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Terrorisme et Société Civile contre Cuba 3/4

Compte-rendu des conférences données par Agee lors des Ateliers pour la Paix organisés par le Mouvement de la Paix cubain à la Havane, Mai 2003

TROISIEME PARTIE

Cuba a ses propres lois qui punissent les actions qui portent atteinte à sa souveraineté ou son intégrité territorial ainsi que toute action qui soutienne les objectifs de la loi Helms-Burton de 1996, c’est-à -dire la collecte d’informations pour soutenir l’embargo ou subvertir le gouvernement, ou la diffusion d’informations du gouvernement des Etats-Unis pour saper le gouvernement de Cuba.

Les nouveaux programmes destinés à la société civile ont démarré avec un énorme succès en Pologne. Dans les années 80, le NED et la CIA, en coordination avec le Vatican, ont soutenu le syndicat Solidarnosc lorsqu’il fut interdit pendant la loi martiale promulguée en 1981. Le programme fut convenu entre Reagan et le Pape Jean-Paul II lors de la visite de Reagan au Vatican en Juin 1982. Ils ont fourni des renseignements, de l’argent, des télécopieurs, des ordinateurs, des imprimantes et des photocopieurs, des magnétophones, des téléviseurs, des magnétoscopes, des fournitures et des équipements de tous types et même des émetteurs radio et télé. Le syndicat se transforma en parti politique et, en 1989, avec les encouragements du dirigeant soviétique Mikael Gorbatchev, Solidarnosc prit le contrôle du gouvernement. Des années plus tard, au mois de Mai 2001, le Sénateur Jesse Helms présenta un projet de loi, Cuba Solidarity Act, qui prévoyait 100 millions de dollars pour reproduire à Cuba, déclara-t-il, le même scénario qu’en Pologne voir http://viktor.dedaj.perso.neuf.fr/html/npa_csa2001.html.

De tels efforts pour développer une société civile d’opposition à Cuba avaient déjà été entamés en 1985 avec l’argent versé par le NED à la CANF. Ces efforts ont été sensiblement renforcés en 1992 avec l’adoption de la loi Cuban Democracy Act, plus connue sous le nom de loi Torricelli, qui visait le soutien par des ONG états-uniennes aux organisations ou individus favorables à "un changement démocratique pacifique à Cuba". Un plus grand pas fut franchi par l’adoption en 1996 de la loi Cuban Liberty and Solidarity Act, plus connue sous le nom de la loi Helms-Burton [voir http://viktor.dedaj.perso.neuf.fr/html/helms_burton_texte_fr.html]. Une des conséquences de ces lois fut que le NED, l’AID et la CIA, cette dernière n’étant pas officiellement mentionnée mais est évidemment impliquée, ont intensifié leur coopération en direction de la société civile cubaine.

On pourrait se demander pourquoi le recours à la CIA est nécessaire pour ces actions. Il y a plusieurs raisons à cela. Une des raisons initiales est que la CIA a une longue expérience et une quantité énorme d’agents et de contacts dans la société civile à travers le monde. En se joignant à la CIA, le NED et l’AID prenaient un train en marche, un train composé de toute une série d’opérations en cours dont ils pouvaient prendre en charge le financement tout en laissant la direction secrète sur le terrain aux officiers de la CIA. De plus, quelqu’un devait contrôler et rendre compte de l’efficacité des destinataires de l’aide sur le terrain. Le NED n’avait pas de personnel sur place pour mener ce genre de suivi, pas plus que les autres fondations dans des conditions normales de fonctionnement. Et puisque l’argent du NED était ostensiblement d’origine privée, seule la CIA avec son personnel et sa technique pouvait effectuer un contrôle discret sans compromettre les bénéficiaires de la société civile, surtout s’ils étaient en opposition avec leur gouvernement. Et enfin, la CIA avait elle-même de grosses quantités d’argent qu’elle pouvait discrètement faire passer en cas de besoin. A Cuba, la participation d’officiers de la CIA sous couvert de la Section des Intérêts US était particulièrement utile, puisque l’aide du NED et de l’AID allait vers des ONG états-uniennes qui devaient trouver des moyens discrets, si possible, pour faire parvenir l’équipement et l’argent à l’intérieur de Cuba. C’était un travail tout à fait dans les cordes de la
CIA.

L’information sur la quantité d’argent que ces agences ont dépensé à Cuba est parcellaire. Rien n’a été rendu publique sur les dépenses de la CIA, mais ce qu’on peut trouver sur les deux autres agences est intéressant. Le site Internet de l’AID mentionne 12 millions de dollars dépensés pour ses programmes Cubains entre 1996 et 2001 (soit une moyenne de 2 millions de dollars par an), mais pour 2002 le budget grimpe à 5 millions de dollars plus une rallonge de 3 millions pour atteindre 8 millions de dollars. Leur budget pour Cuba pour 2003 est de 6 millions de dollars, soit une multiplication par trois depuis que la junte de Bush a pris le pouvoir. Ce qui ne constitue pas une surprise si on compte le nombre de Cubains de Miami que Bush a nommé à des postes élevés au sein de son administration. voir -en partie-http://viktor.dedaj.perso.neuf.fr/html/garde_noire_bush.html

Cet argent, selon AID, fut dépensé "pour promouvoir une transition pacifique vers la démocratie à Cuba." De 1996 à 2001 ils ont dépensé les 12 millions de dollars avec 22 ONG, apparemment toutes basées au Etats-Unis, dont la plupart à Miami. Mais en 2002 le nombre d’ONG de façade avait rétréci à 12 : The University of Miami, Center for a Free Cuba, Pan-American Development Foundation, Florida International University, Freedom House, Grupo de Apoyo a la Disidencia, Cuba On-Line, CubaNet, National Policy Association, Accion Democratica Cubana, et Carta de Cuba. De plus, l’Institut Républicain International, du Parti Républicain, a reçu de l’argent de l’AID pour un groupe affilié, le Directorio Revolucionario Democrático Cubano, basé aussi à Miami.

Ces ONG ont un double rôle, un en direction de leurs contre-parties cubaines à Cuba et un en direction du reste du monde, principalement à travers des sites Web. D’un coté ils font parvenir de l’argent et de l’équipement à Cuba, et de l’autre ils diffusent à travers le monde les activités et le travail de ces groupes à Cuba. Par exemple, Cubanet, à Miami, publie les écrits des "journalistes indépendants" de l’Association de Presse Indépendante de Cuba basée à La Havane et verse de l’argent aux auteurs.

Il est intéressant de noter que l’AID affirme sur son site Internet que "ses bénéficiaires ne sont pas autorisés à utiliser les fonds ou donner de l’argent à toute personne ou organisation à Cuba." Une telle affirmation est difficile à croire, mais si elle est vraie, tout cet argent ne servirait qu’à soutenir l’infrastructure des ONG basées aux Etats-Unis, une sorte d’industrie subventionnée de l’anti-castrisme, sauf pour tout ce qui peut être acheminé à Cuba en tant que tel : ordinateurs, télécopieurs, photocopieurs, téléphones portables, radios, téléviseurs et magnétoscopes, livres, magazines, etc.

Sur son site Web, AID énumère 7 objectifs : solidarité avec les militants des droits de l’homme, distribution des écrits des journalistes indépendants, développement des ONG indépendantes, promotion du droit des travailleurs, communication avec le peuple cubain, préparation d’une future assistance à un gouvernement de transition, et évaluation du programme. Tous ceux qui veulent découvrir quelles sont les ONG qui bénéficient de la majeure partie de tous ces millions de dollars peuvent se connecter à 
l’adresse suivante : http://www.usaid.gov/regions/lac/cu/upd-cub.html

AID affirme que les bénéficiaires de son argent ne peuvent dépenser cet argent pour des Cubains à Cuba, on se demande alors d’où proviennent les 100.000 dollars en espèces que les enquêteurs ont découvert chez les 75 dissidents, pour la plupart sans emploi. Un indice peut se cacher dans une déclaration de l’AID qui dit ceci : "la politique des Etats-Unis encourage les ONG états-uniennes et individus à mener des activités humanitaires et d’information et à construire une société civile à Cuba avec des fonds privés." Est-ce que ces "fonds privés" ne proviendraient-ils pas du National Endowment for Democracy ?

Rappelez-vous que le NED est censé être une Fondation "privée", une ONG. Elle n’est soumise à aucune restriction sur ses dépenses à l’étranger, mais le hasard fait que le NED finance en partie les mêmes ONG que l’AID. Soyez assurés qu’il ne s’agit pas là d’une concurrence ou d’une manque de coordination de la part de Washington. La raison est probablement que le NED peut financer des salaires et autres dépenses personnelles à ceux qui sont sur place à Cuba. Il existe à Cuba, au bout de la chaîne de commandement et d’argent, tout une nuée de groupes et d’individus qui répondent aux objectifs des ONG états-uniennes. On en compte près de 100 et ils ont des noms tels que Bibliothécaires Indépendants de Cuba, Société de Journalistes Marquez Sterling, Association de Presse Indépendante de Cuba, Assemblée pour la Promotion de la Société Civile, et le Parti des Droits de l’Homme de Cuba.

Chaque Cubain de ces organisations a une tache bien définie dans le cadre du programme de l’AID, du NED et de la CIA. Ces taches sont probablement définis dans des documents annexes classifiées en marge des documents officiels. Chaque Cubain sera qualifié de militant des droits de l’homme, de journaliste indépendant ou de bibliothécaire indépendant etc. Après tout, l’argent ne va pas dans la poche de fantômes, même au niveau le plus bas de l’échelle. Pas plus que les ONG n’ont le droit de donner de l’argent selon leur bon vouloir à n’importe quel mécontent qui croiserait leur chemin. Les bénéficiaires finaux sont identifiés comme tels et par écrit, tout comme le sont les Fondations et les ONG participantes à l’opération.

Le site Internet du NED, comme par hasard, n’est pas à jour. Il n’indique que le programme Cubain de 2001. Mais il est instructif. Ses fonds pour les activités cubaines de 2001 se montent à 765.000 dollars, si on les croit sur parole. L’argent versé à 8 ONG en 2001 était en moyenne de 52.000 dollars, tandis qu’une 9eme ONG, la International Republican Institute (IRI) du Parti Républicain a reçu 350.000 dollars pour le Directorio Revolucionario Democratico Cubano, basé à Miami comme je l’ai déjà dit, dans le but de "renforcer la société civile et les droits de l’homme" à Cuba. En contraste, cette ONG a reçu 2.174.462 dollars en 2003 de la part de l’AID via la même IRI. Pourquoi le NED accorderait-il des sommes modestes tandis que l’AID accorderait des sommes énormes, les deux via la meme IRI ? La réponse - à part le pourcentage prélevé au passage pas l’IRI - est probablement que l’argent du NED est destiné aux poches de Cubains à Cuba et que celui de l’AID aux ONG états-uniennes.)

Source : CUBA SOLIDARITY PROJECT
http://viktor.dedaj.perso.neuf.fr/

"Lorsque les Etats-Unis sont venus chercher Cuba, nous n’avons rien dit, nous n’étions pas Cubains."

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