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Nouvelle pitrerie de Robert Ménard : la liberté de la presse selon le jury masqué.


15 novembre 2005


« Le classement mondial 2005 de la liberté de la presse » établi par Reporters Sans Frontières vient d’être publié.


Le titre ronflant annonce en vérité une exécrable pitrerie. Des philologues en feront un jour l’analyse qui discréditera RSF. Bornons-nous ici à relever quelques aberrations qui questionnent :

Le plus grand prédateur mondial de journalistes sur la planète (les USA) figure en flatteuse position par un artifice éhonté inventé par RSF après l’invasion de l’Afghanistan : il s’agit de noter les USA selon les endroits. Sur leur territoire, ça ne va pas mal (rang 44 sur 167) ; dehors (Irak) ils écopent du n°137.

Le procédé de la double notation est une sinistre farce. Imaginons-le, étendu à d’autres domaines :

- Classement mondial de la liberté des femmes. Un proxénète prostitue des mineures sur les grands boulevards (rang 137) mais il est assez bon époux dans l’intimité (rang 44).

- Classement mondial de l’honnêteté. Dans la rue, Al Capone tire sur les transporteurs de fonds (rang 137) mais il paie ses dettes de poker avant de quitter la table (rang 44).

- Classement mondial des Droits de l’Homme. Les USA font torturer à Abou Ghraib, à Guantanamo et dans des prisons secrètes externalisées (rang 137) mais ils ne touchent pas (trop) aux détenus dans leurs prisons (rang 44).

- Classement mondial des Droits de l’Enfant. M. Chaussures-de-Sport fait travailler douze heures par jour des enfants du tiers-monde (rang 137) mais il contrôle tendrement la scolarité de sa progéniture (rang 44).

- Classement mondial du respect de la Vérité. Lors d’une conférence de presse planétaire Colin Powell brandit des faux échantillons d’armes (chimiques) de destruction massive (rang 137) mais, dans le secret du bureau ovale à la Maison blanche, il avait prévenu Bush de la supercherie (rang 44).

- Classement mondial du raffinement. Condoleeza Rice est chargée de « vendre » à l’étranger la sanglante politique extérieure de son pays (rang 137) mais, chez elle, elle joue du piano (rang 44).

- Classement mondial du respect de la propriété. Les Etats-Unis ponctionnent le pétrole du pays vaincu (rang 137) mais, chez eux, la propriété privée est bien protégée par la loi (rang 44).

Par ce procédé pervers, un individu qui serait à la fois belliciste, misogyne, proxénète, tortionnaire, esclavagiste, menteur, voleur (rang 137) pourrait vaquer avec une auréole d’honnête homme, pacifiste-mélomane, bon père et tendre compagnon (rang 44).

Pour établir ce classement schizophrénique qui insulte la logique, la raison et le lecteur « Reporters sans frontières a demandé à ses organisations partenaires (14 associations de défense de la liberté d’expression dispersées sur les cinq continents), à son réseau de 130 correspondants, à des journalistes, des chercheurs, des juristes ou des militants des droits de l’homme de répondre à 50 questions permettant d’évaluer la situation de la liberté de la presse dans un pays. »

Des noms ! Des noms !

Si les personnes et les organisations qui ont participé à cette pantalonnade en sont fières, on attend qu’elles le disent, qu’elles sortent de l’ombre où RSF les confine. Qui es-tu, Jury Mondial de la liberté de la presse, donc de la liberté de dire, de savoir ? Informe-nous de ton identité. Les 14 associations « de défense de la liberté d’expression » vont-elles toutes cadenasser la vérité, se plier à l’omerta ? Qui êtes-vous et avec qui d’autres avez-vous travaillé ? Se taire serait mettre en pratique la censure (et l’autocensure) en vous livrant ici à ce que vous dénoncez ailleurs.

Quelques-uns des « journalistes, chercheurs, militants des droits de l’homme » impliqués se dresseront-ils dignement, arrachant le bâillon pour dire : « J’en suis et voici dans quel journal j’écris, sur quel domaine je cherche, quelle organisation des droits de l’homme m’accueille » ?

Les questions, Les questions ?

Honorables jurés (provisoirement ?) anonymes, vous vous êtes prononcés sur 50 questions. Sont-elle classées « secret défense » (de la liberté de la presse) ou banalement conformes aux critères habituels des questionnaires non dissimulés des instituts de sondage ? Dans le second cas, les rendrez-vous publiques comme la loi (à défaut de RSF) vous y autorise (et vous y encourage pour les besoins de la transparence) ?

Le dépouillement ! Le dépouillement.

Si, organisations ou simples citoyens, vous acceptez de jeter le masque (que vous portez à votre corps défendant pour la plupart d’entre vous, n’en doutons pas), nous direz-vous aussi si vous avez assisté au dépouillement ou si, tout au moins, celui-ci vous a été communiqué dans le détail ? Si la réponse est oui, la preuve sera faite qu’aucun des chercheurs n’était mathématicien. En effet, une petite île des Caraïbes détestée par Bush et Ménard vient de gagner cinq places au classement alors que, d’après les commentaires accompagnant le verdict, elle a emprisonné deux journalistes de plus depuis l’an dernier. Quant aux journalistes-jurés, ils devraient veiller à la cohérence des titres d’une année sur l’autre. En effet, en 2003, vous aviez (curieusement) titré : « Cuba : avant-dernier devant la Corée du Nord ». Cette année, l’île castriste n’est pas évoquée dans le titre alors qu’il eut fallu titrer : « CUBA : toujours dans le peloton de queue devant la Libye, la Birmanie, l’Iran, le Turkménistan, l’Erythrée, la Corée du Nord ».

Les mauvaises langues observeront que nombre de pays auxquels Bush a promis une raclée sont cités là et que, si la Chine n’y figure pas malgré quelques petits problèmes pour les journalistes, c’est que les USA ne se sentent pas d’en faire une cible militaire. Par suite, RSF ne voit pas l’urgence d’un travail médiatique préparatoire.

Maxime Vivas

PS. Dans cette recherche des membres du jury, merci à mes lecteurs de bien vouloir interroger les organes de presse que vous lisez et les organisations des droits de l’homme que vous fréquentez. C’est un service à rendre à ceux qui, de bonne foi, se sont fourvoyés dans cette bouffonnerie ménardienne 2005 et qui, par éthique, voudront dire : « Voici la liste du jury. J’en fais partie. »


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