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Les grands médias rejoignent les anti-vax lorsqu’il s’agit de vaccins fabriqués en Chine et en Russie (Mint Press News)

"Il est frappant de constater à quel point les techniques [sont] similaires à celles que Fox News utilise pour effrayer les gens au sujet de la campagne de vaccination américaine et celles que le New York Times, Reuters et d’autres utilisent pour effrayer les gens au sujet des vaccins chinois." - Jim Naureckas, Fairness and Accuracy in Reporting

WASHINGTON - "Des centaines de travailleurs médicaux thaïlandais ont été infectés malgré les vaccins Sinovac", titrait Reuters au début du mois. Le rapport détaillait comment 618 travailleurs médicaux thaïlandais vaccinés avec le vaccin chinois COVID ont quand même été infectés, entraînant un décès. Comme c’est souvent le cas avec une agence de presse aussi influente, l’article de Reuters a été repris dans le monde entier par des centaines de publications, dont le Washington Post, Yahoo ! News et le New York Post.

Pourtant, l’article indique également que plus de 677 000 travailleurs médicaux thaïlandais ont reçu la dose, ce qui signifie que plus de 99,9 % des personnes vaccinées n’ont pas développé le COVID-19 - un fait qui va à l’encontre des sous-entendus du titre. Une grande majorité des consommateurs de nouvelles ne lisent pas au-delà du titre, ce qui signifie qu’ils ont eu la fausse impression que Sinovac est inefficace.

Une vaccination complète n’offre pas une protection totale contre le COVID-19. Fin juin, CNBC a indiqué que plus de 4 000 Américains vaccinés avaient été hospitalisés à cause du virus, dont 750 étaient morts. Pourtant, Reuters a transformé cette nouvelle en une occasion de répandre la méfiance à l’égard de Sinovac en Thaïlande, qui connaît actuellement un pic rapide et sans précédent de cas de coronavirus.

L’article a également profité de l’occasion pour présenter le gouvernement américain et la société américaine Pfizer comme des sauveurs, notant que "la Thaïlande attend un don de 1,5 million de vaccins Pfizer-BioNTech des États-Unis plus tard dans le mois". Pourtant, dans un pays de 70 millions d’habitants, cette contribution est loin d’être une solution. Les liens étroits de Reuters à la fois avec le gouvernement américain et avec Pfizer rendent cet formulation particulièrement discutable. Jim Smith, président de la Fondation Thomson Reuters et ancien président et directeur général de Thomson Reuters, fait également partie du conseil d’administration de Pfizer. Par ailleurs, Dawn Scalici, l’ancienne directrice commerciale mondiale de Reuters, a passé 33 ans à la CIA, où elle a gravi les échelons jusqu’au poste de directrice principale, supervisant les opérations de l’agence en Irak. Elle a quitté son poste de responsable du renseignement national pour l’hémisphère occidental auprès du directeur du renseignement national pour, selon ses propres termes, "faire progresser la capacité de Thomson Reuters à répondre aux besoins disparates du gouvernement américain".

C’est loin d’être la première fois que Reuters pousse la paranoïa anti-vax contre les vaccins chinois comme Sinovac ou Sinopharm. En janvier, ils ont publié un article intitulé "Un volontaire péruvien participant à un essai de vaccin de Sinopharm meurt d’une pneumonie due au COVID-19, selon l’université." Pourtant, l’article contenait une déclaration de l’université indiquant que le participant faisait partie du groupe de contrôle, qui n’a reçu qu’un placebo, ce qui signifie qu’il est mort parce qu’il n’a pas reçu le vaccin, et non parce qu’il l’a reçu, comme le laissait manifestement entendre le titre de l’article.

En mai, Reuters a également publié un article intitulé "Les experts de l’OMS expriment une ’très faible confiance’ dans certaines données sur le vaccin Sinopharm COVID-19". Pourtant, à la lecture du rapport, l’OMS affirmait avoir "une confiance générale dans la capacité [du vaccin] à prévenir la maladie". Le seul reproche fait par le rapport est que la phase d’essai n’a pas inclus suffisamment de personnes appartenant à certains groupes à risque, comme les femmes enceintes ou les personnes âgées, ce qui signifie qu’il n’est pas certain que l’essai ait démontré de manière catégorique que le vaccin est indiscutablement sûr pour certaines personnes présentant des comorbidités. Mais qu’est-ce qu’un profane, peu familier de la terminologie scientifique, pourrait bien retenir de ce titre ?

La semaine dernière, l’article de Reuters intitulé "Sinovac’s vaccine finds supporters in Singapore despite effectiveness questions elsewhere" (Le vaccin de Sinovac trouve des partisans à Singapour malgré les interrogations sur son efficacité ailleurs) affirmait que la raison pour laquelle la cité-État insulaire importait le vaccin chinois était que "Singapour ne voulait pas contrarier Pékin", et non que le vaccin constituait une défense efficace contre un virus mortel.

Et plus tôt cette semaine, l’influente agence de presse a publié un article intitulé "Selon une étude, le vaccin de Sinopharm induit des réponses anticorps plus faibles à Delta", bien que l’université qui a mené l’expérience ait déclaré que "ce vaccin s’est avéré très efficace pour la variante Delta également". Le médecin qui a supervisé l’étude a conclu que "lorsqu’il s’agit de la variante Delta et d’autres variantes, le vaccin Sinopharm induit des niveaux de réponses en anticorps similaires à ceux des personnes qui ont été infectées naturellement, ce qui est très bien." Ces propos ont été rapportés par les médias chinois, mais pas par Reuters, dont l’article a véhiculé exactement le message inverse.

Toutes les fausses nouvelles qu’il est possible d’imprimer

Reuters est loin d’être le seul média qui semble partir en croisade pour discréditer Sinopharm et Sinovac. L’année dernière, le New York Times a publié un article intitulé "Le Brésil reprend l’essai d’un vaccin chinois après une brève suspension suite au décès d’un volontaire". Ce n’est que dans l’avant-dernier paragraphe qu’il informait les lecteurs que la personne en question s’était suicidée. À moins que le vaccin ne soit censé avoir déclenché cet acte (ce qu’il n’a pas affirmé), alors la prémisse de l’article est nulle. "Un Brésilien se suicide" ne fait pas la une du Times. Pourtant, cet incident s’est avéré digne de deux articles distincts. Il n’est pas facile de voir une raison autre qu’un appât à clics irresponsable ou une intention malveillante délibérée derrière le choix du titre et du sujet.

Un récent article du Times s’est également appuyé sur des insinuations pour discréditer la Chine, son titre étant "Ils se sont fiés aux vaccins chinois. Maintenant, ils luttent contre les flambées épidémiques.". L’article présentait les profils de trois pays - Bahreïn, la Mongolie et les Seychelles - qui avaient acheté et administré Sinopharm et Sinovac. "Ces trois pays ont fait confiance, du moins en partie, à des vaccins de fabrication chinoise facilement accessibles, ce qui leur a permis de mettre en place d’ambitieux programmes d’inoculation alors qu’une grande partie du monde s’en passait", écrit l’auteur Sui-Lee Wee, en les comparant constamment de manière défavorable aux vaccins de fabrication américaine.

Mais ce dont le Times n’a pas informé ses lecteurs, c’est que la grande majorité des cas graves ou mortels dans ces pays sont survenus chez des personnes non vaccinées. Le ministère de la santé des Seychelles l’a confirmé et continue d’implorer la population de se faire vacciner avec le vaccin chinois, en sachant qu’il est sûr. Comme l’a déclaré le ministère de la santé jeudi, "la désinformation prolonge la pandémie de COVID-19 et peut mettre des vies en danger en amenant les gens à prendre des décisions mal informées."

Enkhsaihan Lkhagvasuren, responsable de la mise en œuvre de la politique de santé publique au ministère de la santé de Mongolie, a fait une déclaration similaire, notant que 96 % des décès récents dus au COVID-19 dans son pays sont survenus chez des personnes qui n’étaient pas complètement vaccinées. Dans le même temps, le nombre de cas quotidiens au Bahreïn était déjà en chute libre depuis un mois avant la publication de l’article de Wee, et le pays enregistre actuellement une moyenne inférieure à 100 nouveaux cas par jour.

Le New York Times a longtemps dénigré les dangers des produits chinois, publiant des articles tels que :

  • "Dans la course au vaccin contre le coronavirus, la Chine s’écarte des sentiers officiels" (16 juillet 2020) ;
  • "La Chine donne des vaccins Covid-19 non éprouvés à des milliers de personnes, avec des risques inconnus" (26 septembre) ;
  • "Vaccine Unproven ? No Problem in China, Where People Scramble for Shots" (17 novembre) ;
  • "Le vaccin chinois Covid-19 reçoit une impulsion majeure, mais des doutes subsistent" (9 décembre) ;
  • "La Turquie et le Brésil affirment que le vaccin chinois est efficace, mais avec peu de données à l’appui " (25 décembre) ;
  • "La Chine a tout ce dont elle a besoin pour vacciner des millions de personnes, à l’exception des vaccins approuvés " (29 décembre) ;
  • "Les résultats décevants du vaccin chinois constituent un revers pour les pays en voie de développement" (13 janvier) ;
  • "La Chine voulait montrer ses vaccins. C’est un retour de bâton" (25 janvier).

Tous ces articles ont été rédigés ou coécrits par Wee, une journaliste qui n’a aucune formation scientifique ou médicale, selon sa biographie sur LinkedIn. Et tous s’appuyaient sur des insinuations et des conjectures pour répéter le même message global.

Le Washington Post a également dénigré ce qu’il considère comme "les vaccins de qualité inférieure de la Chine", le chroniqueur Josh Rogin soutenant constamment l’hypothèse discutable de la fuite d’un laboratoire, même lorsque d’autres médias la décrivaient comme une théorie de la conspiration sans fondement.

Condamner le scepticisme à l’égard des vaccins chez soi, le promouvoir à l’étranger

Le New York Times condamne depuis longtemps le scepticisme à l’égard des vaccins dans son pays, fustigeant les conservateurs pour leur réticence à se faire vacciner. Présentant l’extrême droite comme une menace directe pour la sécurité nationale, le Times a averti en mars que "des organisations extrémistes dénoncent désormais la sécurité et l’efficacité des vaccins contre le coronavirus dans le but d’essayer de saper le gouvernement". "La méfiance à l’égard d’un vaccin contre le coronavirus pourrait mettre en péril l’immunité générale", s’inquiétait-il en juillet 2020, ajoutant que "[des] milliards sont versés pour développer un vaccin, mais le calendrier rapide et les encouragements du président Trump créent un tout nouveau groupe de patients hésitant à se faire vacciner."

L’agence Reuters s’est elle aussi présentée comme une organisation pro-science, et a même créé un service de vérification des faits pour démentir les rumeurs concernant les vaccins. Pourtant, une "vérification des faits" datant de juin donne une idée de l’attention qui leur est accordée. Elle commence par la phrase "Refiling to correct typo in paragraph two and headline" [resoumis pour corriger une coquille dans le deuxième paragraphe et le titre] - manifestement une note de l’auteur à l’équipe de rédaction. Pendant près d’un mois, elle n’a pas été corrigée, ce qui laisse penser que personne au sein de l’agence de presse ne l’a lue, que ce soit avant ou après sa publication.

"Il est frappant de constater à quel point les techniques utilisées par Fox News pour effrayer les gens au sujet de la campagne de vaccination américaine sont similaires à celles utilisées par le New York Times, Reuters et d’autres pour effrayer les gens au sujet des vaccins chinois", a déclaré à MintPress Jim Naureckas, rédacteur en chef de l’organisation de surveillance des médias Fairness and Accuracy in Reporting. "Il n’est pas difficile de tirer parti de la méconnaissance des probabilités par les profanes pour faire passer de petits dangers pour de grands. Dans les deux cas, cependant, les médias mettent la vie des gens en danger dans un but politique - en fait, ils mènent une guerre bactériologique par le biais de la guerre psychologique", a-t-il ajouté.

Une telle méfiance n’a pas lieu d’être. Sinopharm et Sinovac sont tous deux des vaccins viraux inactivés qui utilisent des particules virales inactivées ou tuées qui ne peuvent pas se répliquer. Cette méthode est l’une des techniques les plus anciennes et les mieux établies, utilisée par Jonas Salk pour créer son célèbre vaccin contre la polio. La méthode est toujours utilisée pour fabriquer les vaccins modernes contre l’hépatite A et la grippe. Sinopharm et Sinovac contiennent des protéines auxquelles le système immunitaire de l’organisme réagit en stimulant la production d’anticorps anti-COVID, le préparant ainsi à combattre toute infection réelle ultérieure. Les vaccins ont été conçus pour être plus efficaces contre les cas plus graves de COVID-19, les études montrant que les deux vaccins sont suffisamment capables de prévenir les infections symptomatiques et particulièrement utiles pour éviter les hospitalisations.

Un ennemi familier

La Chine n’est pas la seule source étrangère de vaccins envers laquelle les médias occidentaux ont fait preuve d’une profonde hostilité ; le vaccin russe Sputnik V a également suscité un scepticisme considérable. Reuters a publié une série d’articles soulignant les prétendues lacunes du Sputnik, dont une brève indiquant que le Brésil avait rejeté le vaccin. Pourtant, cet article a été publié plus d’un mois après qu’un rapport du ministère américain de la santé et des services sociaux se soit vanté que l’une de ses meilleures réalisations en 2020 avait été de combattre "l’influence malveillante" de la Russie dans l’hémisphère occidental en faisant pression sur le gouvernement brésilien pour qu’il évite le Sputnik. Lorsque cette information a été reprise par Brasil Wire et d’autres médias locaux, elle a provoqué un scandale national.

Le Fonds russe d’investissement direct (RDIF), qui détient les droits de Sputnik, a déclaré que Reuters menait une campagne de désinformation par le biais de reportages "faux et inexacts" qui sont remplis de sources anonymes provenant des groupes de pression pharmaceutiques occidentaux. Il convient de noter ici que Reuters a été secrètement financé par le gouvernement britannique pendant la guerre froide pour mener une propagande antisoviétique et que des documents ayant fait l’objet de fuites montrent que cette relation étroite se poursuit encore aujourd’hui. Le ministère britannique des Affaires étrangères et du Commonwealth collabore avec l’entreprise dans le cadre d’opérations visant à "affaiblir la Russie", selon ses propres termes. Il n’est pas exclu qu’un accord similaire soit mis en place avec la Chine.

Le Washington Post a également fait preuve du même scepticisme à l’égard des vaccins provenant de pays ennemis. Dans un article intitulé "Les Russes et les Chinois vantent leurs vaccins. Peut-on leur faire confiance ?", le journal a permis à un scientifique du fabricant rival de vaccins Moderna de déclarer que nous devrions prendre les résultats russes et chinois "avec des pincettes", ce qui semble confirmer les accusations de la RDIF. La même source de Moderna a affirmé que la Russie ne permettrait jamais que son vaccin soit soumis à un processus d’approbation par les régulateurs de l’UE, une affirmation qui a été presque immédiatement réfutée.

Comme les vaccins chinois, l’efficacité de Sputnik a été confirmée, des études montrant qu’il peut se targuer d’un taux d’efficacité de 92 %.

Fabriquer un nouvel ennemi

La vague de scepticisme à l’égard des vaccins (étrangers) ne repose pas sur la science mais plutôt sur des considérations géopolitiques. Au cours de la dernière décennie, la Chine - et, dans une moindre mesure, la Russie - sont devenues les principaux rivaux internationaux des États-Unis. En 2011, l’administration Obama a entamé ce qu’elle a appelé le "pivot vers l’Asie" des États-Unis - une tentative d’encercler Pékin avec des bases militaires. Aujourd’hui, il y en a plus de 400 qui encerclent la République populaire.

Le budget 2021 du Pentagone indique clairement qu’il y aura un éloignement significatif du Moyen-Orient et un redéploiement des ressources vers l’Asie de l’Est, qui deviendra le "théâtre prioritaire" de l’Amérique dans les années à venir. Une autre région de conflit sera l’Arctique, où le réchauffement des températures ouvrira de précieuses voies maritimes à l’exploitation. Déjà, nombreux sont ceux qui, à Washington, plaident pour une occupation de la Norvège afin de contrer une supposée menace russe.

L’alarmisme constant de la presse a eu un effet significatif : un récent sondage a révélé que l’opinion publique américaine à l’égard de la Chine et de la Russie s’est effondrée et est tombée en dessous des niveaux de la guerre froide, avec seulement 20 % et 22 % des Américains ayant une opinion positive de ces pays, respectivement.

On est loin du constat d’il y a neuf ans, où les mêmes sondages montraient que l’opinion publique envers la Chine était résolument positive. Et lorsque Mitt Romney a tenté de présenter la Russie comme l’ennemi géopolitique numéro un des États-Unis lors des débats présidentiels de 2012, ses adversaires démocrates l’ont raillé sans relâche. "Les années 1980 appellent et demandent si on peut leur rendre leur politique étrangère... la guerre froide est terminée depuis 20 ans", a plaisanté Barack Obama.

Aujourd’hui, il n’y a guère de désaccord entre les deux partis quant à l’identité des deux principaux ennemis des États-Unis, et la rhétorique et les bruits de bottes continuent de s’intensifier. En février, le Atlantic Council - le groupe de réflexion semi-officiel de l’OTAN, composé de hauts responsables militaires des États membres de l’OTAN - a publié un rapport de 26 000 mots décrivant la Chine comme "le défi le plus important auquel les États-Unis sont confrontés" aujourd’hui. Le rapport conseille aux États-Unis d’utiliser la puissance de leur armée pour tracer un certain nombre de "lignes rouges" autour de la Chine, au-delà desquelles les États-Unis répondraient. Il s’agit essentiellement de toute action militaire chinoise ou nord-coréenne dans la région Asie-Pacifique, ou de toute cyberattaque chinoise contre les États-Unis ou leurs alliés. Un manquement à ces mesures, ont-ils conseillé au président Biden, entraînerait une "humiliation nationale".

Le rapport expose également ce à quoi ressemblerait une politique chinoise réussie d’ici 2050 : "Les États-Unis et leurs principaux alliés continuent de dominer l’équilibre régional et mondial des forces dans tous les principaux indices de puissance", le chef de l’État Xi Jinping "a été remplacé par une direction du parti plus modérée ; et [...] le peuple chinois lui-même en est venu à remettre en question et à contester la proposition du Parti communiste, vieille d’un siècle, selon laquelle l’ancienne civilisation chinoise est à jamais vouée à un avenir autoritaire". En d’autres termes, la pression américaine a entraîné un changement de régime à Pékin.

En mai, les dirigeants politiques et militaires des pays occidentaux se sont réunis au sommet de Alliance of Democracies, où l’un des principaux points de discussion a été la création d’une "OTAN asiatique" pour repousser ce qu’ils considéraient comme une agression chinoise intolérable dans la région. Le lieutenant-général H.R. McMaster a approuvé ce plan, décrivant le parti communiste chinois comme étant sans aucun doute la première menace pour la démocratie dans le monde.

Mais si la Chine ne fait pas naviguer ses navires de guerre vers les côtes de la Californie ou du Maine, c’est le contraire qui se produit à l’autre bout du monde. Tout au long des années 2020 et 2021, les États-Unis ont entrepris une série d’actions militaires provocatrices, surveillant les défenses côtières chinoises depuis la mer et les airs. En juillet de l’année dernière, l’U.S.S. Peralta s’est approché à 41 milles nautiques de la frontière maritime de la Chine. Entre-temps, des bombardiers nucléaires américains ont survolé des navires chinois près de l’île de Hainan.

Guerre économique

Parallèlement au renforcement militaire, les États-Unis mènent également une guerre économique contre leurs ennemis, en tentant de freiner l’initiative chinoise "Belt and Road", un vaste plan de développement économique pour l’Asie, l’Europe, l’Afrique et l’Australasie. Avec le même manque de succès, les États-Unis ont tenté de cajoler l’Allemagne pour qu’elle abandonne le gazoduc Nord Stream 2, qui permettra de pomper jusqu’à 110 milliards de m3 de gaz russe en Allemagne (et dans une grande partie de l’Europe), forgeant ainsi une interdépendance économique plus profonde entre les deux pays. La Chine et la Russie sont également soumises à un régime de sanctions considérable de la part des États-Unis.

Parmi les autres mesures de pression économique, l’administration Trump a tenté de forcer l’entreprise de médias sociaux TikTok, détenue par la Chine, à se vendre à un rival américain, a essayé de bloquer le déploiement de la technologie 5G mondiale sous la direction de l’entreprise chinoise Huawei et s’est appuyée sur les plateformes de médias sociaux pour faire taire les voix chinoises. L’année dernière, un groupe de réflexion financé par le gouvernement américain a convaincu Twitter de supprimer plus de 170 000 comptes favorables au gouvernement chinois en une seule journée.

La pandémie de COVID-19 a été un outil commode pour renforcer le sentiment anti-chinois au sein de l’opinion publique américaine, Trump et Biden utilisant les origines chinoises apparentes du virus comme capital politique. Trump lui-même l’a constamment appelé le "virus chinois" et, de façon encore plus dérisoire, le "Kung Flu". Allant plus loin, le sénateur de Floride Rick Scott a affirmé que chaque citoyen chinois était un espion communiste et devait être traité comme tel. Dans un tel climat, les attaques racistes contre les Américains d’origine asiatique ont explosé.

La Russie a également été la cible d’une infoguerre similaire : le radiodiffuseur public russe RT a été retiré des ondes sur certains marchés américains et son personnel a été contraint de s’enregistrer comme agents étrangers en vertu d’une loi de 1938 adoptée pour contrer la propagande nazie. Les deux pays ont également été accusés d’utiliser des armes à micro-ondes jusqu’alors inconnues contre des agents secrets et des diplomates américains.

Un monde à l’envers

Un certain nombre d’articles dans les médias commerciaux suggèrent que ce qu’ils craignent des vaccins chinois et russes n’est pas qu’ils soient inefficaces, mais qu’ils sont effectivement efficaces et qu’ils permettront à ces pays de remporter des victoires diplomatiques. "La Chine et la Russie utilisent les vaccins contre le coronavirus pour étendre leur influence. Les États-Unis restent sur la touche", titrait le Washington Post. Le New York Times semblait d’accord : "Le Brésil a besoin de vaccins. La Chine en profite", écrit-il, s’inquiétant du fait que Sinopharm et Sinovac donnent à la Chine "un énorme pouvoir dans les nations ravagées par les pandémies", notant que le Brésil a récemment adouci sa position intransigeante contre le réseau 5G de Huawei, soi-disant en réponse à l’aide de la Chine. L’idée que les États-Unis pourraient contrer cela en utilisant leur énorme pouvoir politique et diplomatique pour renoncer aux droits de propriété intellectuelle sur la production de vaccins - ce qui signifie qu’ils pourraient être fabriqués librement dans le monde entier - n’a pas été envisagée.

La pandémie de COVID-19 a mis en évidence les profondes inégalités qui existent dans le monde. Aux États-Unis et dans d’autres pays riches qui les ont accaparés, les vaccins sont abondants et disponibles gratuitement pour tous. Mais ils ont été accueillis avec un énorme scepticisme par le public. Un sondage Morning Consult a révélé que 30 % des Américains sont toujours sceptiques à leur égard ou refusent catégoriquement de se faire vacciner. Dans ce qui est devenu une guerre culturelle partisane, plus de 97 % des Américains récemment hospitalisés et 99,5 % de ceux qui meurent du COVID-19 ne sont pas vaccinés, selon le CDC et le Ministère de la Santé.

Pendant ce temps, dans les pays du Sud, le désir de se faire vacciner est immense, mais les actions des États-Unis y font obstacle. Les nations occidentales, qui possèdent bien plus de vaccins qu’elles ne pourront jamais en utiliser elles-mêmes, refusent de renoncer aux droits de propriété intellectuelle, ce qui empêche la production mondiale. Les sanctions américaines empêchent également Cuba d’importer la matière première dont elle a besoin pour augmenter la production de ses vaccins COVID. L’île souffre également d’une pénurie de seringues, en raison du blocus américain, ce qui signifie qu’elle ne peut même pas vacciner complètement ses propres citoyens.

Alors que de nombreux Américains considèrent que le coronavirus n’est plus qu’un souvenir, il fait toujours rage dans le monde entier, avec plus de 8 000 décès par jour et plus d’un demi-million de tests positifs, alors que le monde entre dans une troisième vague d’infections. De nombreux pays ont à peine commencé à vacciner leurs populations, et les rapports suggèrent que les pauvres du monde devront attendre jusqu’en 2024 ou plus pour recevoir une injection. Par exemple, la République démocratique du Congo - le troisième plus grand pays d’Afrique et le deuxième plus peuplé - n’a vacciné que 0,09 % de ses citoyens (moins de 1 sur 1 000).

Des vaccins en provenance d’autres pays pourraient remédier à cette grave pénurie. Pourtant, il est clair que beaucoup à Washington ne veulent pas que cela se produise. Les médias commerciaux ont passé les 18 derniers mois à insister pour que nous fassions "confiance à la science" et à condamner les théories de conspiration nationales sur la fiabilité des vaccins. Pourtant, lorsqu’il s’agit de vaccins étrangers, cette croyance dans la méthode scientifique est sacrifiée sur l’autel de la politique, mettant en danger la vie des gens pour faire avancer les objectifs géopolitiques de l’Amérique.

Le message constant adressé au monde par les médias américains est le suivant : "Les vaccins chinois (et russes) sont inefficaces ou dangereux. Ne les prenez pas". En plus d’être factuellement incorrect, pour de nombreuses personnes du Sud, Sinovac, Sinopharm ou Sputnik sont leur seul choix, ce qui signifie que ce message met en danger des millions de personnes. D’autres n’ont aucun accès aux vaccins.

Le scepticisme national à l’égard des vaccins a été fermement condamné, et des individus et des organisations ont été bannis des médias sociaux, voire empêchés d’utiliser des plateformes telles que Patreon pour financer leur travail. Mais le scepticisme international à l’égard des vaccins n’est non seulement pas censuré, mais il est activement encouragé et stimulé par nombre de nos sources d’information les plus importantes et les plus réputées, qui, dans un acte d’irresponsabilité extraordinaire, mettent activement en danger la vie des gens pour marquer des points politiques.

Alan Macleod

Traduction "non, non, c’est pas politique..." par Viktor Dedaj avec probablement toutes les fautes et coquilles habituelles

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Thomas Frank. Pourquoi les pauvres votent à droite ? Marseille : Agone, 2008.
Bernard GENSANE
Rien que pour la préface de Serge Halimi (quel mec, cet Halimi !), ce livre vaut le déplacement. Le titre d’origine est " Qu’est-ce qui cloche avec le Kansas ? Comment les Conservateurs ont gagné le coeur de l’Amérique. " Ceci pour dire que nous sommes en présence d’un fort volume qui dissèque les réflexes politiques, non pas des pauvres en général, mais uniquement de ceux du Kansas, dont l’auteur est originaire. Cela dit, dans sa préface, Halimi a eu pleinement raison d’élargir (…)
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L’un des plus gros mensonges officiels de notre temps est que les États-Unis et le Royaume-Uni sont en guerre contre l’islam radical. De l’Afghanistan à l’Arabie Saoudite en passant par la Syrie et la Libye, les extrémistes islamiques ont été pendant des décennies un allié vital dans leur véritable guerre : contre l’indépendance, l’unité panarabe et la souveraineté économique au Moyen-Orient.

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