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Le pessimisme est une maladie sénile tandis que l’optimisme, une maladie infantile

Où va l’économie chinoise ?

Des lecteurs malicieux nous font remarquer que nous publions souvent des articles écrits par des Etats-Uniens, mais rarement des articles écrits par des Chinois. En voici un qui nous arrive sans avoir à le traduire.
L’auteur, Yi Da, est un spécialiste en relations internationales basé à Beijing.
Il répond aux Occidentaux qui ne cessent de nous annoncer la fin de la croissance chinoise.
LGS

Trois points pour décoder les « Deux sessions »

Où va l’économie chinoise ? La question est remise sous les feux de la rampe avec la tenue concomitante en Chine des sessions plénières de l’Assemblée populaire nationale (APN) et du Comité national de la Conférence consultative politique du peuple chinois (CCPPC), connues sous le nom des « Deux sessions ». Rendez-vous politique le plus important de l’année, elles offrent l’un des points de repère les plus décisifs pour comprendre les dynamiques profondes qui sont à l’œuvre dans le pays.

Encore faut-il qu’on comprenne le parler qui s’y pratique et qui peut paraître obscur à première vue. Que signifie une croissance d’environ 5% ? Qu’est-ce qu’on entend par les « forces productives de nouvelle qualité » ? Quel est le « nouveau trio » qui fait florès dans les médias ? Il n’est pas sans intérêt de répondre à ces questions pour décrypter la situation réelle de l’économie chinoise, surtout au moment où elle fait l’objet de toute sorte de spéculations allant du « plafond de verre » qu’elle aurait atteint jusqu’à la « fin du miracle économique chinois ».

Environ 5% : un objectif de croissance ambitieux

Comme de coutume, après avoir affirmé, dans le rapport d’activité du gouvernement soumis à l’examen le 5 mars, que l’économie chinoise avait progressé de 5,2% en 2023, le Premier ministre chinois Li Qiang a annoncé viser cette année une croissance d’environ 5%. Objectif jugé ambitieux par de nombreux économistes, surtout si l’on considère « la complexité et les incertitudes croissantes de l’environnement externe ». Objectif qui pourrait aussi faire des sceptiques, si l’on en croit la lenteur de la reprise post-covid, le risque d’une « spirale déflationniste » ou la baisse de la confiance que ces derniers n’hésiteraient pas à évoquer.

Tout prouve le contraire. Il est à constater qu’aujourd’hui en Chine, une croissance de 5,2% est capable de créer une richesse de plus de 6 000 milliards de yuans RMB, alors qu’il y a 10 ans, il aurait fallu une croissance de plus de 10% pour y parvenir. Un progrès qui ne s’invente pas.

Sur la déflation qui « plombe la croissance chinoise », elle a été démentie par le Groupe ING qui conclut dans un rapport que le débat sur ce sujet a été exagéré, de même que par le premier vice-président du FMI qui ne s’attend pas à « une tendance déflationniste globale en Chine ».

Quant au potentiel de l’économie chinoise à moyen et long terme qui semble préoccuper plus les entreprises étrangères que la croissance à court terme, la confiance est toujours là. Une enquête de la Chambre de commerce américaine en Chine montre que la moitié des entreprises sondées maintiendront leur niveau d’investissement en Chine en 2024, et que près de 40% d’entre elles prévoient d’accroître leur engagement.

« Forces productives de nouvelle qualité » : nouveau mot d’ordre

On ne parviendra pas à comprendre ce concept stratégique, qui occupera une place importante dans l’élaboration des politiques chinoises à l’avenir, sans le contextualiser. En effet, selon le président Xi Jinping, le développement de ces forces productives dans lesquelles « l’innovation jouera un rôle de premier plan » constitue « une exigence intrinsèque au développement de qualité ». En d’autres termes, c’est une exigence commandée par les défis économiques que la Chine a à relever, aussi bien du côté de l’offre que de la demande, sur le plan national qu’international, des défis incarnés par ce qu’on appelle le « dilemme de sandwich » des économies à revenu intermédiaire.

Rien n’est jamais écrit. Si les « forces productives de nouvelle qualité » réussissent à stimuler la productivité totale des facteurs en augmentant la valeur ajoutée du capital et du travail, la Chine sera en mesure de résoudre par le haut des équations difficiles sur la démographie, les risques liés à l’immobilier et à la dette locale, ou les défis posés par les restrictions occidentales en matière de commerce, d’investissement et de technologie.

Il est à préciser toutefois qu’il ne s’agit pas de reconstruire un navire flambant neuf en mettant à la casse celui d’origine. Au contraire, cela suggère davantage d’investissement et de soutien à la modernisation des anciennes industries en même temps qu’à la construction d’industries nouvelles, d’où le sens de la stratégie « IA + ». S’y ajoutent entre autres la fabrication de pointe, le numérique, l’aviation commerciale, la biotechnologie, les sciences de la vie, l’informatique quantique...autant de secteurs du futur qui seront particulièrement ouverts aux investissements étrangers. Et il est dans la nature des choses que des efforts supplémentaires seront faits par le gouvernement chinois pour continuer d’améliorer le climat d’affaires et mieux protéger les droits de propriété intellectuelle.

« Développement de qualité » : faire le bonheur du peuple

Le rapport d’activité du gouvernement a été clair sur la finalité du « développement de qualité » : faire le bonheur du peuple, qui est le « premier critère pour évaluer le bilan du gouvernement ». Cela s’est traduit lors des « Deux sessions » par de nouvelles mesures profitant à la fois aux consommateurs et aux entreprises, une façon d’assurer la bonne santé de l’économie et les fondamentaux de l’emploi.

Lors de la conférence conjointe de ministres consacrée à l’économie, première du genre, des explications détaillées ont été données sur l’« Année de la consommation », la campagne « Consommer sans souci » ou bien le programme visant à encourager les ménages à moderniser leurs voitures, appareils électroniques et électroménagers, un peu à l’instar de « la prime à la casse » dans des pays occidentaux pour la conversion des voitures polluantes. Des mesures d’appui aux entreprises privées ont également été dévoilées pour les aider à sortir des séquelles de la crise sanitaire et à s’adapter aux besoins futurs de la concurrence.

Le « développement de qualité » de la Chine ne profite pas qu’à elle seule. Le « nouveau trio », référence aux secteurs des voitures électriques, des batteries et des panneaux solaires, dont les exportations ont progressé de 30 % en un an, illustre bien la détermination de la Chine à se tourner vers une économie éco-responsable. La puissance installée de production d’énergies de source renouvelable a d’ailleurs pour la première fois dépassé celle des centrales thermiques, et représente plus de la moitié des capacités renouvelables installées dans le monde sur l’année 2023. Un fait à ne pas négliger.

Le pessimisme est une maladie sénile tandis que l’optimisme, une maladie infantile. Ce que la Chine fait est ni plus ni moins d’affronter la tête haute les défis actuels, contrepartie douloureuse mais nécessaire à court terme pour le gain d’une économie plus sûre et plus autonome à long terme. Elle ne perdra jamais la confiance, car la victoire aime les cœurs ardents.

YI DA

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Journaliste, écrivain, professeur d’université, médecin, essayiste, économiste, énarque, chercheur en philosophie, membre du CNRS, ancien ambassadeur, collaborateur de l’ONU, ex-responsable du département international de la CGT, ancien référent littéraire d’ATTAC, directeur adjoint d’un Institut de recherche sur le développement mondial, attaché à un ministère des Affaires étrangères, animateur d’une émission de radio, animateur d’une chaîne de télévision, ils sont dix-sept intellectuels, (…)
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