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Valls valse, encore une victoire du dégagisme !

Après une semaine d’ubuesques publications de résultats, qui ne furent jamais ni définitifs ni exacts, le deuxième tour de la primaire du PS s’est déroulé dans les conditions ordinaires : saturation médiatique intense, amandine cécité sur le bilan des candidats et le contenu précis de ce qu’ils avançaient. Mais cela n’est pas une nouveauté et, par conséquent, cela ne mérite pas qu’on s’y arrête.

L’évènement c’est que le PS a organisé une primaire hors du commun. Sa tenue a d’abord auto-bloqué et asphyxié son président sortant en exercice. Puis elle a conduit à faire voter massivement contre le Premier ministre qui a été l’inspirateur du quinquennat. Le fait n’est donc plus la primaire mais ce qui s’exprime à travers elle.

Considérée vue de haut, la situation manifeste un moment particulièrement fort dans la maturation du phénomène « qu’ils s’en aillent tous ». L’insoumission, annoncée par le nom de notre mouvement, partait du constat que ce phénomène travaille en profondeur notre société. Ce phénomène que les Tunisiens avaient nommé le « dégagisme » par référence au slogan omniprésent de leur révolution démocratique à l’adresse du PS de Ben Ali : « dégage ». Car ce résultat est totalement inédit pour un exercice du type d’une primaire.

On doit donc en déduire que tout cela constitue une tendance lourde du moment politique. C’est cette pulsion « dégagiste » qui ouvre les saisons de grand remuement des sociétés. L’épisode Fillon et ses emplois familiaux au Parlement vont sans aucun doute accroitre la rage et le dégoût qui labourent la profondeur de la société. Peu de fois dans ma vie politique j’ai senti autant d’exaspération que j’en observe maintenant. Et on devine que la tendance « dégagiste » de la société va s’amplifier après ce qui sera ressenti comme un succès. Que l’instrument au PS en ait été Benoît Hamon, qui a chanté des paroles si proches des nôtres, est une source de satisfaction supplémentaire. Car dans le combat politique il est essentiel de commencer par l’élargissement de la surface d’usage des mots que vous employez.

Pour moi, sixième République, planification écologique, indépendance de la France, couvrent désormais un champ plus large que celui qu’ils occupaient lorsque nous étions seuls à les prononcer. Que pour désigner son candidat le PS ait préféré nos mots à ceux de son propre gouvernement est un fait qui donnera ses fruits le moment venu. Sans hégémonie culturelle, un programme a les plus grandes peines à avancer. À présent, les gens sérieux, qui sont les plus nombreux, s’intéresseront au contenu, à la cohérence du programme qui se déduit de ces mots. J’estime que le programme historique « L’Ère du peuple » et sa traduction dans « L’Avenir en commun » forment un tout qui, dorénavant, est adossé à une vague dans notre pays. C’est à nous qui avons porté ce choix tant d’années d’être à la hauteur pour le rendre victorieux. La campagne des « insoumis » et ma candidature sont là pour cela. Rien que pour cela.

Obscène sarabande de la caste
Certes, il m’a qualifié de « rouge de chez les durs » et même, comme c’est fin, de « Fidel Castro de YouTube ». Mais n’offense pas qui veut. C’est donc sans rapport avec cette saillie de fin de banquet que je reviens sur l’affaire des emplois familiaux de M Fillon. Peut-être n’y a-t-il rien d’illégal dans les emplois de madame Fillon. La justice le dira. Mais il y a quelque chose de profondément immoral. Et politique. C’est le décalage entre le niveau de revenu de Pénélope Fillon en tant que collaboratrice de son mari, et la purge prévue par François Fillon dans son programme. Car François Fillon ne prépare pas seulement la destruction de la Sécurité sociale et l’affaiblissement des services publics. Il prévoit aussi une ponction très sévère du pouvoir d’achat populaire ! Et comme beaucoup l’ont compris, l’indignation ambiante n’en est que plus violente.

Le programme de François Fillon fonctionne comme une pompe aspirante dans les poches du commun qui verse ensuite à gros bouillon dans les poches des riches. C’est-à-dire Robin des bois à l’envers. Ce n’est pas moi qui le dis. C’est Alain Madelin, un libéral de choc qui sévissait dans les années 2000. Il l’a déclaré au magazine Le Point le 26 mai 2016, bien avant la victoire de Fillon à la primaire de droite. Lisez : « Si François Fillon passe pour le plus libéral, c’est hélas parce que son programme est assurément, en matière de purge, le plus abouti. Voilà qui prête le plus à la caricature d’un libéralisme antisocial… Je pense que cette présentation est une caricature du libéralisme qui apparaît comme une purge patronale. C’est du Robin des bois à l’envers : prendre de l’argent aux pauvres pour le donner aux riches ! ».

C’est vrai. François Fillon veut augmenter la TVA. Et pour quoi faire ? Pour compenser le cadeau de la suppression de l’Impôt de solidarité sur la fortune (ISF) que paient les millionnaires de ce pays. La TVA augmenterait de 2 points, et passerait de 20% à 22% du prix des produits et services. Cela représente une ponction de 15 milliards d’euros par an dans les poches du peuple ! Et dans ce peuple, moins on est riche plus on paie ! En effet les petites gens dépensent tout le peu qu’elles ont et paient donc de la TVA sur tout leur revenu là où les riches épargnent en grande partie. Avec cette hausse de la TVA, François Fillon va donc prendre 300 euros par an dans la poche de chaque salarié payé au SMIC ! 300 euros ! Cela représente plus de la moitié du RSA mensuel, plus d’un tiers du minimum vieillesse mensuel, un quart de SMIC mensuel ou encore quatre pleins d’essence ou la moitié du coût annuel de la cantine scolaire pour un enfant en moyenne. C’est donc une très lourde amputation du pouvoir d’achat que prépare François Fillon. Il ne fait aucun doute que la consommation et donc l’activité du pays en sera réduite d’autant.

Et que va faire François Fillon avec vos 300 euros ? Il va commencer par rendre 15 000 euros par an à chaque millionnaire de France ! Robin des riches à l’œuvre. En effet, François Fillon veut supprimer l’ISF, l’impôt de solidarité sur la fortune. Aujourd’hui cet impôt rapporte plus de 5 milliards d’euros par an de recettes à l’État. Il est payé par 343 000 foyers fiscaux. Cela représente à peine 1% des 37 millions de foyers fiscaux. Il fallait l’imaginer : augmenter la TVA pour tous pour baisser l’impôt des 1% les plus riches ! Mais ce n’est pas tout. Avec la hausse de TVA, François Fillon entend aussi faire un très beau cadeau aux actionnaires. Il veut utiliser la hausse de TVA pour « financer une partie des allègements » de cotisations sociales et de baisse d’impôt sur les sociétés.

Avec Fillon, le pouvoir d’achat va en prendre un rude coup. François Fillon a déjà prévu de ne pas augmenter le SMIC. Sur TF1 lors d’un débat de la primaire, il a expliqué le plus froidement du monde qu’à ses yeux, « le SMIC actuel c’est ce que la société française peut faire de mieux » en matière de niveau de salaire. Il a aussi prévu de faire les poches des chômeurs. Il veut rendre « dégressives » dans le temps les allocations-chômage. Il n’a pas précisé le détail mais cela consiste à réduire le montant de l’allocation perçue chaque mois au fur et à mesure que le chômeur reste au chômage. Une double peine en somme ! Enfin, avant que François Fillon ne dise qu’il retire ce projet sur la santé, il vous coûtait déjà au moins 300 euros de plus par an pour votre complémentaire santé pour compenser les déremboursements par la Sécu !

C’est en lisant ces comptes que l’on prend la mesure de ce que signifie la découverte de l’embauche de son épouse et du niveau de sa rémunération. Je suis témoin de la rage que cette information fait naître. Une colère drue et terrible comme ce vent qui coupe en deux les gens qui dorment par terre tandis que continue ce monde d’opulence insolvable. La caste qui défend cet ordre des choses et le complète à la sauce du programme de Fillon est fauchée par un règlement de compte interne qui dévoile son obscène sarabande.

100% renouvelables = 370 milliards d’économie
Ma semaine a été largement consacrée à l’idée du passage à une France utilisant 100% d’énergies renouvelables. C’est-à-dire sortant à la fois du nucléaire et des énergies carbonées. Mardi, j’ai échangé avec les représentants du Réseau Action Climat qui regroupe l’essentiel des associations et ONG engagées sur les questions climatiques. Le lendemain, j’étais à la présentation du scenario NegaWatt 2017-2050. Un travail remarquable qui montre comment passer de la situation actuelle au 100% renouvelables en 2050 en fermant au passage la dernière centrale nucléaire en 2035, dans 18 ans.

Je le fais avec d’autant plus de sérieux que je serais sans doute le seul candidat à défendre l’idée de la sortie du nucléaire si Jadot rejoint Duflot dans le soutien à la candidature de Benoît Hamon puisque celui-ci s’en tient au seul plan de poursuite décroissante du nucléaire de François Hollande et du PS. Dans ces deux événements, j’ai puisé de nouveaux arguments. Notamment un pour tordre le cou à ceux qui demandent sans cesse « combien ça coûte » avant d’écouter la fin de la réponse précédente. Car le 100% renouvelables et l’écologie, ça peut rapporter gros ! Les prétendus comptables qui tiennent lieu de candidats ou de journalistes devraient y réfléchir.

Le 100% énergies renouvelables en 2050 permettrait une économie globale de 370 milliards d’euros cumulés sur la période 2020-2050 selon l’Association NegaWatt. 370 milliards d’euros ! C’est l’équivalent du budget annuel de l’État ! Pour parvenir à ce chiffre, NegaWatt a calculé le solde entre les dépenses engagées dans la transition écologique et les économies réalisées, notamment en importations d’énergies.

Déjà, il y a quelques semaines, la prestigieuse université américaine de Stanford disait que le 100% renouvelables permettrait des économies considérables. Ses universitaires avaient estimé qu’une France 100% renouvelables économiserait 22,8 milliards par an d’ici 2050 rien qu’en matière de santé. C’est dire notamment le coût de la pollution en termes de santé publique sans oublier les 48 000 décès prématurés par an ! La prochaine fois qu’on vous demande : « combien ça coûte de faire 100% renouvelables ? », répondez : « Combien ça coûte 48 000 morts par an ? » !

Au total, l’université Stanford a évalué que le 100% renouvelables permettrait une baisse annuelle de 379 milliards d’euros sur les dépenses de santé, électricité et lutte contre le changement climatique. Cela représente une économie de 5 700 euros par an et par personne ! Évidemment, il faut déduire de ce chiffre annuel les investissements à réaliser. Ce que ne fait pas l’université états-unienne. Mais c’est ce que fait Negawatt pour parvenir à son chiffre de 370 milliards d’euros d’économies cumulées d’ici 2050.

Le Réseau Action Climat a quant à lui attiré mon attention sur les niches fiscales anti-écologiques. Il estime à 30 milliards d’euros par an le coût des niches fiscales favorables aux énergies fossiles. 30 milliards d’euros ! Ce chiffre inclut le manque à gagner fiscal et les coûts de l’impact sur la santé et l’environnement de l’usage de ces énergies. Parmi ces niches fiscales anti-écologiques, il y a bien évidemment l’avantage fiscal pour le diesel en matière de TVA et de Taxe intérieure sur la consommation de produits énergétiques (TIPCE, l’ex TIPP pour « taxe intérieure sur les produits pétroliers »). Cette niche fiscale est estimée à 6 milliards d’euros par an de manque à gagner. Évidemment, en disant cela, je n’ignore pas que beaucoup des gens qui roulent ont diesel y ont été encouragé et l’ont fait car c’était moins cher pour eux.

La question n’est donc pas seulement fiscale ou écologique. Elle est aussi sociale. La sortie du diesel ne sera socialement possible que si des mesures fortes sont prises pour venir en aide aux actuels propriétaires de véhicules diesel, pour les aider soit à renoncer à leur véhicules s’ils le peuvent, soit à en changer pour des véhicules moins polluants. Mais pour commencer, on pourrait supprimer l’allégement fiscal sur le diesel pour les entreprises. Même le PS a fini par l’admettre. Mais, comme d’habitude, ces gens disent une chose et en font une autre. En effet le gouvernement n’a rien trouvé de plus intelligent à faire que… d’étendre l’avantage fiscal aux véhicules à essence ! Et pourquoi ? Pour respecter une directive européenne ! Car les lobbies ont bien travaillé au sommet. Et la Commission européenne empêche de supprimer l’avantage fiscal en matière de TVA sur le diesel. Mais elle autorise de l’étendre à l’essence ! Incroyable, non ? On voit ici aussi que la sortie des règles et traités européens est une exigence écologique autant que de souveraineté !

Un autre exemple d’aberration anti-écologique en matière fiscale concerne l’aviation. Aujourd’hui, les compagnies aériennes opérant en France sont exonérées de la TICPE, la taxe sur les produits énergétiques. Pour le dire clairement, le kérosène bénéfice d’une niche fiscale. Au total, cette niche coûte 3,5 milliards d’euros de manque à gagner par an. Et il y a plus scandaleux encore. C’est que cette niche s’applique aussi pour les vols intérieurs, entre deux villes françaises ! Pourtant ici, il n’y a aucune concurrence internationale ni risque que les vols soient déplacés vers d’autres aéroports. Vous n’irez pas à Francfort prendre un vol pour faire Brest-Nice ! La seule exonération sur les vols intérieurs coûterait 1,3 milliards d’euros de manque à gagner selon le Réseau Action Climat ! C’est d’autant plus absurde que le ferroviaire ne bénéficie pas d’un allégement fiscal identique. En effet, la SNCF doit, elle, payer la CSPE, la contribution au service public d’électricité. Le kérosène des avions est aidé mais pas l’électricité du train pourtant moins polluante !

Et en matière de niches fiscales anti-écologique, le PS a eu tout faux pendant ce quinquennat. C’est ce qu’a dit un rapport de la Cour des comptes de novembre 2016. Que dit-il ? Que le montant des niches fiscales anti-écologiques a augmenté de 14% entre 2010 et 2015 alors que les niches fiscales écolo ont été rabotées de 27% ! Pour l’écologie aussi, la révolution fiscale est urgente ! Tourner la page des ambiguïtés et de la non décision permanente en est la première condition.

Alerte ! Le CETA passe en force !
On connait la ligne adoptée par Trump contre les traités de libre-échange. Il faut donc suivre de près ce qui se passe dans le tohu-bohu en cours. Car si Trump annonce être contre le TAFTA, accord de libre-échange entre son pays et l’Union européenne, pendant ce temps l’accord avec le Canada suit son parcours. Et ses partisans en Europe comme au Canada n’en sont que plus chaud-bouillants pour parvenir à le faire adopter. En effet le Canada deviendrait le point de passage de l’échange des produits entre européens et nord-américains. Car le Canada est, de son côté, intégré dans une zone de libre-échange avec les USA. Le trajet du texte est donc à suivre avec le maximum d’attention. Voyons cela.

Après avoir été validé par le Conseil européen le 30 octobre 2016, le traité de libre-échange UE-Canada arrive désormais devant le Parlement européen. Il sera soumis au vote de la plénière le 15 février prochain. À la suite de sa validation par le Parlement européen il sera soumis à la ratification dans chaque pays. Évidemment chacun a sa méthode et ce sera soit le vote du parlement du pays soit un referendum. On comprend bien que tout cela peut prendre du temps et finir par échouer tout simplement. Dans ces conditions, l’incroyable est prévu : une application « provisoire » du traité aura lieu !

C’est ce que prévoit la décision du Conseil en date du 30 octobre. « L’accord économique et commercial global (CETA) entre le Canada, d’une part, et l’Union européenne et ses États membres, d’autre part, est appliqué à titre provisoire par l’Union conformément à son article 30.7, paragraphe 3, dans l’attente de l’achèvement des procédures nécessaires à sa conclusion ». C’est incroyable mais vrai. Le Conseil a décidé que l’accord s’appliquerait même si aucun pays ne l’a ratifié ! Le coup vient de loin car l’article 30.7 du texte de l’accord CETA précisait déjà le calendrier de cette application : « Les parties peuvent appliquer provisoirement le présent accord à compter du premier jour du mois suivant la date à laquelle elles se sont notifié réciproquement l’accomplissement de leurs obligations et procédures internes respectives ».

Aucun dirigeant, aucun gouvernement ne peut donc dire qu’il ne le savait pas. Tout a été négocié et décidé pour réaliser ce coup de force. C’est au point que même l’avis du Parlement européen devient inutile. Le site de la Commission européenne, division Commerce, nous indique que cette mise en œuvre anticipée peut avoir lieu sans même attendre ce vote du Parlement européen ! « À la suite de la décision du Conseil, il sera possible d’appliquer l’AECG (CETA) à titre provisoire. ». Enfin, la majeure partie de l’accord peut alors être appliquée de manière anticipée : seuls les tribunaux d’arbitrages et les chapitres concernant la propriété intellectuelle en sont pour l’instant exclus. Et dans le cas où un état refuserait de valider l’accord alors que la mise en œuvre anticipée est déjà engagée aucune procédure n’est prévue pour stopper l’application de l’accord. En clair : le CETA, que vous en vouliez ou que vous n’en vouliez pas, c’est pareil !

Autant dire que le vote du 15 février n’est qu’une formalité, voire une politesse faite aux députés à qui l’on fait semblant de demander leurs avis. C’est d’ailleurs ce que semble penser le nouveau président conservateur du Parlement européen, Antonio Tajani. Il est tellement confiant dans le résultat du vote, qu’il a même pris la liberté d’avancer la venue du Président canadien au Parlement de Strasbourg. Justin Trudeau devait en effet venir en mars. Il sera là dès février. C’est qu’il s’agit aussi pour lui d’accélérer la procédure pour prévenir toute tentative d’opposition et ainsi asseoir son autorité au sein des institutions européennes. D’ailleurs M.Tajani avait prévenu avant son élection qu’il ne serait pas question avec lui de « ré-ouvrir les négociations sur le CETA ». De toute manière, on ne peut guère s’attendre à ce qu’une personne ayant déclaré, alors qu’il était commissaire au transport « Le Dieselgate n’est pas un problème pour moi », s’interroge sur les impacts écologique d’un tel accord.

Car le CETA est en totale contradiction avec le – déjà bien insuffisant – accord de Paris sur le Climat (COP 21). D’ailleurs, l’accord de Paris n’est même pas mentionné une seule fois dans les 454 pages de l’accord UE-Canada. Et les deux chapitres consacrés à l’environnement (chapitre 22 – « Commerce et développement durable » et chapitre 24 – « Commerce et environnement ») ne contiennent aucun élément contraignant. Pourtant, l’impact d’un tel traité de libre-échange sur le réchauffement climatique est conséquent. Même la Commission européenne reconnait dans son étude d’impact que l’augmentation prévue des échanges marchands (+23%) aura un impact négatif sur les émissions de gaz à effets de serre avec une augmentation des émissions de méthane et d’oxyde d’azote. Alors même que l’UE s’est engagée à réduire ces émissions de 40% d’ici 2030.

L’accord prévoit également de faciliter l’importation d’énergie fossile en provenance du Canada et plus particulièrement de sables bitumineux dont l’extraction et l’exploitation produit 1,5 fois plus d’émission de gaz à effet de serre que des pétroles conventionnels. Les échanges prévus entre l’UE et le Canada concernent pour une grande partie des produits agricoles avec notamment l’ouverture de quotas de dizaines de milliers de tonnes de bœuf et de porc canadiens exportable dans l’UE sans droit de douanes. Encourageant d’autant les fermes-usines canadiennes qui produisent à bas prix au détriment des petites exploitations, de la qualité des produits, du bien-être animal et des circuits-courts « production-consommation ».

Enfin, le mécanisme de règlement des « différents » contenu dans le traité, et même sous sa forme un peu édulcorée de Cour spéciale sur l’investissement (ICS), permettra aux entreprises d’attaquer les décisions des États, notamment dans le cas de mise en place de législation protectrice de l’environnement comme par exemple l’interdiction de la fracturation hydraulique dans l’exploration et l’exploitation des gaz de schiste.

Pour ma part, j’alerte sans relâche sur les dangers de ce traité depuis 2013, et je signais encore ce samedi, à l’occasion de la journée de mobilisation européenne « Anti-CETA », une tribune à ce sujet. Et je voterai contre au Parlement européen.

Car, alors qu’il préfigure l’avenir de nos relations commerciale avec l’outre-Atlantique, le sujet se fait bien discret dans la présidentielle française. Et pour cause ! Les principaux candidats soutiennent cet accord, sans probablement même savoir ce qu’il contient. Ainsi Fillon déclare à qui veut l’entendre que « Le CETA est un bon accord » tandis que Macron ânonne que « Ce traité améliore la situation par rapport à l’actuelle ». Et la délégation socialiste du Parlement européen, après avoir soutenu, tout du long, le processus, vient de découvrir que le traité n’était finalement pas bon. Et alors que ses membres n’ont rien fait pour empêcher son adoption en commission parlementaire, ils jurent aujourd’hui, la main sur le cœur, qu’ils s’y opposeront de toute leur force. Pour ma part, je crois que leur capacité à s’opposer à quoi que ce soit n’est pas plus sérieuse que celle de Mme Le Pen qui prétend lutter contre le CETA sans même prendre la peine d’aller voter contre son adoption en commission « Commerce international » lundi 23 janvier.

De la mère de toutes les libertés
« Le Journal du Dimanche » m’a interrogé il y a une semaine sur une série de sujets qui touchent à la liberté de disposer de soi. Ce genre d’exercice a l’inconvénient de la brièveté des réponses mais il a l’avantage de l’obligation de mettre en formules simples des réponses à des sujets complexes. J’ai pensé que la lecture de la partie de l’entretien consacré à ces questions intéressera mes lecteurs.

Jeudi soir, lors du troisième et dernier débat avant le premier tour de la primaire de la gauche, François de Rugy, suivi par Benoît Hamon, ont plaidé pour le droit à mourir dans la dignité. Cela va dans votre sens, vous qui êtes favorable au « droit d’éteindre la lumière »…

Ils ont fait œuvre utile. Cela facilite mon travail. Mais il faut parler clair et nommer les choses par leur nom : le suicide assisté. Ne nous cachons pas derrière des euphémismes. Les Français sont prêts à regarder cette idée en face. Le débat nous grandira tous. Ici il y a un grand décalage entre la maturité des gens, massivement pour, et les responsables politiques, plutôt frileux… Car en politique, les questions philosophiques font souvent très peur. Parler de la mort pour un politicien c’est typiquement le genre de sujet sur lequel il va biaiser. La formation moyenne des responsables politiques est extrêmement technocratique, elle est très peu littéraire et peu philosophique. Ce sont des sujets qui les encombrent.

Vous, au contraire, vous en avez fait l’une de vos marques de fabrique…

Il faut un débat sur la nature de la civilisation humaine à notre époque. L’avenir de la planète et celui de l’être humain sont à l’ordre du jour. Il ne faudrait pas que les questions de la présidentielle se résume à : combien ça coute ? Je veux introduire dans le débat le droit à être maître de soi-même. Il y a un lien direct entre le droit à l’avortement et le droit au suicide assisté. Je propose que ces deux droits soient inscrits dans la Constitution.

Depuis 2016, le droit à la « sédation profonde et continue » est autorisée… Cela ne suffit-il pas ?

Je récuse la loi qui s’applique aujourd’hui. Elle consiste à priver un mourant d’eau et d’alimentation. C’est la « diète noire », une torture qu’infligeait le dictateur Sékou Touré. S’ensuit une mort atroce. Le suicide assisté est le droit ultime de rester maitre de soi-même, de rester libre dans une circonstance contre laquelle on ne peut rien. C’est une liberté, pas une obligation, bien sûr. Il est misérable de devoir aller en Suisse ou en Belgique pour bénéficier du suicide assisté, comme autrefois on allait en cachette en car à Amsterdam pour un avortement.

Pourquoi êtes-vous hostile à la GPA, alors même que c’est le point d’aboutissement de cette liberté de disposer de soi-même que vous jugez fondamentale ?

Je comprends qu’en toute logique on pose cette question. J’y suis opposé pour une raison philosophique. Le corps n’est pas une marchandise. Ne sommes-nous pas tous pour la gratuité du don des organes ou du sang ? Quand vous vous êtes vendu comme une marchandise, vous n’êtes plus maître de vous-même. La GPA fait d’une femme un outil de production. Le jour où l’on me présentera une milliardaire qui par amour d’une femme pauvre d’un bidonville acceptera de porter son enfant, je réviserai mon point de vue.

Pour une femme malade qui ne peut pas porter d’enfant, quelle est votre objection ? La GPA n’est-elle pas alors la seule solution qui existe ?

Non, il y a aussi l’adoption. La GPA est fondée sur une illusion : que la filiation reposerait sur autre chose que de l’amour. Le lien biologique n’est pas fondateur de la relation humaine. L’amour prime sur la génétique

Depuis 2016, « l’achat d’acte sexuel » est sanctionné par une amende de 1 500 euros maximum. Faut-il aller plus loin ?

Il faut assumer un parti pris abolitionniste ferme. À tous ceux qui disent que la prostitution est métier comme un autre, je leur demande pourquoi ils ne le proposent pas à leur mère, à leur femme ou à leur fille.

Êtes-vous partisan de la PMA pour les couples de femmes ?

Oui. Il s’agit d’une capacité biologique que n’ont pas les hommes. C’est encore une fois la libre disposition de ses aptitudes qui ne nuit ni aux principes ni aux personnes.

Faut-il comprendre que vous considérez que le désir d’enfants est un droit ?

Non. Tous les désirs ne sont pas des droits. C’est aussi pour cela que je suis contre la GPA.

Jean-Luc MELENCHON

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Impérialisme humanitaire. Droits de l’homme, droit d’ingérence, droit du plus fort ?
Jean BRICMONT
Jean Bricmont est professeur de physique théorique à l’Université de Louvain (Belgique). Il a notamment publié « Impostures intellectuelles », avec Alan Sokal, (Odile Jacob, 1997 / LGF, 1999) et « A l’ombre des Lumières », avec Régis Debray, (Odile Jacob, 2003). Présentation de l’ouvrage Une des caractéristiques du discours politique, de la droite à la gauche, est qu’il est aujourd’hui entièrement dominé par ce qu’on pourrait appeler l’impératif d’ingérence. Nous sommes constamment (…)
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Caitlin Johnstone

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