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L’activisme de Bono au service des puissants

Assassiner des millions de gens est une chose, mais soutenir ces crimes en se qualifiant de saint des temps modernes en a irrité plus d'un. Ce complexe du Messie fait de Bono un individu controversé. Spirit's FreeSpeech janv. 10

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Illustration © Mint Press News

le 6 juin 2022

DUBLIN - Bono fait à nouveau parler de lui pour son activisme politique. À la demande du président ukrainien Volodymyr Zelensky, la rockstar irlandaise et leader du groupe U2 s’est rendue à Kiev, où elle a interprété quelques chansons avec des soldats ukrainiens dans la station de métro Khreshchatyk devant une centaine de personnes, dont la plupart étaient des journalistes. Après le concert, Bono s’est adressé au peuple ukrainien par l’intermédiaire des médias, déclarant :

“Votre président est le chef de file mondial de la cause de la liberté en ce moment ... le peuple ukrainien ne se bat pas seulement pour sa propre liberté, il se bat pour nous tous qui aimons la liberté”,

tout en appelant à un changement de régime en Russie.

Auparavant, Bono avait envoyé à Nancy Pelosi, présidente de la Chambre des représentants des États-Unis, le poème suivant, dans lequel il faisait de Zelensky un saint vivant. Mme Pelosi l’a lu lors d’un événement organisé à l’occasion de la Saint-Patrick :

“Oh, St Patrick a chassé les serpents

Avec ses prières mais ce n’est pas tout.

Car le serpent symbolise

Un mal qui surgit

Et se cache dans votre cœur, en se brisant.

Et le mal a surgi, mes amis

De l’obscurité qui habite certains hommes

Dans la douleur et la peur

C’est alors que les saints peuvent apparaître

Pour chasser de nouveau ces anciens serpents

Et ils luttent pour notre liberté

Du psychopathe de la famille des hommes

Le chagrin et la douleur d’Irlande

Sont désormais en Ukraine

Et le nom de Saint Patrick devenu Zelensky”.

Son œuvre a été mal accueillie, les médias la qualifiant de “détraquée”, “d’un genre particulièrement horrible” et de “littéralement le pire poème jamais écrit”. Son militantisme récent n’a pas non plus impressionné Harry Browne, de l’université technologique de Dublin et auteur du livre The Frontman : Bono (In the Name of Power).

“Zelensky est tout juste assez vieux pour se souvenir de l’époque où U2 était cool, et sûrement assez vieux pour se souvenir de [Bono] comme d’une figure publique clé dans la prise de décision mondiale sur des questions politiques et humanitaires”, a déclaré le Dr Browne à MintPress, ajoutant : “La rencontre n’a pas été très bien accueillie au niveau mondial... Il semble que l’image de Bono n’est plus l’image utile voire même crédible des meilleures intentions de l’Occident”.

C’est toutefois loin d’être la première fois que le natif de Dublin, âgé de 62 ans, choisit publiquement son camp lors de diverses guerres. En 2016, par exemple, il a accepté l’offre du Premier ministre turc Ahmet Davutoğlu de se joindre à lui lors de sa visite très médiatisée d’un camp de réfugiés syriens près de la frontière entre la Turquie et la Syrie. Bono a exalté “la générosité du peuple turc”, ajoutant que la réponse de la Turquie à la guerre civile syrienne est une “leçon” à retenir par le monde entier. Ce message a été quelque peu mis à mal puisque, à peine deux semaines plus tard, la Turquie a envahi et occupé la Syrie et ne l’a pas quittée depuis.

Les amis de la haute

Depuis sa première grande velléité de militantisme lors du concert Live Aid de 1984 (où une grande partie de l’argent récolté aurait servi à acheter des armes pour l’armée éthiopienne), Bono est devenu une figure quasi omniprésente dans les sphères de pouvoir, étant invité à s’exprimer lors d’une foule d’événements élitistes sur la pauvreté, notamment la conférence de Munich sur la sécurité, le sommet du G8, la Banque mondiale et le Forum économique mondial, tout en étant souvent considéré comme la voix de l’Afrique et comme une puissance intellectuelle et morale qui aide à résoudre les problèmes humanitaires les plus urgents du monde.

Pourtant, ses détracteurs diraient que, loin d’aider les pauvres et de défier le pouvoir, il l’a au contraire renforcé. Comme l’a écrit Browne :

“Bono a, le plus souvent, amplifié les discours de l’élite, préconisé des solutions inefficaces, traité les pauvres avec condescendance et léché les bottes des riches et des puissants. Il a suscité et reproduit des façons de voir le monde, en particulier l’Afrique, qui ne sont rien d’autre qu’un savant mélange de colonialisme missionnaire traditionnel et commercial, où le monde pauvre n’existe qu’en tant que mission à accomplir pour le monde des riches”.

Dans le cadre de ses activités, Bono a volontiers côtoyé les personnes les plus célèbres de la planète. À la Banque mondiale, il a discuté de la pauvreté avec Paul Wolfowitz, l’un des principaux artisans de la guerre en Irak. Au Forum économique mondial, il a déclaré au génocidaire rwandais Paul Kagame et à la directrice du Fonds monétaire international Christine Lagarde que “le capitalisme a sorti plus de gens de la pauvreté que n’importe quel autre ‘isme’”. Il est difficile de trouver une personnalité influente à laquelle il ne se soit pas associé.

En 2013, il a rencontré les Obama à Dublin et leur a servi de guide. Quatre ans plus tard, il faisait l’éloge du vice-président Mike Pence, défenseur de l’humanitaire en Afrique. Parmi les autres personnalités controversées qu’il n’a pas manqué de côtoyer, citons le président français Emmanuel Macron et le chef de guerre américain Henry Kissinger.

De gauche à droite, Mike Bloomberg, Wilbur Ross, Gordon Brown, Henry Kissinger et Bono lors de la collecte de fonds 2009 de la fondation Appeal of Conscience. Photo © Alamy

Alors qu’il prétend se préoccuper sincèrement de l’éradication de la pauvreté, le chanteur irlandais s’est constamment rapproché des personnalités et groupes les plus impliqués dans le maintien du monde dans la misère. En 2005, il a rédigé l’introduction du livre de Jeffrey Sachs intitulé La fin de la pauvreté. Économiste extrêmement influent, Sachs, plus que quiconque, est à l’origine de l’effondrement du niveau de vie dans la Russie des années 1990, qui s’est lancée dans une orgie de privatisations et de capitalisme de gangsters hypertrophié qui l’a privée de son impressionnant dispositif de sécurité sociale d’antan. La population du pays s’est ainsi réduite de quelque 3 millions d’habitants entre 1992 et 2006, tandis que des millions de gens mouraient des conséquences de la crise économique. Les conseils qu’il a prodigués au dictateur bolivien Hugo Banzer ont également provoqué une catastrophe au cours de laquelle l’hyperinflation a atteint 14 000 %, mais qui a également permis à de nombreuses personnes parmi les plus riches de Bolivie d’accroître leur fortune.

Bono est également un disciple de Lawrence Summers, l’ancien économiste en chef de la Banque mondiale et membre du conseil d’administration de la campagne ONE Campaign de Bono, une organisation caritative qui prétend lutter contre l’extrême pauvreté et les maladies en Afrique. Comme Sachs, Summers a été l’un des principaux créateurs des inégalités extrêmes observées aujourd’hui dans le monde. Lorsqu’il oeuvrait à la Banque mondiale, il a contraint les pays du Sud à privatiser leurs actifs et à permettre aux entreprises occidentales de piller leurs ressources naturelles, tout en réduisant considérablement les programmes sociaux qui permettaient à des centaines de millions de personnes de survivre.

En public, cependant, Summers est probablement plus connu pour le tristement célèbre Mémo Summers, un document écrit alors qu’il dirigeait la Banque mondiale, et qui affirmait que les pays occidentaux devraient être autorisés à se débarrasser de leurs déchets toxiques dans les “pays sous-peuplés d’Afrique”. “Il me semble que la logique économique derrière le déversement d’une cargaison de déchets toxiques dans le pays où les salaires sont les plus bas est impeccable”, écrivait-il, déclarant qu’il est “lamentable” que des endroits comme Los Angeles ne puissent pas aussi déverser leur pollution routière sur l’Afrique.

Loin de faire de lui un paria dans les cercles philanthropiques des célébrités, la présence de M. Summers au conseil d’administration de ONE Campaign permet de véhiculer une grande partie de l’activisme de M. Bono.

Basée sur Pennsylvania Avenue, à deux rues de la Maison Blanche, ONE Campaign est une ONG gigantesque, qui reçoit des fonds de plusieurs des plus grandes entreprises du monde, dont la Bank of America, Coca-Cola, Johnson & Johnson et Google. Elle travaille également en étroite collaboration avec d’autres organisations d’élite telles que la Fondation Bill et Melinda Gates et l’Open Society Foundations. Bien que ses objectifs déclarés de faire reculer la pauvreté et la maladie soient louables, il est difficile de savoir dans quelle mesure elle y a contribué. Après tout, si l’on exclut la Chine des statistiques, le recul de la pauvreté dans le monde va dans la mauvaise direction. Et bien qu’elle se présente comme une “organisation de défense et de sensibilisation de la base”, un simple coup d’œil au conseil d’administration de l’entreprise laisse entrevoir une autre réalité.

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De Facebook au gouvernement des EU, le conseil d’administration de ONE Campaign représente les intérêts les plus puissants du monde. Source : ONE Campaign

ONE Campaign est dirigée par Gayle Smith, ancienne directrice de l’USAID, une organisation gouvernementale américaine de soutien aux changements de régime qui finance des groupes politiques et sociétaux dans le monde entier conformes aux intérêts des États-Unis. Par exemple, l’USAID a joué un rôle déterminant dans la tentative de renversement du gouvernement cubain l’année dernière, en finançant, formant et soutenant discrètement les militants anticommunistes qui ont mené une révolution de couleur manquée. L’ancien Premier ministre britannique David Cameron, le chef des opérations du groupe Facebook et de nombreux hauts fonctionnaires de la Fondation Bill et Melinda Gates et de l’Open Society Foundation siègent également au conseil d’administration de ONE Campaign.

La fondation ONE Campaign apporte un soutien sans faille à la ’New Alliance for Food Security and Nutrition’, une initiative soutenue par l’Occident qui consiste pour les pays du G8 à accorder une aide économique aux États africains en échange de mesures visant à ouvrir leurs nations à l’agro-industrie étrangère, à autoriser l’accaparement massif de terres et à signer des accords avec des géants de l’agro-industrie tels que Monsanto, qui les piégeront dans une dépendance permanente à leurs produits à base d’OGM.

Comme le note Harry Browne, le style d’activisme de Bono “est par définition une stratégie limitée qui consiste à rechercher une assistance pour résoudre les problèmes du monde auprès de personnes et d’institutions fondamentalement responsables de ces problèmes”.

Ainsi, son action finit par blanchir les institutions mêmes qui asservissent le monde. Bono est donc devenu le chantre de l’empire. Les puissantes organisations qui asservissent les nations africaines sont confortées par cette forme d’activisme, plutôt qu’elles ne la remettent en question. Comme l’explique Browne : “Il est plus intéressant d’y réfléchir d’un point de vue dialectique : comment ces institutions sont-elles servies par cet ‘activisme’ ? On peut facilement imaginer, par exemple, que les députés européens se sentent valorisés lorsque de jeunes militants de ONE Campaign en tee-shirt prennent le contrôle du Parlement européen, ce qui en soi constitue une finalité de l’activité”.

Soutenir les criminels de guerre et discréditer les Palestiniens

U2 a construit toute sa réputation sur la nature anti-guerre d’un groupe indie doté d’une conscience sociale. Ils ont d’ailleurs sorti un album entier intitulé “War”, acclamé par la critique. La grande majorité des compatriotes de Bono se sont opposés à la guerre en Irak. C’est sans doute encore plus vrai de ses fans. Pourtant, en 2003, Bono était à ce point introduit dans les sphères du pouvoir et si intimement lié aux administrations Bush et Blair que la guerre en Irak a posé un sérieux dilemme : fallait-il sacrifier sa crédibilité ou ses relations ? En fin de compte, il a trouvé une troisième voie assez peu satisfaisante, approuvant les dirigeants, mais se gardant bien d’apporter un soutien inconditionnel à leur guerre.

“Tony Blair ne part pas en guerre pour le pétrole. Tony Blair est sincère dans ses convictions sur l’Irak. A mon avis, il se fourvoie, mais avec sincérité. Nous ne devons pas faire de Saddam Hussein un martyr. Il est doué pour manipuler les image”, a-t-il déclaré. Ce mensonge flagrant présente le déclenchement de la guerre pour le pétrole non pas comme un crime, mais comme une erreur stratégique de relations publiques favorisant un dictateur.

Pour ce qui est de Bush, Bono s’est livré à la même gymnastique cérébrale : “Je soutiens [Bush et Blair] dans leur volonté de foutre la trouille à Saddam Hussein, mais en y associant le reste du monde [...] Je soutiens [Bush et Blair] tant qu’ils partent en guerre sans être soutenus par les Nations unies. Ce serait une erreur, parce que cela donnerait l’impression que les États-Unis n’ont pas besoin de s’expliquer”, a-t-il déclaré, s’opposant une fois de plus tièdement, à la seule raison que cela pourrait paraître négatif.

Bono, à l’extrême droite, pose avec de gauche à droite

King, leur Aung San Suu Kyi”. Ainsi, comme d’autres, il fait abstraction des décennies de lutte non violente des Palestiniens, soutenant au contraire que ceux-ci relèvent du conte de fées bien loin de l’anti-violence rêvée par les “blanchisseurs” occidentaux.

Dans la même tribune, Bono a présenté Barack Obama comme un Martin Luther King des temps modernes, bien que l’administration Obama ait poursuivi les guerres de Bush et bombardé simultanément sept pays. Il a également appelé à un changement de régime en Iran, en Corée du Nord et au Myanmar, saluant les manifestants comme des héros courageux “qui continuent à descendre dans la rue malgré la certitude d’une répression brutale”. Son vœu sera exaucé au Myanmar, où Aung San Suu Kyi prendra le pouvoir et présidera au génocide de dizaines de milliers de musulmans rohingyas.

Un empire commercial qui échappe à l’impôt

Afin de favoriser le dynamisme de la scène artistique, l’Irlande s’est dotée d’une législation fiscale extrêmement généreuse pour les personnes travaillant dans le secteur de la création. Aucun artiste ou musicien du pays ne paie d’impôt sur le revenu pour les royalties inférieures à 250 000 dollars par an. Pourtant, U2 a décidé en 2006 de transférer sa fortune dans des paradis fiscaux. Qu’un individu se présentant comme le champion des pauvres de la planète évite de payer des impôts sur une fortune estimée à 700 millions de dollars a suscité de nombreuses critiques. La prestation de U2 au festival de Glastonbury en Angleterre en 2011 a été émaillée par d’immenses banderoles dans la foule dénonçant les escrocs de l’évasion fiscale qui servent aux pauvres des leçons sur la justice dans le monde. Commentant l’affaire, Bono a déclaré que les “gens intelligents” se montrent “raisonnables” quant à leur mode d’imposition. Le guitariste principal de U2, David Evans (qui insiste pour qu’on l’appelle “The Edge”), a déclaré qu’il était “ridicule” que les gens en fassent “tout un plat”. Bono lui-même sera plus tard cité dans les “Paradise Papers”, une fuite de documents révélant l’ampleur de l’évasion fiscale pratiquée par l’élite mondiale des super-riches.

L’économie irlandaise a connu un déclin critique après la crise financière de 2008. Sa bulle financière fictive a éclaté, causant des dégâts incalculables à des millions de personnes. Le régime fiscal particulièrement avantageux a encouragé les entreprises du monde entier à se délocaliser à Dublin, entraînant une hausse des prix de l’immobilier et une gentrification à des niveaux aberrants, et privant d’avenir les générations Millennial (nés entre 1981 & 1996) et Z (nés entre 1997 & 2012). Pourtant, en 2014, Bono a suscité l’indignation en déclarant que le programme hypercapitaliste non durable mis en œuvre par les gouvernements successifs “a apporté à l’Irlande la seule prospérité que nous ayons jamais connue”. Beaucoup pourraient demander “prospérité pour qui ?”

“U2 est une sorte de grand capitaliste, sans en avoir l’air, mais il l’est”, a déclaré le manager du groupe, Jim Aiken.

Ce discours “faites ce que je dis, pas ce que je fais” explique en grande partie pourquoi Bono est l’un des hommes les plus détestés dans son pays d’origine. U2 est l’un des produits d’exportation les plus connus d’Irlande, mais des années d’activisme hypocrite et artificiel ont rebuté bon nombre de ses compatriotes. Browne écrit que les Dublinois racontent souvent à leurs amis : “J’ai vu Bono en ville aujourd’hui, mais j’ai fait semblant de ne pas le reconnaître - je ne voulais pas lui faire ce plaisir”. L’insistance de Bono à porter des lunettes de soleil en permanence, même à l’intérieur, contribue à son comportement prétentieux. Il a déclaré souffrir d’un problème de santé qui l’oblige à en porter. C’est peut-être le cas. Cependant, on constate que cette pathologie semble davantage affecter les célébrités que le reste de la population.

Bono s’est constitué un empire commercial considérable, avec notamment l’achat d’un grand hôtel à Dublin et d’un centre commercial en Lituanie, détenus par l’intermédiaire d’une société écran basée à Malte, où la fiscalité est très avantageuse. Le centre n’aurait payé aucun impôt en Lituanie bien qu’ayant réalisé des profits. En 2004, Bono a également fondé une société de capital-investissement qui se consacre à des projets d’industries créatives. Par l’intermédiaire de cette société, il a produit “Mercenaries 2”, un jeu vidéo dont le but est d’envahir le Venezuela et de renverser un “tyran assoiffé de pouvoir” qui a pris le contrôle du pays et de son approvisionnement en pétrole. Le jeu, qui affiche une propagande pro-américaine flagrante, dépeint clairement un coup d’État contre le président Hugo Chavez, ce que Bush, l’ami de Bono, a tenté à plusieurs reprises. C’est l’USAID a fourni le financement et la formation aux putschistes ratés.

Ainsi, de l’Irak à la Palestine en passant par l’Iran et le Venezuela, Bono s’est toujours rangé du côté des puissants de ce monde, attaquant leurs ennemis et les protégeant des critiques. C’est une chose d’assassiner sans pitié et d’affamer des millions de personnes, mais c’est ce que de nombreuses personnes pratiquent à Washington et à Londres. C’en est une autre d’encourager ce processus en chantant ses mérites et se présentant comme un saint des temps modernes. Et c’est sans doute justement ce complexe du Messie qui a irrité tant de gens et fait de Bono un individu si controversé.

Bono se présente comme un activiste radical, qui bouscule les conventions et défend les opprimés du monde entier. En réalité, il n’a rien fait ou dit depuis des décennies qui puisse déranger les leaders politiques et financiers du monde, et est constamment invité dans les hautes sphères du pouvoir. Bono n’est pas une menace pour l’empire, il en est même le visage souriant en chansons. De sorte que si Bono dit la vérité au pouvoir, il en est si proche qu’il peut même la chuchoter. Et le pouvoir aime entendre ce que Bono lui raconte. Comme l’a souligné Browne, “Le travail de Bono sert-il les objectifs de tous ceux qui cherchent à dominer financièrement et idéologiquement le monde des pauvres comme des riches, et dont les intérêts sont très éloignés de ceux de la majorité d’entre nous ? Il ne connaît peut-être pas la réponse lui-même, mais nous, oui”.

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* Alan MacLeod est rédacteur en chef de MintPress News. Après avoir obtenu son doctorat en 2017, il a publié deux livres : Bad News From Venezuela : Twenty Years of Fake News and Misreporting et Propaganda in the Information Age : Still Manufacturing Consent, ainsi qu’un nombre d’articles académiques . Il a également contribué à FAIR.org, The Guardian, Salon, The Grayzone, Jacobin Magazine, et Common Dreams.

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