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Enfants et fonctionnaires dans le collimateur

Aujourd’hui, tous les enseignants de France sont appelés à la grève. Pour ce qui est de ceux du supérieur, il leur faut impérativement refuser une université financiarisée, des établissements où la concurrence entre les personnels est pensée comme le seul principe d’organisation et de fonctionnement, où le statut de fonctionnaire national aura disparu, un univers d’opacité, sans démocratie représentative, soumis au bon vouloir de l’autocratie des présidents.

Pour ce qui est de l’enseignement en crèche et en maternelle, où les personnels semblent très motivés, je me contenterai d’un témoignage personnel, ayant deux enfants dans ce type d’établissement.

Les « réformateurs » qui nous gouvernent ont à la fois institué le flicage des bambins, et diminué le nombre d’heures de cours. Cette diminution a été compensée par des heures de soutien pour les enfants un peu lents. Des heures de soutien pour des enfants de quatre ans ! Ma fille qui est en cours préparatoire est parfaitement consciente de ce qui se passe : elle a ainsi observé que deux ou trois élèves qui ne savaient pas lire au premier novembre (peut-on me montrer les tables de la Loi stipulant qu’il faut savoir lire à ce moment de l’année ?) allaient en soutien car, dit-on, « elles risquent de retarder la classe. » à‚gés d’à peine six ans, ces pauvres gosses sont donc déjà stigmatisés par rapport au groupe. Ce sur l’ordre d’un Président de la République qui fut, sa scolarité durant, un cancre, et d’un ministre de l’Éducation nationale qui fut inculpé, puis relaxé (http://www.20minutes.fr/article/237670/France-Xavier-Darcos-inculpe-de...) pour avoir fait travailler ses élèves, quelques jours avant le bac, sur un sujet très voisin de l’un des trois proposés aux candidats.

J’entends que, très affaiblie par la crise, la banque étatsunienne Citigroup va faire disparaître 50000 emplois dans les prochains mois (deuxième charrette historique après les 60000 licenciements d’IBM en 1993). J’entends également que les dirigeants d’une grande banque d’outre-Atlantique ont fait passer directement dans leur poche les deux tiers de l’aide fournie par le plan Paulson.

Pourquoi se gêneraient-ils ? Les politiques, les Bush, les Sarkozy, les Strauss-Kahn ne sont que leurs affidés. Une Christine Lagarde, un Éric Woerth ne sont rien d’autre, à leur niveau, que les représentants, en Europe, des intérêts du big business étatsunien.

Et pendant ce temps-là , de trop nombreux salariés, dans l’enseignement en particulier, font la fine bouche devant les actions nécessaires, se disent horrifiés lorsqu’une ligne de métro est interrompue vingt-quatre heures ou qu’un amphi d’université est bloqué par des étudiants.

La guerre de classes engagée par l’hyperbourgeoisie n’épargnera personne tant que les classes moyennes se cantonneront dans le déni de la réalité, tant qu’elles considéreront déshonorant de faire grève, de défiler dans la rue, de distribuer des tracts etc.

Il ne faut pas attendre grand-chose de la gauche institutionnelle, en pleine connivence avec la droite depuis une génération. La casse du service public, de l’État-nation, mise en place par Sarkozy aujourd’hui a été conçue (entre autre) dans un rapport élaboré en 2005, à la demande de l’Institut Montaigne, par Camille Putois, une énarque qui servit alternativement Sarkozy et Royal (http://www.plusnews.fr/articles/000076_segolene_royal_vole.php). Cette ancienne normalienne est désormais « directrice corporate » (chef d’entreprise, en français vulgaire) de l’Agence Havas. La gauche institutionnelle est muette devant les mauvais coups quotidiens de la droite affairiste parce qu’elle ne trouve pas grand-chose à y redire, parce qu’elle n’a rien fait lorsqu’elle était au pouvoir pour valoriser l’esprit de service public, pour défendre le droit public face au droit privé (les années Jospin, dans ce domaine, furent catastrophiques), enfin parce qu’elle a légitimé l’idéologie d’entreprise et les pratiques commerciales au sein des services publics comme, par exemple, La Poste.

Détruire la fonction publique est chose simple et rapide. La Suède social-démocrate et libérale l’a superbement réalisé. Dans ce pays, la spécificité des emplois publics d’État, des collectivités territoriales a disparu en 1986. Depuis, la fonction publique a été pour partie privatisée. Les grilles de rémunération ont été abandonnées et le principe même de flexibilité est devenu constitutif de l’embauche et des parcours des employés. Les recrutements nationaux n’existent plus. En leur place, une " compétition ouverte " (les nominations ne peuvent reposer que sur des « motifs objectifs tels que ceux touchant au mérite et aptitudes personnelles »). Les emplois subalternes échappent à cette règle : les recrutements s’opèrent par petite annonce, avec envoi de curriculum vitae, puis entretien, comme dans le privé. Résultat des courses : aucun agent de l’État n’a un statut et un parcours identiques à aucun autre, tandis que les effectifs dans l’administration locale ont chuté de 15%, ce qui était les buts primordiaux poursuivis. Il n’y a pas d’avancement selon des critères nationaux. Pour obtenir une promotion, l’agent doit chercher un emploi plus important et signer un nouveau contrat. Avant 1986, les rémunérations étaient déterminées par l’État après négociations avec les syndicats (extrêmement représentatifs à l’époque), dans le respect d’une grille de salaires nationale. Depuis, ces rémunérations varient en fonction de « l’aptitude et la compétence du salarié », donc d’un système totalement individuel et différencié, identique, voire pire que celui du secteur privé. Avec ce nouveau système, les salaires élevés se sont rapprochés de ceux du privé, tandis que les bas salaires ont baissé en valeur relative. Les performances des agents n’ont nullement progressé (ce n’était évidemment pas le but de la " réforme " ). Les licenciements sont désormais aussi faciles que dans le privé.

En quoi les retraités de la fonction publique française vont-ils souffrir ?
La RGPP (révision générale des politiques publiques) qui vise, au premier chef, comme cela a été réalisé ailleurs en Europe, à faire disparaître le statut de fonctionnaire, fera également disparaître le statut de pensionné de l’État. La « réforme » de juillet 2008 va renforcer les inégalités entre régions riches et régions pauvres, par exemple dans le domaine de l’offre médicale et paramédicale. Comme les autres citoyens, les retraités de la fonction publique (ceux des rectorats et des inspections académiques en particulier) n’auront bientôt plus comme interlocuteurs que des centres d’appel. Les franchises médicales seront augmentées, les aides ménagères à domicile seront supprimées. Le " coût " de la vieillesse sera évalué en temps réel. Les pensions de réversion seront assorties aux ressources du conjoint vivant.

Aujourd’hui, les pensions ne sont plus indexées sur les salaires des actifs. La création annoncée d’une caisse de retraite pour les fonctionnaires de l’État séparera le budget de l’État et les pensions.

Le ministre Santini voit dans le régime de retraite des fonctionnaires « une sorte de régime spécial ». Sa politique est de le rapprocher du régime du privé, au nom de « l’équité » (c’est-à -dire du nivellement par le bas) des régimes.
Retraités, actifs, même combat !

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