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Conseils pour lutter démocratiquement (« à la française ») contre le terrorisme en Chine

Lettre ouverte à Xi Jinping, président de la République populaire de Chine

Monsieur le président
Par cette lettre ouverte, je veux contribuer aux efforts de votre pays contre les « trois fléaux » (fondamentalisme, terrorisme, séparatisme).

Je vous écris (comme Villepin) depuis un vieux pays, la France, un vieux continent, l’Europe, qui a connu les guerres, l’occupation, la barbarie. Un pays qui n’a cessé de se tenir debout face à l’Histoire et devant les hommes. Fidèle à ses valeurs, il veut agir résolument avec tous les membres de la communauté internationale. Il croit en notre capacité à construire ensemble un monde meilleur.

Je crois que vous parlez, chez vous, de « travailler main dans la main avec les autres pays pour construire une communauté de destin pour l’humanité ».

Or, j’apprends par la presse atlantiste que votre combat au Xinjiang est à ce point du bricolage que vos adversaires, pour le discréditer, doivent l’augmenter d’imaginaires mesures extrêmes qui se révèleraient aussi scandaleuses qu’inefficaces si vous les appliquiez. Voici donc quelques mesures qui ne vous mettront pas la « communauté internationale » à dos, puisque la France en use (et nous sommes « la Patrie des droits de l’homme »).

Comment la France lutte-t-elle contre les « trois fléaux » ?

1- Mesures exceptionnelles prises au non de la lutte contre le terrorisme et le fondamentalisme.
Elles s’appliquent sur tout ou partie du territoire en cas de péril imminent résultant d’atteintes graves à l’ordre public. C’est-à-dire, tout le temps.

Les autorités peuvent interdire la circulation des personnes ou des véhicules dans les lieux précis et à des heures fixées par arrêté, « dans le but de prévenir des troubles à la sécurité et à l’ordre publics ». Elles peuvent instituer « des zones de protection ou de sécurité où le séjour des personnes est réglementé », interdire de séjour « toute personne à l’égard de laquelle il existe des raisons sérieuses de penser que son comportement constitue une menace pour la sécurité et l’ordre publics ».

Les autorités peuvent dissoudre les associations « qui participent à la commission d’actes portant une atteinte grave à l’ordre public ». Elles peuvent assigner à résidence toute personne dont « le comportement constitue une menace pour la sécurité et l’ordre publics », prescrire la remise des pièces d’identité et l’obligation de se présenter périodiquement aux forces de l’ordre. La durée maximale de l’assignation à résidence est de douze mois. Au-delà, une prolongation est possible sous certaines réserves.

Les autorités peuvent « ordonner la fermeture provisoire des salles de spectacle, débits de boissons et lieux de réunion » et interdire « les réunions de nature à provoquer ou à entretenir le désordre, c’est-à-dire en particulier les manifestations. Elles peuvent ordonner des perquisitions à domicile entre 21 heures et 6 heures au cours desquelles les données numériques contenues dans les ordinateurs peuvent être saisies soit par leur copie, soit par la saisie de leur support lorsque la copie ne peut être réalisée.

Les autorités peuvent prendre toute mesure pour assurer le blocage des sites internet « provoquant à la commission d’actes de terrorisme ou en faisant l’apologie ». Elles peuvent prononcer des couvre-feux, délimiter des zones de protection et de sécurité dans des agglomérations, voire la totalité d’une région.

Ces mesures ont permis de procéder à des milliers de perquisitions, des milliers de contrôles d’identité et de fouilles, des centaines d’assignations à résidence et d’ouvertures de procédures judiciaires.

Une trentaine de mosquées ont été fermées en 18 mois pour tenues de prêches ambigus sur le djihad armé.

Un système de vidéosurveillance est installé pour « mieux contrôler l’utilisation des lieux mis à la disposition des fidèles et prévenir ainsi la constitution de groupes incontrôlés, susceptibles de diffuser des messages radicaux ». Une « équipe de vigilance » d’une douzaine de personnes est instituée pour alerter sur les « comportements et les expressions contraires aux lois dans ou aux abords du lieu du culte ».

La Justice estime que toutes ces dispositions ne portent pas d’atteinte grave et manifestement illégale à une liberté fondamentale.

Restons sourds, comme les autorités françaises, aux communiqués d’Amnesty International qui demande la levée de ces mesures exceptionnelles en prétendant « que des pouvoirs exécutifs étendus, assortis de très peu de contrôles sur leur application, ont causé toute une série de violations des droits humains ». Laissons cette ONG estimer que « Des mesures d’urgence brutales, notamment des perquisitions de nuit et des arrêtés d’assignation à résidence, bafouent les droits de centaines d’hommes, de femmes et d’enfants, qui en ressortent traumatisés et stigmatisés », qu’il y a « très peu de résultats concrets » dus à ces mesures exceptionnelles, et que plusieurs centaines « ont donné lieu à des enquêtes supplémentaires pour des infractions pénales non liées au terrorisme ».

Monsieur le Président Xi Jinping,
Je dois ajouter que la règle française (non écrite, car contraire à la loi, mais implacable) est de « liquider » (assassiner) les terroristes lors des affrontements avec les forces de l’ordre ou lors de tentatives d’arrestations marquées par une résistance. De plus, l’ex-président de la République, François Hollande, ne s’est pas caché d’avoir ordonné des « neutralisations » de djihadistes français en Syrie par nos forces spéciales, soit par assassinats, soit par frappes aériennes ciblées dont on serait étonné qu’elles n’aient pas faits de victimes collatérales. Bien entendu, tout citoyen français qui rentre en France après avoir combattu avec Daesh est emprisonné.

Toutes ces dispositions vont avec l’Etat d’urgence en France, pays menacé par le terrorisme et le fondamentalisme, c’est-à-dire par deux des trois fléaux que vous combattez au Xinjiang, région chinoise qui se heurte, en plus, au séparatisme.

2- Mesures exceptionnelles prises en France au nom de la lutte contre le séparatisme.
La France a eu à agir naguère contre des velléités de séparatisme. Laissons de côté les Kanaks indépendantistes de Nouvelle-Calédonie que nous avons abattus en 1988 dans la grotte d’Ouvéa à 17 000 km de Paris et prenons pour exemple le cas plus proche et plus récent du Pays basque.

De part et d’autres des Pyrénées, chaîne de montagne qui sépare la France de l’Espagne, vivent 3 millions de Basques, dont 270 000 sur le territoire français, dans le sud du département des Pyrénées-Atlantiques. Monsieur le président, pensez au Turkestan et vous allez bien comprendre.

Les Basques (groupe ethnique isolé et unique) sont marqués par des caractéristiques anthropologiques et biologiques. Si, comme partout en France, la langue officielle du Pays basque français est le français, les Basques parlent entre eux une langue spécifique, dont la filiation est inconnue. Attachés à leurs coutumes, traditions, folklore, au style de leur habitat, ils sont largement sensibles aux revendications d’indépendance et d’unification en un seul pays.

Jusqu’à un passé récent, leur combat a pris la forme de la violence armée, ce qui a servi de prétexte aux gouvernements français et espagnol pour créer une organisation clandestine, le Groupe Armée de Libération (GAL) qui disposait de fonds secrets, était composé de membres des services spéciaux espagnols, de policiers et de militaires, parfois renforcés par des criminels de droit commun.

Dans les années 80, le GAL a commis une quarantaine d’attentats, dont plusieurs dizaines d’assassinats de militants basques, essentiellement sur le territoire français.

Bref, et pour conclure, chacun convient en Europe qu’aucun pays au monde ne peut tolérer qu’une de ses régions lui soit arrachée par la violence au nom d’un nationalisme exclusif ou d’une religion, ou des deux à la fois. Et nul ne s’étonne si les mesures prises pour défendre une partie de son territoire sont, dans chaque pays, à la mesure de l’enjeu et de la violence à affronter.

Autrement dit, ces mesures vont rarement avec les élargissements de certaines libertés fondamentales et notamment celles d’aller et venir librement, sans surveillance, sans risques pour l’intégrité physique des séparatistes, sans contrôles tatillons de la population dans laquelle ils se fondent.

Bien entendu, monsieur le président, je vous informe ici des méthodes de combats adoptées en France contre les « trois fléaux » pour que vous sachiez qu’on vous accuse à tort de faire ce que nous avons fait et pour vous encourager à poursuivre plutôt dans la voie que vous avez choisie et qui est celle d’améliorer encore l’éducation et les conditions de vie au Xinjiang, de faire progresser cette région dans le respect des particularités des nombreuses ethnies qui la peuplent et donc dans la préservation de leurs coutumes et de leur langue. Et sans faiblesse face aux éléments fanatisés et aux prosélytes fous d’Allah.

Dans cette attente, je vous prie de croire à toute ma considération démocratique, républicaine et laïque.

VIVAS Maxime

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