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Ravages du conformisme

Avec les expériences et les rencontres de la vie, on est amené à développer ce que j’appellerais grossièrement un « radar à cons ». Un outil relationnel précieux pour éviter les dispersions, coûteuses en temps et en énergie. Mais évidemment, l’affinement progressif de cet outil implique un certain engagement personnel, car pour connaître autrui il convient d’abord de se montrer ouvert et disponible tout en étant le plus désintéressé possible, et chasser en soi toute espèce de préjugé. Un effort relativement inconfortable pour beaucoup, mais nécessaire si l’on entend connaître véritablement l’autre sans en attendre systématiquement quelque chose ni y projeter égoïstement ses désirs. Sachant que toute relation humaine à peu près saine et équilibrée est basée sur le principe – à la fois naturel et culturel – d’échange.

En réalité on s’aperçoit que les gens (et particulièrement les gens de la ville), sous le poids du conformisme et du besoin d’appartenance à un groupe, aspirent davantage à paraître qu’à être, soucieux de présenter un aspect général identifiable et catégorisable, suivant des critères sociaux et culturels définis. Fondamentalement, l’enseignant sait que d’une année à l’autre, ce sont les mêmes caractères, les mêmes profils, les mêmes avis, les mêmes réponses types qu’il retrouvera chez ses élèves, peu d’entre eux sortant véritablement du lot par un quelconque esprit critique ou une proposition originale. Étant entendu qu’à l’âge adulte, l’être – sauf rare exception – ne fait que devenir une caricature de lui-même, et donc des autres...

Je n’ai jamais été un utilisateur des réseaux sociaux, mais lorsque mes élèves, enfants et adolescents, me montrent de quoi il retourne, je suis quelque peu effaré de la machine à uniformisation que cela représente. Il y a dans ce culte nauséeux de l’apparence et de la ressemblance quelque chose de littéralement pornographique, dans la mesure où il s’agit là de s’exposer machinalement au monde en une « vie par procuration », avec l’image de soi – souvent trafiquée – pour seul témoignage de la réalité. Il faudra un jour m’expliquer sérieusement le principe de pornographie : quel intérêt pour le consommateur s’il ne peut participer ? Quel intérêt pour l’acteur si la relation n’est ni intime ni amoureuse ?

Lorsque je vois l’une de ces multiples « influenceuses » pour ados, pseudo-femmes fatales maquillées comme des voitures volées, persuadées d’être à jamais les reines du bal en pensant que cela suffit à la société, je ne peux m’empêcher de l’imaginer aux cabinets avec une diarrhée fulgurante ou au saut du lit avec la face décomposée et l’haleine d’un mort. Idem pour son équivalent masculin, qui mise tout sur son dernier selfie de salle de bain et sa capacité à mimer des airs de séduction, de gravité ou de lamentation sans jamais réaliser qu’il n’a rien d’autre à proposer qu’une gestion de sa propre virtualité. Idem pour le journaliste ou le ministre que j’imagine au rayon charcuterie d’Auchan, fusillés du regard par les gens qui contiennent difficilement leurs insultes et leurs crachats. Derrière l’image, la réalité et le néant. Mais où avez-vous rangé votre cerveau ? Qu’avez-vous fait de votre envie de vivre ?

En cela, la crise du Covid aura été, avec sa médecine politique et sa chasse aux dissidents, un formidable révélateur de cons. Souvenons-nous de ces bons soldats masqués qui changeaient de trottoir à la vue de gens non bâillonnés... De ces bons téléspectateurs consciencieux qui faisaient la queue en se bousculant devant les vaccinodromes... De ces bons artistes engagés dans la guerre au virus, tellement engagés qu’ils en venaient à réserver leurs spectacles aux détenteurs d’un passe vaccinal... Nous avons tous en tête des anecdotes de l’absurde liées à cet épisode honteux que beaucoup, chez les cons, aimeraient oublier. Mais nous, pédagogues taquins, sommes là pour le leur rappeler gentiment !

Outre mon non-respect assidu du confinement (quel bonheur de marcher dans une ville déserte, débarrassée de ses cons !) et mes amendes (par la suite annulées...) pour non-port du masque, c’est d’abord au travail que j’ai été victime du totalitarisme covidique et de l’absurdité hygiéniste. Alors que se terminait la période de l’« enseignement à distance », par écrans interposés, la directrice du lycée où j’exerçais envoya un mail à l’ensemble des professeurs en annonçant les conditions de reprise des cours en « présentiel » : c’était le fameux « protocole sanitaire », à suivre en détail sous peine de passer pour un terroriste épidémique... Comme il y était indiqué l’obligation de porter un masque en permanence et de se soumettre à la mesure d’un thermomètre à l’entrée de l’établissement chaque matin, je ne pus me retenir d’envoyer un mail de réponse collectif en disant regretter de ne plus avoir le privilège de « faire la bise » à mes chères collègues (que je salue ici chaleureusement et que je remercie pour leur aimable soutien !), m’enquérant par ailleurs du « mode » de prise de température employé...

Eh bien, ces quelques mots d’esprit suffirent à provoquer mon licenciement ; la directrice, vexée, m’accusant à la fois de « sexisme », d’insolence envers la hiérarchie et de propos graveleux, ou quelque chose d’approchant (dans mon malheur, j’échappai tout de même à l’accusation d’homophobie quant au sous-entendu sodomitique peu inspiré que j’avais formulé). Je tentai de lui expliquer par la suite que ma réponse, d’une pertinence douteuse je l’admets, était l’expression désespérée d’un manque d’affection et de vitamine D dû au confinement enduré les semaines précédentes, mais rien n’y fit, j’étais bel et bien viré comme un pauvre sidaïque, avec tout de même une généreuse prime de licenciement à la clé (de quoi financer quelques mois de vacances confortables au Maroc).

Le con est facilement outré. Grossièrement confiant ou grossièrement méfiant, il est un danger public pour la liberté. Esclave consentant plutôt que libertaire déclassé, il vénère et suit aveuglément l’autorité. N’ayant jamais d’avis personnel ni de proposition alternative à faire valoir, incapable de penser par lui-même et encore moins de risquer sa réputation, il s’en remet aux dogmes en vigueur. Puis les dogmes changent et le con s’éteint sans avoir jamais rien produit de viable.

Le con peut donner l’illusion de l’érudition en enfilant une belle cravate ou en citant des auteurs connus. Il peut donner l’illusion du pouvoir en se fâchant tout rouge. Il peut aussi donner l’illusion de la rébellion en gueulant des slogans qu’il ne comprend pas. Bref, le con nous fait perdre notre temps et notre énergie mais malheureusement il n’a que nous pour lui rappeler sa connerie.

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Les Chinois sont des hommes comme les autres
Maxime VIVAS
Zheng Ruolin (Ruolin est le prénom) publie chez Denoël un livre délicieux et malicieux : « Les Chinois sont des hommes comme les autres ». L’auteur vit en France depuis une vingtaine d’années. Son père, récemment décédé, était un intellectuel Chinois célèbre dans son pays et un traducteur d’auteurs français (dont Balzac). Il avait subi la rigueur de la terrible époque de la Révolution culturelle à l’époque de Mao. Voici ce que dit le quatrième de couverture du livre de ZhengRuolin : (…)
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Ce qui nous fait avancer, ce sont nos sources. Ce sont des gens, sans doute, qui sont à l’intérieur de ces organisations, qui veulent du changement. Ce sont à la fois des figures héroïques qui prennent des risques bien plus grands que moi et qui poussent et montrent qu’ils veulent du changement d’une manière, en fait, extrêmement efficace.

Julian Assange - Wikileaks

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