RSS SyndicationTwitterFacebookFeedBurnerNetVibes
Rechercher

Gaza : Violence coloniale et justifications mensongères

La propagande du gouvernement israélien a été complètement intériorisée dans le discours dominant des médias québécois et canadiens. On explique la violence actuelle par le fait que le Hamas aurait brisé la trêve avec Israël, et qu’il est donc responsable de la violence israélienne présentée comme une « riposte », Israël ne faisant que se défendre contre un ennemi implacable qui veut toujours le détruire. Dans les meilleurs des cas, on déplore les excès de la dite « riposte », mais on ne remet pas en question qu’il s’agit bien d’une riposte. Le dossier entier de La Presse sur la situation actuelle a pour titre : Riposte d’Israël à Gaza.

On a donc complètement intériorisé la signification que le gouvernement israélien veut donner à l’événement, et elle devient le cadre à partir duquel la situation actuelle est perçue et comprise. On ne remet pas non plus en question le principe même de la violence pour résoudre le différend israélo-palestinien, étant entendu que cette violence est légitime quand Israël l’utilise mais illégitime quand le Hamas le fait, même si les moyens dont dispose chacun des deux protagonistes ne sont pas comparables et que les dommages qu’ils subissent en termes humains et en termes d’infrastructures ne sont aucunement comparables non plus.

Cette logique souffre de deux erreurs fondamentales qui font qu’elle ne tient absolument pas la route. D’abord elle contredit les données empiriques sur le terrain qui sont bien documentées et que personne ne conteste : c’est juste qu’on les oublie. Ensuite elle s’inscrit dans une logique proprement coloniale.

Qui a brisé la trêve ?

Contrairement à ce qui a été répété ad nauseam dans les éditoriaux ainsi que dans les entrevues télévisées, ce n’est pas le Hamas qui a brisé la trêve mais bien Israël. C’est le 4 novembre 2008 que la trêve, qui durait depuis quatre mois, a été brisée par Israël lors d’un bombardement qui a fait six morts parmi les Palestiniens. C’est seulement après ces assassinats ciblés que les tirs de roquettes ont repris, pas avant. Le 17 novembre, les Israéliens bombardaient à nouveau et tuaient quatre autres Palestiniens, amenant le total de morts palestiniens à quinze depuis le bris de la trêve par Israël. Ces faits sont solidement documentés (voir par exemple les textes de l’ancien correspondant du Jerusalem Post, Joel Greenberg, dans la Chicago Tribune du 17 novembre 2008).

Dès le lendemain du 4 novembre Israël a décidé de boucler complètement Gaza et de ne pas permettre la circulation de nourriture et de médicaments. Entre le 5 novembre et le 30 novembre 2008, seuls 23 camions de vivres ont pu entrer à Gaza alors qu’en moyenne, ce sont 3000 camions par mois qui peuvent répondre aux besoins de la population qui se chiffre à 1.5 millions. La situation humanitaire déjà désastreuse, et dénoncée comme telle par les représentants de l’ONU, est devenue encore plus catastrophique suite à ce blocus. Mais ni les bombardements Israéliens ni le blocus ne sont considérés comme des actes d’agression.

Une logique coloniale

Alors qu’est-ce qui amène les faiseurs d’opinion à « oublier » ces petits détails ? C’est qu’au fond, le gouvernement d’Israël se donne le droit d’utiliser la violence contre une population qu’il considère humainement inférieure, mais ces populations inférieures ne doivent surtout pas lever le ton. Dans la logique coloniale, rien n’est considéré comme une agression contre des populations subalternes, alors que toute révolte des subalternes est considérée comme un affront à l’ordre colonial, et doit être sévèrement punie.

Dans cette logique, on n’a pas besoin de respecter le droit international, et on pense que les peuplades inférieures ne comprennent que le langage de la force. Cette logique n’est heureusement pas partagée par toute la société israélienne et les mouvements comme Gush Shalom la contestent énergiquement. Par contre, l’élite politique canadienne l’a reprise intégralement. Or ce n’est pas le langage de la force qui va faire débloquer la situation, mais le respect du droit international.

Rachad Antonius,

Professseur, UQAM (Université du Québec A Montréal).

31 décembre 2008

http://www.tadamon.ca/post/2373/langswitch_lang/fr#more-2373

URL de cet article 7739
  
AGENDA

RIEN A SIGNALER

Le calme règne en ce moment
sur le front du Grand Soir.

Pour créer une agitation
CLIQUEZ-ICI

Même Thème
Si vous détruisez nos maisons vous ne détruirez pas nos âmes
Daniel VANHOVE
D. Vanhove de formation en psycho-pédagogie, a été bénévole à l’ABP (Association Belgo-Palestinienne) de Bruxelles, où il a participé à la formation et à la coordination des candidats aux Missions Civiles d’Observation en Palestine. Il a encadré une soixantaine de Missions et en a accompagné huit sur le terrain, entre Novembre 2001 et Avril 2004. Auteur de plusieurs livres : co-auteur de « Retour de Palestine », 2002 – Ed. Vista ; « Si vous détruisez nos maisons, vous ne détruirez pas nos âmes », 2004 (...)
Agrandir | voir bibliographie

 

En 2001, on nous a dit que la guerre en Afghanistan était une opération féministe. Les soldats US libéraient les femmes afghanes des talibans. Peut-on réellement faire entrer le féminisme dans un pays à coups de bombes ?

Arundhati Roy

Médias et Information : il est temps de tourner la page.
« La réalité est ce que nous prenons pour être vrai. Ce que nous prenons pour être vrai est ce que nous croyons. Ce que nous croyons est fondé sur nos perceptions. Ce que nous percevons dépend de ce que nous recherchons. Ce que nous recherchons dépend de ce que nous pensons. Ce que nous pensons dépend de ce que nous percevons. Ce que nous percevons détermine ce que nous croyons. Ce que nous croyons détermine ce que nous prenons pour être vrai. Ce que nous prenons pour être vrai est notre réalité. » (...)
55 
Lorsque les psychopathes prennent le contrôle de la société
NdT - Quelques extraits (en vrac) traitant des psychopathes et de leur emprise sur les sociétés modernes où ils s’épanouissent à merveille jusqu’au point de devenir une minorité dirigeante. Des passages paraîtront étrangement familiers et feront probablement penser à des situations et/ou des personnages existants ou ayant existé. Tu me dis "psychopathe" et soudain je pense à pas mal d’hommes et de femmes politiques. (attention : ce texte comporte une traduction non professionnelle d’un jargon (...)
46 
La crise européenne et l’Empire du Capital : leçons à partir de l’expérience latinoaméricaine
Je vous transmets le bonjour très affectueux de plus de 15 millions d’Équatoriennes et d’Équatoriens et une accolade aussi chaleureuse que la lumière du soleil équinoxial dont les rayons nous inondent là où nous vivons, à la Moitié du monde. Nos liens avec la France sont historiques et étroits : depuis les grandes idées libertaires qui se sont propagées à travers le monde portant en elles des fruits décisifs, jusqu’aux accords signés aujourd’hui par le Gouvernement de la Révolution Citoyenne d’Équateur (...)
Vos dons sont vitaux pour soutenir notre combat contre cette attaque ainsi que les autres formes de censures, pour les projets de Wikileaks, l'équipe, les serveurs, et les infrastructures de protection. Nous sommes entièrement soutenus par le grand public.
CLIQUEZ ICI
© Copy Left Le Grand Soir - Diffusion autorisée et même encouragée. Merci de mentionner les sources.
L'opinion des auteurs que nous publions ne reflète pas nécessairement celle du Grand Soir

Contacts | Qui sommes-nous ? | Administrateurs : Viktor Dedaj | Maxime Vivas | Bernard Gensane
Le saviez-vous ? Le Grand Soir a vu le jour en 2002.