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L’étrange démission de Saâd Hariri : des jours sombres pour les Libanais ?

Saâd Hariri, une démission et des interrogations

« La guerre est la continuation de la politique par d’autres moyens. » Carl Von Clausewitz, officier prussien.

Une étrange information, le Premier ministre libanais démissionne et annonce cela à partir de Riyadh et ceci sans consulter personne ni donner d’explication viable. Les acteurs sont connus et la reprise en main par Damas de ses régions, signe le déclin de l’Etat islamique et du même coup de la perte de puissance de l’axe sunnite Arabie saoudite- Turquie et d’Israël - Etats-Unis. L’Iran et le Hezbollah libanais sont plus que jamais les Satan de rechange

Première salve de la guerre saoudienne contre le Hezbollah

« Sombres jours pour le Liban ? Oui, lit-on sur le site Moon Of Alabama, la guerre arrive au Liban. » C’est par ce titre inquiétant que le site Moon of Alabama évoque le Liban. « (...) Aujourd’hui, le Premier ministre libanais Saad Al-Hariri a démissionné en faisant une déclaration écrite par l’Arabie saoudite sur la chaîne de télévision saoudienne Al Arabia. C’était la première salve. L’axe saoudo-israélo-américain perdra cette guerre et c’est l’Iran et la Russie qui vont y gagner. » Au début de la semaine, Thamer al-Sabhan, le ministre saoudien extrêmement sectaire des Affaires du Golfe, avait menacé le Hezbollah libanais et annoncé une surprise : il a appelé lundi à « renverser le Hezbollah » et a annoncé des « développements étonnants » dans les « jours à venir ». Se référant à son tweet de dimanche sur le gouvernement libanais, le ministre a déclaré : « J’ai envoyé ce tweet au gouvernement parce que le parti de Satan (Hezbollah) y est représenté et que c’est un parti terroriste. Le problème n’est pas de renverser le gouvernement, mais plutôt de renverser le Hezbollah. » (1)

Pendant qu’il y avait des combats en Syrie et en Irak, le Liban était en paix. Maintenant que ces guerres se terminent, les luttes par procuration reprennent au Liban. Joseph Bahout l’avait prédit à la mi-octobre : « Au niveau régional, l’Arabie saoudite et les Emirats arabes unis cherchent maintenant un autre endroit d’où ils pourraient défier et faire saigner l’Iran pour compenser la perte de la Syrie. Le violent désir de renverser la donne régionale pourrait les amener à tenter de reprendre pied au Liban. Les États du Golfe, Israël et les États-Unis ne veulent pas que l’Iran récolte les fruits d’une victoire en Syrie. S’ils cherchent à rééquilibrer la relation régionale avec Téhéran au Moyen -Orient, le seul endroit pour le faire serait le Liban, malgré les nombreux risques que cela comporterait. Dans un tel cas, et malgré sa réticence à mettre en péril son sanctuaire libanais, le Hezbollah pourrait ne pas avoir d’autre choix que d’accepter le défi, surtout s’il a une composante israélienne. La politique libanaise est organisée selon un accord compliqué. Le camp sunnite, financé par les Saoudiens, occupe le poste de Premier ministre. Le poste de président est occupé par l’ancien général chrétien Michel Aoun. Le poste de président du Parlement est occupé par le leader du mouvement chiite Amal Nabih Berri. (...) Hariri avait récemment nommé un ambassadeur libanais en Syrie. Hier, Hariri a reçu la visite à Beyrouth d’Ali Velayati, un haut conseiller de Khamenei, le chef suprême d’Iran. Les Saoudiens n’ont apprécié ni l’un ni l’autre l’événement. Le plan de Thamer a été mis en marche. Ils ont envoyé un jet privé et ramené Hariri à Riyad. Là, le prince clown saoudien Mohammed ben Salmane Al Saoud a donné à Hariri la lettre de démission (écrite par Thamer ?) qu’il a lue à la TV saoudienne. » (1)

A quoi joue l’Arabie saoudite de Mohammed ben Salmane Al Saoud ?

On dit que l’Arabie saoudite est derrière ce scénario diabolique. Le prince Mohamed Ibn Selman, maître omnipotent depuis qu’il a isolé son cousin anciennement prince héritier, est atteint d’hubris. Il veut tout régenter aidé en cela par la maladie de son père qui lui laisse les coudées franches. Les médias français aux ordres notamment français ne tarissent pas d’éloges et s’extasient hypocritement devant sa modernité qui consiste à présenter les avancées fantastiques comme pour la femme de conduire une voiture et en fait démolir en creux les fondements bien compris de l’Islam – pas celui du « wahhabisme » oublient que c’est la Turquie qui la première octroya le droit de vote aux femmes. Naturellement, pas un mot sur le génocide à bas bruit au Yémen et ce n’est pas parce que les médias occidentaux n’en parlent pas qu’il ne se passe rien et que tout va bien. Au contraire, c’est le chaos. En réalité, lit-on sur la contribution suivante : « Cette démission relève d’un plan concerté mis au point conjointement par le prince héritier Mohamed ben Salman et le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu visant à stopper les progrès enregistrés jusqu’ici par le Hezbollah libanais et ses alliés syrien et iranien dans la région. Cette démission coïncide également avec le renforcement d’une campagne médiatique féroce, menée tambour battant par toutes les chaînes satellitaires arabes inféodées au régime de Ryad, visant comme d’habitude l’Iran et la Syrie, mais également ce qui est présenté comme le terrorisme au Liban. Le renforcement des relations stratégiques entre l’Arabie saoudite et Israël vise à ramener le Liban dans le giron saoudien, quitte à l’expédier à l’âge de pierre à coups de bombes, stopper l’avancée des troupes syriennes et iraniennes au Levant et enfin à empêcher toute jonction entre les forces armées syriennes et les forces irakiennes Engagée dans une désastreuse campagne militaire au Yémen, engagée dans la guerre en Syrie et intervenant dans les coulisses des sables mouvants de la politique irakienne, l’Arabie saoudite perçoit l’Iran comme son ennemi mortel et n’hésitera pas à soutenir une nouvelle agression israélienne contre le Liban visant les infrastructures du Hezbollah libanais. » (2)

Les conséquences prévisibles

L’un des premiers gouvernements à réagir et pour cause est celui de la France. Comme lu sur le site voltairenet.org. Le gouvernement français est intervenu auprès du prince héritier saoudien, Mohamed ben Salmane, pour qu’il libère le Premier ministre libanais, Saâd Hariri, actuellement aux arrêts à l’hôtel Ritz de Riyad avec plusieurs des personnalités arrêtées lors du coup de Palais. Il est impossible de le joindre. Monsieur Hariri a annoncé depuis l’hôtel Ritz qu’il démissionnait de ses fonctions au Liban. Cependant, selon la Constitution libanaise, il reste en charge des affaires courantes dans l’attente de son successeur. (3)

« Il est évident que les premiers à en souffrir, seront les Libanais, de ce vide. « Le secrétaire général du Hezbollah, Sayyed Hassan Nasrallah, a pris la défense de Saâd Hariri, leader de la Coalition opposée à son parti. Il a dénoncé une ingérence saoudienne dans les affaires libanaises. Le président Michel Aoun a réuni un Conseil de défense au palais de Babda pour déterminer les réactions à la disparition inattendue du Premier ministre. Il ne semble pas considérer comme valide une démission par téléphone et ne devrait en tenir compte que si le Premier ministre revenait au Liban la lui annoncer en personne. Dans sa lettre de démission écrite par les Saoudiens il accuse l’Iran d’ingérence étrangère dans la politique libanaise. La démission de Hariri a pour but de provoquer une crise constitutionnelle au Liban et d’empêcher de nouvelles élections parlementaires. Voilà la suite probable du plan saoudien (1) :

L’administration Trump annoncera de nouvelles sanctions contre le Hezbollah et contre le Liban.

Le gouvernement saoudien infiltrera au Liban une partie de ses combattants par procuration d’Al-Qaïda/EI de Syrie et d’Irak Il financera des opérations terroristes libanaises locales.

Des extrémistes sunnites se livreront à des nouvelles tentatives d’assassinat, à des attentats terroristes et à des émeutes contre les chrétiens et les chiites au Liban.

Les États-Unis essayeront de pousser l’armée libanaise à déclarer la guerre au Hezbollah.

Israël tentera de provoquer le Hezbollah et de détourner son attention avec de nouvelles machinations à la frontière libanaise et à la frontière syrienne. Mais il n’entamera PAS une vraie guerre.

Pour le site Moon of Alabama le plan a peu de chances de réussir pour plusieurs raisons :

Le peuple libanais dans son ensemble ne veut pas d’une nouvelle guerre civile.
L’armée libanaise ne s’impliquera pas avec un camp ou un autre et au contraire tentera de maintenir le calme partout.

Les sanctions contre le Hezbollah frapperont tout le Liban, y compris les intérêts sunnites.

Un nouveau Premier ministre sunnite sera installé à la place de la marionnette saoudienne qui a démissionné. Le Liban constituera un nouveau marché pour les Russes et les Iraniens. » (1)

« Les compagnies russes s’engageront dans l’extraction gazière et pétrolière libanaise en Méditerranée et remplaceront les Etats-Unis. Le plan saoudo/américano/israélien contre le Hezbollah a tout l’air d’une crise de rage impuissante provoquée par leur défaite en Syrie et en Irak. « Les troupes irakiennes ont, malgré les protestations des Etats-Unis, débarrassé les zones frontalières avec la Syrie de l’EI. Des milices irakiennes ont franchi la frontière pour aider les troupes syriennes à reprendre Abu Kamal, le dernier endroit contrôlé par l’EI. Cela ouvrira enfin une route directe de la Syrie vers l’Irak et au-delà. (...) L’Etat islamique parrainé par l’Arabie saoudite en Irak et en Syrie a été anéanti (...) L’Irak a retrouvé sa souveraineté nationale. Il a vaincu l’EI, empêché les Kurdes de s’approprier une partie du territoire arabe, et déjoué toutes les tentatives de relancer une guerre civile. (...) il est très probable que la puissante alliance de la Syrie, de l’Iran, de la Russie et du Hezbollah remportera la guerre. (...) Les efforts maniaques des Saoudiens et des Etats-Unis pour contrecarrer une prétendue influence iranienne (et russe), ont permis à l’Iran (et à la Russie) d’améliorer et de sécuriser leur situation bien mieux qu’ils n’auraient jamais pu l’espérer autrement. » (1)

Une nouvelle guerre au Moyen-Orient ?

C’est de notre point de vue, un vœu pieux, l’Empire et Israël ne laisseront pas les Russes redessiner la carte de l’énergie au Moyen-Orient. C’est aussi l’analyse lucide de différents spécialistes. Sous la plume du spécialiste du Moyen-Orient Richard Labévière nous lisons les mêmes conclusions concernant l’axe américano-saoudo-israélien contre la coalition syrie-Irak-Hezbollah-Russie : « (...) Cette décision spectaculaire fait suite à l’appel du président américain Donald Trump, lancé le 20 mai dernier depuis Riyad, d’« isoler l’Iran ». Avec la libération de Deir ez-Zor par l’armée gouvernementale syrienne, l’opposition armée et ses soutiens sunnites – Arabie saoudite, Qatar, Emirats arabes unis, Koweït, etc. – sont aux abois. En reprenant le contrôle des régions de l’est de la Syrie, l’armée syrienne et ses alliés, non seulement libèrent des zones pétrolières qui seront essentielles pour la reconstruction du pays, mais surtout opèrent leur jonction avec les forces de Bagdad sur la frontière avec l’Irak, une bande de quelque 650 kilomètre entre la Jordanie et la Turquie.(...) Dieu ez-Zor était le dernier centre aux mains de Dae’sh en Syrie, depuis la chute de Rakka mi-octobre. » (4)

« Malgré les protestations américaines, les troupes irakiennes ont débarrassé les zones frontalières avec la Syrie de l’essentiel des groupes salutistes. Des milices irakiennes ont même franchi la frontière pour aider les troupes syriennes à reprendre Abu Kamal, la dernière localité contrôlée par Dae’ch. Il est certain que cette jonction favorisera une collaboration militaire entre la Syrie et l’Irak, cauchemar de Washington, de Tel-Aviv et de Riyad ». « Parrainé par l’Arabie saoudite en Irak et en Syrie, Daech a, donc été anéanti, L’Irak a retrouvé sa souveraineté nationale et la Syrie est en passe de reconquérir la sienne. Une dynamique de revanche et de nouveaux irrédentismes. (...) Les propos de Benjamin Netanyahu, le 5 novembre à la BBC, confirment involontairement cette évolution et la défaite de l’axe américano-israélo-saoudien : « La démission de Sand Hariri veut dire que le Hezbollah a pris le pouvoir, ce qui signifie que l’Iran a pris le pouvoir. Ceci est un appel à se réveiller ! Le Moyen-Orient vit une période extrêmement dangereuse où l’Iran mène une tentative pour dominer et contrôler toute la région... Quand tous les Arabes et les Israéliens sont d’accord sur une chose, le monde doit l’entendre. Nous devons stopper cette prise de contrôle iranienne ». Dans tous les cas de figure, chaque fois qu’une nouvelle menace cible l’Iran, c’est le Liban qui trinque. » (4)

« La démission surprise de Sand Hariri parachève une révolution de palais qui intervient en pleine reprise des négociations internationales sur la Syrie. En visite en Iran, le 1er novembre dernier, Vladimir Poutine a confirmé sa détermination à poursuivre le processus d’Astana par une prochaine réunion des différentes composantes de l’opposition à Sotchi. Au début de la semaine, Thamer al-Sabhan, le ministre saoudien des Affaires du Golfe, avait menacé le Hezbollah libanais et annoncé des surprises à venir. (...) Dimanche soir, lors d’une allocution télévisée, le secrétaire général du Hezbollah s’est montré rassurant en soulignant que « l’escalade politique verbale ne change rien à la réalité régionale ». Il a appelé les Libanais au calme et à ne pas céder à trois rumeurs colportées par ceux qui cherchent à provoquer une crise constitutionnelle : un projet d’assassinat contre Saâd Hariri, une frappe israélienne et un plan saoudien pour attaquer le Liban « Avant même l’annonce de la démission de Sapad Hariri, Samir Geagea - le patron des Forces libanaise (FL) – avait, lui-aussi multiplié les attaques en direction du Hezbollah. Toujours en phase avec Tel-Aviv et Riyad, le leader d’extrême-droite cherchera, sans doute, à tirer profit de la situation pour affaiblir ses concurrents du camp chrétien en se présentant comme la seule alternative possible à la succession du président Michel Aoun. » (4)

« D’autres conséquences sont à craindre. L’administration américaine pourrait en profiter pour annoncer de nouvelles sanctions contre le Hezbollah et le Liban. L’Arabie saoudite continuera à infiltrer au Liban une partie de ses combattants de la Qaïda et de Dae’ch en Syrie et en Irak. Comme depuis plusieurs décennies, la monarchie wahhabite financera de nouvelles opérations terroristes au Liban et dans d’autres pays de la région. » (4)

Conclusion

On le voit, une nouvelle géopolitique tente de se mettre en place après le domino syrien qui n’est pas tombé. La première « manche » – ce mot est tragique il s’agit de la mort de centaines de milliers de personnes qui ne savent pas pourquoi ces stratégies à leur encontre – s’achève près de 200 000 morts syriens pour rien, un pays exsangue, mais debout,. Le peuple libanais qui a tant souffert de la guerre interconfessionnelle dans une guerre qui a duré 15 ans au milieu des années soixante dix attend d’une façon inquiète la nouvelle confrontation qui se dessine du fait du rôle diabolique de l’Arabie saoudite guidée par Mohamed Ibn Salman, un Schwarzkopf au petit pied qui veut -avec sa coalition de pieds nickelés – faire le job pour le compte de l’Empire et d’Israël croyant de ce fait, dominer l’Iran, pays qui investit dans le savoir et ne compte pas sur les pétrodollars et le parapluie américain. Pendant ce temps, la cause palestinienne s’enfonce, disparaît de plus en plus des écrans radar ; C’est tout béent pour Israël devant l’anomie du monde et dire que le roi Fayçal ne désespérait pas d’aller prier à Jérusalem dans la mosquée de Omar. Sombre jour, un nouveau feuilleton s’écrit. La variable d’ajustement sera à n’en point douter le Liban.

Chems Eddine CHITOUR

1.http://www.moonofalabama.org/2017/11/lebanon-hariris-resignation-the-o...
2.https://strategika51.wordpress.com/2017/11/05/la-demission-du-premier-ministre-libanais-sur-instruction-de-ryad-le-prelude-a-une-nouvelle-agression-contre-le-liban/
3. http://www.voltairenet.org/article198635.html
4. http://prochetmoyen-orient.ch/liban-demission-hariri-contre-iran/

8 Novembre 2017

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