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Lettre ouverte à Zoé Valdés

En 2004, Zoé Valdés avait écrit à Nicolas Sarkozy, alors ministre de l’intérieur, pour lui faire part de sa crainte pour sa propre sécurité (pour cause d’agents castristes qui rôdaient à Paris). Voici ma réaction à l’époque.

Chère Zoé,

C’est avec une émotion non dissimulée, alors que je tente de contrôler le tremblement émotionné de mes doigts, que je vous écris cette lettre. Un certaine gêne s’empare de moi, sachant que cette lettre n’a pas un caractère privé. Mais c’est mon seul espoir d’entrer en contact avec vous. Alors au diable les considérations d’ordre orgueillistiques, je dirai ce que j’ai à dire, à visage découvert et face au monde entier.

Bien entendu, je suis un lecteur assidu de vos oeuvres. J’ai failli dire "livres", mais ce terme n’aurait pas suffi pour rendre toute leur dimension à vos créations brutes, sans fards, cruelles et profondes (surtout dans les scènes de sodomie entre frère et soeur - pratique très courante à Cuba où la promiscuité et le castrisme s’allient pour pervertir la jeunesse).

Vous avez écrit une lettre, qui dis-je ? vous avez lancé un appel au secours à Sarkozy, Ministre de l’Intérieur de la France. Vous avez commencé par le féliciter pour sa politique répressive. Sage précaution. Vous lover à ses côtés avant de lui susurrer quelque mot doux et quémander une faveur ou deux n’est pas une mauvaise stratégie. Votre sensualité légendaire ne vous fait donc jamais défaut ?

Dans cette lettre, vous allez pratiquement jusqu’à vous ouvrir les veines pour convaincre notre Ministre de votre amour pour la Patrie des Droits de l’Homme et pourquoi vous y avez élu domicile, tout en précisant que vous avez la nationalité espagnole. Comme je vous comprends : Paris, c’est quand même autre chose que Madrid, nous sommes bien d’accord là-dessus. Capitale des Lumières, Paris présente aussi l’avantage d’être le fief de la Gauche la Plus Conne de la Planète, ce qui facilite sérieusement votre travail de relations publiques impudiques.

Pour une vague échauffourée devant une exposition à Paris, vous interpellez un ministre en exercice pour lui faire part de votre frayeur ancestrale du castrisme et de ses sbires qui sèment la terreur et contrôlent les rues de la ville. Apparemment, faire du shopping sur les Champs Elysées en compagnie d’Ileana de la Guardia serait devenue une occupation à hauts risques. Ceci explique d’ailleurs pourquoi vous et vos pareils sont obligés de vous réfugier dans les médias et les studios divers. N’avez-vous jamais pensé à vous faire déposer en limousine devant un magasin Vuitton ?

Dans une de vos dernières oeuvres, qui se déroule à la Havane, vous citez au moins 50 fois le nom d’Edith Piaf. Vous citez au moins 200 films occidentaux. Et vous racontez au moins 400 scènes qui ne sont que des reprises de blagues ou d’histoires en vogue à Cuba. Pour un lecteur occidental non averti, votre technique (car il ne s’agit que cela), consiste à le flatter en parsemant vos oeuvres de "références culturelles" qui lui sont familières. Un lecteur français vous lit et tombe sur le nom "Edith Piaf", voilà qu’il a la chair de poule. Un sourire tendre lui illumine le visage en pensant à cette petite cubaine qui a fait tant d’efforts pour assimiler "notre" culture. En balançant 200 références cinématographiques, vous êtes certaine de balayer large, et votre lecteur (occidental) s’y reconnaîtra. Une bouffée de tendresse s’extirpera de sa poitrine pour cette petite cubaine tellement cultivée... n’est-ce pas ? En parsemant votre oeuvre de scènes "osées", vous vous donnez un côté "rock-and-roll", rebelle indocile, franche-tireuse... Puisque les scènes sont "osées", c’est que vous-même vous osez. CQFD. Ceci présente un avantage indéniable : sous un vernis "familier" au lecteur occidental, vous pouvez asséner des conneries monumentales pour tout ce qui concerne le pays où vous êtes née. Le lecteur occidental est persuadé d’assister à un acte de transgression de tabous. Ce qui est toujours bon pour quelques frissons un peu faciles. Le seul problème, c’est que la littérature cubaine moderne peut être aussi osée que la vôtre, avec l’opportunisme en moins - mais pas forcément, d’ailleurs. Si vous réussissez à surfer dans le monde de l’édition occidentale, c’est parce que vous surfez sur une grosse vague d’inculture et d’ignorance occidentale qui vous porte comme elle porte sa haine de Cuba et dont vous êtes l’égérie.

Au fur et à mesure de vos passages dans les médias, comme un cuisinier qui goûterait à sa soupe pour contrôler la cuisson, vous avez placé la barre d’inepties de plus en plus haut. Vous avez constaté qu’à chaque fois, votre interlocuteur diplômé d’une "grande école du journalisme" se contentait de hocher la tête d’admiration. Vous vous êtes dit : pourquoi se gêner ? Vous en êtes aujourd’hui à affirmer que les écoles de campagnes cubaines sont en fait de véritables "camps de travail", que 80.000 cubains auraient "disparu" (faudrait peut-être chercher du côté de Miami, je suis sur qu’on retrouverait la plupart), et que les crimes du castrisme sont pires que ceux de Pinochet et Stroessner réunis... Ouf.

George W. Bush ayant déjà cité l’exploitation sexuelle des enfants avec la complicité du gouvernement Cubain, voilà tout l’éventail des critiques distillé. Il n’en manquait qu’un : l’antisémitisme des "castristes". Mais pour cela, votre ami Jacobo Machover s’en est chargé dans un article publié récemment par un portail internet de juifs francophones. Je leur ai écrit. Ils n’ont pas répondu. On en reparlera.

Avec, d’un côté, vos amis de Reporters Sans Frontières et quelques abrutis de service du Parti Socialiste français comme Laurent Fabius, et, de l’autre, vos très chers amis de Miami, vous êtes un des piliers du pont qui relie (bizarrement ?) une partie de la social-démocratie française à l’extrême-droite cubaine terroriste. Un sacré "axe du mal", ou je ne m’y connais rien.

Je suis désolé d’avoir ainsi dévoilé en public votre stratégie et celle de vos amis. Ce me démangeait depuis un certain temps. Vous m’en avez offert l’occasion. C’est aussi pour cela que je vous aime.

Viktor Dedaj
8 février 2004

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