Depuis le 11 septembre 2001 et jusqu’à l’élection de Barack Obama, les États-Unis ont été la nation la plus haïe au monde. Pourtant, la planète entière a été atterrée devant une catastrophe humaine d’une telle ampleur. Avec la diffusion en boucle des images de l’attaque du World Trade Center, le peuple américain s’était gagné la sympathie de tous. Mais l’administration de Georges W. Bush n’a pas su en profiter pour instaurer des liens plus sains avec les autres pays. Au contraire, elle n’a cessé de s’isoler en créant un climat de peur chez les Américains et les Américaines et en déclarant une guerre au terrorisme, au nom de laquelle elle allait intervenir militairement en Irak et en Afghanistan. Pour ce faire, les États-Unis se sont basés sur la stratégie du 1 %, conçue par Dick Cheney, selon laquelle s’il existe seulement 1 % de possibilité qu’une quelconque menace pèse sur la sécurité de la nation, cette possibilité doit être considérée comme une certitude .
La peur est une arme puissante et permet nombre de débordements : le Patriot Act, les arrestations et les détentions arbitraires, Guántanamo, les vols secrets de la CIA (dans lesquels 14 pays européens ont été impliqués), le cas de Lynne Stewart (avocate accusée de soutien au terrorisme pour avoir défendu le Sheik Omar Abdel Rahman), les atteintes aux libertés civiles, en sont des exemples parmi d’autres. Avec la fin de l’ère Bush, la planète entière a poussé un soupir de soulagement. L’arrivée d’Obama au pouvoir a suscité un engouement sans mesure. Non seulement Obama est noir, et son élection prouve, qu’au fond, les Américains sont bons et justes, mais en plus il est jeune, beau et charismatique. Il est le symbole d’une nouvelle Amérique dans laquelle les noirs sont enfin reconnus comme des citoyens à part entière. Cette élection, acclamée à l’échelle planétaire pour des motifs relevant davantage des émotions que de la raison, a transformé du jour au lendemain l’image des États-Unis. La nation guerrière devenait un exemple de démocratie. Barack Obama est né d’un père musulman, ses origines multiethniques et son parcours n’ont rien de commun avec ceux de ses prédécesseurs. Son élection atteste donc de la bonne volonté et de la remarquable capacité d’adaptation états-uniennes.
Je me suis demandée, et je suis certaine que je ne suis pas la seule, comment Obama allait survivre à cette élection. Au sens propre et au sens figuré. J’ai même craint qu’il soit assassiné par l’Amérique réactionnaire. Je me suis dit qu’avec les attentes qu’on avait de lui, il allait forcément décevoir. Mais tel n’est pas le cas, du moins à ce jour. Un homme politique ne se fait pas seul, il est la création de volontés conjointes de différents intérêts, souvent purement mercantiles. Barack Obama ne fait pas exception à la règle. Il a été porté au pouvoir par le monde de la politique, des affaires et le complexe militaro-industriel. Obama n’a pas les mains libres. Même si l’homme est sympathique, il n’en est pas moins la marionnette des différents intérêts que je viens de mentionner. Son credo contre la prolifération nucléaire lui a été dicté dans le but de rehausser l’image ternie des États-Unis en affichant une volonté pacifiste jamais vue chez les dirigeants américains. L’Amérique de Bush a tué sans compter, celle d’Obama guérira les plaies en promettant paix et coopération. L’hégémonie américaine subsiste, car ce sont les États-Unis qui, une fois de plus, mènent la danse. Et ce, même si Nicolas Sarkozy s’agite désespérément sur la scène internationale.
Le pseudo pacifisme d’Obama est bien illusoire, mais nombreux sont ceux qui tombent dans le panneau. Proposer un désarmement nucléaire qui n’aura pas lieu du vivant du président américain, comme il est le premier à le dire, est une façon astucieuse pour les États-Unis de conserver leur rôle de « gardien » du monde et de rester chef des opérations militaires à l’échelle de la planète. Au lieu de frapper l’ennemi, ils l’acculeront. Comme nous le savons tous, aujourd’hui, l’ennemi, c’est l’Iran. Les pays occidentaux, États-Unis en tête, refusent l’arme nucléaire à l’Iran, mais se contentent de vagues promesses à très long terme en ce qui concerne l’élimination de leurs propres armes nucléaires. Obama a beau affirmer que son but ultime est un monde dénucléarisé, il ne propose pas que son pays donne l’exemple en se débarrassant de son arsenal nucléaire. Il concède à l’Iran le droit au nucléaire civil tout en déclarant haut et fort que l’Iran constitue une menace en raison de son programme nucléaire. De toute évidence, les voies de la diplomatie sont insondables…
La réaction de Téhéran était prévisible et ne s’est pas fait attendre « La répétition de ces accusations semble contredire le slogan de changement », a déclaré à juste titre Hassan Qashqavi, porte-parole du ministère des Affaires étrangères iranien. En fait, rien n’a changé, les États-Unis et l’Europe veulent continuer à dominer la planète et l’Iran demeure le bouc émissaire. En prétendant oeuvrer pour la conciliation, Obama et ses supporters européens ne font que poursuivre le même objectif : démoniser et acculer l’Iran. Si ce dernier refuse la main tendue, il prouvera, une fois de plus, qu’il est le méchant, autorisant ainsi les États-Unis à l’attaquer pour le bien et la sécurité de tous. Pendant ce temps, Israël pourra menacer quotidiennement l’Iran avec ses armes nucléaires… Par contre, Téhéran n’est pas autorisée à se défendre et à éventuellement recourir à la force. Probablement que les voies insondables de la diplomatie font la différence entre les « méchants » et les « gentils », sans espoir de rédemption pour l’Iran, condamné à brûler en enfer, quoi qu’il fasse.
Non, je ne crois pas au pseudo pacifisme des États-Unis et Obama n’est pas parvenu à me convaincre de ses bonnes intentions. Il ne peut y avoir de paix tant qu’il existera un déséquilibre de cette taille entre les pays. La paix ne sera possible qu’au prix de l’équilibre de la force nucléaire. L’arme nucléaire pour tous ou pour personne.
Claude Jacqueline Herdhuin
Scénariste, assistante-réalisatrice, auteure