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Ils vont encore attiser le feu

Il leur reste douze mois. Douze mois pour sauver leurs meubles vermoulus, ceux d’une République redéfinie à l’aune d’un passé mythifié et forcément révolu, d’une République qu’ils refusent de faire vivre par tous et pour tous . Douze mois à durcir le ton, la loi, le mépris à l’égard des humbles, la férule des patrons. Et tout cela dans l’espoir de reconquérir leur électorat privilégié qui s’en va vers l’extrême droite ou prendre à l’extrême droite tout ou partie de son électorat de prédilection. Les naïfs de mai 2007 depuis longtemps cocufiés sont perdus d’avance pour cette droite extrême. On tentera bien d’empoigner quelques bonnes grosses ficelles pour les rattraper mais sans y croire vraiment. Oui, leur seule chance, croient-ils, c’est le pied de fer dans la botte de velours.

Nous parlons de la France. Comment pourrait-on ne pas la reconnaître, même en usant de mots couverts comme pour conjurer l’effroi qui nous gagne. Nous parlons de la clique sarkozienne à la morgue teintée de racisme ordinaire. Comment pourrait-on ne pas les reconnaître puisqu’ils ne s’embarrassent même plus des masques de la prudence. La stratégie gagnante est dirigée par le quatuor de choc Besson-Guéant-Hortefeux-Guaino. Bien sûr, rien ne sera possible sans la fidélité du vaste deuxième cercle, celui des séides qui doivent tant au Prince et que l’on trouve tantôt au gouvernement tantôt au parlement. Rien ne sera possible encore sans la servilité de médias depuis longtemps complaisants avec des moeurs politiques devenues clairement antidémocratiques. Soyons-en persuadés, l’enjeu de la victoire espérée lors de la Présidentielle de 2012 en notre beau pays, vous savez, celui des droits de l’Homme, tient en ceci : la frontière est si ténue désormais entre la droite extrême au pouvoir et l’extrême droite montante que seule l’enflure sécuritaire outrancièrement médiatisée permettra de départager les candidats de la « France perdue ».

Ici, comme un peu partout en Europe, l’étranger est sur la sellette. Existe-t-il beaucoup de nations sur le point de voter une cinquième loi relative à l’immigration en sept ans ? Par bonheur la France a la chance de compter Éric Besson parmi ses citoyens inventifs quant aux moyens à mettre en oeuvre afin de contenir les hordes de nouveaux barbares fabriqués pour les besoins de la cause populiste. Dans sa rhétorique dénuée de toute espèce de générosité, la sécurité de la France et la restauration de sa dignité perdue ont un prix. La « loi Bessin sur l’immigration » arrive donc au Parlement. Son adoption sera sans surprises sauf par quelques détails émergeant de l’écume de ses articles les plus nauséabonds. Dresser le florilège des « apports » de cette prochaine loi serait hélas trop long. Trois éléments suffiront à en dépeindre la sale ambiance. Le projet de loi prévoit qu’avant même d’être présentés à un juge, les sans-papiers pourront être enfermés cinq jours, c’est-à -dire plus longtemps que les assassins ou les terroristes. Les enfants d’immigrés en situation irrégulière pourront être enfermés en centres de rétention avec leurs parents jusqu’à quarante-cinq jours avant que l’un de ces derniers ne soit expulsé. Un bannissement de deux à cinq ans sera prononcé pour les étrangers à qui un titre de séjour aura été refusé. Oui, nous sommes toujours en France.

Pour justifier l’injustifiable de tous ces reculs vis-à -vis de la loi commune la seule présence physique d’étrangers épars sur notre territoire ne suffisait pas. Si l’on pouvait convaincre « la communauté nationale » qu’elle est moralement menacée dans ses fondements culturels et historiques les plus intimes les choses seraient plus faciles. A situation exceptionnelle, lois et procédures d’exception ! Et quand l’exceptionnel n’existe pas de fait, on l’invente. C’est ainsi que l’on gonfle démesurément la baudruche islamiste. Certes, il existe un mouvement islamiste - du reste multiforme et à audience maigrichonne - rejetant les principes fondamentaux de la République, en particulier la laïcité. Mais de là à faire de ce phénomène contrôlable une menace réelle pour la France et son identité nécessairement enrichie d’apports réguliers, il y a un fossé que les droites prêtes à en découdre n’hésitent pas à franchir d’un bond unanime. Les révoltes populaires en cours dans le monde arabe apportent opportunément de l’eau à ce délirant moulin à paroles vénéneuses. Ces révoltes vont inéluctablement provoquer des déferlantes d’immigration vers l’Europe nous dit la prédiction concurrentielle. Les meilleurs spécialistes du monde arabe peuvent bien démentir cette baliverne, rien ne semble en mesure d’en interrompre l’amplification. La peur est devenue l’arme favorite des pouvoirs politiques sans imagination.

La parole circule et c’est là l’un de ses plus beaux avantages. Le revers de sa médaille est que son maniement par des individus malveillants autorise des dérapages indignes. Ainsi, M. François Fillon, juché sur la tribune de l’Assemblée nationale, s’est autorisé à parler le 1er mars dernier de "citoyens français d’origine musulmane" . Quand le Premier ministre de la France lui-même oublie que selon le premier article de notre Constitution tous les Français sont égaux devant la loi sans distinction d’origine, ne doit-on pas considérer que l’on s’apprête à commettre des actes irréparables ? L’intelligence et la générosité, deux qualités rares ces temps-ci, commandent d’arrêter au plus vite la spirale débridée que des ténors politiques décidément bien peu catholiques nourrissent de leur verve inepte. Notre conscience est ici sollicitée. Va-t-on faillir comme d’autres l’ont fait hier en de sombres heures de notre Histoire ?

Yann Fiévet

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