Mais le spectacle continue. Les gesticulations sont maintenues et les menaces, remisées, sont rappelées, histoire de ne pas reconnaître ouvertement les mensonges éhontés qui ont été déversés durant des jours. Se prépare donc le passage à une autre étape, celle où il faut grappiller le maximum de terrain, en négociant avec les Russes et les Chinois la redistribution des cartes et garantir une place aux intérêts économiques occidentaux.
Les coûts seront certainement moindres que ceux qu’aurait occasionnés une conflagration à l’issue incertaine.
Et puis, cela donne le temps de réfléchir.
Alors le ministre français de la défense peut justifier la reculade autrement que par la décision des États-Unis de se départir de leur projet. Il fait s’approprier à son pays la démarche.
Mieux, il le met en avant, jugeons-en par : « S’il n’y avait pas eu une pression de la France et des États-Unis pour enrayer la prolifération et s’opposer à la mise en œuvre d’armes de destruction massive, il n’y aurait pas eu cette réaction là ».
Ainsi, le monsieur veut faire croire que François Hollande, son président, était dans le secret des dieux et qu’il savait ce dénouement, c’est-à-dire obtenir la neutralisation des armes chimiques de l’armée syrienne, comme objectif caché de la mise en scène guerrière.
À ce titre, à l’en croire, tout le cinéma sur les « frappes ciblées », sur la « punition » et tutti quanti, était une stratégie qui devait pousser les Russes à agir et à obliger le gouvernement syrien à se départir de son arsenal chimique. Triste attitude quand on sait la rapacité qui préside réellement et qui mène vraiment le jeu.
Laissons le journal le Figaro lui répondre : « le président français a été contraint, depuis le début de la crise syrienne, de s’adapter au jeu des autres nations » ou encore « François Hollande a été pris à contre-pied dans le dossier syrien ».
Qu’à cela ne tienne, la menace de guerre s’éloigne ou est reportée à plus tard. En attendant, ce sont ces tractations de coulisses qui vont déterminer le sort de la région et de la Syrie en particulier. Au siège des Nations-Unies se produiront les effets de scènes pendant que se concluront ailleurs, les accords concrets, ceux qui portent le véritable enjeu de l’affaire syrienne.
En marge, tout en bas des articles se trouve coincée cette « opposition » qui se voyait caracoler sur les tapis de cadavres étalés par les bombardiers et les Tomahawk étatsuniens. Elle se voyait portée au pouvoir à Damas à l’instar des « révolutionnaires » libyens installés à Tripoli par l’OTAN. Mais cette fois-ci, comparaison n’a pas été raison, les fictions politiques et militaires n’ont pas eu le bonheur escompté, même pas l’attention habituelle des médias, qui ont dû comprendre vers où braquer leurs projecteurs, vers les vrais acteurs et à qui consacrer leurs Unes.
Ahmed Halfaoui