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Kenya, ou quand un sous-lieutenant reçoit des coups de poing en retour de son zèle de serveur de bar

Après les larmes et l’émotion, tentons de comprendre la prise d’otages sanglante à Nairobi et ses implications.

Une pratique vieille comme le monde : utiliser la religion pour cacher les vraies raisons d’une stratégie politico-économique ou la perversité d’un système. Ces 40 dernières années, impitoyablement, le Moyen Orient a été l’objet de la part des Occidentaux, à leur tête les États-Unis, de manipulations religieuses afin de faire main basse sur son pétrole. Lorsqu’en 1979, les Soviétiques envahirent l’Afghanistan pour y soutenir les communistes locaux, la résistance afghane ne s’est pas faite attendre. Elle va fermement s’opposer à l’invasion. L’Occident va alors soutenir les islamistes : Massoud, l’islamiste « modéré » et le radical Ben Laden, futur fondateur d’Al Qaida. Aux États-Unis d’Amérique, les stratèges, à commencer par Zbigniew Brzezinski, étaient aux anges, ravis de pouvoir enfin « donner aux Soviétiques leur Vietnam ». C’est pourquoi ils vont soutenir massivement les Islamistes qu’ils appelaient à l’époque des "Freedom Fighters" (Combattants de la Liberté). Leur combat est un Djihad, une guerre sainte menée contre l’envahisseur athée (soviétique). C’est le début de la généralisation du soutien occidental aux mouvements islamistes qui vont monter progressivement en radicalisme jusqu’à commencer par mordre leurs propres créateurs. La prise d’otages à Nairobi, au Kenya n’échappe pas à la règle. Après avoir complètement détruit la Somalie pour y instaurer un chaos indescriptible, les États-Unis refilent la patate chaude à des sous-fifres régionaux : Ethiopie, Ouganda et Kenya. Ces 3 territoires qui se la jouent "puissances régionales" alors même qu’il n’en est rien, vont régulièrement, et surtout sur commande de leurs "amis" américains, envoyer des troupes militaires en Somalie pour soi-disant y "rétablir l’ordre". La dernière expédition a eu lieu en 2011 où les trois sous-lieutenants africains (Ethiopie, Ouganda, Kenya) appuyés par le Lieutenant Israël et les commandants en chef (l’Angleterre, les États-Unis et la France) étaient partis en guerre contre les fameux Shebabs. Ne voulant plus perdre des hommes en Somalie comme ce fut le cas dans les années 90 dans l’expédition dénommée "Restore Hope" qui leur a coûté 30 hommes, les États-Unis sous-traitent aux trois sous-fifres précités la guerre et le maintien d’un certain ordre en Somalie. Cette région, ouverte sur la mer est un enjeu géopolitique majeur pour les Occidentaux, car non seulement elle regorge d’importants gisements de matières premières indispensables pour les maîtres du monde, mais surtout elle est le point de passage pour les navires marchands et pétroliers. La sécurisation de cette route maritime est donc une priorité face à une partie des Somaliens qui s’est radicalisée et a pris des armes tellement leur territoire se retrouve privé de tout : pays, sécurité, Etat, perspectives d’avenir, ressources halieutiques...et avec un héritage insupportable de déchets de toute sorte.

Aujourd’hui le rôle d’agent vecteur de puissances étrangères que joue le Kenya en Afrique (le pays abrite le siège de plusieurs organisations dites internationales, de plusieurs multinationales...), et particulièrement dans la région est-africaine, s’est aggravé avec la Chine. Le Kenya est considéré comme une véritable porte d’entrée en Afrique par la Chine qui a lancé depuis le 11 janvier 2012 la section Afrique de la CCTV émettant depuis Nairobi. A partir donc du Kenya, CCTV Africa projette ouvrir 14 bureaux locaux dans différents territoires africains. Réduite pour le moment à 02 heures d’émission par jour, la CCTV Africa compte d’ici 2015 émettre 24 heures 24. La concurrence est rude notamment entre la Chine et les USA (ces derniers, quand il le faut, font alliance avec les Européens et Israël). Ces dernières années, à chaque tournée africaine des dirigeants chinois ou états-uniens, le Kenya est sur la liste des territoires visités. Il se fait que les dirigeants actuels du Kenya se retrouvent poursuivis par la branche judiciaire de l’impérialisme occidental, la CPI. Ceux-ci, sérieusement embêtés, se tournent davantage encore vers la Chine qui a compris que pour bien vivre en Afrique, il vaut mieux ne pas se mêler des turpitudes de politique intérieure de ses « partenaires ». Ainsi, le 19 août 2013, le président du territoire du Kenya s’est rendu à Pékin pour une visite d’une semaine. Sur les lieux, Kenyatta fut royalement reçu avec 21 coups de canon tirés en son honneur. Avant l’élection présidentielle, les États-Unis par la voix de Johnnie Carson, le responsable Afrique du département d’Etat étasunien, a averti les Kényans que " les choix ont des conséquences", un avertissement en direction des électeurs qui désiraient porter Uhuru Kenyatta au pouvoir. Ce dernier, avec un parlement acquis, veut faire sortir le Kenya du traité créant la CPI. Le vote du parlement kenyan est manifestement interprété par l’Occident prescripteur comme un "mauvais exemple". Cela pourrait donner des idées à des tyrans africains pouvant tomber facilement en disgrâce avec leurs vieux mentors. Alors, comment arrêter le Kenya ou comment le punir ?

La politique internationale telle que l’ont construite l’Europe, et depuis la fin de la guerre de 39-45, les États-Unis d’Amérique est un jeu où la ruse et la violence sont interchangeables. Lorsqu’un pays "ami" devient trop turbulent ou s’il prend trop de liberté, il faut lui montrer un peu de muscles pour le calmer et le ramener dans les rangs. Dans cette logique, et l’histoire le prouve, les Occidentaux sont capables de pactiser avec leurs ennemis officiellement déclarés pour toucher un nerf sensible au petit turbulent. A regarder les faits, on a laissé, à tout le moins, les Shebabs frapper le Kenya. Histoire de montrer que les États-Unis, leur lieutenant Israël et leurs familles parentes et alliées sont incontournables et que la sinophilie (amour de la Chine) dont souffre Kenyatta peut être soignée. La preuve : dès que les Shebabs ont déclenché leur attaque contre le supermarché à Nairobi, Israéliens et Etats-uniens ont tout de suite investi la place pour officiellement "apporter leurs conseils".

Ce qui arrive au Kenya est la démonstration qu’à force de vouloir "baiser" avec tous "ses partenaires", on finit écartelé. Pour mémoire, le Kenya est un bon ami d’Israël qu’il a aidé à mettre fin à la prise d’otages par des militants palestiniens et leurs supporters allemands à Entebbé (Ouganda) en 1976. A l’époque, tous les territoires africains par l’intermédiaire de la fameuse OUA (Organisation de l’Unité Africaine) avaient adopté une position commune à l’égard d’Israël : rupture de leurs relations avec Israël pour violences et injustices graves envers les Palestiniens. Conformément aux résolutions de l’OUA, le Kenya rompt ses relations avec Israël, mais discrètement, il resta un de ses meilleurs amis, si bien même que la compagnie israélienne El Al reliant Tel-Aviv à Johannesbourg, capitale de l’État raciste et d’Apartheid d’Afrique du Sud, faisait toujours escale à Nairobi. Lors des évènements d’Entebbé, le Kenya a laissé Israël utilisé son territoire comme base arrière aux troupes israéliennes. Cette ambiance bon enfant se traduira par une véritable alliance militaire et de renseignements depuis les années 1980. Fidèle à son jeu favori consistant à manger à tous les râteliers, le Kenya caressait les "pays arabes", les Palestiniens et l’OPEP. En 1974, le Kenya avait reçu des pays de l’OPEP et des institutions financées par eux des millions de dollars et des facilités pour ses exportations sur les marchés proche-orientaux, notamment sur le marché saoudien. Le Qatar et l’Arabie Saoudite, deux nains du désert promus, grâce aux pétrodollars, sur l’échiquier international par leurs alliés occidentaux qu’ils aident en finançant les mouvements islamistes ont-ils pardonnés au Kenya son double jeu ? Le doute est permis. Plus récemment encore, le même Kenya (l’Ouganda aussi) a fourni des mercenaires aux USA alors en difficulté en Irak qu’ils ont envahi en 2003. Des milliers de Kenyans et d’Ougandais ont été recrutés pour venir y suppléer l’armée américaine. Des patriotes irakiens et leurs soutiens ici ou ailleurs ont-ils oublié cela ? Rien n’est moins sûr.

Hier, lorsque les États-Unis étaient confrontés à l’URSS dans la conquête du monde, ils n’avaient pas, une seule seconde, hésité à utiliser les religieux, notamment les islamistes contre elle. Cette stratégie fut payante, car elle a contribué à dissoudre l’URSS. Aujourd’hui, le même islamisme va être utilisé, sinon est déjà utilisé, pour contrer autant que possible le déploiement chinois. Le terrain africain est propice à ce jeu car les Etats africains ne sont que des fantômes, des cadavres solidement plantés depuis la Conférence de partage de Berlin en 1884-1885.

A supposer que les Occidentaux (États-Unis et ISRAEL en tête) n’aient pas laissé agir les Shebabs, on peut néanmoins conclure qu’à force de jouer le rôle de serviteur zélé des intérêts étrangers dans la région, notamment en Somalie, détruite par les États-Unis et leurs alliés qui l’ont réduite en dépotoir de déchets toxiques de tout genre, et où des populations sont sans perspectives car vidées de toutes les richesses de leur terre, un point névralgique pour le commerce mondial dominé par ces derniers, le Kenya a donné sa tête à cogner. Ceci n’est que logique. Car, la doctrine Obama veut que les États-Unis dirigent par derrière (Leading from behind), c’est-à-dire que les États-Unis, autant que possible, restent derrière les rideaux et envoient au front leurs lieutenants et autres sous-fifres qui perdent en ressources humaines contre du soutien matériel et logistique. S’il le faut les drones étasuniens complèteront le dispositif. A ce coup là, les lieutenants qui acceptent le deal doivent être prêts à encaisser les coups. C’est ce qui arrive au Kenya. Quand on mène le combat d’autrui, on subit les dommages que celui-ci devrait en temps normal subir. Dommage que les victimes au Kenya ne soient pas ces fameux gouvernants qui ont accepté jouer ce petit jeu avec le diable.

La France a déjà joué sur la menace islamiste pour refaire son ordre au Mali et essayer de démontrer aux nouveaux venus qu’elle reste malgré ses faiblesses, le seul maître à bord de ses territoires et de leurs mines. Plus, le temps va passer, plus la question religieuse en Afrique sera utilisée comme au Moyen-Orient pour couvrir les vrais enjeux de son remodelage.

24 septembre 2013

KPOGLI Komla
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Donde Estan ? ; Terreurs et disparitions au Pérou (1980-2000)
Daniel Dupuis
La pratique des arrestations illégales, des tortures et des exécutions en dehors de tout procès régulier puis de la dissimulation des dépouilles (d’où le terme de « disparus ») est tristement célèbre en Amérique latine où les dictatures ( l’Argentine de la junte militaire, le Paraguay dirigé par le général Alfredo Stroessner, le Chili tenu par Augusto Pinochet...) y ont eu recours. De 1980 à 2000, sous un régime pourtant démocratique, l’armée du Pérou n’a pas hésité à recourir à la terreur (…)
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« Le combattant qui l’emporte est celui qui gagne la campagne de l’information. Nous en avons fait la démonstration au monde : l’information est la clef de la guerre moderne - stratégiquement, opérationnellement, tactiquement et techniquement. »

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