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Tunisie

Comme un avertissement à d’autres régimes : qui sème la misère...

Les soulèvements populaires qui se déroulent en Tunisie et en Algérie ne peuvent laisser indifférent. Tout démocrate qui se respecte a le devoir de les soutenir. Ainsi que d’amener nos représentants politiques européens à faire de même, sans la moindre ambiguïté. Après un mois d’émeutes sanglantes et un dénouement favorable au peuple tunisien, quelques voix officielles trop timides jusque-là commencent à susurrer une vague critique de ces gouvernements autoritaires, mais sont singulièrement moins bruyantes que lorsqu’il s’agit de condamner voire menacer le régime iranien, syrien, soudanais, palestinien… qui osent nous résister ! Il est dès lors instructif d’écouter les interventions - ou les silences - de nos ténors habituels. L’on peut vite discerner les inanités usuelles et obséquieuses des Baroin, Mitterand, Alliot-Marie et autres pantins, motivées par les sordides intérêts qui seuls et comme toujours semblent nourrir leurs commentaires hypocrites… Hasardeux pour ces planqués d’aller faire la leçon des Droits de l’Homme à des dictateurs qui sont des partenaires économiques dont nous tirons profit. Impensable d’oser critiquer des régimes autoritaires qui collaborent à notre traque au « terrorisme », mantra préféré de ces incompétents. Le président Ben Ali le savait tellement bien qu’il ne se privait pas d’utiliser cette appellation grossière pour désigner le soulèvement d’une population révoltée par des années de pauvreté sans issue.

Il est navrant de constater à quel point les (ir)responsables politiques de nos vieilles démocraties semblent encore vivre dans le passé et s’abriter derrière leurs vieux réflexes. De voir que ceux-là n’ont toujours pas pris la mesure des nouveaux moyens de communication qui mettent à portée de main de chaque internaute toutes les informations disponibles, sauf à en censurer l’accès. D’où leurs tentatives pour imposer le silence à certains sites tel Wikileaks, sous prétexte que le peuple ne doit pas tout savoir des manigances d’Etat parce qu’il ne serait pas à même de tout comprendre. Pratique qui ne manque pas dans ces régimes despotiques avec lesquels pourtant nous continuons à commercer allègrement. Il est donc lamentable de les entendre nous mentir encore de manière éhontée, pensant nous rassurer par leurs propos, alors que leurs impostures ne font qu’alimenter le dégoût et le mépris, quand ce n’est pas la haine chez les plus jeunes. Ils n’ont décidément rien compris…

Pour tout observateur perspicace dans le déroulement des évènements du monde, comment s’étonner de telles révoltes ? Et comment croire qu’elles peuvent être contenues, ramenées au silence et écrasées par l’usage de la force policière et/ou militaire ? Ou par d’énièmes promesses d’un mieux-être que certains peuples attendent depuis des décennies ? Malgré ses beaux discours, le président tunisien savait bien que "300.000 emplois" ne se décrètent pas d’un claquement de doigts. Le mal est tel que c’est toute l’organisation de ces pays qui doit être profondément revue et corrigée : sur base de redistribution des richesses nationales volées par les familles au pouvoir ; sur l’éradication de la corruption, du népotisme et du clientélisme ; sur des principes de liberté, de justice, de respect de la vie humaine ; sur le droit à l’éducation, à l’hygiène et à la santé, et de tant d’autres critères encore que les opposants à ces régimes attendent de pouvoir mettre en place pour travailler à l’émergence de leurs démocraties… En observant l’exemple tunisien, il conviendrait peut-être de se rappeler que l’Histoire est pleine de tels soulèvements qui surviennent tôt ou tard… et que cela n’est qu’une question de temps, de maturation…

Dans la foulée, comment penser que les populations innombrables du Moyen-Orient attaquées de toutes parts depuis des décennies par un Occident surarmé et belliqueux, pillées par nos appétits inextinguibles de leurs ressources énergétiques dans des guerres abjectes, trahies par nos dirigeants qui pactisent avec leurs dictateurs, discriminées par un racisme décomplexé qui n’a de cesse de s’affirmer au point même d’être un thème central dans le programme de certains partis politiques, stigmatisées dans la moindre tentative de vivre parmi nous certaines de leurs valeurs, traitées de manière honteuse et inégalitaire au quotidien, rabaissées partout et en tous lieux,… vont continuer à se laisser malmener sans réagir !? Il faut être aveugle et sourd ou profondément inculte pour ne pas voir ces réalités et penser que l’Occident peut indéfiniment perpétuer sa détestable culture coloniale xénophobe et raciste faite d’injustices, de pillages, de crimes, et du deux poids deux mesures dans tout ce qu’il touche et tout ce qu’il entend gérer dans la seule obsession de ses intérêts, et du haut de sa suffisance…

Le peuple de Tunisie vient de démontrer sa capacité à se soulever. Il vient de donner une leçon de courage et de dignité à l’ensemble des nations et particulièrement à celles dirigées par une classe politique autoritaire et despotique. Sa révolte qui a renversé le président Ben Ali sonne comme un avertissement aux régimes nombreux qui se moquent de leurs citoyens et les maintiennent dans un système injuste et inégalitaire. Les responsables politiques des pays voisins sauront-ils entendre le message du peuple tunisien ?...

Daniel Vanhove -
Observateur civil
Auteur
14.11.01

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Daniel VANHOVE
D. Vanhove de formation en psycho-pédagogie, a été bénévole à l’ABP (Association Belgo-Palestinienne) de Bruxelles, où il a participé à la formation et à la coordination des candidats aux Missions Civiles d’Observation en Palestine. Il a encadré une soixantaine de Missions et en a accompagné huit sur le terrain, entre Novembre 2001 et Avril 2004. Auteur de plusieurs livres : co-auteur de « Retour de Palestine », 2002 – Ed. Vista ; « Si vous détruisez nos maisons, vous ne détruirez pas nos (…)
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