorité que Macron et (au hasard) Gilles Le Gendre, ancien élève du collège Sainte-Croix de Neuilly-sur-Seine, chef d’entreprise, successivement journaliste dans des journaux dont le titre fait rêver le poète que je suis : (Challenge, l’Usine Nouvelle, le Nouvel Economiste, l’Expansion) et patron des députés LREM : : « Notre erreur est d’avoir probablement été trop intelligents, trop subtils... ».
Cependant, faut-il que les gilets jaunes, la police ou l’armée tirent sur Luc Ferry ?
Certes pas. D’abord, devant le tollé provoqué par son appel au crime, il a dû se fendre d’une déclaration d’une hypocrisie et d’une bêtise telle que j’ai cru à une analyse de Jean-Michel Aphatie. Lisez Luc Ferry, agrégé de rétropédalage : « Je n’ai évidemment jamais appelé à tirer sur les gilets jaune dont je défends le mouvement depuis l’origine. Je demande simplement que les policiers puissent se servir comme ils le demandent de leurs armes NON LÉTALES quand CERTAINS cherchent carrément à les tuer. Clair ? »
Ce qui est clair c’est que « l’armée » a soudain disparu pour faire place à « non létales » dont l’absence nous avait contrariés dans sa controversée diatribe belliciste de bon bourgeois assuré de n’avoir jamais à appuyer lui-même sur la détente et à ramasser des morceaux de cervelle sur le pavé devant sa porte.
Pour finir, jouons au jeu du « Luc Ferry inversé », pour voir si ça passe : « Les gilets jaunes devraient se servir de pavés et de cocktails Molotov, une bonne fois, contre les salopards de keufs fachos (policiers, gendarmes mobiles, baqueux ) et contre les sièges des merdias. Depuis 1968, on a les meilleurs lanceurs du monde, ils sont capables de mettre fin à ces saloperies flicaillères et journaleuses. »
Bien entendu, je désapprouve cette conclusion (1) et je préfère de loin (car je suis prudent et douillet) ce qui est dit ici.
Maxime VIVAS
Note (1) Me croit qui veut.
(Article revu et abondé le 10/01/2019).