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Fatal freinage aux Etats-Unis.













Les Echos, 7 janvier 2008.


L’économie mondiale a connu de bonnes années. La croissance a été forte, le fossé entre pays développés et pays en développement s’est rétréci, avec une forte croissance en Inde et en Chine. Même l’Afrique ne s’en est pas si mal sortie, avec une croissance de plus de 5 % en 2006 et 2007. Mais cette période faste touche peut-être à sa fin. On s’inquiète depuis des années du déséquilibre causé par les énormes emprunts américains. L’instant de vérité est arrivé, avec la multiplication par quatre des prix du pétrole depuis 2003 - à laquelle l’Amérique a contribué avec sa guerre en Irak.

Jusqu’à présent, trois facteurs ont limité les effets d’un pétrole plus cher. D’abord la Chine, avec l’énorme augmentation de sa productivité, a exporté sa déflation. Ensuite, les Etats-Unis ont bénéficié de cette situation en abaissant leurs taux d’intérêt à des niveaux sans précédent, provoquant une bulle immobilière avec des prêts accessibles à tout le monde ou presque. Enfin, les travailleurs partout dans le monde ont amorti les conséquences du renchérissement, avec des salaires réels en baisse et une part plus faible du PIB.

Cette partie est terminée. La Chine est maintenant confrontée à l’inflation. Et si les Etats-Unis parviennent à convaincre la Chine de laisser sa monnaie s’apprécier, le coût de la vie augmentera en Amérique et ailleurs. Avec l’essor des biocarburants, les marchés de l’agriculture et de l’énergie sont devenus intégrés. Si l’on y ajoute l’augmentation de la demande et une baisse de l’offre pour des raisons climatiques, on peut s’attendre à une hausse du prix dans l’alimentation - une menace mortelle pour les pays en développement.

Cela pourrait mettre un coup d’arrêt à la surconsommation aux Etats-Unis. Même si la Réserve fédérale continue à baisser les taux d’intérêt, personne ne va se précipiter pour financer des prêts dans l’immobilier. Avec la baisse des prix dans ce secteur, la frénésie de dépenses va fatalement se calmer. Le gouvernement Bush espère retarder une vague de saisies de logements, et va laisser au prochain président la tâche de résoudre les problèmes économiques, comme il le fait avec le bourbier irakien.

L’Amérique exporte ses difficultés non seulement via ses mauvaises pratiques financières, mais aussi par un dollar plus faible. Il va être de plus en plus difficile à l’Europe d’exporter. L’instabilité des marchés financiers, liée à l’affaiblissement du dollar, sera coûteuse pour tous. Les salariés vont-ils accepter encore longtemps la baisse de leur niveau de vie au nom d’une mondialisation inéquitable dont les promesses apparaissent de plus en plus illusoires ? En Amérique, le mécontentement monte.

Pour ceux qui pensent qu’une mondialisation bien gérée peut bénéficier à tous et qui croient en la justice sociale et à l’importance de la démocratie, tout cela fait l’effet d’une douche froide. Les ajustements de cette ampleur sont toujours douloureux. Le revers de la médaille d’un « monde qui croule sous les liquidités » est un monde confronté à une demande globale fléchissante. Ces dernières années, les dépenses débridées de l’Amérique ont comblé le fossé. Mais, maintenant, les dépenses du gouvernement et celles des ménages américains sont appelées à diminuer, les candidats à la présidence des deux partis promettant un retour à une politique budgétaire responsable. Après sept ans durant lesquels l’Amérique a vu sa dette publique passer de 5.600 à 9.000 milliards de dollars, cela devrait être une bonne nouvelle, mais cela intervient au plus mauvais moment.

Il y a une lueur d’espoir dans ce sombre tableau : la croissance mondiale a des origines plus diverses qu’il y a dix ans. Depuis quelques années, les pays en développement sont les véritables moteurs de la croissance. Néanmoins, une croissance ralentie - ou une récession - de la première économie mondiale aura des conséquences planétaires. Si les autorités monétaires augmentent les taux d’intérêt pour atteindre leurs objectifs en matière de lutte anti-inflationniste, nous devons nous préparer au pire : un nouvel épisode de stagflation. Le prix à payer en termes de pertes d’emploi et de revenus sera énorme.

Joseph E. Stiglitz, prix Nobel d’économie 2001, est professeur à l’université Columbia (New York).

(Article est publié en collaboration avec Project Syndicate.)

 Source : Les Echos www.lesechos.fr




France : La crise des subprime ou le nouveau nuage de Tchernobyl, par Philippe Cohen.


Subprimes, chute du dollar : Pour qui sonne le glas, par Mike Whitney.




[ (...) Plus généralement, durant ces semaines écoulées depuis mi août et qui se terminent peut-être en cette fin octobre 2007, tous les indicateurs passent au rouge -monnaies, prix des matières premières, etc. mais les bourses "tiennent" et c’est là , officiellement, l’essentiel.
Donc la musique sur les "fondamentaux qui sont sains" tente encore de s’imposer et les analyses convenues limitent la crise financière à l’ "affaire des subprimes", la qualifiant pour mieux se rassurer de "crise estivale".

Belle inversion idéologique, car la réalité est grosso modo tout le contraire : quand la surface et l’apparence semblent aller bien, les fondations sont rongées. La crise ne provient pas de la "finance" en tant que superstructure, elle concerne les fondations du capitalisme. Dans ces conditions, la "santé de la Bourse" n’a plus la signification qu’elle pouvait avoir autrefois. Elle signifie en fait redoublement de parasitisme envers le mode de production capitaliste lui-même ; la santé, à ce stade, c’est déjà la maladie. Mais il est vrai que pour les actionnaires, il ne s’agit pas seulement d’idéologie puisque tant qu’ils encaissent, tout va bien même si la maison brûle. (...)]
Subprimes, immobilier, faillites bancaires : retour sur la crise "financière", par Vincent Présumey.




L’éclatement de la bulle immobilière américaine : une anomalie ou une manifestation de la crise du système ? par Danilo Corradi.




A LIRE : Note sur l’éclatement de la bulle immobilière américaine, par Isaac Johsua.






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