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Quelle banderole politique les villes ont-elle le droit d’afficher ?

En rétention administrative en Israël depuis août 2017, Salah Hamouri, avocat franco-palestinien marié à une Ivryenne, Elsa Lefort, fille de l’ancien député communiste Jean-Claude Lefort, a fait l’objet en septembre dernier d’un portrait par le graffeur C215, dessiné au coin de la rue Molière et du boulevard Brandebourg à Ivry-sur-Seine. La ville en a tiré une affiche qu’elle a apposée devant la mairie d’octobre à mi-avril, date à laquelle le portrait, vandalisé, a été retiré pour être restauré.

A Ivry, la pratique de la banderole politique est assez coutumière, et la commune affiche actuellement une autre banderole qui proteste contre « la mise sous tutelle des collectivités locales par l’Etat au travers de la contractualisation » ainsi qu’une troisième pour exiger le droit de visite de Claude Mangin-Asfari à son époux emprisonné au Maroc, Naâma Asfari, citoyen d’ honneur de la ville.

Ce 30 avril, le courrier adressé au maire d’Ivry-sur-Seine par la préfecture du Val-de-Marne a toutefois ciblé uniquement celle concernant Salah Hamouri. « Il m’a été signalé l’apposition d’une banderole en soutien à Monsieur Salah Hamouri sur le fronton de l’Hôtel de ville de votre commune, ressortissant franco-palestinien, placé en détention administrative en Israël depuis le 23 août 2017. Je vous rappelle que le principe de neutralité des services publics s’oppose à ce que soient apposés sur les édifices publics des signes exprimant des opinions politiques tels qu’un drapeau symbole d’une revendication politique » , faisait savoir la préfecture, demandant à la ville de respecter le principe de neutralité des collectivités locales.

Pour Philippe Bouyssou, maire PCF de la ville, il s’agit d’un regard « sélectif » de la part de l’Etat, au regard de la « ligne éditoriale débordante » des banderoles apposées sur le fronton de la mairie. « Cela signifie-t-il que prendre position contre une disposition de la loi de Finances ou en faveur du droit de visite de l’épouse d’un prisonnier politique Sahraoui ne contreviendrait pas au fameux principe de « neutralité » que vous évoquez ? Ou bien que par votre plume l’Etat se rendrait lui­-même coupable d’une totale absence de neutralité ? Ou pire encore que vous vous contentiez de retraduire une forme de délation sans en avoir fait vérifier le fondement ?« , accuse l’édile qui fait par ailleurs remarquer que le portrait dont il est question n’est actuellement plus apposé en mairie, étant en cours de restauration.

Sur le fond, l’élu s’oppose à la demande de la préfecture de respecter le « principe de neutralité ». « Est-il nécessaire de vous rappeler que les collectivités locales sont dirigées par des assemblées élues qui à ce titre exercent un mandat politique porteur de valeurs ? » tance l’édile. « Dans une période où la libre administration des communes est remise en cause par la contractualisation, vous comprendrez que la confusion que vous opérez entre « collectivité locale » et « service public » constitue une véritable atteinte à la démocratie dont je doute que les services de l’Etat puissent se rendre coupables », enfonce le maire qui prévient que le portrait de Salah Hamouri « restera donc apposé sur la façade de ce qu’il convient d’appeler la Maison du peuple jusqu’à ce que cette libération soit effective ».

Pour rappel, Salah Hamouri, est un avocat franco-palestinien. Arrêté une première fois au poste de contrôle de Qalqiliya en mars 2005 alors qu’il était étudiant en sociologie de l’Université de Bethléem, il avait été accusé d’avoir voulu tuer le rabbin Ovadia Yossef et d’appartenir au Front populaire de libération de la Palestine. Plaidant coupable après trois ans de détention provisoire, il avait écopé de 7 ans de prison avant d’être libéré par anticipation fin 2011 dans le cadre d’une libération de 550 prisonniers palestiniens échangés contre le jeune soldat franco-israélien Gilad Shalit. Depuis, Salah Hamouri a obtenu son diplôme d’avocat, s’est marié en 2014 avec Elsa Lefort, ancienne conseillère municipale PCF de Choisy-le-Roi et fille de l’ancien député Jean-Claude Lefort, membre de son comité de soutien pendant son emprisonnement. Le couple vit alors à Jérusalem Est. Mais début 2016, alors que le couple est rentré en France pour passer Noël en famille, et que Elsa Lefort, enceinte de six mois et demi, reprend l’avion pour Israël un jour après son mari, elle est refoulée à l’entrée du pays malgré son « visa de service » délivré par le Bureau des affaires consulaires du ministère des Affaires étrangères israélien, considérée comme « potentiellement terroriste ». Après deux jours de rétention à l’aéroport Ben Gourion de Tel-Aviv, elle est expulsée vers la France et ne pourra repartir, malgré la mobilisation et le soutien d’élus. Au mois d’août 2017 que Salah Hamouri est à nouveau arrêté à son domicile de Jérusalem dans la nuit de 22 au 23 août et il est depuis en rétention administrative.

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