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H.Kempf, Eva Joly, la bourgeoisie, l’oligarchie et les perspectives.

Avec Hervé Kempf nous allons aborder une série de notions politiques utiles à la caractérisation du régime politico-économique dans lequel nous vivons. Caractérisation utile aussi à l’élaboration de meilleures perspectives d’émancipation. Pas de "science politique" positiviste et conservatrice ici !

I - Du césarisme à l’oligarchie.

Le type de gouvernement de la France de N Sarkozy a pu être qualifié de "césarisme démocratique" (1), une sorte de bonapartisme politique moderne fondé sur le rituel de l’élection. D’une part, les élections démocratiques de type délégataire se transforment en outil de dépossession des citoyens au profit d’une "caste politique" coupée des citoyens mais liée aux puissants et d’autre part le type de l’élection - la présidentielle - favorise une dérive autoritaire des institutions. Il faudrait ici évoquer le rôle des médias, de la publicité, etc. Sur un autre aspect, Nicolas Sarkozy a pu être qualifié aussi de "Président des riches" (titre d’un ouvrage bien connu) pour ses liens étroits avec la bourgeoisie. Cet ensemble caractérisé par le terme de "démocratie libérale" (versus démocratie restreinte et fort poids du marché et des firmes) (2) ou de démocratie délégataire (versus critique de la démocratie représentative) tend à être caractérisé aujourd’hui par le terme d’oligarchie pour marquer une évolution.

En effet, Hervé Kempf (3) renouvelle l’analyse et met en avant la notion d’oligarchie. La référence à la démocratie s’estompe encore plus pour souligner le gouvernement d’une minorité, une minorité riche. La caste politique est en lien étroit avec le petit monde des banques et de la finance.

II - Bourgeoisie + caste politique = oligarchie ?

Hervé Kempf ne définit pas la bourgeoisie à l’instar des Pinçon-Charlot (4) ou des auteurs de "Bourgeoisie : Etat d’une classe dominante" (5). Penser la classe dominante incite à rechercher aussi les couches sociales d’appui qui conforte la domination de la classe dominante. Le capitalisme ayant évolué, a bourgeoisie contemporaine n’est plus seulement la bourgeoisie industrielle de la fin du XIX ème siècle telle que décrite par de nombreux auteurs et reprise par Marx. Il y a une bourgeoisie commerciale qui accumule le profit dans la grande distribution. Il y a la bourgeoisie d’affaire proche de la bourgeoisie financière et rentière elle-même très liée à la classe capitaliste de la production. Et la bourgeoisie nationale côtoie la haute bourgeoisie mondialisée. Surtout, tout ce monde-là est très soucieux de maintenir leur domination sur le peuple-classe et il forme à ce titre la seule vraie classe dise les Pinçon-Charlot car ils sont tout à la fois une classe objective et une classe subjective, très consciente de ses intérêts et privilèges.

Hervé Kempf, ne parle d’ailleurs pas de classe dominante mais ce qu’il dit de l’oligarchie (dans un entretien avec Eva Jolly) montre qu’il s’en approche fortement. Pour lui, reprenant un point de vue sociologique, l’oligarchie c’est l’actuelle" classe dirigeante, qui mêle pouvoir économique, pouvoir politique, hauts fonctionnaires, dirigeants de grands médias". La "classe dirigeante" n’est pas la classe dominante mais l’oligarchie fusionne la classe dominante à la caste politique. L’oligarchie est globale est domine le peuple-classe. La mal nommée "classe politique" est en fait une caste coupée vers le bas du peuple-classe par les mécanismes de la délégation "démocratique" mais ouverte sur le côté et vers le haut vers les dirigeants administratifs et économiques, vers les grands possédants.

III - Quel type d’oligarchie ? Une ploutocratie.

H.Kempf rappelle dans une émission (cf vidéo) les trois types connus d’oligarchie. Ce qui lui permet de souligner que nous sommes en ploutocratie. C’est à dire gouverné par une minorité de riches.

Face à Eva Jolly, Hervé Kempf poursuit son propos en précisant que "l’oligarchie est un système dans lequel le politique n’est pas le pouvoir essentiel. Il faut mettre l’accent sur le pouvoir économique, par exemple avec la nationalisation des banques". Effectivement, ni les écologistes ni le PS n’ont cette lucidité. Il faut aller plus à gauche pour trouver cette perspective. Pour Hervé Kempf, les "pontes" du PS font aussi partie de l’oligarchie. Qu’est-ce qui distinguait un DSK d’un Sarkozy ? DSK est un économiste très libéral (ainsi que le souligne Gadrey) doublé d’un bourgeois et Sarkozy est un avocat d’affaire "bling bling" et Fouquet’s. Ce n’est pas la Porsche qui fait le bourgeois mais l’ensemble du patrimoine mobilier et immobilier. Cela ramène au projet politique.

IV - Eva Joly, un néo-capitalisme vert offensif contre le capitalisme morbide ?

Il est certain qu’Eva Joly et ses amis écologistes entendent faire reculer l’oligarchie "nucléaire", une fraction de l’oligarchie globale. Mais s’ils sont déterminés sur ce plan c’est que l’alternative réside pour eux sur le développement d’un capitalisme vert et propre. Ils entendent s’appuyer sur un patronat national venu du monde rural moindrement impliqué dans la finance et l’appareil d’ Etat. C’est pourquoi on peine à lire chez Eva Joly un programme écologiste qui s’attaque fermement à la classe dominante en se montrant solidaire du peuple-classe. Cette solidarité suppose en effet de défendre les différentes couches sociales en tenant compte de leur position dans la hiérarchie sociale. Cela suppose de défendre et étendre les services publics en passant par des nationalisations. Cela suppose de défendre l’échelle mobile des salaires en pensant que les prolétaires sont nombreux en France. Est-ce possible sans passer par la relance de la production ? Il faudrait ici promouvoir certaines productions contre d’autres en rompant avec les consignes de l’Union européenne et en s’affrontant à une plus large fraction du capital.

Le volet fiscal suit le volet social : Est-elle d’accord pour voir, comme François Hollande en 2007, les premiers riches (les "petits riches") à 5000 euros brut par mois (soit 4000 euros net) par individu ? Ce qui signifie que ces riches-là doivent réellement participer à la justice fiscale mais aussi et surtout les gros riches au-dessus. Le revenu mensuel élevé est aussi un indice de patrimoine conséquent. Plus au-dessus encore, l’hyper-classe internationale (le 1% tout en haut) doit être amputée de ses revenus par l’instauration d’un revenu maximum. Il parait très élevé chez les écologistes. Mais son existence est un bon signe. Les autres partis de gauche (sauf le PS semble-t-il) l’ont aussi dans leur programme. Reste à avoir la volonté de l’appliquer une fois au commande du pays.

Christian Delarue

http://amitie-entre-les-peuples.org/spip.php?article1716

1) Déconstruire le césarisme démocratique du sarkozysme Christian DELARUE sur contre-feux.com et Marianne.

http://www.contre-feux.com/politique/sarkozysme-deconstruire-le-cesarisme-democratique.php

2) Les cercles de l’émancipation par la démocratisation

http://amitie-entre-les-peuples.org/spip.php?article690

3) Comment en finir avec l’oligarchie, dialogue entre Eva Joly et Hervé Kempf - Présidentielle - Basta !

http://www.bastamag.net/article1551.html

mais aussi la vidéo : "La France devient-elle une oligarchie ?" (Hervé Kempf)

http://www.youtube.com/watch?v=Q3ZLZMdKGKc

4) Michel Pinçon et Monique Pinçon-Charlot. Le président des riches.

http://www.legrandsoir.info/Michel-Pincon-et-Monique-Pincon-Charlot-Le-president-des-riches.html

5) "Bourgeoisie : Etat d’une classe dominante" ouvrage collectif chez Syllepse.

http://www.myboox.fr/livre/bourgeoisie-etat-d-une-classe-dominante-263743.html


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