« Les Juifs de France n’ont d’avenir que si la France reste une nation ; il n’y a pas d’avenir possible pour les juifs dans une société multiculturelle, parce que le pouvoir des groupes antijuifs risque d’être plus important. »
Alain Finkielkraut
C’est par ces phrases que depuis plus d’une quinzaine d’années le philosophe Alain Finkielkraut combat la communauté musulmane déniant de ce fait à la République d’être une société multiculturelle exception faite, on l’aura compris, de la culture Yddish fondement de son identité originelle. Ce faisant, il ne perd pas une occasion de mettre de l’huile sur le feu en attisant les haines et en désignant du doigt les Arabes, les Noirs, et les Antillais. Il explique le mal-être français par le brunissement des Français.
D’où est issu Finkielkraut ? C’est un émigré polonais de la deuxième génération qui n’est pas marqué au fer rouge quant au numéro de son ascendance. Né en 1949, il se veut plus français que les Français de souche et à ce titre, se découvrant aussi un zèle de bénédictin pour la cause sioniste. Il « dérive » sans arrêt, dans l’impunité la plus totale, profitant de l’indulgence du pouvoir et de l’inexistence d’un contre-pouvoir d’intellectuels d’origine maghrébine ou plus généralement arabe capable de lui donner la réplique. Ce n’est pas demain que Malek Chebel, Tahar Ben Djelloun ou Abdelwahab Meddeb répliqueront à Alain Finkielkraut ! Au contraire, ces intellectuels sont sans aspérités, au besoin, ils piétinent leur identité originelle.
Pour rappel, les Juifs polonais n’étaient pas en odeur de sainteté en Pologne. Dès les années trente et pendant la Seconde Guerre mondiale, certains des massacres perpétrés par les nazis furent menés avec l’appui, voire la participation active, des habitants comme lors du massacre de Jedwabne au cours duquel entre 300 à 1600 Juifs furent torturés et mis à mort par une partie des habitants de Jedwabne. On recense 32 autres villes où des pogroms se déroulèrent. On comprend dans ces conditions que Finkielkraut père ait fui la Pologne.
Alain Finkielkraut est un philosophe éclectique, certes, brillant, mais faisant de la défense d’Israël un sacerdoce. Il diabolise tout ce qui pourrait entacher une République française qu’il veut blanche aseptisée, libre de tout arabe et mélanoderme, pour lui responsables du mal-être français.
Tentons de rapporter en honnête courtier quelques-unes de ses prouesses.
Fustigeant Mai 68, il y ajoute l’anti-sémitisme qui d’après lui, libère la parole. « Au nom de la lutte contre une pensée unique, qui serait composée d’un soixant’huitardisme d’arrière-garde, d’un antiracisme dogmatique et d’un antisémitisme larvé, il est aujourd’hui possible de dire à peu près tout et n’importe quoi. » Ces propos d’Alain Finkielkraut, rapportés par le quotidien israëlien Haaretz expliquent donc que la prise en compte des diverses cultures qui composent la France au fil des métissages et de l’immigration est en soi une menace pour les juifs. Comprenez bien aussi qu’une société multiculturelle se résume à une lutte de pouvoirs entre les parties qui la composent ».
Dans le viseur de Finkielkraut, l’Islam et les immigrés quand bien même ils seraient de dixième génération. « Aujourd’hui, nous dit-il en substance, toujours selon Haaretz, il serait impossible de critiquer les immigrés. Et on voit bien, en effet, dans quelle espèce d’estime ces derniers sont tenus dans le débat public quand on ne parle que d’irrégularités administratives, de polygamie voire à l’occasion de rites barbares organisés dans les appartements de banlieue. Quand, pour la dernière fois, a-t-on parlé d’immigration sans parler d’insécurité ? Il y a quelques mois, Finkielkraut, malgré les explications des renseignements généraux qui ne purent que constater le malaise social à l’origine des émeutes de 2005, affirmait que nier la dimension ethnico-religieuse de ces émeutes était sacrifier à cette bien-pensance de plomb.
Dans un petit livre réjouissant qui s’embarrasse moins d’idéologie qu’il ne s’intéresse aux faits, le journaliste Sébastien Fontenelle explique comment Alain confond, quand ça l’arrange antisémitisme et antisionisme. Finkielkraut tient des propos nauséabonds et se pose en victime dès qu’on les conteste, criant au procès et en réclamant presque un. (1)
Il n’est pas étonnant de ce fait, qu’Alain Finkielkraut joue le rôle du redresseur de torts à sa façon, ainsi, il prend la défense de Brice Hortefeux après la condamnation du ministre de l’Intérieur à 750 euros d’amende pour injure raciale. De plus, « Interrogé sur l’attaque de la flottille par l’armée israélienne, Alain Finkielkraut affirme que l’attaque de Tsahal n’était pas appropriée ». « C’est un fiasco ». Il ajoute cependant : « Mais ce n’est pas ce qu’on entend. On assiste à un véritable déferlement de haine, comme s’il s’agissait d’un crime contre l’humanité. Et ce n’est même pas non plus un crime contre les humanitaires, car si les militants de ces bateaux étaient des humanitaires, ils auraient accepté que la marchandise soit déchargée dans un port israélien à des fins de contrôle et acheminée par la route à Ghaza ».
Après ses déclarations sur l’équipe « black, black, black », Alain Finkielkraut avait été repris de volée par le monde du football, Lilian Thuram en tête. Il ne critique pas les joueurs pour ce qu’ils font, mais pour ce qu’ils sont : des jeunes issus de la diversité et des banlieues. Pascal Boniface eut à réagir contre ce parti pris injuste. « Après un crochet par Jérusalem, passant sans transition de Ghaza au Mondial, et de la déconfiture des Bleus à nos banlieues, Finkielkraut, le philosophe tout terrain, mais à la pensée unilatérale, ne pouvait trouver plus belle opportunité que celle offerte par la tragi-comédie footballistique, pour déverser avec gourmandise sa théorie du chaos social au service d’une cause subliminale, toujours en toile de fond, même si elle se joue au Proche-Orient. La jubilation de Finkielkraut sur les ondes d’Europe 1 est très perceptible lorsqu’il va jusqu’à préconiser la composition de la future équipe de France, en fonction de critères qui lui agréent, du niveau culturel requis, jusqu’au profil type du joueur idéal, plutôt » gentleman « que » voyou, de la génération caillera, les considérations ethnique et religieuse étant clairement citées.(2)
« On se rappelle qu’en 2005, ce philosophe s’était gaussé de l’équipe "black, black, black" dans une interview au journal Haaretz, où il attribuait l’origine de la crise des banlieues à un problème ethnique. Par la suite, il s’était offusqué que des Français puissent vibrer lors de la qualification de l’équipe d’Algérie. Sur Europe 1, il a déclaré : « On a plutôt envie de vomir avec la génération caillera, il est temps de ne plus sélectionner des voyous arrogants et inintelligents et de sélectionner des gentlemans. Il faut prendre acte des divisions ethniques et religieuses qui minent cette équipe. (...) Il y a finalement une logique dans la pensée de Finkielkraut. Les Noirs et les Arabes sont des voyous, les joueurs de l’équipe de France sont principalement des Noirs qui viennent des banlieues ; ils sont donc des voyous. (...) Peut-on expliquer la débâcle actuelle par les divisions ethniques et religieuses ? Une fois encore, Alain Finkielkraut semble obsédé par la question ethnique ou religieuse à laquelle il ramène tout. Le problème est un problème d’individu ou de groupe, pas un problème de religion ou d’origine ethnique. (...) Faut-il rappeler à Alain Finkielkraut, chantre de l’homogénéité, que même l’équipe d’Israël est diverse puisqu’il y a des Arabes qui en font partie ? »(2)
En fait, Alain Finkelkraut est avant tout un communautariste pro-israelien, et qui se permet de donner des leçons de patriotisme à la France entière ! Il devrait le savoir, lui et tant d’autres charriant la misère, désignant la « caillera » le philosophe, l’intellectuel sinon la représentation des inégalités. Il s’est targué de parler de la Cité oubliant son pendant, la banlieue, qui n’est autre que la représentation géographique, ethnique et sociale d’une mise au banc de la Cité.
Finkelkriaut passe le plus clair de son temps à défendre la République contre les assauts du démon communautariste, mais que fait-il finalement ? Défendre les intérêts de sa communauté, devenant ainsi lui-même un communautariste. Alain Finkielkraut rejette le concept d’une Société française multiculturelle. La nation n’est pas une notion statique. Passé commun et vouloir-vivre collectif, la Nation se nourrit d’apports successifs des groupes qui viennent la rejoindre. Je n’ose pas le penser mais j’espère qu’A-F acceptera, au même titre que les juifs, les Polonais, les Italiens l’ont fait que les apports noirs et arabes viennent enrichir la nation française... Pourquoi Finkelkraut dit-il systématiquement qu’une société multiculturelle est incompatible avec le concept de nation ? Qu’y a-t-il d’antinomique ? Ne pouvons-nous pas tous être français, juifs, chrétiens, musulmans, bouddhistes, athées, agnostiques, blancs, noirs, jaunes, arabes... ?
Les Antillais aussi
Alain Finkielkraut n’en veut pas seulement aux Français comme lui, mais toujours Arabes et musulmans dans sa classification, il a aussi une dent contre les Antillais qu’il accuse d’être des assistés de la République. Le philosophe antillais Raphael Confiant lui répond : « Depuis quelques semaines, le philosophe Alain Finkielkraut se répand dans tous les médias, en particulier sur les radios juives, pour stigmatiser les Antillais, en particulier les Martiniquais, au motif que ces derniers seraient tout à la fois des "assistés" et des antisémites. (...) Mais venons-en maintenant à la question de l’antisémitisme des Antillais. Et là , que l’on me permette d’énoncer une vérité d’évidence : la Shoah est un crime occidental ! Comme l’a été le génocide des Amérindiens, Le terme de "crime contre l’humanité" est une hypocrisie.(...) Ce ne sont pas les Juifs vivant dans les pays arabes, les Séfarades, qui ont dû fuir comme des dératés pour s’en aller construire un Etat où ils seraient enfin libres mais bien les Juifs d’Europe, les Ashkénazes, parce qu’ils avaient compris qu’ils ne pouvaient plus vivre sur ce continent. (...) » (3)
« Ma question à Alain Finkielkraut est donc simple, naïve même : pourquoi après avoir subi tant d’avanies de la part de l’Occident vous considérez-vous quand même comme des Occidentaux ? Pourquoi un ministre des Affaires étrangères d’Israël s’est-il permis de déclarer récemment : "Nous autres, Occidentaux, nous ne nous entendrons jamais avec les Arabes car ce sont des barbares." Comment, monsieur Finkielkraut, peut-on se réclamer de l’Occident après avoir subi l’Inquisition, les pogroms, les chambres à gaz et la rafle du Vel d’Hiv ? Un ultime point tout de même : quand vous déclarez, sur Radio communauté juive, que nous détesterions Israël "parce que ce n’est pas un pays métissé", je préfère croire que vous voulez rire. Quel pays est plus muticulturel et plus multilingue qu’Israël avec ses blonds aux yeux bleus russophones, ses Noirs d’Ethiopie (Falashas) parlant l’amharique, ses Séfarades au type sémite et souvent arabophones et même ses Juifs hindous et chinois ? » (3)
« Non, ce que ne supporte pas Finkielkraut, c’est que des noirs et des arabes « menacent » notre belle République ; ainsi, le problème que ces jeunes d’immigration maghrébine et africaine posent se substitue aux problèmes auxquels est confrontée l’éducation nationale dans son ensemble. Au fond, il a à peu près le même raisonnement que Zemmour, et on a l’impression qu’il appartient au « jeune musulman » de façon essentielle, et non pas circonstancielle, de saper les fondements de notre démocratie. (...) Mais le plus grand danger de cette lancinante mise au pilori est l’oubli dans lequel elle nous plonge du racisme quotidien auquel sont confrontés ces Français musulmans, dont le problème n’est pas de vouloir s’intégrer, mais d’y être invités. (...) Quelle vision a donc Alain Finkielkraut de cette société française, divisée entre sa jeunesse noire et arabe et le reste, des Français bien comme il faut ? » (4)
A l’autre bout de la communauté juive, il se trouve des Juifs tolérants, ouverts, des humanistes, Edgar Morin est l’un d’eux. Philosophe d’origine juive, il a été condamné on s’en souvient par la cour d’appel de Versailles, en juin 2005, pour « incitation à la haine raciale » pour avoir écrit à propos d’Israël : « On a peine à imaginer qu’une nation de fugitifs issus du peuple le plus longtemps persécuté dans l’histoire de l’humanité, ayant subi les pires humiliations et le pire mépris, soit capable de se transformer en deux générations en peuple dominateur et sûr de lui et à l’exception d’une admirable minorité en peuple méprisant ayant satisfaction à humilier ». Les juifs d’Israël, descendants des victimes d’un apartheid nommé ghetto, ghettoîsent les Palestiniens. Les juifs qui furent humiliés, méprisés, persécutés, humilient, méprisent, persécutent les Palestiniens. Les juifs qui furent victimes d’un ordre impitoyable imposent leur ordre impitoyable aux Palestiniens. Les juifs victimes de l’inhumanité montrent une terrible inhumanité. Les juifs, boucs émissaires de tous les maux, « bouc-émissarisent » Arafat et l’Autorité palestinienne, rendus responsables d’attentats qu’on les empêche d’empêcher ».
Déjà dans L’Arche, n°533-534 de juillet-août 2002, Alain Finkelkraut, s’en prend également à Edgar Morin, osant même écrire « Aucun Le Pen au monde ne va aussi loin », et qualifiant le texte de l’article publié dans Le Monde de « Manifeste de la haine antijuive ». En définitive, cet empêcheur de vivre-ensemble, cet intolérant ce « Fidèle d’Israël, ne supporte pas ces enfants d’immigrés bruyants, revanchards et indomptables à l’école. Ils corrompent son idéal et son vieux monde. En haut de la rue Jean-Pierre-Timbaud, dans le Paris populaire, là où son grand-père avait ouvert la petite maroquinerie reprise, il y a maintenant des magasins où l’on vend des djellabas, des voiles et aussi des burqas, une boucherie halal et un peu plus bas une mosquée. » (....) Il n’a plus aucune indulgence. La question sociale n’est pas la sienne. Il ne veut plus rien entendre des traumatismes de l’histoire. La repentance coloniale n’a, dit-il, produit que la haine de la France. Il ne veut pas se rappeler que les pères de ces enfants, arrivés il y a quarante ans, étaient durs à la tâche et silencieux. Il parle de mode de vie incompatible. (5)
Tout est dit. Alain Finkielkraut a comme son ami Pascal Bruckner formaté durablement les imaginaires des dirigeants actuels. Il n’est plus question de « Nation comme un plébiscite de tous les jours, un vouloir-vivre collectif » pour citer Ernest Renan et qui ce désir d’être ensemble et défendre des valeurs communes.
Sombres jours pour les mélanodermes et les Arabes même s’ils sont français depuis plusieurs générations.
Pr Chems Eddine CHITOUR
Ecole Polytechnique enp.edu.dz
1. Daniel de Almeidahttp://societe.fluctuat. net/blog/15726.html30.03.07
2. http://pascalboniface.blogs.nouvelobs.com/2010/06/21/finkielkraut-all-whites-all-right.html
3. Raphael Confiant http://www.bondamanjak.com/martinique/28-a-la-une/41-raphael-confiant-repond-a-alain-finkielkraut.html2 Avril 2005
4. Mazarine Pingeot Alain Finkielkraut commet une Zemmourienne. blogNouvelObs.25/05/2010
5.http://toutsurlachine.blogspot.com/2010/06/portrait-alain-finkielkraut-itineraire.html