Objectif : décider démocratiquement d’une démarche citoyenne, participative, concertée, afin de déterminer dans les mois qui viennent le meilleur moyen d’éteindre le feu en prenant en compte les désirs des gens et en montrant qu’on peut faire de l’extinction autrement par une écoute de la base, un changement de comportement qui prouvera qu’il y a une autre façon d’arrêter le feu. Quel camelot !
La scène se passe dans la caserne des pompiers. Ils sont 80 ou 1000, peu importe, dont le métier est d’éteindre le feu, qui en vivent, qui ont été formés à ça, qui ont obtenu leur diplôme, qui nous donnent des conseils depuis des décennies et qui nous vendent leur calendrier.
Pendant que le pompier-démocrate-citoyen-participatif-hâbleur-frimeur parle, les flammes brûlent la première maison (et le Code du travail qui s’y trouvait), une bombonne de gaz surchauffée explose et
projette en haut des arbres, où elle se maintient, la flamme du FN.
Un pompier se précipite, une lance en main et chacun de dénoncer son geste en solo d’égocentrique (on voit bien qu’il vient de là où il vient, celui-là, c’est tout dire !).
Bref, et pour parler clair, la France est dotée d’une ribambelle de partis politiques, financés un peu par nos deniers de contribuables. Leurs directions sont truffées d’intellectuels, d’élus à tous les échelons, d’anciens ministres, de vieux routiers de la chose publique. Ces partis ont mené mille batailles et fait voter autant de lois, en ont fait échouer qui étaient scélérates. Ils ont accumulé des trésors d’expérience, remplis des caves d’archives bien classées. Depuis des dizaines d’années (et parfois depuis des siècles) ils ont analysé, scruté, passé au scanner notre pays ; ils l’ont façonné.
Et en 2016, ils te nous déclenchent un concert de klaxon, une cacophonie de casseroles qu’on est bien obligés d’entendre et qui nous annoncent LA nouvelle : en vue des élections présidentielles de l’an prochain, il faut prendre le temps de réfléchir, se mettre autour d’une table, écouter toutes les suggestions, discuter d’un texte, construire un projet, travailler, se mettre au travail, au travail se mettre, mettre au travail se, pour élaborer un programme.
Certes, l’offre politique (expression de maquignon) ne peut être figée dans un monde qui bouge, des aggiornamentos sont nécessaires. Mais il y a un socle, des valeurs qui marquent les identités, des limites idéologiques à l’évolution du curseur. Il y a un programme auquel la gauche a souscrit en 2012, que les militants ont défendu dans les rues et les quartiers, en réunion publique, au porte à porte, de sorte qu’il s’agit de s’adapter à la frange, et pas plus, sous peine de se renier.
Trahirai-je un secret susceptible de mettre en péril la Défense nationale et d’enfreindre l’état d’urgence en disant que, depuis 2012 (au moins), on sait que des élections présidentielles auront lieu en 2017 ?
A-t-on oublié que, dans les jours qui ont suivi son discours du Bourget sur son « véritable adversaire » (la finance), notre président normal a foncé à Londres dire aux banquiers « I am not dangerous » et que, au lendemain de son élection, il a limité l’augmentation du SMIC à l’équivalent d’un Carambar par jour, selon l’expression de Jean-Luc Mélenchon (pompier-solitaire-égocentrique) ?
N’avait-on pas remarqué que le mensonge électoral de François Hollande a été suivi du « J’aime l’entreprise de Manuel Valls » lors d’une Université d’été du MEDEF ( il ne fréquente pas celles des syndicats ouvriers) et par la cooptation à un poste clé du gouvernement d’un cadre de la banque Rothschild, jamais élu, non membre du PS, enrichi par spéculation en un temps record et bien décidé à aller aussi vite pour finir de ruiner les pauvres de ce pays ?
Ne voit-on pas que l’autodafé du Code du travail ferait comparaître les travailleurs, en chemise et la corde au cou, devant un patronat jamais rassasié ?
Ne remarque-t-on pas que personne n’a eu le culot de proposer des assemblées, colloques, séminaires pour arrêter les modalités de la lutte (assez) unitaire contre la loi El Khomri, qui est une loi du MEDEF ?
N’a-t-on pas lu Karl Marx : « Le Capital a horreur de l’absence de profit. Quand il flaire un bénéfice raisonnable, le Capital devient hardi. A 20%, il devient enthousiaste. A 50%, il est téméraire ; à 100%, il foule aux pieds toutes les lois humaines et à 300%, il ne recule devant aucun crime ».
N’a-t-on pas lu Jean Jaurès dénonçant en son temps (déjà !) les « faux socialistes », les socialistes « de château et de sacristie », « charlatans de la réaction et du boulangisme » et « singes malfaisants ».
N’a-t-on pas lu Elsa Triolet, écrivain (prix Goncourt), affirmant : « Une barricade n’a que deux côtés », ce qui est discutable, mais pas toujours.
Et que nous chante-t-on ? Il faut faire surgir des idées nouvelles, rédiger un programme novateur (en partant du néant ?), se réunir, se rencontrer, échanger, réfléchir (prendre le temps de), inventer, faire preuve d’imagination, étudier, regarder de près, travailler, se mettre au travail, au travail se mettre, au mettre travail se et définir enfin une offre et une stratégie.
Ceux qui nous tiennent ce langage sont, ou bien des incapables, ce que nul ne croit, ou bien des enfumeurs, ce qu’il faut craindre et croire (ce dont on peut être sûrs, allez). Car, ce que veut le peuple de France, ce que veulent ceux qui clament dans leur désespoir qu’il n’y a que le FN qu’on n’a pas essayé, on le sait. On peut le résumer en 5 lettres : U.N.I.O.N. Les Français veulent qu’on soit tous ensemble avant d’être d’accord sur tout.
Au référendum de 2005, une majorité de Français a voté contre le TCE sans l’avoir tout lu (263pages), mais en ayant compris l’essentiel, à commencer par l’entourloupe.
En 2017, un programme proposant une 6ème république qui sera le fruit d’une Constituante sortie du peuple avec des dispositions clés, comme la fin du régime présidentiel, des référendums révocatoires, l’abolition des lois antisociales, la chasse aux fuyards fiscaux, l’amnistie pour tous les syndicalistes, des sanctions contre les voyous, même s’ils sont patrons, la prise en compte de l’écologie (et non pas sa prise en otage ; Placé et Cosse me comprendront), le plafonnement des rémunérations, la sortie progressive du nucléaire et immédiate de l’OTAN, notre désengagement militaire au Moyen-Orient, un tel programme pourrait satisfaire assez pour que son porteur soit suivi, même si l’on nous assure qu’il fait des grimaces (voir photos de presse), tonne, gronde, menace, s’emporte, enrage, assène, aboie, vitupère, tempête, tonitrue, pète les plombs, éructe (le synonyme « rote » est gardé en réserve pour l’instant, la campagne électorale n’ayant pas commencé), surtout quand un journaliste (1), l’apercevant dans la rue (19 mars 2010) menant campagne avec des militants du Parti de Gauche pour des élections régionales, lui pose par trois fois LA question qui urge et qui est appropriée : « Etes-vous pour la réouverture des bordels ? » . Remarquez, on a entendu à la télé un autre journaliste (titulaire d’une carte de presse) lui demander « Vous l’avez vu ? » en espérant un « Vu quoi ? » qui aurait permis la réponse : « Mon cul ». Il paraît qu’il fait rire le studio quand il réussit son coup (émission d’Hanouna, ouverte aux téléspectateurs dans la limite de leur QI et des places disponibles). J’ai entendu un journaliste de télé demander à Jean-Luc Mélenchon : « La date de votre dernier calin ? ». Quels nullards !
Le seul vrai sujet qui n’a pas été discuté à gauche, par la gauche réunie à cette fin, depuis que les oligarques ont fait main basse sur les organes de presse, c’est le pouvoir des médias : exorbitant, malfaisant, abrutissant et mortifère pour le pays. Si quelqu’un crée une commission pour y réfléchir, s’asseoir autour d’une table, écouter toutes les suggestions, travailler, se mettre au travail, au travail se mettre, mettre au travail se, je suis volontaire.
Pour gagner du temps on pourrait s’inspirer de ceci : « Les représentants des mouvements, groupements, partis ou tendances politiques groupés au sein du C.N.R proclament qu’ils sont décidés à rester unis après la libération afin d’assurer […] la liberté de la presse, son honneur et son indépendance à l’égard de l’Etat, des puissances d’argent et des influences étrangères. » (Programme du Conseil National de la Résistance, 15 mars 1944 : « Mesures à appliquer dès la libération du territoire »).
Sur les affiches de 2017, il faudra un nom.
Vous dirai-je que je n’ai aucun mépris pour la classe politique patriote qui, tout entière marcha derrière le général De Gaulle dont le premier gouvernement donna à la France des ministres comme le communiste Ambroise Croizat dont le nom figure enfin dans le dictionnaire grâce à une intervention auprès d’Alain Rey de François Ruffin (vous avez vu son film : « Merci patron ») ?
Héros de la Résistance arrêté, déchu de son mandat de député, condamné, Ambroise Croizat connaîtra 14 prisons, avant d’être transféré dans un bagne algérien. A la Libération, il fut ministre du travail, comme Myriam El Khomry. Comme ? Que nenni : on lui doit la création de la sécurité sociale.
Je n’insiste pas.
On a eu aussi le communiste Marcel Paul, autre héros de la Résistance, dénoncé, torturé, déporté, puis ministre de l’énergie et créateur d’EDF-GDF. C’est Ségolène Royal qui s’occupe de ça à présent.
Je n’insiste pas.
Et le communiste Charles Tillon, Résistant, emprisonné, fondateur et commandant en chef des FTPF (Francs tireurs et partisans français), puis ministre de l’air à la Libération ! On rêve de le revoir à ce poste, au-dessus des cyniques qui dirigent Air-France, qui licencient, qui applaudissent les lois d’un Qatar où l’on emprisonne les grévistes. Sous le ministère de Charles Tillon, l’Aviation civile française a été nationalisée et Air France est devenue propriété de l’État.
C’est Alain Vidalie, secrétaire d’Etat aux Transports, qui s’occupe de ça, à présent. Il a réclamé des sanctions contre ceux qui ont déchiré la chemise du DRH d’Air France.
Je n’insiste pas.
Les ministres-militants nommés plus haut, qui affrontèrent les pires tortionnaires, qui subirent les coups, la prison, les interrogatoires, voire la torture, la déportation, cracheraient leur mépris devant tout patron qui escalade une grille pour fuir ses employés et devant un ministre qui veut voir ces derniers au tribunal.
Je n’insiste pas.
Ces ministres communistes, et des centaines d’autres militants, admirables face à l’occupant nazi, surent où était leur devoir à la Libération. Et leur devoir était de se mettre en position pour faire avancer leurs idées, celles pour lesquelles ils avaient tout risqué.
Leur devoir, quand la maison France était en ruine, n’était pas de réfléchir, de s’asseoir autour d’une table, d’écouter toutes les suggestions, de travailler, etc. en dehors du gouvernement en attendant que le rapport de forces, dans 5 ans, dans 10 ans ou à la Saint-Glinglin les mette en position de tenir les manettes et d’appliquer tout leur programme (2).
Remarquez, je dis ça, on lira que je compare Jean-Luc Mélenchon à De Gaulle, Sarkozy et Hollande à Pétain, le MEDEF aux Maîtres des Forges (« Plutôt Hitler que le Front populaire »).
En fait, je regarde les champs de bataille et les salons où l’on construit un puzzle avant de le balayer sans cesse pour recommencer en se disputant tandis que l’huissier emporte les meubles. Je compare les intérêts des partis aux intérêts de la Nation. Je compare les hommes d’action aux hommes d’appareils.
Et à ces derniers je dis, de là où je suis, avec l’arrogance du chien regardant un évêque : le peuple de gauche attend de vous, messieurs, que vous viriez les solfériniens, que vous empêchiez les valets LR du MEDEF de revenir aux commandes, que vous confiniez la bête dans son manoir de Montretout et que vous donniez un souffle nouveau, un espoir à la France, un avenir aux jeunes à qui nous devons des comptes.
Qu’ils s’en aillent tous ! Ce n’est pas compliqué de les accompagner dehors.
Il suffit d’arrêter de tirer sur le premier qui sort de la tranchée et que nous avons exposé à la mitraille en 2012, en souhaitant alors ardemment sa victoire avec des idées qui étaient aussi les nôtres, à gauche, et qui le sont toujours. Pour vérifier cette assertion en détail (mais sans moi), le mieux est d’asseoir autour d’une table quelques politologues (sic), d’écouter chacun, de discuter, de réfléchir, de travailler, de se mettre au travail, d’au travail se mettre, d’au mettre travail se.
Pour moi, c’est tout réfléchi.
Vladimir MARCIAC
(1) En fait, il était étudiant en journalisme à Sciences Po. Depuis, il a pu s’améliorer et cesser d’être un jeune loup cherchant le buzz à tout prix.
(2) Rien à voir, avec les participations des communistes dans des gouvernements précédents. Il s’agit au contraire d’écarter le PS, fausse gauche, et de s’appuyer sur les forces vives qui veulent renverser la table.