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La politique de la carotte et du bâton face à l’exercice de la démocratie par les Palestiniens

Depuis 58 ans, Israël refuse aux Palestiniens le droit de construire un état et de jouir des droits humains les plus élémentaires en pratiquant un terrorisme d’état...
... afin de les intimider et de leur infliger un génocide politique, espérant ainsi réduire les Palestiniens à l’état de poussière et stopper leur résistance au projet sioniste dans la patrie palestinienne.

Israël a non seulement tourné le dos aux accords qu’il avait signés avec l’Autorité Palestinienne mais aussi aux résolutions des Nations Unies. Malgré tout cela, Israël n’a jamais été mis sous pression et encore moins puni de ne pas s’être conformé à ces accords et à la loi internationale.

Après la signature des accords d’Oslo, le premier ministre israélien Rabin a été assassiné par un colon israélien qui s’opposait au processus de paix, et le Likud a reconquis le pouvoir juste après cet évènement. A peine arrivés au pouvoir, les likudnistes se sont empressés de révoquer les termes des accords de paix ; c’est Ehud Olmert, alors maire de Jérusalem, qui a recommandé en 1996 au gouvernement Natanyahu d’ouvrir l’infâme tunnel qui passe sous le sanctuaire musulman, ce qui n’a pas manqué de provoquer de sanglants affrontements durant la lune de miel du processus de paix, et depuis lors, en violation flagrante avec les accords d’Oslo, Israêl n’a jamais cessé son expansion coloniale dans les Territoires Palestiniens. Plutôt que d’être sanctionné et isolé pour ses actes, Israël a gagné le soutien des Etats-Unis, supposés jouer le rôle du principal « garant de la paix » à ce moment-là , et la communauté internationale contemplait tout cela en montrant son approbation.

Dès que les Palestiniens voulurent élire leurs représentants, les israéliens ont entamé une campagne visant à miner le parti vainqueur (dont les candidats n’ont pas été autorisés à mener leur campagne électorale à Jérusalem, ont été harcelés aux checkpoints, arrêtés et emprisonnés) et le peuple qui l’avait élu ; l’Occident les a déjà condamnés comme obstacle « au processus de paix », bien que celui-ci est inexistant depuis cinq ans. Tous les discours occidentaux sur la démocratie ont soudain été balayés lorsque cela s’est avéré utile.

«  Démoniser » le nouveau gouvernement des Palestiniens et mettre en état de suffocation et de famine les Palestiniens dans le cadre de punitions collectives pour avoir exercé leur droit de désigner leurs propres représentants, représentent la première tentative de remettre en cause leur victoire.

Cette hypocrisie et ce système à double-standard appliqués par ceux-là même qui exaltent les vertus de la démocratie sont tout à fait honteux.


L’argent de l’Occident qui a été attribué aux Palestiniens et qui est maintenant refusé n’était rien de plus qu’un dessous de table politique versé pour que l’ancienne direction palestinienne se comporte conformément aux intérêts occidentaux ; ce n’était pas une aide humanitaire comme cela avait été proclamé, ni une compensation pour tout ce que nous avons enduré de la part de l’Occident depuis qu’il a envoyé ses colons juifs indésirables coloniser notre terre. L’argent est utilisé en tant que moyen de pression sur la population en la forçant à ne pouvoir se préoccuper que des moyens de survie au niveau du quotidien, en abandonnant par conséquent sa lutte politique. La position des gouvernements occidentaux a toujours été la même : Israël a été créé et restera en sécurité pour toujours, et le peuple Palestinien sera dépossédé de sa terre et repoussé le plus loin possible des frontières de sa terre natale.

Les donateurs se donnaient la garantie que l’argent allait se perdre dans un appareil bureaucratique et ne servirait pas à monter des projets de développement ou à construire une économie palestinienne indépendante qui amènerait à la fin liberté et souveraineté. L’argent était versé pour qu’une dépendance permanente soit instaurée vis-à -vis de l’Occident, mais il était versé seulement au compte-gouttes de façon à pouvoir tenir compte du climat politique et de la bonne volonté manifestée par la direction palestinienne de rabaisser nos droits nationaux. La connaissance de ces faits n’est pas le monopole d’intellectuels et d’universitaires Palestiniens ; beaucoup de Palestiniens en sont aussi persuadés.

Lorsqu’ils ont voté pour le Hamas, les Palestiniens ont voté de façon à refuser la politique de la carotte et du bâton. Concernant la corruption dans l’Autorité Palestinienne, les pays donateurs étaient les mieux informés, mais ils ont toléré cet état de fait pour leurs intérêts politiques et stratégiques. Ils ont continué à distribuer des fonds, mais comme on s’y attendait, le nouveau gouvernement a trouvé à son arrivée les caisses palestiniennes vides.

L’administration américaine cherche maintenant à imposer une campagne politique et psychologique contre les Palestiniens afin de faire avorter leur espoir de faire aboutir leurs droits nationaux dans le nouveau contexte politique palestinien. La Chambre des Représentants aux Etats-Unis a voté par 418 voix contre 1 le retrait de l’aide directe américaine à l’Autorité Palestinienne. Les américains ont organisé des discussions entre responsables israéliens et palestiniens — il faut noter en particulier la participation de Jibril Rajoub, conseiller d’Abbas à la sécurité nationale, qui a mené la délégation palestinienne — afin de trouver les moyens de marginaliser le nouveau gouvernement sorti des urnes. Les Américains sont aussi intervenus pour interdire une initiative arabe consistant à aider les Palestiniens financièrement et pour saboter politiquement le nouveau gouvernement élu.

Alors que le monde est en train d’inventer des moyens de punir les Palestiniens et aggraver leur isolement, Israël annonce son intention d’annexer la vallée du Jourdain qui représente un tiers de la Cisjordanie. Ce projet inclut la limitation de la liberté de mouvement des personnes et des biens dans la vallée du Jourdain — une des principales ressources agricoles pour les Palestiniens mais également très importante pour l’emploi et l’économie. La vallée dispose de sols fertiles et est relativement abondante en eau. Les restrictions sur le déplacement des productions agricoles ont déjà entraîné de sérieuses difficultés et ont obligé beaucoup de fermiers à abandonner leur terre et leur travail. Cette étape fait partie de la politique israélienne unilatérale visant à déterminer le futur des Territoires Palestiniens, séparant Jérusalem-Est et ses faubourgs du reste des Territoires Palestiniens et découpant la Cisjordanie en pièces isolées les unes des autres, tuant définitivement tout espoir d’un Etat Palestinien.

Israël a pris plusieurs mesures avec l’objectif de punir collectivement les Palestiniens à cause de leur choix démocratique : transformer les points de passage entre la Bande de Gaza et Israël en frontière internationale, empêchant ainsi les Palestiniens de commercer par l’intermédiaire de leurs ports maritimes (en contradiction flagrante avec le Protocole de Paris régissant les relations économiques entre le gouvernement israélien et l’Autorité Palestinienne), niant au peuple Palestinien et à son gouvernement le droit à la libre circulation, et retenant les taxes perçues en lieu et place des Palestiniens et censées être reversées à l’Autorité Palestinienne. Israël impose ainsi un siège économique qui est encore plus brutal que celui imposé jusqu’ici, exacerbant les dures conditions de vie du peuple maintenu sous occupation, selon le dernier rapport publié par les Nations Unies en décembre dernier.

L’an passé, 37% des Palestiniens ont eu des difficultés à obtenir de la nourriture, et 54% des habitants de la Bande de Gaza ont diminué leur volume nourriture consommée, et la mortalité infantile a augmenté de 15%. Et pourtant, les politiciens israéliens continuent leur compétition pour savoir qui proposera les mesures les plus extrêmes pour martyriser les Palestiniens, y compris les coupures d’électricité et d’eau dans les zones d’habitations palestiniennes.

Selon la Quatrième Convention de Genève, la force occupante a une responsabilté particulière pour soutenir et assurer la dignité humaine de celui qui vit sous occupation, mais la faim est une nouvelle fois utilisée comme une arme contre les Palestiniens.

Lors d’une visite des responsables israéliens au point de passage d’Ertez pour vérifier les effets de leurs mesures punitives contre les Palestiniens, Rohama Abraham, le vice ministre israélien de l’intérieur, s’est entendu dire que les prix augmentaient de façon dramatique et que les Palestiniens ne pouvaient plus acheter leur alimentation de base ; le sucre venant d’Israël était vendu six fois plus cher que les plants de fraisiers produits par les Palestiniens. «  S’ils ne peuvent acheter du sucre, qu’ils mangent de la marmelade  », a été la réponse d’Abraham. « C’est comme un rendez-vous avec un diététicien. Les Palestiniens maigriront, mais ils ne mourront pas », a déclaré Dov Weissglas, conseiller auprès du premier ministre lors d’une réunion avec le chef d’état-major des forces de défense israéliennes, le directeur du Shin Bet et des généraux et fonctionnaires de haut rang afin de discuter avec le ministre des affaires étrangères Tzipi Livni pour décider comment répondre à la victoire électorale du Hamas. Il a été rapporté qu’il y a eu un éclat de rire général parmi les participants.

Ceci révèle la déliquescence morale qui règne parmi les israéliens, et non pas un quelconque sens de l’humour. Affamer toute une population n’est pas un sujet qui prête à rire, mais les israéliens sont enivrés par leur suprématie militaire et leur racisme.


Toutes ces informations révèlent seulement une fraction de la réalité de la vie en Palestine. Vivre une telle réalité, c’est détruire notre humanité à tous : nous, les Palestiniens, qui sommes exposés à cela, les israéliens qui nous infilgent ces tourments et vous qui observez notre lutte. Il n’est pas difficile de comprendre comment des personnes innocentes sont marginalisées et pourquoi elles pourraient se tourner à nouveau vers les armes si leur choix démocratique n’est pas respecté. Par conséquent, si une autre bombe explose à Tel Aviv, le gouvernement israélien devra en rendre compte, et non pas les gens du Hamas.

Je ne peux qu’exprimer mon respect à l’égard du gouvernement suédois qui a exceptionnellement augmenté son aide de 5 millions d’Euros de façon à aider les Territoires Palestiniens après que les Etats-Unis et Israël aient décidé d’étrangler ces territoires financièrement. Maintenant, alors qu’Israël et ses alliés ferment toutes les portes autour des Palestiniens, je demande à la communauté internationale et à tous les gens libres autour du monde de garder une petite porte ouverte pour communiquer un minimum de sens moral, d’intégrité et de compassion et éviter ainsi que plus de sang ne soit versé.

Samah Jabr


Samah Jabr est palestinienne et réside à Jérusalem. Medecin, elle poursuit une formation en psychiatrie dans la région parisienne. Elle est chroniqueuse pour le Palestine Report en 1999-2000, sa rubrique s’intitulait " Fingerprints " ("Empreintes digitales"). Depuis le début de l’Intifada, elle contribue régulièrement au Washington Report on Middle East Affairs et au Palestine Times of London. Lauréate du Media Monitor’s Network pour sa contribution sur l’Intifada, un certain nombre de ses articles ont été publiés dans le International Herald Tribune, le Philadelphia Inquirer, Haaretz, Australian Options, The New Internationalists et autres publications internationales. Elle a donné plusieurs séries de conférences à l’étranger pour faire partager la vision palestinienne de ce conflit dont l’Université Fordham et au St. Peter’s College à New York, à Helsinki et dans plusieurs universités, mosquées et églises en Afrique du Sud.


 Source : The Palestine Times : "The policy of the stick and carrot facing the democracy of the free Palestinians" www.ptimes.org

 Traduction : Claude Czurbach

 Source français : CCIPPP (Campagne Civile Internationale pour la Protection du Peuple Palestinien)
www.protection-palestine.org


La Résistance Palestinienne. Un droit légitime et un devoir moral, par Samah Jabr.

Palestine : Sharon, la colonisation et la guerre globale préventive, Michel Warschawski.

Danser sur l’air de Sharon - Le retrait est le prélude à l’Annexion. Hasan Abu Nimah, Avi Shlaim.




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